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Full text of "livre de Jean Bultot"

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Jean Bultot 



Mozsnake 


Beschrijving: 

26 ans de conneries, mensonges et diffamation...ga suffit!! 


http://mozsnake.skyrock.eom/4.html 

Le livre que personne n'a ose publier... 


PROLOGUE 


GROS OISEAU DE MALHEUR 


15 decembre 1990, 


L'avion Cl30 HERCULES de la Force aerienne beige prend son envoi. Curieusement loin de 
sa base, il transporte une bien etrange cargaison! L'aeroport militaire de WATERKLOOF en 
Afrique du Sud s'efface rapidement et sa piste ne devient plus qu’une toute petite ligne vue du 
ciel. 

Dans le ventre du gros transporteur... il n’y a qu’une... cage a singe soigneusement 
cadenassee... et dans cette cage a singe,...il y a MOI!!! 

Trois gendarmes de l’escadron special d’intervention epient mes moindres mouvements. Un 
medecin dort beatement sur une couchette suspendue par des sangles. Le bruit est 
assourdissant dans cette carlingue et je me souviens... 










AOUT 1976 


Universite Libre de Bruxelles, bastion de la libre pensee. L'auditoire 1301 de la faculte de 
droit tremble de la fievre des etudiants en criminologie et de leurs proches. ARLETTE, Here 
de son gros ventre, parle avec mes parents assis au fond de la salle. Je suis nerveux et 
incapable de prendre part a la conversation. Le brouhaha s'estompe avec l’arrivee du jury, les 
coeurs se serrent, les tripes se nouent. Le President, apres un tres bref discours sur les resultats 
de l’annee, proclame enfin le premier resultat: « Deuxieme licence en sciences de 
criminologies. A reussi avec grande distinction et est done promu criminologue: JEAN 
BULTOT!! » Mes jambes se derobent, ARLETTE m’embrasse furtivement, mes parents 
pleurent gauchement, paralyse par l’emotion, sous les applaudissements, mon corps s'avance 
jusqu'a l’estrade ou chaque professeur me serre la main. Je balbutie des « Merci », « Merci 
beaucoup ». De retour a ma place, mes yeux contemplent le ventre d'ARLETTE, notre bebe 
peut deja etre here de son papa! 

Le diplome de criminologie offre peu de debouches. Peu d’appeles et... encore mo ins d’elus! 
Les possibility resident aupres de la police judiciaire ou de la direction des etablissements 
penitentiaries, or ... il n’y a que 30 directeurs de prison francophones pour tous le pays! 

Le six septembre, je suis papa d’un beau garcon que Ton a appele du nom de son arriere- 
arriere-arriere-(ouf!)grand-pere: CYRIAQUE. La famille ne s'agrandira plus. 

En attendant un concours de directeur de prison organise par l'Etat, je travaille trois mois dans 
un home ferine de la Protection de la Jeunesse comrne chef de section adjoint et ensuite trois 
autres mois comrne sous-directeur d'un home prive pour enfants caracteriels. Apres un 
different sur la facon d’eduquer les enfants, je me retrouve pendant un an dans la file des 
chomeurs au pointage. Heureusement, le concours de directeur organise par l'Etat arrive et 40 
candidats s'y presentent. II n'y a que deux laureats et je fais partie de cette petite « elite ». 

Le ler juin 1978, je me presente tout emu a la porte de la prison de Saint-Gilles a Bruxelles. 
Ma main nerveuse firappe le lourd marteau de la porte de la porte, et au surveillant qui 



m’ouvre, je prononce cette phrase pleine d’orgueil: « Bonjour, je suis le nouveau directeur! » 
Le surveillant se met au garde-a-vous et me salue! Le roi n’est pas mon cousin! Un an plus 
tard, apres le delai de stage, l'Etat me nomine definitivement a mon poste et je peux occuper 
une des habitations reservees aux directeurs. Trois directeurs dirigent la prison sous la 
houlette d’un directeur principal: Monsieur WILLE. L'habitation, construite en 1860, se revele 
etre un veritable hotel de maitre! Le jardin etend son immensite entre le premier mur 
d’enceinte, visible de la rue, et le second mur, beaucoup plus eleve, une veritable muraille! 

Une porte discrete me pennet de quitter mon domicile sans passer par la porte principale qui 
donne sur la cour de la prison. Dans cette cour, stationnent les fourgons cellulaires et les 
camions de livraison. Bref, j'ai la joie d’apprendre qu'avec mes vingt-sept ans, je suis le plus 
jeune directeur de prison de Belgique et peut-etre meme d’Europe! L'avenir, plein de belles 
promesses, m’ouvre tout grand ses bras!!! A part les vexations multiples de mon patron, une 
grosse brute, la vie se deroule sans accroc jusqu'en 1982. ARLETTE travaille comme 
infirmiere et CYRIAQUE pousse sans probleme. Notre couple, cependant, bat serieusement 
de l'aile depuis la naissance de CYRIAQUE, mais on s'accroche, malgre la pression terrible de 
mes beaux-parents LICHTERT qui souhaitent la destruction de notre union! 

Deux evenements viennent marquer ma vie en 1982: je fais le connaissance d’un veritable 
ami, PIERRE-PAUL DE RYCKE dit PEPE et je decouvre les joies du tir pratique. PEPE 
dirige un club prive, le JONATHAN, ou il organise des soirees completement folles. Mais a 
partir de cette epoque, le plus important se trame dans l'ombre: « ON » me prepare un 
costume sue mesure!Tout commence par une journee de tempete, en voici le recit... 


DIMANCHE, 27 MOVEMBRE 1983, 


Le vent mugit a n’en plus linir et la pluie martele rageusement les vitres. Quel sentiment de 
malaise peut dons atteindre cet hornme qu pesamment ecrit sa lettre anonyme? Ce temps 
d'enfer ne lui brule-t-il pas Fame quelque part? II relit calmement sa lettre de denonciation, 
rien ne doit manquer, ni les noms, ni l’appartenance politique, ni les adresses. II ferine 
l’enveloppe, met son pardessus et brave le vent d’un pas difficile. Lorsqu'il laissera tomber son 
pli, trois personnes subiront les foudres de la justice! Le vent est incroyablement fort, la radio 
avait deja annonce plusieurs morts. La lettre tombe dans la boite. L'homme a peut-etre un 
sourire derisoire, peut-etre un sourire de honte. 

Le soir de ce dimanche 27 novembre 1983, la television annonce que la tempete a cause la 
mort de 13 personnes et qu'un avion Jumbo s'est ecrase en Espagne en causant a lui tout seul 
la mort de 179 vacanciers. Le lendemain, l'automne manifeste toujours sa grogne par des 
rafales de vent rageuses. Le vieux Palais de Justice de Nivelles craque sous ses coups de 
boutoir. Monsieur WEZEL, juge destruction, entre dans son cabinet. Dans le courrier 
matinal, une lettre anonyme de denonciation. En l’ouvrant, le juge apprend que le courageux 
anonyme l’informe qu'un ancien gendarme du groupe Dyane, monsieur Claude GODIN, 
traficotait des FAL et des pistolets FN a des prix ridiculement bas. Jugez plutot: un pistolet 
GP a 5000 frs!! !Rien ne manque dans l’information, ni les adresses des cafes, avenue 
Willemans a Forest, ou se deroulaient les transactions, ni le domicile du comparse a Nimy. Un 
detail firappe le juge: les deux « denonces »etaient qualifies par l’informateur coniine 
sympathisants de l'extreme droite et GODIN etait considere comme « un ami intime de JEAN 



BULTOT .» Les informations rccucs depassent 1’arrondissement judiciaire de monsieur 
WEZEL. II est done oblige d’avertir ses collegues des autres regions et e'est ainsi que 
l'information circule et est finalcment transmise a Monsieur le Juge BELLEMANS de 
Bruxelles et a Monsieur le Juge VAN SPITAELS de Mons qui lui attribue la reference de CR 
61/83. 

« Encore! » Telle est certainement l’expression de surprise du membre du Parquet de 
Bruxelles en charge de ce nouveau dossier. Ne venait-on pas de recevoir de l’inspecteur 
FRANCIS DORAO de la police judiciaire de Liege, un long rapport date du 4 octobre 1983 
(dossier 390/86), soit quelques semaines avant cette lettre, dans lequel ce JEAN BULTOT est 
decrit sous un jour particulierement choquant et tneme odieux? Le parquet de Bruxelles n’en 
croyait pas ses yeux! « JEAN BULTOT, directeur adjoint de la prison de Saint-Gilles, est un 
habitue du bar JONATHAN, rue Wilmotte a Saint-Gilles. II est un ami du patron, PIERRE- 
PAUL DERYCKE (alias PEPE). Ce bar est un repaire fortifie de gangsters. » L'inspecteur 
DORAO explique: « Dans ce bar, les filles sont obligees de se prostituer, de la drogue circule, 
des spectacles pornos sont organises, des photos scabreuses sont prises a des fins de chantage. 
» II tennine par: « Au milieu de tout ce monde, BULTOT trone, pactisant avec des gangsters 
importants et se livrant a des parties orgiaques dans des bains de confiture!! » GILBERT 
DUPONT, dans son livre « Les tueurs », reproduit cette information epoustouflante en 
provenance du dossier: « Certains clients viennent armes avec des FAL ou des 
KALASHNIKOV! » les informations tres sures de DORAO proviennent de l’ancien portier du 
JONTHAN, un certain JEAN-PIERRE MARINO. 

Le ton est donne, la machination se met en place! Je suis dans l'ignorance totale de ces 
rapports et pour tout le monde, BULTOT est toujours un « Monsieur bien »! 

En 1982, le tir pratique a encore tout a m’apprendre, mais je raffole deja de ce sport ou il faut 
degainer tres vite et tirer un peu « a la cowboy »! Aujourd’hui, je tremble un peu, car je 
participe a ma premiere competition. Mon experience est derisoire, mais le stress me deborde 
de partout! Ce championnat se deroule en deux journees a Bourg-Leopold. Je ne connais que 
peu de ce monde et le President me presente JEAN-PIERRE MARINO. D'un abord jovial, ce 
grassouillet inspire la sympathie. Tres volubile, Jean-Pierre ne tarit pas d’eloges sur le tir et les 
armes. II est, selon lui, un veritable expert. Litteralement en extase devant certains flics qui 
pratiquent le tir pratique, il reve de devenir, lui, une star a la maniere de STARSKY et 
HUTCH. Or, l’occasion lui en est offerte le deuxieme jour de la competition; il est pres de six 
heures du matin et MARINO s'engouffre au volant de sa Lancia dans le goulot de l'avenue 
Louise. Arrive au milieu de ce dernier, il apercoit trois individus qui courent vers leur voiture 
alors que le son inquietant d'une sonnerie d’alarme retentit dans la galerie. En un eclair, le 
justicier sort de son cocon! Il braque le volant et bloque la voiture des « malfrats ». Il jaillit de 
son vehicule et demande des explications. Malheureusement pour lui, ni son physique 
rondouillard, ni ses propos n'impressionnent ses futurs detenus... bien au contraire. Us sortent 
meme de leur voiture et dans leurs yeux brille la sinistre intention d’inculquer a MARINO les 
bonnes manieres. Ce dernier, comprenant tout le delicat de la situation, plonge dans sa voiture 
et empoigne son pistolet 45 pret pour la competition. Des temoins appellent la police et 
MARINO ne se dessaisira de son arme qu'a l’arrivee des agents. Le papillon reprend vite l’etat 
de larve. Les trois gangsters sont rapidement blanchis par l’enquete (ces jeunes gens faisaient 
simplement une course entre eux) et MARINO devient rapidement, panni les tireurs, le centre 
de quolibets et de rires cyniques. Coinme d’autres tireurs issus du milieu judiciaire, 
j'interviens aupres du Ministere public afin de demontrer que la bonne foi de Jean-Pierre 
d’aider la justice etait bien reelle. 



Orgueilleux et assez intelligent pour se rendre compte du ridicule de la situation, MARINO en 
creve de depit. Le fait qu'une de ses victimes soit precisement un proche du President d’un 
autre club de tir qui s'entraine dans la meme salle que lui n'arrange pas les choses. Le dossier 
quoique classe sans suite, reste repertorie au easier du Parquet de Bruxelles. MARINO quant 
a lui veut absolument vivre une autre vie que celle de sage dessinateur industriel. II se 
presente alors chez monsieur BARON, patron de la societe de gardiennage MONITOR. Apres 
un premier contact, monsieur BARON l'assure de son engagement. MARINO, tout febrile, 
demissionne de son emploi sans attendre la signature de son nouveau contrat. Monsieur 
BARON est un homme avise et prudent. II possede une antenne au Parquet, en l’occurrence 
un gendanne qui lui signale que MARINO est fiche avec un numero de code correspondant a 
« attaque a main armee ». La reaction est nette et brutale envers MARINO: pas de contrat. II 
est done au chomage et anxieux: il est marie et pere d’une adorable petite fille. MARINO 
vient me voir a mon bureau de la prison, il est desemparelPris de sympathie pour lui, je le 
presente a PEPE qui l'engage coniine receptionniste au JONATHAN en attendant qu'il trouve 
autre chose. Il travaille bien, il aime le contact avec le public et... les lilies, et semble 
honnete. PEPE le prend cornme adjoint. MARINO se complait dans cette vie nocturne ou il 
gagne bien sa vie et ebauche quantite de flirts. Un jour, il tombe amoureux d’une fille et part 
en vacances pendant une semaine sans prevenir sa femme. A son retour, revenu sur terre, il 
veut aussi recuperer son epouse qui, elle, n’a plus envie de reprendre la vie commune. Je joue 
meme le mediateur. Sa femme est formelle: « Le JONATHAN ou moi! » Sa petite amie 
l'ayant plaque, il retoume chez sa femme et laisse PEPE en rade, la veille des vacances de se 
dernier. PEPE lui demande de rester, ne fut-ce qu'une semaine: refus et dispute. De retour 
chez lui, sa mythomanie lui suggere de se presenter cornme un heros. Il conte a DORAO, qui 
est aussi un cadre de la Federation de tir, ses descriptions incroyablement mensongeres du 
JONATHAN. DORAO n’est pas tellement interesse par le JONATHAN, mais bien par JEAN 
BULTOT...pourquoi? Et MARINO, sans scrupule et sans egard pour les differentes occasions 
ou je lui ai tendu la main, va done etendre ses divagations sur ma personne. 

FRANCIS DORAO est heureux de pouvoir envoyer un dossier au Parquet de Bruxelles et un 
autre a la Surete de l'Etat, sous le titre de : « Activites suspectes de Jean Bultot». Dans ce 
dossier, non seulement le JONATHAN y est decrit cornme un veritable repaire de truands qui 
n'hesitent meme pas a venir en deposant leurs armes sur la table, mais l'etablissement sert 
aussi de centre secret pour 1’extreme droite: « Les nazis enferment des Arabes dans les caves 
afin de les torturer. La musique diffusee par la sono couvre ainsi les hurlements des supplicies 
»! Et pour couronner le tout, il semble que « JEAN BULTOT dirige tout ce beau monde »! Le 
Parquet de Bruxelles est done saisi de deux rapports contre moi et ce en l'espace d’un mois de 
temps. 

Les enquetes sont menees et revelent que les dossiers accusateurs ne sont constitues que par 
un gros tissu de mensonges. Le Parquet ne me convoquera meme pas, les resultats d’une 
premiere enquete ayant demontre l’absurdite des accusations. Quant au chantage et a la 
drogue, aucune des pretendues victimes ne s’est fait connaitre et aucune prise de drogue ne fut 
jamais realisee. L'excellent FRANCIS DORAO, un des as de la police judiciaire souvent cite 
dans les journaux, est solidement depite! Son rapport bidon n’a donne aucun resultat, il va 
done employer une methode plus musclee. 

Completement inconscient des ces coups bas dans l’ombre, je me battais deja sans le savoir 
contre une force qui bloquait toutes mes promotions ou mutations au sein de l’administration 
penitentiaire. Il faut cependant savoir que les promotions ou mutations au sein de 
l'administration sont regies par certaines regies bien precises. Il n'y est que rarement deroge et 



ce pour des raisons tres importantes. 


En 1983, le poste de directeur s'ouvre au centre penitentiaire agricole de Saint-Hubert. Ce 
centre ne possede qu'un seul directeur, il y est done « patron ». De plus, j’adore les Ardennes! 
Je postule l’emploi, plein d'espoir! Le seul candidat qui se presente contre moi est un 
technicien de niveau deux qui vient de reussir un examen de promotion pour des cadres 
subaltemes et possedant une longue anciennete. II s'agit done pour lui d’une promotion et pour 
moi d’une mutation. Or, ces demieres ont toujours priorite sur les promotions. A ma grande 
stupefaction et malgre mes cinq ans d’anciennete, le poste est attribue a l’autre candidat. La 
rancoeur me ronge devant cette injustice que je ne comprends pas! Auparavant, Monsieur 
l'lnspecteur General JANSSEN de fadministration penitentiaire avait tout essaye pour me 
dissuader de ma presenter a ce poste. Par le biais de la section B2 de la surete de l'Etat, un 
rapport confidentiel etait parvenu a mes superieurs decrivant le danger de placer a un poste 
isole un element dangereux d’extreme droite. 

Entete et completement ignorant des moyens mis en oeuvre contre moi, je postule alors la 
direction des prisons d’Arlon et de Dinant. Toujours avec le meme resultat! Tout est mis en 
oeuvre pour me laisser adjoint a Bruxelles sous la coupe du terrible monsieur WILLE 
surnomme par les surveillants AWILLE DADA. Je suis reellement torpille par la Surete de 
l'Etat! Le decouragement commence a me gagner. Je decide de reagir en m'investissant au 
maximum dans les competitions de tir ou on peut laisser cours a son enthousiasme. Mais 
DORAO veille, le choc sera brutal. 

En 1982, je cree un club de tir qui s'appelle « Le Phenix ». La meme annee, a mon local de tir 
a Geraardsbergen, je monte deja une competition qui fait couler beaucoup d’encre. Monsieur 
Jean-Pierre DENIS qui plus tard allait devenir le president mondial de la IPSC, soit de la 
International Practical Shooting Confederation, m’expliqua qu'il avait vecu un championnat 
extraordinaire en France ou le tir devait s'effectuer a la lumiere d’un stroboscope. Je decide de 
faire mieux. La derniere epreuve est vraiment fantasmagorique. J'avais regu en pret une 
machine agricole qui donne des impulsions electriques sur les clotures. Un ramping est prevu 
en-dessous d’un treillis faiblement electrifie par cette machine. De plus, le tireur doit tirer sur 
des cibles alors qu'elles sont eclairees par un stroboscope et un rail de feux bleus de 
gendarmerie. Pour corser encore l’epreuve, le tireur subit deux sirenes hurlantes a cote de lui! 
Un tireur vous expliquera que le tir provient d’une discipline ou la concentration est tres 
importante. Les artifices que j'ai poses comine autant de pieges font que le tireur se montre 
completement deboussole, mais parfaitement ravi. Malheureusement, le huitieme tireur- oh, 
honte, un membre de mon club!- prend son pistolet dans le treillis electrifie. II regoit une 
bonne dizaine de decharges avant de se sortir de ce petrin. MARINO le sauve en arrachant les 
fils, ce qui a pour effet de faire sauter le plombs: un vrai film comique! Tous les participants 
s'ecroulent de rire, l’epreuve est supprimee, mais restera gravee dans les memoires. Quelle ne 
sera pas ma stupefaction de lire quelques annees plus tard que les participants tiraient a la 
mitraillette et que certains troncons etaient electrifies! 



En 1983, suite a l'aide de monsieur VANDENBROECK, commissaire de police a Evere, je 
demenage mon club dans les toutes belles installations du Triton a Evere. La salle est 
magnifique, les cibles sont commandees par un ordinateur, bref le club est sous le 
ravissement. Dans cette nouvelle salle, le club va prendre un essor considerable. De ce petit 
club, nous prenons une envergure importante a tel point que je suis oblige d’augmenter les 
heures de cours. Cette meme annee, MARINO est toujours dans mon club. II le quittera apres 
les incidents du JONATHAN pour creer son propre club: 1’IMPACT SHOOTING CLUB. La 
grande nouveaute apportee par le PHENIX est l’introduction de la gent feminine. Dans les 
grands pays ou le tir est populaire, les equipes feminines sont legions. En Belgique, la 
federation avec J-P DENIS (pourtant President mondial), FREDDY SEMOULIN (ex-coureur 
automobile, papetier et armurier) et LEOPOLD DURIE, repugne a l'introduction des femmes 
dans le tir. C'est ainsi que je fais la connaissance de CLAUDINE FALKENBURG. Nous 
devenons tres vite des amis et meme un peu plus. Le club developpe une telle reputation que 



des tireurs se deplacent de Malines pour suivre les entrainements. Mais ma surprise est a son 
comble lorsque des diamantaires juifs se deplacent d’Anvers deux fois par semaine pour 
suivre mes entrainements. C'est ainsi que mon club compte une dizaine de Juifs aux noms 
evocateurs et dont le plus celebre et le plus sympathique ne s'appelle pas moins que « 
GOLDFINGER »! Plus tard, les journaux ecriront que mon club etait un repaire d’extreme 
droite... Preuve s'il en est que je ne melange pas mes opinions personnelles avec le sport. 

Un probleme interne va assombrir le club. Devenu trop important, il ne peut plus dispenser un 
entrainement diversifie et adapte a chacun vu l’ampleur des nouvelles inscriptions. Certains « 
anciens » renaclent un peu et souhaitent trouver un club de perfectionnement a la competition. 
A Jette, s'ouvre une nouvelle salle et tout naturellement le promoteur de ce nouveau complexe 
cherche a creer une section de tir pratique a fin d'y attirer un nombreux public. JACQUES 
GOOSSENS qui est mon bras droit part creer cette section. Plusieurs membres en profitent 
pour le suivre en esperant un club elitiste. Malgre ces defections, le PHENIX devient vite le 
club le plus important de Bruxelles. 

Depuis 1982, j’ai debute aussi une autre activite, la technique Defense-Security creee par 
Lucien Victor OTT. Ce dernier, la cinquantaine, se targue d’avoir ete garde du corps du 
General de Gaulle. Ceinture noire cinquieme dan de JUJITSU, il est aussi ancien para et 
instructeur a la legion etrangere. De par ses peregrinations dans le monde, il a mis au point 
une methode de combat adaptee pour les forces de l’ordre. Cette technique est vraiment 
simple, mais surtout d’une remarquable efficacite. Elle sera d'ailleurs adoptee par la 
gendarmerie beige et diffusee dans ses differents centres d’instruction. Lorsque j’avais dix- 
sept, j'etais un pratiquant de karate. J'avais obtenu ma ceinture marron et adorais la 
competition. Je suis d’emblee seduit par la simplicite enfantine de la technique et m'inscris 
aux cours. Je me pique au jeu et deviens rapidement instructeur. C'est ainsi que j’accompagne 
OTT dans divers deplacements afin de le seconder dans ces demonstrations ou ses cours. 

OTT n’est pas un homme facile. Dans n'importe quelle assemblee, il doit a tout prix etre le 
centre d’interet et malheureusement, le cote matamore du personnage prend souvent le pas sur 
son aspect de veritable specialiste. Neanmoins, ses vrais amis l’acceptaient tout entier et j’en 
garde un fameux souvenir. Nous donnons cours a la police de Liege, aux para-commandos de 
Marche-Les-Dames, et meme aux instructeurs des Marines Britanniques a Deal dans le Kent. 
Je ne recois aucun argent pour cette activite, mais elle me permet de croiser des instructeurs 
divers et comparer les techniques. 

En 1984, L V OTT met sur pied un seminaire sur sa technique Defense-Security. Pour ce 
faire, il me demande de faire une conference sur la balistique et une demonstration sur le tir. 
Ma conference se base sur « L'efficacite des annes de poing » et « Les annes de poing 
modernes » de Dominique VENNER. Pour la demonstration pratique, j'organise avec mon 
club une demonstration de tir dans la terre glaise pour montrer l’onde de choc de differents 
calibres. J'apporte une porte une portiere de voiture pour prouver que meme un petit calibre 
peut la traverser. A la fin de la demonstration, OTT me demande de faire un test special. Il 
sort de son attache-case des morceaux de Kevlar de quinze centimetres sur quinze environ. Le 
Kevlar est un tissu utilise pour l’elaboration des gilets pare-balles. C'est done a la demande 
expresse de OTT que je place un morceau sur la portiere. Je vais tirer avec differents calibres. 
Deux constatations s’imposent: le kevlar arrete les balles, mais n’arrete pas l'effet de choc. 
OTT demontre alors aux invites que la dechirure dans la portiere equivaut au choc recu dans 
la poitrine et qu’il vaut mieux que la balle perce le corps que de liberer toute son energie dans 
les premiers centimetres. J'abonde volontiers dans son sens. Parmi l'assemblee, nous trouvons 



differents directeurs de firme de securite en Belgique, un officier de police judiciaire de 
Toulouse charge de la lutte anti E.T.A, des espagnols de la Guardia Civil aussi en charge de la 
lutte anti-E.T.A, une garde du corps du roi Juan Carlos, un ex-patron du G.I.G.N JEAN- 
PIERRE GOURITIN recycle dans une importante societe parisienne de gardiennage, etc, 
etc,... 


Titre en gras 


Tout demarre en fevrier 1984. Claudine me telephone en pleine soiree. Elle vient d'etre 
molestee par Francois D., membre du club de tir pratique de Jette. Arrive en hate a son 



domicile, je la trouve completement effondree. Sans reflechir une seconde, je decide d’aller 
demander des comptes aupres de cette brute qui est partie s'entrainer tranquillement dans son 
club. Sur place, je lui demande de sortir, mais devant son refus, je decide d’amener Claudine 
au commissariat de police afin d'y deposer plainte. Aussitot, une voiture de police sera 
depechee jusqu'au club et Francois D. sera apprehende. 

Le mo is suivant, je recois un choc epouvantable en apprenant que la federation me penalise 
pour mon attitude et me suspend pour trois mois de toute competition. FEDDY SEMOULIN 
m’explique doctement que notre sport est fragile et qu’il etait tres cavalier de faire venir la 
police dans un club de tir. Je suis estomaque. Je suis penalise pour avoir ose demander a la 
justice de s'occuper d’un fait penal. Mais ma surprise est de courte duree et fait place a 
l'effarement! Le 17 avril 1984, les membres de mon club recoivcnt une lettre leur apprenant 
que le PHENIX n’est plus reconnu et qu'ils doivent s'inscrire dans d’autres clubs de la 
federation. Je ne recevrai moi-meme cet avis que quelques jours plus tard. RENE SMEETS, 
dans la revue FIRE du mois de mars 1991, reconnaitra qu'il s'agissait bien d’une directive de 
la Surete de l'Etat et que n’importe quel pretexte etait bon pour m'ecarter. Cette fois-ci, 
DORAO ne se contente pas de diffamer, il sevit. La lettre est signee par SEMOULIN et me 
signific mon rejet sans la moindre motivation. Je telephone aux dirigeants, mais personne n’a 
assez de courage pour m’expliquer cette decision. Or, une competition a lieu quelques 
semaines plus tard, celle de la P.J. de Liege justement. La mesure est tellement injuste et 
scandaleuse que je decide de porter faction en justice. II n’est pas question de me laisser faire 
par un flic qui pense etre au-dessus des lois. Je contacte Maitre MARTIAL LANCASTER qui 
est un tres brillant avocat du barreau de Bruxelles. Le 18 mai 1984, f affaire est presentee 
devant le tribunal des referes de Bruxelles, preside par Madame HOLBERHE. La federation 
avait mande un avocat de Mons (region de SEMOULIN) qui explique faiblement que le 
federation avait ses raisons... qu'elle preferait ne pas devoiler. Le tribunal me donne raison et 
je trouve in extremis un huissier pour faire significr le jugement aux autorites de la federation. 

Le 20 mai, je me rends done au championnat de Liege avec une photocopie du jugement prete 
pour tous les Presidents du club. A mon arrivee, et malgre le decision de la justice, 
SEMOULIN declare qu'on ne m’inscrira pas et DORAO, officier de police judiciaire, me 
remballe grossierement par cette phrase: « Tu sais ou tu peux te le mettre ton jugement? » Je 
me dirige aussitot vers JEAN-PIERRE DENIS, President mondial, qui me declare: « Je n’ai 
rien a voir au niveau beige. » Un vrai panier a crabes! En proie a une sourde colere, je cours 
telephoner au Substitut du Procureur du roi de garde le week-end, mais il refuse de se 
deplacer pour une telle peccadille. J'alerte ensuite la presse et rentre a Bruxelles. Le journal « 
La lanterne » fera echo de cet incident le 23 mai 1984. Je suis sidere, je n’ai jamais vu un 
jugement dument signifie etre bafoue par un membre du ministere de la justice dont la 
fonction est de faire respecter la loi. Apres m’etre calme et avoir recouvert tout mon sang¬ 
froid, je decide de ne plus me battre pour une federation dont la lachete des dirigeants et leur 
mepris de la loi sont incompatibles avec mon sens de la morale. Je decide de creer ma propre 
federation! 

Quelques jours apres cet incident de Liege, L.VOTT me demande de l’accompagner au Cap 
d’Agde en vue d'y preparer un nouveau seminaire Defense-Security. Nous partons dans ma 
voiture, OTT, son epouse, Claudine et moi. Je suis tres interesse par ces nouveaux contacts, 
car je compte bien ouvrir dans le Sud de la France une antenne de la nouvelle federation de tir 
que je compte creer. Nous passons par Toulouse et sommes accueillis par un des couples les 
plus fantastiques jamais rencontres dans ma vie: ANDRE ET YOLANDE PEYSSERAND. 
Andre est un tres gros industriel de la region, mais sa grande fierte est d'etre un pied-noir. 



Nous avons roule une bonne partie de la nuit, mais Andre est aussi epuise que nous... il a « 
roule » la semoule du couscous pendant toute la nuit. Le couple est age de plus ou moms 
quarante ans; et un franc courant de sympathie passe d’emblee entre Andre et moi-meme. 
Apres le dejeuner au couscous (meilleur que la-bas), nous prenons la direction du Cap d’Agde 
ou les PEYSSERAND ont amarre leur yacht. Je n’etais jamais monte sur le pont d'un yacht, 
encore mo ins d’un yacht a moteur de 18 metres de long... fabuleux. Le bateau dispose de 
quatre chambres et nous passons une apres-midi tres agreable a deviser sur l’Algerie francaisc, 
le combat, le tir et le tout entrecoupe par des blagues savoureuses. 

Pendant la soiree, Andre largue les amarres et nous allons nous ancrer en mer sur une bonne 
place de peche. II fait doux, le ciel est etoile, la mer est calme. Pendant que je m’adonne a la 
joie de la peche avec Andre, je sens une douce quietude m'envahir, mes soucis disparaissent 
comme par enchantement. Claudine se sent tres bien aussi et tres amoureuse. J'ecourte done 
cette seance de peche et nous regagnons notre cabine a l'avant. Celle-ci est, a mon insu, tres 
mal insonorisee et Andre, amuse, appellera tout le petit monde afin de lui faire profiter de... 
du... enfin, vous me comprenez! Le lendemain matin, a notre grande confusion, nous sornmes 
applaudis et la bonne humeur s'installe d’emblee pour cette belle journee. Le temps est 
magnifique et je me rends compte qu'en moins de 24 heures, je suis devenu amoureux des 
bateaux. Andre se montre amuse de mon enthousiasme et Yolande parait legerement 
mysterieuse. La journee se deroule en contacts locaux et j’entrevois de larges possibilites 
d’antennes francaiscs dans ma nouvelle federation. Lors de la soiree, apres le « petit» pastis 
obligatoire, Andre m’emmene avec Claudine voir un « petit » yacht de 12 metres qu'il se 
prepare a vendre a un Americain. Je suis tout de suite tombe amoureux de ce couach arcoa 
appele SYLVINE II. Devant mon emerveillement pour le bateau, Andre me propose d’en 
differer la vente de 3 mois si je voulais l'acheter. Pour cela, il me fallait de l’argent et je n’en 
avais pas devant moi. Des ma rentree en Belgique, je me mets a chercher les possibilites de 
rentabiliser ce bateau qu'il me vendait 100 000 Lr. Ce n'etait pas cher pour un bateau a moteur 
possedant deux chambres, un salon, une salle a manger, un coin cuisine et un wc-douche. Tres 
vite, je vois la possibility de le rentabiliser. Voyages d’agrement sur la Meuse, voyages a 
Londres,... En tres peu de temps, je suis vraiment sur de pouvoir l’entretenir. Je me toume vers 
EDOUARD LECLERC, un homine hors du cornmun, philosophe et philanthrope. Nous 
avions souvent de longues conversations et bien que nous ne soyons pas de la meme 
philosophic, c'etait toujours tres agreable de discuter avec lui. Je lui parle de mon projet et 
certains de ses amis demandent pour reserver le bateau pour une sortie. Il m’avancera l’argent 
sous forme de traites mensuelles. 

Pendant les vacances d’ete, je retourne au Cap d’Agde ouje deviens l'heureux proprietaire de 
SYLVINE II. La-bas, je suis des cours de capitaine de mer et de capitaine de fleuve. 
Normalement, Andre pensait ramener mon bateau par camion jusqu'a Nieuport ouje comptais 
demander un emplacement. Mais voila, il s'agissait d’un convoi exceptionnel, vu la grandeur 
du bateau, et il fallait les autorisations de tous les departements a traverser, plus une escorte 
de motards de la gendannerie. Au vu de ce probleme, je demande a mon pere de me rejoindre 
pour remonter le bateau par le Rhone, puis par le Rhin. Mon pere possede beaucoup de 
qualites, mais c'est loin d'etre un sportif. Il hesite, n’ayant jamais mis les pieds sur un bateau, 
neanmoins, il ne peut me le refuser. Commence alors pour lui un long calvaire qui va durer 12 
jours. Il fait et defait les amarres pendant plus ou moins deux cents ecluses, il perd je ne sais 
combien de kilos et parfois... son sens de la bonne humeur. La poisse nous accompagne: 
l'helice se decroche sur le Rhone. Andre vient a notre rescousse. Joint de culasse du moteur 
pete a Avignon. Je telephone a la finne de Marseille afin de laisser la piece avec la facture 
dans un bistrot, car je prends le train de nuit. La firme se laisse convaincre et a l’aube, je suis 



de retour avec la piece. Je retrouve mon pere ecoeure et abattu: le mecanicien avait oublie de 
fermer une canalisation et il y avait quatre cents litres de mazout dans la cale! A Cologne, 
papa, qui a pris la barre, passe trop pres de la berge, racle le fond du fleuve et fausse l'helice, 
celle qui nous avait donne du fil a retordre. Bref, nous devons continuer sur un seul moteur. A 
Cologne, Claudine et un ami relayent mon pere completement epuise. Etant en transit, grosses 
difficultes a la douane hollandaise qui exige le paiement de la TVA du bateau, paiement qui 
sera rendu a la sortie du pays, pres dAnvers. Evidemment, a la sortie du pays, la douane n’a 
rien rendu et je n'ai recupere cet argent que deux mois plus tard, grace a une intervention 
aupres du Consul des Pays-Bas. Cela pose un grave probleme a l’entree de la Belgique. La 
aussi nous devons payer la TVA a l’entree, mais je n'ai plus d’argent. A Anvers, on passe done 
par un temps epouvantable (un cargo venait de couler au large des cotes beiges suite a la 
tempete qui sevissait) devant la douane beige sans nous arreter et c’est sans le moindre ennui 
administratif que nous arrivons au port de plaisance de Bruxelles. Peu apres, je fais mettre le 
bateau en cale seche... il y a beaucoup de frais pour le remettre en bon etat et le voyage m’a 
tout pris, meme les 10 000 Frs de pret d’Andre. Mais ou trouver les fonds? J’en parle a gauche 
et a droite, mais personne ne semble interesse a investir pour reparer le bateau. Et voila, plus 
il reste en cale seche a Bruxelles, plus il coute, car la location de l'emplacement pour les 
bateaux non membres du club nautique de Bruxelles est tres chere. 

En Belgique, la federation de tir beige donne le spectacle de quelques « derapages ». Je trouve 
en effet parfaitement normal d’apprendre a un individu possedant une arme toutes les 
possibility de defense en cas de necessity. Par contre certains clubs, dont celui de MARINO, 
n’hesitent pas a programmer des epreuves ou Ton tire avec FAL et RIOTGUN sur des cibles 
representant des silhouettes humaines (cfir exercice Infernal Assault de 1’IMPACT 
SHOOTING CLUB). Il existe done une mesure incroyable qui fut stigmatisee par certains 
joumaux. Or, les autorites judiciaires ne pouvaient ignorer ces faits, Monsieur le Substitut 
LEBRUN de Bruxelles, etant membre du Conseil d’Administration du club de MARINO. 
Pourtant, officiellement, tout a ete mis en oeuvre pour etouffer les bases reelles de 
l’entrainement a la Federation. JEAN-PIERRE SEMOULIN a ete un des premiers a 
preconiser le terme « cible non tirable » pour une « cible otage ». Plus question non plus de 
parler d’impact a la tete ou au corps, mais de zone A ou B. Affaire a suivre!!! 



Titre en gras 


De retour en Belgique, deux gros problemes me preoccupent: l’argent pour le bateau et le 
developpement de ma nouvelle federation. Celle-ci s'appelle: P.H.S.S. Ou PRATICAL 
HANDGUN FOR SAFETY AND SPORT. Nous voulons ainsi nous distancer de l’autre 
federation BPSA ou IPSC en designant l’arme de poing cornme unique base de l’entrainement. 
II n’est done pas question chez nous d’entrainer les gens a tirer sur des silhouettes humaines 
avec des FAL ou RIOTGUN dans des ATTAQUES aux noms evocateurs: « Infernal Assault, 
Airport trouble, Nightmare, etc, etc... ». Par contre, le membre du club apprendra a tirer pour 
le sport avec son arme de poing, mais aussi comment se comporter pour se DEFENDRE en 
cas d’attaque. II ne s'agit pas d’une nuance, mais d'une volonte deliberee de rester dans le 
cadre strictement defensif de la notion de legitime defense pronee par la loi. II est a no ter pour 
les neophytes judiciaires que, contrairement a une opinion repandue, le policier n’a pas plus de 
droit qu’un simple citoyen a utiliser son arme. 

Mais qu’est-ce qu’en fait le tir pratique? On a beaucoup ecrit sur le tir pratique, on a dit bien 
des choses, des choses vraies, des choses stupides, completement inventees. Je vais essayer de 
recadrer ce sport dans sa veritable optique. Premiere constatation: le tir pratique est 
indeniablement un sport de combat. II ne s'agit nullement de faire pan pan au milieu d’une 
cible ronde, mais de simuler un combat ou l'intelligence, le courage et la vitesse sont 
preponderants. D'ou la devise internationale de ce sport: DILIGENTA, VIS, CELERITAS. 

Les competitions internationales sont uniquement basees sur du tir a l’arme de poing de gros 
calibre. Une arme de faible calibre ne dispose pas d'un stopping power suffisant (capacite de 
neutralisation de l’adversaire). II faut done disposer d'une arme de 9 mm minimum. Les 
declarations par voie de presse des differents dirigeants, proclamant haut et fort qu’il ne s'agit 
que d’un simple sport sont parfaitement hypocrites et mensongeres. Appelons un chat, un chat. 
Cependant, la loi est tres simple: on ne peut utiliser son arme que pour sa propre defense ou 
pour la protection de la vie d’autrui! 


A la prison, la routine continue. Je subis toujours le joug d’AWILLE DADA. Pourtant une 
information recuc par un detenu va changer le cours de ma vie. II s’appelle BRUNO VAN 
DEUREN. II joue d’abord les bravaches et me dit qu’il connait mon sumom de LUCKY 
LUCKE et qu’il serait interesse de voir lors de sa liberation si je tire plus vite que lui. Je veux 
mettre fin a cette conversation, mais il va me parler de l'affaire DEKAISE. Ce dernier est un 
armurier de Wavre qui fut victime d’une agression le 30 septembre 1982. Deux homines ont 
attaque son etablissement avec violence. Ils frappent DEKAISE et ses deux clients au visage 
et abattent un agent de police qui essaye de les arreter! Traques par la gendarmerie, ils criblent 
de balles deux gendarmes qui seront grievement blesses et ils parviennent a s'enfuir! Cette 
attaque sera repertoriee par les enqueteurs cornme faisant partie des mefaits des tueurs du 



Brabant Wallon. 


Sans sourciller, BRUNO VAN DEUREN me dit avec vitesse: « Vous me prenez pour un con, 
mais vous ne savez pas qui je suis! » Je me retourne en feignant volontairement mon interet: 

— Ah oui? 

— Oui, c'est moi qui ai agresse ce salaud de DEKAISE. 

II attend ma reaction, mais je ne dis rien, attendant la suite. Devant mon mutisme, il continue: 
—DEKAISE avait touche de l’argent pour faire un travail particulier, il ne l'a pas fait. On a ete 
recuperer la marchandise et lui f... une correction. C'est moi qui l'ai frappe, il le merite, car 
quand on accepte un travail, il faut le faire. Je regrette pour ce pauvre con de flic qui s’en est 
mele, mais en fait, il est mort pour avoir tente de defendre une ordure! 

J'en parle a mon assistante sociale et je pense a une vaste frime parce qu'il vient d’etre puni. 
C'est aussi son avis. Une assistante sociale d'un organisme exterieur a la prison recoil les 
memes confidences, mais elle ne les prend pas au serieux non plus. BRUNO VAN DEUREN 
est un mythomane. Il doit cependant etre interessant a ecouter, car son avocate, Maitre 
CARINE COUQUELET, tres mignonne, vient l’ecouter chaque jour pendant des heures dans 
un box reserve aux avocats, a un tel point que monsieur PERAIN, mon collegue, est oblige de 
leur rappeler, suite aux observations des surveillants, qu'il faut eclairer le box lorsqu'il fait 
noir. Je range cependant cette infonnation dans ma memoire et n'y prete plus guere attention. 
Autre nouvelle de prison, l'ex-commissaire GODEFROID, alias FREDDO pour les amis, a ete 
arrete et ecroue pour une tenue de maison de debauche. Il pense a une guerre des polices, car 
il a ete arrete par la gendannerie. J'apprendrai plus tard que faction judiciaire est dirigee en 
sous-main par son superieur FRANS REYNIERS. Freddo ronge son amertume et sa peur a la 
prison de Forest. Dame, panni les detenus, beaucoup se souviennent de ses methodes 
expeditives et il craint pour son integrity physique. A Saint-Gilles, j’avais monte un atelier 
pour la Regie (service donnant du travail aux detenus par l’intermediaire d’entrepreneurs 
externes a la prison). Dans cet atelier se trouvaient deux gendarmes indelicats et 
TIMMERMANS, autre membre de la PJ de Bruxelles. En accord avec JEAN-POL PETIT, 
directeur de la prison de Forest, je fais venir Freddo a Saint-Gilles afin de lui eviter de se faire 
massacrer par les autres detenus. A propos de cette regie, un autre evenement va se produire, 
dont je suis tres Here, mais qui me vaudra de gros ennuis. 

Une grosse papeterie de Bruxelles nous confie un enonne travail consistant a enrouler des 
posters, puis les mettre sous cellophane. Je me demenais cornme un diable pour obtenir du 
travail pour les detenus. Il faut dire aussi que je maintenais mes moniteurs (surveillants) sous 
pression et que le travail etait toujours correctement remis. Il m'est arrive plusieurs fois de 
recevoir des demandes pressantes du ministere afin de ceder du travail a la prison de Forest. Il 
n'etait pas rare de voir plus de 100 personnes au travail regies a la prison de Saint-Gilles et a 
peine dix a Forest. De meme, a cause de ma politique agressive de contact avec un maximum 
de firmes, le ministere dut freiner mes ardeurs, car je « faisais une concurrence insupportable 
aux ateliers proteges ». En tant que directeur gestionnaire, j’estimais et j’en suis toujours 
persuade, que mon devoir etait d’aider les detenus devolus a ma garde. Et done, je recois ce 
travail important de posters necessitant la mise au travail de plus ou moins 40 detenus. Le 
travail est effectue correctement et tout semble se derouler normalement. La veille de la 
remise de plus ou moins 100 000 rouleaux, la finne me telephone pour me dire que le camion 
en provenance du Danemark arrivera le lendemain vers 10 heures. Fort de mon experience de 
regularity, j’assure mon interlocutrice que tout est en ordre, mes moniteurs ne m'ayant signale 
aucun probleme. Quelle n’est pas ma surprise, vers 16h30, lorsqu'un de mes moniteurs me 
signale qu'il y a un leger retard et qu’en fait, il me manque plus ou moins 10 000 rouleaux 



pour terminer la commande. Je m'affole un peu, car je sais que cette finne est tres pointilleuse 
sur les horaires et a deja essaye plusieurs prisons avant d’etre satisfaite de la mienne. Je sais 
aussi que, si la remise n’a pas lieu, je pourrai me retrancher derriere mes moniteurs qui se 
retrancheront derriere la lenteur des detenus et que face a 1’administration, le client ne pourra 
pas faire grand chose. Par contre, quarante detenus risquent de perdre leur emploi si le client 
n’est pas satisfait! Je me depeche dans le bureau d’AWILLE DAD A, mais il est deja parti pour 
aller jouer au bridge et je ne peux l'atteindre. La decision est difficile: jouer au fonctionnaire 
ou jouer au responsable sincere de pauvres diables? Me doutant que la forme prime souvent 
sur le fond et done que le terrain est deja piege, je decide toutefois de sauver le contrat coute 
que coute. Les tables du refectoire des surveillants dans le couloir de l’aile A de la prison. Je 
demande ensuite a certains detenus du centre d’orientation penitentiaire (tous condamnes pour 
un ou plusieurs meurtres), leur accord pour m'aider toute la nuit a terminer les rouleaux et je 
requisitionne tous les deserteurs, les Temoins de Jehovah et mon atelier regie pour travailler 
pendant toute la nuit. Durant celle-ci, la prison n’est protegee que par 12 surveillants dont 5 au 
centre. Le fait de se trouver avec quarante detenus sortis de cellule au milieu d’une aile ne les 
enchante nullement. Je prends done la responsabilite de m'armer tout en cachant 
soigneusement l’anne sous mon veston et en l’indiquant au chef du centre. Je decide de passer 
toute la nuit avec tout ce monde! Ce fut la seule fois que je fus arme au centre de prison. Plus 
tard, certains illumines n’ayant jamais vu une prison de pres, reprendront dans des articles des 
articles de presse certaine accusations fantaisistes me decrivant coniine un cow-boy 
deambulant l’arme a la hanche dans les couloirs de la prison. Vers deux heures du matin, un 
des « contremaitres » me declare qu’il n'y a plus assez de papier collant. Je prends le coup en 
pleine poitrine et je sens une vaste lassitude m’envahir. Soudain, un detenu demande a me 
parler d'urgence. II connait un petit magasin Boulevard Lemonnier qui reste ouvert tout la nuit 
et ou il pense qu'il est possible de trouver du papier collant. Je confie mon anne au chef de 
poste et effectivement quarante minutes plus tard, je rentre triomphant avec une dizaine de 
rouleaux de scotch. Les detenus auxquels j'ai explique les motivations de ce travail me 
sourient d'un air complice. Tout le monde se pique au jeu et l'atmosphere est bon enfant. Vers 
quatre heures du matin, je fais chercher quelques bacs de biere au refectoire des surveillants et 
je fais distribuer une biere a chaque detenu. Il n'est plus question de prison, de detenus, de 
surveillants, de directeur. Il est question d’une equipe qui travaille d’arrache-pied pour sauver 
l'emploi de quarante rejetes de la societe. A six heures, lorsque les surveillants de jour 
arrivent, leur stupefaction est grande de voir tous ces detenus ereintes, mais tellement heureux 
d’avoir prouve qu'ils etaient autre chose que du betail parque. La fatigue se lit sur tous les 
visages, mais sur les tables 10 000 rouleaux tronent cornme autant de trophees, de 
decorations, de rehabilitations a leur dignite d'homme. Je rentre chez moi, ereinte, mais 
tellement emu et tier, non pas de moi, mais de mes gars et de leur volonte. Je me douche et 
me rase. Brusquement, la prison ne m’apparait plus cornme une machine, je me sens remis en 
question et je rage d'autant plus que [’administration refuse de me donner le commandement 
d’une prison. Je me sens tellement sur d’en faire non pas un centre de parcage, mais un 
etablissement ou tous ensembles nous pourrions nous elever vers un but lucratif. Je me sens 
poete, je me sens bien, je me souris dans le miroir. Cornme un gamin qui vient d’avoir un beau 
bulletin, je me rends a mon bureau a neuf heures, tier du travail accompli, sans faille et sans 
bavure. 

Typhon, raz-de-maree, eruption volcanique ne sont que peccadilles a cote de l'accueil que je 
regois de mon bien-aime patron. Non seulement, il desapprouve cette initiative insensee, 
grotesque, dangereuse, follement imbecile, etc, etc, mais il decide de rediger un rapport contre 
moi a 1’administration centrale. Il vient, je ne le saurai que plus tard, de recevoir les foudres du 
professeur communiste DE WAELE, en charge du centre d’orientation penitentiaire. Les 



detenus qui lui sont devolus subissent des tests pendant une annee et il lui est parfaitement 
intolerable de « perdre » une journee, merne si c’est pour sauver le travail de quarante detenus. 
Je suis done en demeure de rediger ma defense par ecrit, mais lorsque le camion apparait, 
mon amertume disparait pour faire place a la ficrte. C'est done d’un ton tres ferine que je 
replique aux accusations et je contacte la finne pour lui expliquer les faits. Devant ma volonte 
reelle d'aider les detenus et l'intervention de la finne me remerciant, la direction generate ne 
s’en tiendra qu'a une admonestation assortie d’une expresse interdiction de renouveler ce genre 
d’exploit. Cet « exploit » ressurgira beaucoup plus tard. Apres mon depart au Paraguay, le 
parlementaire gauchiste JOHAAN PEPERMANS, demandera a Monsieur JEAN GOL si 
j’avais parfois pris des decisions inacceptables ou en rapport avec l'extreme droite. Le ministre 
repondra lachement et laconiquement que certaines decisions prises par BULTOT furent 
parfois annulees parce que ses criteres sortaient du cadre penitentiaire. Sans autre explication, 
GILBERT DUPONT declarera dans son livre « LES TUEURS »: « fonnulation vague qui 
laisse imaginer bien des choses... » En recevant mon admonestation par AWILLE DAD A, je 
me rappelle une phrase magnifiquc de JEAN DUPREEL, ancien directeur general des prison 
et professeur de criminologie a l’Universite Libre de Bruxelles: « L'action penitentiaire 
reclame l’enthousiasme, et l’enthousiasme est une qualite de jeunesse »! En sortant du bureau 
de mon patron, je sens que j’ai pris un coup de vieux... 

Les problemes de mon bateau, de la federation adverse de tir et de mon patron me poussent 
encore plus vers une realisation que je veux eclatante de ma federation de tir. Parmi les 
membres, c'est l’enthousiasme! Les membres du club qui viennent de Malines decident 
d’ouvrir une section de ma federation dans leur club local et les Juifs d’Anvers sont aussi a la 
recherche d’une salle. Je me demene sans compter (helas!) en me dcplacant partout ou je peux 
faire la promotion de la federation. Cette depense d’energie se double d’une fameuse depense 
tout court. Or, le bateau est toujours hors de l’eau et me coute 300 francs beiges par jour en 
plus du remboursement des 17 000 frs mensuels a Edouard LECLERQ. Pour frapper un grand 
coup, nous decidons de mettre sur pied un championnat de tir a des prix insenses. II y a pour 
100 000 frs de prix, du jamais vu dans le tir pratique. J'ai contacte tous mes amis et mes 
connaissances. Claudine qui travaille au cabinet de Cecile GOOR, Secretaire d'Etat 
francophone a Bruxelles, se charge du patronage moral de son patron, de madame NEYTS? 
Secretaire d’Etat neerlandophone a Bruxelles et de Monsieur MAINIL, Ministre des pensions. 
Pour ma part, je contacte le Bourgmestre d'Evere et le centre culturel des U.S.A. Je veux une 
fete eclatante, elle sera plus belle encore. Devant l’ampleur de l'evenement, tous les grands 
armuriers acceptent de sponsoriser la fete avec du materiel de tir. Monsieur MENDEZ 
FRANCO, rien a voir avec JUAN MENDES, assassine plus tard, est fortement interesse par 
cette nouvelle federation. Nous ne defavorisons pas le calibre 9 mm au profit du 45 A.C.P. 
Aussi il offre en superbe pistolet GLOCK en prime. N’etant pas ego'iste mais je dois le 
reconnaitre, un peu fouteur de m..., je declare la competition ouverte a tous les tireurs de 
n’importe quelle federation. Je promets les resultats le jour meme (la BPS A demandait deux 
jours) et une inscription minime de 750frs. Parmi les lots, il y a une TV couleur, une riot gun, 
des munitions et PEPE, mon ami, pour ne pas rester en arriere, m'offre un lot d’excellentes 
bouteilles de vin. 

STEPHANE STEEMAN et MIMI BEDIN (vedettes de l'humour beige) m'assurent de leur 
presence pour la remise des prix. Tout est pret pour une competition triomphale. Cette 
competition seme le desordre et la pagaille dans l'autre federation. DORAO et SEMOULIN se 
repandent en menaces. Mais l'attrait d’une telle competition jamais vue en Belgique semble de 
plus en plus fort chez la majorite des tireurs de la BPS A. 


Une reunion orageuse a lieu au mois de novembre 1984 et de peur de perdre une bonne partie 



de ses membres, la BPSA, la rage au coeur, ne peut interdire la venue de ses tireurs a ma 
competition. Je vois done avec plaisir leurs 15 meilleurs tireurs se presenter a l’inscription. La 
competition est superbe, les resultats calcules pour la premiere fois en Belgique sur ordinateur 
sont prets en une demi heure apres la demiere balle tiree. Les coupes des ministres du club 
sont remises par un STEPHANE STEEMAN en verve, je ne vis plus sur terre, je plane tres 
haut, je suis heureux, j’ai reussi. 

Coinme j'ai le vent en poupe, je decide de frapper encore plus fort !! Au milieu de l’annee 
1983, j’avais eu l’occasion de rencontrer a plusieurs reprises le journaliste GILBERT 
DUPONT de « LA DERNIERE HEURE » lors d’un temoignage en cours dAssises et d’un 
reportage sur la prison. Le courant avait fair de passer entre nous et je le contacte pour lancer 
dans la presse la promotion de ma nouvelle federation. Le 5 decembre 1984, GILBERT 
DUPONT va trouver un titre choc : 

LE DIRECTEUR DE PRISON TIRE PLUS VITE QUE SON OMBRE... 

Se servant ainsi de mon surnom de prison, LUCKY LUCKE, le journaliste appose a son 
article une photo de moi-meme en train de tirer. Cette photo que je lui avais gentiment cedee 
sera reprise pendant des annees par toute la presse beige lors de mes ennuis judiciaires. La 
parution de farticle provoque de fortes reactions en tout sens. La premiere et l’inevitable se 
presente par ma convocation dans le bureau de AWILLE DADA. II est outre, ou est done mon 
devoir de reserve, je m’exhibe coniine un clown, etc., etc. Les reactions positives deferlent au 
telephone. Une dizaine de clubs dans le pays desirent me contacter a fin de connaitre un peu 
mieux cette technique. Je depense cependant beaucoup d’argent pour mes deplacements, 
demonstrations et « tournees de boissons du President ». A l'horizon, toujours pas de rentree 
suffisante en vue a fin de reparer le bateau et payer sa TVA. 

TITRE EN GRAS 


En Belgique, en 1983, Monsieur JEAN GOL est toujours ministre de la justice. En 1982, 
apres trois mois de « regne » de Monsieur le Ministre, debutent les actions terroristes 
attributes aux tueurs fous du Brabant Wallon. L’annee suivante, la serie noire continue avec 
les carnages de Temse, Colruyt de Nivelles, VAN CAMP patron du restaurant « LES TROIS 
CANARDS », Delhaize de Beersel en octobre, le bijoutier dAnderlues en decembre. En 
1984, la Belgique est toujours sous la protections efficace de JEAN GOL, mais... elle boit 
debuter un autre terrorisme : 

les C.C.C. ou CELLULES COMMUNISTES COMBATTANTES. 

II y a done deux bandes terroristes en 1984 qui tuent les innocents ou qui dynamitent des 
edifices. Du jamais vu depuis que la Belgique existe, et le pire est a venir... 

L’operation MAMMOUTH du 19 octobre 1984 consistera en une vaste operation de 
perquisitions (plus ou mo ins 120), certaines seront effectuees dans des partis politiques 
reconnus mais marginalises, aucune dans les grands partis de la majorite !! 

JEAN GOL espere impressionner f opinion publique de sa capacite a nous defendre. A part 
certaines infonnations politiques ainsi habilement recoltees, le resultat est nul. La reponse des 
C.C.C. ne se fait pas attendre : deux polynomes de l’OTAN sont dynamites le 26 novembre, et 
le 11 decembre, six attentats, tous reussis, frappent l’oleoduc militaire de l’OTAN. Ces 
attentats relegueront au second plan la note tendre de l’annee, le mariage de notre jolie 
princesse ASTRID, fille des PRINCES de LIEGE avec l’ARCHIDUC LORENZ 
D’AUTRICHE. 



Le pouvoir occulte qui cherche ma perte doit penser : 

« Plus on veut marginaliser ce BULTOT et plus il resiste et plus il frappe fort! » 

Quel est le point faible de BULTOT ??? 

DORAO est a nouveau sollicite ! 

La reussite dans le tir me rend d’humeur tres agreable en decembre 1984. Bien-sur, il y a le 
probleme du bateau, mais a coeur vaillant rien d'impossible. La jeune federation compte deja 
150 membres et nous avons en cela largement depasse la BPSA. De plus, les contacts deja 
etablis devraient concretiser l’adhesion de deux cent membres en plus au debut 1985. 

Au Reveillon de Noel, j'aurai la surprise d’etre invite au restaurant le MACON par FREDDY 
GODEFROID. Il est heureux et libre. Nous devisons joyeusement pendant le reveillon et je 
me ramasse meme une joyeuse cuite. En face de moi, son ami de longue date, toujours 
souriant et affable : LEOPOLD VAN ESBROEK. 

L'annee 1984 se termine sur la promesse d’une riche annee 1985. A minuit, nous trinquons a 
un avenir meilleur. En quittant le MACON, je remarque le fer a cheval cloue au-dessus du 
bar. J'y vois un bon presage !! Et pourtant, 1985 est l’annee de la terreur et de la barbarie. 

Monsieur JEAN GOL est toujours ministre de la justice. Le ler mai, un manque de 
synchronisation entre la gendannerie et les pompiers provoque la mort de deux de ceux-ci 
dans un attentat revendique par les C.C.C. Fin min. Monsieur Jean GOL demissionne a la 
suite du drame du Heysel (Des hooligans anglais attaquent des supporters italiens dans ce 
stade en 1985. Le bilan est tres lourd : 30 morts !). Sa conscience lui interdit de sieger avec 
Monsieur NOTHOMB, Ministre de l'interieur responsable de la securite du stade... Apres 
cette attitude ecoeurante, Jean GOL, daignera reprendre sa place de ministre de la justice. En 
septembre et octobre, malgre la haute protection de GOL, et de « sa police efficace », les 
tueurs fous du Brabant Wallon vont encore tuer. Des victimes tombent sur les parkings des 
super-marches de Braine-L'Alleud et d’Overijse. Des agents trouvent la mort, foudroyes par la 
riot gun des crapules... 

Jean GOL ne demissionne pas... sa conscience semble cette fois moins aigue !!! 

TITRE EN GRAS 


Au debut de cette annee qui s'annonce prometteuse, Axel van RYSEL, le mari Claudine, vient 
me demander un bien etrange service. Il est sans einploi et ne peut payer de pension 
alimentaire pour son fils. Il vit separe de sa femme et ne survit que par un cachet offert par 
une radio libre. Il m’explique que dans le cadre d’echange culturel avec une radio libre 
espagnole, il pourrait leur vendre une vingtaine de video-recorders s'il parvient a obtenir un 
prix concurrentiel. Je l’envoie chez le foumisseur de la prison en radio-portatives pour 
detenus. Mais les prix proposes sont encore trop hauts. Il me demande alors carrement si je ne 
connais personne qui pourrait lui en fournir du modele « tombees du camion », autrement 
dit... volees ! Le probleme est delicat vu mes fonctions. Neanmoins, je decide de l'aider apres 
qu'il m’eut promis qu'une partie des benefices iraient a Claudine. Je le mets aussi directement 
en garde : mon role consistera uniquement a le mettre en contact avec un receleur, le reste est 
SON affaire. 

Je pense done tout naturellement a VAN ESBROEK et par l'intermediaire d’une assistante 
sociale qui detient son adresse, je reprends contact avec lui. A notre premier entretien, il se 



montre directement d’accord et semble meme n’avoir aucun probleme en ce qui conceme 
quantite, modele, marque, etc. Je reunirai done chez moi VAN RYSEL et VAN ESBROEK 
a fin qu'ils puissent se rencontrer. Its discuteront sans que j'intervienne et aboutiront a un 
accord. Tout le monde se quitte, mon intervention est done tenninee ! Cependant, un soir vers 
minuit, VAN ESBROEK me telephone pour m demander l’adresse de VAN RYSEL car il doit 
lui fournir la marchandise le soir meme. Ne connaissant pas moi-meme le nom de la rue mais 
comine je connais le chemin, je me propose de lui indiquer la voie. Rendez-vous est pris 
devant un etablissement bien connu de tous : le cimetiere d'Evere. J'y arrive le premier. Un 
cimetiere, la nuit, en hiver, c'est vraiment sinistre ! Je m’en veux de m'etre laisse embarque 
dans cette galere. L’hiver, la nuit et le cimetiere ont serieusement decolore mon visage. En 
arrivant a minuit accompagne de son complice DOMINIQUE SALESSE, VAN ESBROEK 
m’acheve par ce mensonge : 

« Je viens tout juste d’aller voler ces videos !! » 

En fait, l’enquete prouvera qu’il a bien vole ces videos mais comine le vol a eu lieu a cinq 
heures du matin, il ne pouvait done s’agir de la meme nuit. Me rendant compte du petrin dans 
lequel je me suis betement jete, je debarque livide au domicile de VAN RYSEL. En dix 
minutes, les deux comparses vont decharger leur camionnette, encaisser l’argent de VAN 
RYSEL et disparaitre. Axel est content, et moi aussi, que cette affaire soit tenninee et je rentre 
chez moi. 

Le sommeil sera difficile a venir. A la fois je venais d’assister a une operation de truand avec 
le cote excitant de la chose et en meme temps, je me rendais compte du risque encouru et 
tellement plus important que le benefice retire, c’est-a-dire...rien !!! 

Je m’endors done sur ces sentiments troubles et moroses. Quelques jours plus tard, Axel me 
telephone. Il a appris que j’ai de gros ennuis techniques a ma voiture et il se propose de ma la 
reparer pour un prix modique vu le plaisir que je lui ai rendu. Et effectivement, il se 
presentera a la prison pour y reparer mon Audi 100. Cette reparation demande plusieurs jours. 
Au lendemain de sa premiere prestation, Axel se presente a la porte de mon domicile avec une 
boite en carton. Il faut savoir que pour acceder a mon domicile, on doit obligatoirement passer 
la porte principale gardee par deux surveillants et ainsi acceder a la cour d’honneur de la 
prison. La porte de mon domicile se trouve directement a droite du sas d’entree. A ma grande 
surprise, Axel deballe une video dans mon salon et m’explique son probleme. Il a bien 
revendu les differentes video-recorder mais il lui reste un modele qui ne ressort pas du 
systeme VHS. Il me demande done de l’aider a trouver des amateurs pour cette video. Et je 
vais commettre ma seconde grosse erreur ! Comine il est pret a la solder pour le prix de 10 ou 
15 mille francs, je contacte rapidement quelques amis en les avertissant de l’origine du video. 
Personne ne sera interesse, non a cause de l’origine delictueuse de l'appareil, mais par la 
difficulty de trouver des cassettes qui ne soient pas du systeme VHS. Au soir, Axel reprendra 
son appareil. 

Antoine DELSAUT me demande cependant de lui rendre visite. Antoine est un militaire beige 
retraite. Avec son epouse, il partage son temps entre le tir (il fut membre de mon club) et la 
collecte de menus renseignements pour la Surete de l’Etat. Le couple ecume en effet les 
differents meetings politiques d’extreme gauche et note le nom des assistants ainsi que le 
numero des plaques de voitures. Ils sont d’un abord tres sympathique et nous soinmes devenus 
amis en 1982. De par certaines relations secretes qu'il possede, il m’etonnera de detenir une 
mitraillette UZI enregistree comine pistolet semi-automatique !!! J'utiliserai d’ailleurs cette 
derniere arme lors de la demonstration Defense Security de OTT a Evere. Arrive a son 
domicile, je suis surpris d’entendre formuler par Antoine une demande pour des videos VHS ! 
En fait, surpris et pas surpris... Les autres amis n’ayant absolument pas refute l'offre pour des 



raisons morales mais bien pratiques ! II m’explique qu'il souhaite ces videos pour ses fils et 
lui-meme et que de toutes facons, il compte les installer dans ses appartements en Espagne. 
Antoine en desire trois exemplaires. Renseignements pris aupres de VAN ESBROEK, il lui en 
reste encore ’de stock' !!! 

Rendez-vous special pris devant le domicile de DELSAUT, ou VAN ESBROEK laisser son 
vehicule devant l'immeuble. Antoine descendra, dechargera les appareils et laissera une 
enveloppe avec l’argent dans la boite a gants. VAN ESBROEK surveillera la scene a distance 
et recuperera ainsi son vehicule. Je n’ai touche aucun centime dans cette affaire et les 
protagonistes de cet episode « video-recorder » vont tous me nuire dans les mois a venir. A 
ma decharge, je dois expliquer que j'avais contracte un profond degout des institutions 
policieres de ce pays. 

Dans l’ombre, on decide de continuer ma destruction, DORAO y met le paquet. Premiere 
mesure : je donne cours a Malines et j'ai la une magnifique section de tir pratique debutante 
mais qui promet. Alors que cette salle existe depuis des dizaines d’annees sans le moindre 
ennui, la Police judiciaire y fait deux descentes afin de controler les armes des tireurs de ma 
section et non les annes des autres tireurs. Le President de la salle s'enquiert aupres d’eux des 
motifs d’une telle verification et il lui est repondu qu'ils ne peuvent rien dire mais qu'il vaut 
mieux m'eviter afin de continuer a etre tranquille !!! La commission de la salle se reunit et je 
recois une lettre me demandant de ne plus me presente a Malines. Les tireurs sont avertis que 
j'ai des problemes avec la police et ne viennent plus tirer a Evere non plus. Le malaise se 
poursuit quand, a deux reprises, des policiers en civil viennent regarder notre entrainement. 
Pour parfaire le tout, mes tireurs d’Anvers, tout un groupe de juifs diamantaires, me signalent 
qu’ils ne peuvent plus venir a cause de certaines pressions. En deux mois, plus de federation, 
meme plus de club ! 

En ce debut de l’annee 1985, je vais trouver le ler substitut VAN DOOREN du parquet de 
Bruxelles. Il s'agit d'un jeune magistrat avec lequel j'ai toujours eu de bonnes relations car il 
est responsable au Parquet de la section des delivrances des ports d’arme. Je viens le trouver 
pour le renouvellement de mon port et lui demander, en lui expliquant la situation, si « j’avais 
commis quelque infraction ? ». Il me dit simplement qu'il sait qu'il u a des problemes entre les 
deux federations, qu'il y a eu des ragots mais qu'il ne les croit pas car ils sont tous sans 
fondement. La preuve, il me renouvelle mon port d’arme. Je ne sais evidemment pas qu’il y a 
eu deux rapports emis contre moi (la lettre anonyme et le rapport DORAO) et peut-etre 
d’autres que je ne connais pas. Je sors un peu rassure de son cabinet. Mais la faillite de ma 
federation et le fait que je n’avais toujours pas trouve d’argent pour le bateau me laisse fort 
deprime, de plus, je me bats contre un adversaire inconnu qui veut me detruire pour des 
raisons que j’ignore. 

Freddy GODEFROID que je vois de temps en temps me redonne du courage au debut du 
mois de fevrier. Il m’annonce que peut-etre il a trouve quelqu'un qui pourrait m'aider. Je 
reprends espoir, la federation de tir m'a deja pris enormement d'argent et chaque moi, je paie 
cher pour un bateau qui, hors de l’eau (alors qu'il est en acajou), se deteriore encore plus 
durant l'hiver. 

A cette epoque, je fais mienne la devise des chasseurs ardennais beiges, unite d’elite, « 
RESISTE ET MORDS ! » Reparer ce bateau a tout prix et commencer a le rentabiliser, voila 
le but que je me suis fixe. La personne envoyee par GODEFROID n'est autre que ... VAN 
ESBROEK. Il me remercie d'avoir pense a lui pour VAN RYSEL et DELSAUT. Cette 



operation lui rapporte la jolie somme de 250 OOOfrs. II se dit pret a m’aider afin de me 
renvoyer l'ascenseur !!! 

TITRE EN GRAS 


J'ai besoin d'argent, 17.000 FB, plus de 9.000 FB de location d’emplacement au port. 
J’explique a VAN ESBROEK que pour m’en sortir et rentabiliser le bateau au maximum, je 
dois disposer d'au moins 200.000 FB. Pour lui, cette somme ne pose aucun probleme mais je 
dois l’aider a la realiser. 

II m'explique alors les raisons de sa collaboration avec Freddy GODEFROID (Freddo) du 
temps ou ce dernier etait commissaire. 

VAN ESBROEK etait un indicateur officiel, c'est-a-dire que le milieu criminel le 
reconnaissait cornme tel. 

La combine se demonte comme suit: un voleur disposant d’un butin deja considerable prend 
contact avec VAN ESBROEK et lui donne les caracteristiques de l’objet vole (voiture de luxe, 
fourrures, bijoux, etc.). VAN ESBROEK alerte son ami Freddo qui recherche la designation 
du crime dans le B.C.S. (Bulletin Central du Signalement). Muni des infonnations 
necessaires, Freddo telephone a l'assurance du bien vole et I’informe qu'un indicateur est pret 
a lui rapporter le bien contre une recompense. Celle-ci est, comme par hasard, de plus ou 
moins 10%, soit la valeur accordee aux receleurs. 

La compagnie paie, et le partage s'ensuit entre le voleur, l’indic et parfois le flic. 

Moralite (sic !)de l'affaire : le voleur est content, il ne prend pas de risque en cherchant un 
receleur trop bavard ; l’indic est content, il donne un coup de fil et il touche de l'argent; le flic 
est content, son efficacite est louee par tous (ses superieurs, l'assurance, la victime et les 
truands) et il touche de l’argent; la victime du vol est contente car elle recupere son bien ; 
l’assurance est contente car ignorante de sa qualite de victime, elle ne paie que 10% de la 
valeur du bien vole. 

Bref, l’amaque parfaite !!! 

VAN ESBROEK m’explique qu'il a trouve un nouveau partenaire depuis Freddo et qu'il gagne 
ainsi enormement d’argent. De plus, il m'invitera dans un somptueux restaurant de la Grande 
Place a Bruxelles tenu par un de ses amis. 

J'y apprends que les courses truquees fleurissent aussi au palmares de VAN ESBROEK. 

Si je n’avais entendu cette conversation de mes propres oreilles, je n’aurais jamais era que ces 
magouilles existaient bel et bien en Belgique. 

Il existe cependant une lacune grave dans les explications que me donne VAN ESBROEK : 
j'apprendrai en 1986, soit bien apres mon depart au PARAGUAY, qu'il etait aussi un expert 
en hold-up. 

Il sera condamne en 1987, a vingt ans de prison, pour plusieurs hold-up et escroqueries. 

Il me cachera soigneusement cette « activite ». 

Pour l'instant, il me propose de revendre certains titres lui appartenant. Mais comme, me dit- 
il, il se mefie de la gendarmerie qui traque les indies de la police judiciaire, il me declare qu'il 
ne souhaite pas attirer l'attention sur lui en se presentant en personne au guichet d’une banque. 

En echange, il prend une part de propriete du bateau sous forme de participations aux 
benefices lors des excursions payantes. Il est pret a mettre jusqu'a 500.000 frs pour equiper le 
bateau avec tout le confort! 

La proposition me parait de suite allechante, mais une sonnette d’alarme retentit en moi en ce 
qui conceme cette vente de titres. 

Je demande conseil a Louis S. qui avait deja arrange la transaction (inaneicre du bateau. 

Louis est un homme tres gentil, toujours souriant et pret a rendre service. Il gere une petite 



agence Assubel a Jette et me semble done tout indique pour me donner de bons conseils. 
Lui-meme n'est pas competent en titres ou actions de banque, mais il m'assure qu’il possede 
des amis qui travaillent dans ce milieu et que Ton pourrait proceder a la verification de ces 
titres. 

Me voila done rassure et e’est le coeur leger que je reprends contact avec VAN ESBROEK. 

II m'invite a son domicile, rue des Deux Gares a Anderlecht. 

Une surprise speciale m’y attend ! 

VAN ESBROEK y habite avec son amie et sa fille un appartement des plus minables. 

Tout y est vieillot et use. 

Devant mon etonnement, VAN ESBROEK se met a rire ! Personne ne peut ainsi imaginer 
qu’il a de l’argent bien cache. II m’avoue meme qu’il per^oit une allocation du C.P.A.S. 
(service social) de la commune dAnderlecht. 

Assis dans un fauteuil branlant, je regarde VAN ESBROEK preparer une place sur la table. 
Le gros chat de la maison vient me renifler d’un air mefiant. 

Safari, son amie, et sa fille s’eclipsent dans la cuisine. 

II regne une legere odeur d'urine de chat assez desagreable. 

La mallette de VAN ESBROEK s’ouvre : un paquet d’obligations d’une valeur d’un million et 
demi de francs s’offre a mes yeux. J’oublie le sinistre appartement, son decor passe, ses 
chaises bancales et ce chat nauseabond, une pensee m’envahit: je vais sortir du petrin !! 

« Tiens », me dit-il en grand seigneur, « tu emportes le tout, tu le fais controler ou bon te 
semble et tu me le vends ». 

II y a beaucoup plus que convenu, mais il me dit necessiter aussi de quelques liquidites. 

II est done prevu que je lui remette la difference apres la vente des bons de caisse. 

Cest la premiere fois que je manipule une telle somine et je quitte son appartement avec le 
coeur content et inquiet a la fois. 

Des le lendemain, je me rends chez Louis afin de proceder a la vente de ces titres mais au 
prealable, je lui demande de particulierement verifier leur « honnetete » ! 

Louis m'assure qu'il met tout en oeuvre afin d’eviter tout pepin et je sors de son bureau l’esprit 
completement rassure. 

Mon bateau va enfin retoumer a l’eau ! 

Mon attente est de courte duree, Louis S. me recontacte deux ou trois jours plus tard. Ayant 
fait diligence pour me rendre service, il m’annonce que tout est parfait sauf fun ou l'autre titre 
sur lequel il y a opposition. Je lui demande avec anxiete quel type d’opposition mais il me 
repond : 

« Je ne sais pas, mais il y a des dizaines de cas possibles. De toute fa^on, si cela avait ete 
grave, on me l'aurait signale. » 

Je lui redemande les titres et vais tout remettre a VAN ESBROEK. 

Il n’a pas fair du tout affole et me rassure. Il ira voir Louis S. plus tard pour regler ce 
probleme mais qu'a cela ne tienne, il me passe le jour-meme un autre paquet d’obligations. 

Au debut, je refuse, mais comme j’ai le controle de la Banque, je ne vois pas ce que je risque ! 
Cest ce qui fera ma perte, plus tard. On me reprochera d’avoir controle, done d’avoir des 
doutes, done d’etre complice. 

Le piege tendu est vraiment diabolique. 

En remettant le nouveau paquet d’obligations, je demande a Louis de bien vouloir proceder a 
plusieurs verifications et ce en presence de VAN ESBROEK qui m’accompagne jusqu'a 
Assubel. 

Les controles prendront une semaine et Louis m'assure que les trois controles sont negatifs, 
pas une seul titre douteux. 



Je lui demande done de les mettre en vente mais voila, une semaine plus tard, ils n’etaient 
toujours pas vendus. 

VAN ESBROEK se fait menacant: il m’a con (16 un million et demi en titres et sans re 9 u, il 
accepte les controles, je lui annonce que tout est OK et il ne voit pas venir son argent. 

J'en parle a un visiteur de prison, ancien directeur general d’une tres grosse entreprise, 
actuellement en retraite. Je lui demande de m’expliquer la raison du retard de cette vente. 

Il me regarde etonne, telephone a sa banque et me conseille d'y aller de sa part. 

Je redemande les titres au banquier d'Assubel et me rends avec VAN ESBROEK a la banque 
BBL de Forest, place Saint-Denis. 

Le responsable prend les titres, paie les coupons et nous dit qu'il me telephonera des qu’il aura 
des nouvelles. 

VAN ESBROEK, agace par ces retards successifs met cependant les titres a son nom. Je 
comprendrai plus tard que rassure par les controles, il n'a plus rien a craindre. 

Je laisse neanmoins mon nom et mon adresse car VAN ESBROEK n'a pas le telephone. 

Deux jours plus tard, alors qu’entre-temps j’avais vu Freddy GODDEFROID qui m’avait aussi 
rassure sur VAN ESBROEK, ce dernier desire me voir le soir. 

J’allais avoir un des plus grands chocs de ma vie ! 

Il m’annonce froidement que les titres sont des titres voles, qu’il en a pour une quantite 
actuelle de 20 millions et que d’ici peu, il sera en possession de 200 millions de titres au 
porteur. 

Il me donne 30% si je peux faire verifier l’existence d’opposition sur ces titres. 

Comine je suis estomaque et que je ne sais vraiment pas quoi lui dire, j’ai la gorge 
completement nouee. 

Il poursuit calmement en me disant qu’avec ma fonction, on ne se mefierait pas, que j’avais 
une bonne reputation et qu’en plus, ce serait un travail facile ! 

Quand je reprends mes esprits, je lui explique qu’il a honteusement abuse et qu’il aurait du 
m’en parler et que je ne voyais pas bien comment la banque ne poserait pas de question. Pour 
terminer je lui marque mon desaccord de marcher dans de telles combines ! 

Il me dit: 

« Reflechis bien, il y a 60 millions pour toi et sans risque. La preuve, e’est qu’on va toucher 
l’argent sans probleme car les titres sont controles. » 

Je replique : 

« Et pourquoi es-tu si sur que je ne vais pas te denoncer ? » 

« Reponse tres facile », me dit-il, « premierement, je dirai que tu es complice, deuxiemement, 
je travaille avec des amis manouches (gitans) qui n’hesiteraient absolument pas a me venger ! 

» 

Sur ce, on se quitte. 

Nous soinmes le 11 mars au soir. 

Inutile de vous dire que je ne dors pas. Une nuit vraiment atroce. Je dois faire un choix. Une 
chose est rapidement decidee : je ne vais pas le denoncer, e’est me mettre dans une situation 
inextricable. 

Vous remarquerez que souvent dans la vie, le fait de n’avoir rien fait de mal mais d’etre plonge 
dans une situation sans issue vous pousse a faire des betises pour en sortir a tout prix. 

Le controle effectue par le banquier me laissait un peu d’espoir et aussi le fait que la banque 
possedait les titres depuis trois jours. 

En fait, VAN ESBROEK avait reussi son coup d’une maniere magistrale ! 



Done, je n’ai plus qu'a me retirer et a le laisser encaisser l’argent. Tous les controles sont 
negatifs, je vais me debrouiller autrement pour trouver de l'argent. 

Je dois dire cependant que l'affaire des 200 millions me tarabustait. 

Mais qui peut dire honnetement qu'il ne serait pas tente ? Oui, je sais, ceux qui les possedent 
deja, et encore... 

Je termine sur cette conclusion qui me rassure : 

Ma conscience avait resiste au tiers des 200 millions. 

Le matin du 12 mars, je me leve avec une decision bien ferine : je ne dis rien et VAN 
ESBROEK empoche tout. Point final. 

Comine par hasard, le lendemain, de bonne heure, la banque me telephone par l’intermediaire 
d'une ravissante voix feminine. Elle me declare que l’argent attend a la banque. Je demande, 
en masquant mon inquietude si tout est sans probleme : reponse affirmative. 

Sachant que VAN ESBROEK telephone tous les jours a 11 heures, je lui dis que surement il 
sera la vers 15 heures. 

Effectivement, VAN ESBROEK me telephone, je lui dis que son argent l'attend a la banque et 
qu'il peut aller le chercher sans probleme. 

Je lui declare aussi mon intention de ne pas me rendre a la banque. II se montre d’abord 
surpris, puis mefiant et ensuite franchement hostile... il craint un piege ! 

Ma parole donnee ne le rassure pas et je promets de le rencontrer vers 15 heures dans un petit 
pub en face de la banque. 

Comine je ne faisais plus de tir, j’avais pu mettre un peu d’argent de cote. 

Je decide de me rendre au magasin de trophees sportifs de LV OTT afin de lui remettre les 
11.000 FF qu’Andre PEYSSERAND, le vendeur de mon bateau m’avait prete pour mon 
retour. 

OTT devait justement se rendre au Cap d’Agde, mais devant on absence, je remets l’argent a 
Simone, son epouse. 

Je decline naturellement un recu... j'ai confiance. 

Un an plus tard, Andre me fera le reproche de na pas respecter ma parole concernant ce 
remboursement: il ne recevra jamais cet argent! Je n’aurai jamais l'occasion de reclamer des 
comptes a OTT car il est decede ! 

Apres le dejeuner, je me depeche vers la banque. 

J'arrive a 15 heures precises, pas de VAN ESBROEK ! 

15 heures 10’, pas de VAN ESBROEK ! 

Tout en buvant un cafe au comptoir, j’observe la place et mon sang se glace. 

Deux personnages d'une vingtaine d’annees, bien habilles, se faufilent maladroitement a pied 
entre les voitures afin de se dissimuler. Ils s'echangent d'ailleurs quelques signaux entre eux... 
Pas de problemes : des flics !!! 

Dans le pub, tout est tranquille, meme ce type de quarante ans qui joue tres mal au flipper... 
BORSU de la police judiciaire que je ne connaissais pas. 

Je sens que le drame va se jouer ! 

Je sors du pub, BORSU me poursuit et m’arrete. 

Les deux jeunes se rappliquent et me mettent dans une polo bleue. BORSU sort de la banque 
avec le responsable des titres et un employe qui, d’un signe affirmatif, m'identifient! 

Nous partons a toute vitesse jusqu'au Palais de justice. 



Arrete..., j’etais arrete !!! 


Les membres de la P.J. ne me disent rien pendant le trajet qui me conduit de Uccle jusqu'au 
Palais de justice. 

Malgre mon emoi, je m’efforce a reflechir le plus intensement possible. 

Les titres ont ete verifies, je me suis presente sous ma veritable identite, VAN ESBROEK n’a 
pas interet a me vendre, sinon il ne touche rien (ou alors, il y a peut-etre un immense piege 
pour lequel il a d'autres avantages ?). 

Pourquoi ne pas m'avoir arrete plus tot ? 

A premiere vue, cette affaire parait etre une simple escroquerie et il me faudra attendre 1989 
pour connaitre (presque) tous les tenants et aboutissants de l'immense piege qui m’a ete tendu. 
A notre arrivee au Palais de justice, je suis conduit directement dans les locaux de la police 
judiciaire. On me laisse encore seul pendant plus ou moins 15 minutes qui me permettent 
encore de reflechir mais sans trouver helas de solution. 

Apres ce laps de temps, BORSU rentre tout joyeux dans le bureau et me dit: 

« Et bien Monsieur BULTOT, pour un beau flag (flagrant delit en argot de policier), c'est un 
beau flag ! Votre complice est passe aux aveux complets et vous etes pris au piege ! 

Il s'installe alors a sa machine a ecrire et tres sur de lui, il me demande ma version des faits. 
Nous allons etre souvent interrompu par differents flics de la P.J. qui viennent dans le bureau 
pour des raisons diverses. 

En fait, ils viennent pour voir le poisson qu'ils croient avoir ferre. 

Persuade que je vais etre arrete, j’omets volontairement de parler du banquier dASSUBEL, 
Louis S., afin de ne pas le mettre, comrne moi, dans un petrin impossible. Je ne parle pas non 
plus de la declaration de la veille de VAN ESBROEK, me declarant la provenance des titres. 
BORSU a fair de beaucoup s'amuser de ma declaration. Que cache-t-il done ? 

Lorsque ma declaration est terminee, il declare faussement etre navre pour moi mais : 

« Vos declarations ne concordent absolument pas avec celles de VAN ESBROEK ! » 

En effet, il me declare que VAN ESBROEK m’accuse de connaitre depuis le debut, l’origine 
delictueuse des titres et que je travaille dans des tas de « magouilles » avec des tas de truands. 
Il ajoute meme que je suis un veritable expert en conseil de banditisme mais ne cite aucun 
truand pour lequel je ... travaillerais. 

Pour le coup, je suis solidement estomaque ! 

BORSU se montre patemaliste : 

« Avouez et vous serez soulage ! » 

Et ce, avec un tel accent de sincerite qu’il aurait converti une tribu de cannibales au 
vegetarisme ! 

Cette hypocrisie, loin de m’ebranler, me renforce davantage. Je demande a etre confronts et 
ma proposition lui va justement a ravir. 

En me voyant arriver, VAN ESBROEK me jette un coup d’oeil furieux. Il ne manque vraiment 
pas de culot apres les declarations qu'il a faites contre moi, alors que moi je n’ai rien dit qui 
soit de nature a lui nuire ! 

Il me faut peu de temps pour comprendre que la P.J. lui a fait croire que je l'avais denonce. 
D'ou ses declarations completement absurdes de mechancete. 

Devant BORSU, je lui declare : 

« Mais enfin Pol, pourquoi t'acharnes-tu contre moi qui suis arrete coniine toi ? » 

D'abord incredule, il s'apercoit ensuite qu'on s'est joue de lui. 



Brusquement, il declare a BORSU qu'il faut acter immediatement qu'il retire ce qu'il vient de 
dire contre moi. 

Je jubile tandis que BORSU fulmine. II arrete de taper a la machine et malgre mes 
protestations, il interrompt notre confrontation. 

Un jeune et arrogant commissaire, BEAUDESSON, flanque d’un immense adjoint 
m’embarquent et nous partons vers 17 heures a la prison pour faire une perquisition a mon 
domicile de directeur. 

Perquisition vraiment de pure forme, ils fouillent mon bureau et surtout ma chambre. Ils ne 
trouvent rien, fatalement puisqu’il n'y a rien a trouver ! 

Ils ne se priveront pas d’emettre quelques remarques ameres sur le desordre qui regne chez 
moi ! 

Retour au Palais de justice ou on me laisse seul. 

Entre-temps, VAN ESBROEK est travaille par l’equipe de BORSU. Moi, on me laisse 
tranquille jusqu'au moment ou, vers 18 heures 30, ils s'apercoivcnt que je suis anne ! 

Je rappelle que j’ai un port d’arme permanent octroye par Monsieur le Procureur du Roi. 

Ils se mettent a cinq pour me desanner !!! 

Au soir, au grand dam de BORSU, le procureur du Roi decide de ne pas m'envoyer a l’amigo 
mais de me garder dans les locaux de la P.J. 

BORSU, pas tres content, et un de ses homines vont done passer la nuit avec moi. BORSU 
fait venir un lit de camp qu'il me laissera jusqu'a trois heures du matin, par apres, il se 
l’octroiera. 

Avant de se coucher, il aura encore avec moi une conversation a batons rompus. « J'etais mal 
embarque, il y avait un flag : je me dirigeais vers la banque ». Il s'etonne de mon sourire. Je le 
lui explique : 

« Meme si je me dirigeais vers la banque pour toucher de l’argent mais que je ne l’ai pas 
touche, il s'agit d’une tentative de recel et d’escroquerie et ces inculpations n’existent pas dans 
le code penal. » 

De plus, fort de mon innocence, j'ai decide de na pas me laisser intimider et de rendre coup 
pour coup. 

Le lendemain matin, on me remet seul dans un autre bureau, voisin de celui du commissaire 
MARNETTE. 

C'est ainsi que pendant une demi-heure, j’entends les coups pleuvoir sur un negre qui n’arrete 
pas de crier qu'il ne sait rien. 

Vers midi, un flic vient me dire que si j'ai de l'argent, on peut m’apporter a manger. Le 
procede me surprend, mais il fait dire que je n'ai vraiment pas faim ! 

Treize heures, toujours pas de substitut ni de juge ! 

Quatorze heures, rien ! 

Dans une heure, ils doivent me liberer. En effet, en Belgique, on ne peut priver un individu de 
sa liberte plus de 24 heures sans un mandat d’arret. 

Mais que se passe-t-il done ? 

Les demieres minutes sont eprouvantes. C'est dit, a 15 heures, je me mettrai a tambouriner sur 
la porte ! 

Quatorze heures trente, rien, toujours rien ! 

Les minutes m’etouffent, une angoisse terrible m’etreint la gorge. J'ecoute dans tous les sens 
du couloir. Rien de special, pas d’animation, rien ! 

Quatorze heures cinquante, on vient me chercher afin de me conduire devant le juge 
d’instruction, Madame LYNA. 



Un lourd pressentiment m’envahit: Madame LYNA est l'epouse de Monsieur CHOME, haut 
dignitaire du parti communiste en Belgique. 

Comme par hasard, dans ce petit pays de justice, Madame LYNA s'occupe de tous les cas de 
militant d’extreme droite. 

Je suis done introduit chez Madame le Juge. 

Le ton est tout de suite severe : 

« VAN ESBROEK vous accuse d'etre son complice dans une affaire d’escroquerie aux titres 
de banque ! » 

Je l’interromps aussitot: 

« Mais, Madame, VAN ESBROEK s'est retracte hier et a declare lors de la confrontation qu'il 
retirait ses allegations contre moi ! » 

Elle me regarde surprise : 

« VAN ESBROEK vous a encore accuse il n'y a pas une heure dans mon cabinet ! » 

Alors la, bravo ! 

L'equipe d’interrogatoire avait bien fonctionne ! 

Je parle de la confrontation, mais comme par hasard, Madame LYNA n’en a pas entendu 
parler. 

Elle fait done mander VAN ESBROEK qui est amene menottes aux poings. En me voyant 
avec le meme costume que la veille et tout firipe cette fois, il marque vraiment la surprise de 
me voir. 

« Alors, qu'avez-vous a dire devant VAN ESBROEK, qu’il ment ? » 

« Oui, Madame, mais je crois savoir pourquoi. Deja hier, on lui a fait croire que c'etait moi 
qui l'avais vendu et je vois qu'on lui a remis cette idee dans l'esprit. » 

Surprise du juge : 

« VAN ESBROEK, je peux vous assurer que Monsieur BULTOT n’est pour rien dans votre 
arrestation ! Est-il ou non votre complice ? » 

VAN ESBROEK insiste : 

« Monsieur BULTOT ne m’a pas denonce ? » 

Reponse categorique dujuge : 

« BULTOT ne vous a pas denonce mais est-il ou non votre complice et est-il aussi mele a 
d’innombrables magouilles, comme vous le pretendiez ? » 

VAN ESBROEK me regarde d’un air depite puis declare : 

« Madame, je veux refaire toute ma declaration, la police judiciaire m'avait declare que 
BULTOT m'avait fait tomber dans un piege ! » 

Sans se demonter, elle fait sortir VAN ESBROEK et commende a me faire la morale. 
Monsieur BULTOT, en tant que directeur de prison, vous n’avez pas a frequenter les truands ! 
(sic quand on sait que l'Etat me paie pour ce travail et qu'en principe, ils doivent etre meilleurs 
apres la prison que pendant!). 

Elle decide toute fois de garder l’inculpation de recel malgre la declaration de VAN 
ESBROEK et me confisquc mon arme alors que celle-ci ne rentre en rien dans le probleme 
qui precede. Ce detail se revelera tres important et servira plus tard a ma deuxieme arrestation 
en novembre. 

Je suis done libre et je redescends dans les locaux de la police judiciaire pour recuperer mes 
papiers d’identite. 

La joie intense qui rayonnait sur les visages de ces braves flics faisait chaud au coeur. De vrais 
lions affames ! 

Il etait evident qu’ils n’allaient pas abandonner. Deux fois, ils avaient reussi a tourner l’esprit 
pas tres malin de VAN ESBROEK, ils allerent done essayer encore. 



En sortant, j'ai droit a un petit laius de BORSU : 

« Quand on est fonctionnaire, on ne frequente pas des anciens truands. Si un de mes homines 
le faisait, je le casserais aussitot. C'est tout a fait incompatible avec la profession. » 

II se gardait bien de me dire qu'il etait l’amant d'une femme dont le fils, surnomme « le grand 
Philippe », etait en detention preventive pour l’incendie criminel d'une maison habitee ! 

Se servant des apostilles du substitut du procureur du Roi, BORSU sortait regulierement 
Philippe de la prison de Forest et ce afin d’aller manger ensemble. 

En novembre 1985, je l’ai d’ailleurs rencontre en compagnie du « grand Philippe » sur la place 
Keym de Watermael-Boisfort. 

Mais par apres, j’apprendrai bien sur ce « tres moral » Monsieur BORSU. 

La meme annee, en effet, la direction de la prison de Forest avertissait le Parquet du procureur 
du Roi, qu'un officier de la police judiciaire sortait regulierement une prostituee avec un 
bulletin d’extraction signe du Procureur du Roi. 

Cette fille rentrait tard a l'etablissement avec des kilos de pralines et de chocolat. BORSU fut 
remis au pas ! 

Aussi, bien plus tard, au Paraguay, quand je rencontrerai un vieux sorcier indien, je lui 
demanderai, plus par boutade que serieusement, s'il pouvait faire du mal a distance. II hesitera 
mais 1000 guaranis (valeur 30 FB), somine enorme pour lui, achevera de la convaincre. 

II me repondra affirmativement. II me demandera le nom et je lui inscrirai celui de notre brave 
Tartuffe. Puis, j'oublierai completement le fait. 

Quand Rene HAQUIN viendra me voir en 1987, je lui demanderai ce que devenaient les uns 
et les autres. C'est ainsi que j’apprendrai que BORSU avait eu un terrible accident de voiture 
la nuit... il se serait endonni... et qu'il etait handicape a vie ! Hasard ou vaudou ? A vous de 
choisir ! 

TITRE EN GRAS 


Revenons au 17 mars 1985 a 16 heures. 

Je sors du palais de justice et je rentre a pied jusqu'a mon domicile. Je marche coniine un 
veritable automate, mon corps ressent le contrecoup de cette terrible epreuve. 

J'apprendrai plus tard par un gendanne que Madame LYNA et Monsieur POELMAN, le 
procureur du Roi de Bruxelles avaient tres longuement discute sur mon sort. 

Ce que la police appelle un « flag » n’en est absolument pas un. Le fait d'etre pres de la 
banque n’indique en rien une volonte de commettre une escroquerie. 

J'apprendrai aussi plus tard que Dominique SALES SE, complice de VAN ESBROEK dans 
l'affaire des videos, a assiste a mon arrestation, il est planque dans un autre cafe de la place. 

Je rentre a la maison ou l'on devine l'emoi des miens. J'ai a peine retire mon veston que le 
telephone sonne : la presse... il ne manquait plus que cela ! Un inspecteur de la P.J. avait 
alerte les medias en vue d’un bon « scoop » sur l’arrestation d’un directeur de prison, scoop qui 
pouvait etre juteux puise « l'affaire LEROY (premier substitut du procureur du Roi) »venait 
de debuter. 

Le journaliste qui me telephone se revele etre un tres chic type. 

Il me dit qu'il a appris mon arrestation et ma liberation et que suite a cette derniere, il veut 
bien ne rien ecrire pour ne pas me nuire. 

En revanche que je lui explique toute l'histoire au cas ou d’autres journaux sortiraient l'affaire. 
Je le sens sincere et c'est ainsi que Joseph HUYNEN, de « LA LANTERNE » recoil la 
version officielle des faits. Il me signale que Rene HAQUIN est aussi au courant mais que vu 
les faits, il n’ecrira rien de facon a ne pas me nuire. Cette delicatesse vaudra a Rene HAQUIN 



d’etre le premier journaliste a venir me voir au Paraguay. 

Et, effectivement, rien ne sort dans la presse le lendemain. 

Le 18 mars, je me presente a la premiere heure dans le bureau de WILLE. Je m'attends a une 
crise epouvantable, que dis-je apocalyptique ! Rien de tout cela. II reste tres calme et feint la 
surprise. Or, j’apprendrai plus tard qu'il savait deja, par la direction generale, ce qui s'etait 
passe. 

La direction generale, au vu du manque de charge contre moi, me laisse au travail pendant 15 
jours encore pour me suspendre le ...29 mars !!! 

Mon cas embarrasse visiblement certaines autorites judiciaires. II doit y avoir de fameuses 
empoignades a mon sujet. J'ai toujours agi a visage decouvert et la technique minable de la 
P.J. consistant a faire croire a VAN ESBROEK que je l'ai piege n’a reussi qu'a lui faire 
produire cinq declaration contradictoires en 24 heures. 

Voila BULTOT libre et la P.J. depitee agitant un flag cornme une pauvre baudruche 
degonflee. 

La version officielle de mon arrestation relatee dans le dossier se revele parfaitement 
mensongere : 

« VAN ESBROEK entrera le premier dans la banque et se fait immediatement arreter ! A15 
heures, un employe de la banque qui prenait un cafe dans le pub ou je me trouve, rente dare- 
dare a la banque pour prevenir de la presence du « complice » au pub voisin. Les policiers s'y 
precipitent et constatent avec horreur qu'il s'agit d’un directeur de prison ». 

Les mensonges de cette version officielle sont parfaitement demontables. 

Premierement, je m’etais presente a la banque avec mon identite et mon numero de telephone. 
La banque elle-meme m’avait prevenue de la vente des titres. J'etais done parfaitement 
identifie. 

Deuxiemement, lorsque je suis entre dans le pub, BORSU s'y trouvait deja et m'y attendait. 
Pour conclure, qu'aurait fait un employe de banque dans un pub a 15 heures en lieu et place de 
son travail ?!!! 

Alors pourquoi ces mensonges ? 

Pourquoi m’avoir laisse en fonction jusqu'au 29 mars ? 

A l’epoque, plusieurs reponses me viennent a l’esprit. 

1. Je fus suspendu le lendemain d'un article de Gilbert DUPONT de « LA DERNIERE 
HEURE », en date du 28-03 qui relatait un resume des faits, mais sans me citer. II etait suivi 
en cela par la presse flamande : « HET LAATSTE NIEUWS » et « NIEUWSBLAD ». Dans « 
LA DERNIERE HEURE », l’article me concernant etait juste en-dessous d’un article sur 
Claude LEROY. 

2. La police judiciaire devait faire d’enormes pressions pour me degommer. 

3. Un fait nouveau ? 

Reponse officielle : Monsieur Jean GOL a declare, devant la Chambre des Representants, 
qu’il m’avait suspendu des qu'il avait appris mon inculpation... or il la connaissait depuis le 
premier jour ?!?! 

Le jour de ma suspension, Monsieur PERAIN, qui remplacait AWILLE DADA en son 
absence, m’appelle dans son bureau. Avec tact et une gentillesse infinie, il me met au courant 
de ma suspension, ce qui impliquait de lui remettre tous les dossiers en ma possession et mes 



clefs. II m’etait aussi fait defense de penetrer dans la prison proprement dite. 

Les lannes me montent aux yeux. Monsieur PERAIN ne dit rien mais dans son regard se lit 
une grande detresse. II est aime par les detenus et les surveillants, mais tout juste respecte par 
AWILLE DADA. 

Je refais rapidement un tour des bureaux et je pressens que c’est la demiere fois. Je mets de 
l’ordre dans mon bureau et le coeur completement dechire, je me presente a nouveau chez 
Monsieur PERAIN avec mes differentes clefs. Je peux a peine parler. Ma langue a triple de 
volume. 

Je depose le tout sur son bureau. II est lui-meme tres emotionne ! II sait que je suis un fonceur 
et une grande gueule mais pas un salopard. Les larmes me brulent les yeux sans pour autant 
couler. II ne dit rien. Son silence est un appui terrible. Dans ces moments-la, les paroles sont 
vides de sens. Apres un temps qui me parut enonne mais qui en fait devait etre tres court, je 
lui dis simplement: 

« Je m’en vais. Merci ». 

Nos regards se croisent! La situation est insoutenable, il faut que je parle avant de pleurer ou 
de hurler. Monsieur PERAIN me tend la main, son regard m'exprime toute sa sympathie et 
c'est avec l'estime de cet homme que j'ai toujours mis des lieues au-dessus des autres, que je 
sors de ce bureau et du bloc cellulaire pour ne plus jamais y revenir. 

Je rentre le pas lourd vers mon domicile. II pleut, il fait gris ! 

Dans mon salon, je regarde par la fenetre grillagee les gens qui s'encourent pour ne pas se 
mouiller. Mon regard se pose sur les gerbes d’eau lancees par les voitures roulant dans les 
flaques. Je regarde tout ce petit monde qui me parait soudain derisoire et stupide. Je reste 
immobile, comine gele a cette fenetre, puis lentement mes yeux s’humectent et pendant de 
longues minutes mes lannes vont bruler mes joues sans le moindre sanglot. Je ressens une 
tristesse infinie et je ne prends meme pas la peine de m’essuyer le visage. Devant cette 
grisaille de temps, reflet de mon spleen, je marmonne cette phrase de Jacques BREL : 

« Avec un ciel si gris qu'un canal s'est pendu ! » 

Le lendemain, revenu de mon emotion, je decide d’investiguer a mon tour pour savoir ce qui 
s'est reellement passe. 

Premier controle : Louis S., d’ASSUBEL. 

Quand je le rencontre, je trouve en face de moi un homme verdatre. Il se voit deja au fond 
d'un cachot obscur et soumis a l’opprobre generale. Je le rassure comine je peux en lui disant 
que je n’ai pas parle de lui mais qu'il me devoile toute la verite ; A-t-il oui ou non fait proceder 
a tous les controles demandes ? Pour me prouver sa bonne foi, il me met en contact avec un 
des agents de change qui verifia les differents titres un a un ! Pas de doute, il s'agit d’un 
enonne piege ! 

Il s'averera plus tard que ces bons avaient ete voles le 25 janvier 1985 au cure de Wieze, 
Monsieur PAELINKS. Jusqu'au debut du mois de mars, ils ne seront pas opposables, mais 
comine par hasard, ils seront frappes d’opposition le lendemain de leur mise en vente a la 
place Saint Denis !!!! 

Je rassure (sic) l'assureur et de cominun accord on decide, en cas d’interrogatoire, de nier toute 
sa participation. On me le reprochera, mais une certaine honnetete m’empecherait de mettre 
dans un bourbier impossible un respectable pere de famille sans tache. 

Autre personne que je contacte d'urgence : Freddy GODEFROID. Il etait au courant de la 
transaction sur les bons de caisse et en plus, c'est toujours l’ami de VAN ESBROEK. Freddo 
vient directement au rendez-vous accompagne par la compagne de VAN ESBROEK. En effet, 



Dominique SALESSE, grand ami et complice de VAN ESBROEK, etait aussi en planque 
dans un bistrot de la place Saint Denis. II a done vu l'arrestation de son ami vers 14 heures 40 
et la mienne 20 minutes plus tard. II peut temoigner de ma non-responsabilite dans 
l’arrestation de VAN ESBROEK. La compagne de VAN ESBROEK pouvait done bien 
confirmer a « Dikke Leopold » que je ne l’avais absolument pas vendu. 

Et effectivement, pendant 15 jours, VAN ESBROEK ne change pas de version malgre les tres 
nombreux interrogatoires qu’il subit! 

Le 14 mars, done le jour de ma liberation, un fait se passe a la prison, qui echappe a mon 
attention puisque je n'y travaille pas ce jour-la. Philippe DE STAERCKE, alias Johnny, ne 
rentre pas le soir a la prison. II purge une fin de peine en semi liberte, c'est-a-dire qu'il 
travaille la journee a l'exterieur de la prison et le soir, il y rentre donnir. II s'agit la d’un 
systeme accorde soit en fin de peine, soit pour des peines de moins de six mois. 

Plus tard, VAN ESBROEK « donnera » la famille DE STAERCKE, pour le vol des titres, ses 
fameux « amis » manouches, et essayera a la prison de faire courir le bruit que je suis le 
delateur. Toutes les qualites, ce brave VAN ESBROEK ! 

Une des premieres mesures importantes que je prends est de me presenter a un avocat. Je 
n'hesite pas, je prends le meilleur : Maitre Guy FRANCOIS. Ce dernier est sans conteste le 
plus grand avocat de Bruxelles. Toujours tire a quatre epingles et volontiers coquet, Maitre 
FRANCOIS se revele cependant un defenseur redoutable pour le Parquet. Pas d’effets de 
manches, il demontre, il demonte, il disseque les charges. II ne releve pas de la classe des 
proceduriers, mais il possede un esprit d’analyse etonnant. Il synthetisera plus tard toute mon 
aventure en deux heures. M’ayant connu comine directeur, et selon ses dires, apprecie pour 
mon action sociale, Maitre FRANCOIS se chargera de ma defense et obtiendra en finale un 
resultat eblouissant. 

Pour l’instant, je me trouve done en vacances forcees et je vais les mettre a profit pour 
travailler au bateau. Je me rends regulierement au port afin de le poncer et de lui mettre une 
couche d’anti-fooling (contre les algues et les mollusques). Cette operation se revelera longue 
car le bateau, hors de l’eau, est encore plus enorme. Je prends done mon mal en patience. 

Rien de special ne va se produire jusqu'au 7 mai, si ce n’est la hargne que va deployer 
AWILLE DAD A pour me creer un maximum de problemes. 

Premiere mesure : il m’interdit de passer par la porte principale. Je peux seulement rentrer et 
sortir par la petite porte de la tourelle de mon jardin. 

Deuxieme mesure : il agrandit cette mesure a Arlette et a mon fils. Je prends immediatement 
contact avec Monsieur DE RIDDER, directeur general des prisons, pour lui signaler que 
dorenavant, je suis oblige de donner la cle de la prison a mon fils qui a l’epoque avait 9 ans. Je 
lui explique qu'a partir du moment ou on met trois surveillants a la porte principale et qu'un 
garcon de neuf ans peut se promener avec une cle qui donne acces directement a l’arriere du 
sas de securite, cette mesure est particulierement dangereuse. Je dois me disputer avec 
Monsieur DE RIDDER qui finit par ceder au bon sens de ma demande. Ainsi done, je resterai 
le seul a ne pas pouvoir franchir cette porte principale. 

Le 3 mai 1985, la pluie celebre mon trente-quatrieme anniversaire ! 

En fonction des problemes que je traverse, beaucoup d’amis viennent me voir et nous faisons 
une petite fete a la maison ou chacun essaye de me reconforter et de m’encourager a continuer 
la lutte. Tous etaient entres par la porte principale. La petite soiree se termine vers 11 heures 



30, mais au moment de partir, le surveillant, pretextant un ordre de Monsieur AWILLE 
interdit de sortir par la porte principale : dorenavant, elle est aussi interdite a mes amis. Cette 
mesure est d'autant plus revoltante que l'electricite ne fonctionne plus dans mon jardin et 
qu'un sender de plus ou moins 50 m separe la porte de mon salon de la porte du jardin 
donnant sur la rue. 

II faut savoir aussi que depuis plusieurs semaines, AWILLE DADA refusait categoriquement 
que soit entretenu mon jardin et meme que les poubelles soient enlevees par des detenus 
accompagnes de surveillants, procedure normale pour tous les directeurs habitant l’enceinte de 
la prison. AWILLE DADA avait deja, en quelque sorte, commence un systeme 
d’incarceration ! 

A la fin de la fete done, suite a l’interdiction de sortir par la porte principale et a cause du 
probleme d’obscurite, de desordre et de salete que presentait mon jardin, je telephone a 
AWILLE DADA et lui demande de tout de meme laisser sortir une de mes invitees : c'est une 
jeune maman accompagne de son bebe de deux semaines. AWILLE DADA me raccroche au 
nez, ce qu'il fait d'ailleurs frequemment, meme si son interlocuteur est le directeur general des 
prisons en personne. Lurieux, je lui telephone, en insistant encore pour la jeune maman, mais 
rien n'y fait. 

Le lendemain ou le surlendemain, Louis S., l'agent dASSUBEL vient me voir. II dissimule 
difficilement sa peur. II me signale que la police judiciaire est descendue chez lui avec VAN 
ESBROEK et que celui-ci l’a denonce cornme etant un de mes amis qui avait verifie les titres. 
II m'explique qu'il a tout nie en bloc et que la police judiciaire est repartie avec VAN 
ESBROEK, sans plus. Je suis etonne de voir le revirement de la situation de VAN ESBROEK 
mais, par apres, j’apprendrai que celui-ci faisait l’objet de pressions assez fortes. La presse 
s'est un instant focalisee sur moi, mais le vrai danger est autre part: « Tout bouge a la 
federation de tir pratique ! » 

DORAO, tres actif au sein du comite, demandera a la reunion du 13.03.85 : 

« A l'avenir et ce afin de ne pas donner des arguments a nos eventuels detracteurs, 
n’organisons plus de match 'trop pousse' vers le style 'armee 6 juin 1944’ et autre offensive des 
Ardennes ». 

Neanmoins, le but reel de ce tir est officiellement proclame dans la resolution numero 37 en 
date du 26.11.84, de JEAN-PIERRE DENIS, President mondial: ”If the shooter has to shoot a 
practical course of fire, witch means a course of fire within what has happened or what could 
happened in reality, this is truly within the essence of international practical shooting 
confederation”. 

TRADUCTION : SI LE TIREUR DOIT EFFECTUER UN PARCOURS DE TIR 
PRATIQUE, CELUI-CI DOIT COMPRENDRE UNE SITUATION QUI EST ARRIVEE OU 
QUI POURRAIT ARRIVER EN REALITE, CECI EST L'ESSENCE MEME DE L’lPSC. 

Le tireur doit done etre mis dans des conditions pouvant arriver reellement. La question 
importante est done : Pourquoi JEAN-PIERRE DENIS a-t-il autorise MARTINO a entrainer 
des civils avec des armes de guerre et des riot gun dans des « assauts infernaux », si ce n’est 
pour les confronter a des situations reelles ? Or, ces situation n’existaient que dans les tueries 
sauvage du Brabant Wallon et nulle part ailleurs. 

SEULS LES TUEURS ONT EMPLOYE CES TECHNIQUES !!! 

Des entrainements speciaux etaient aussi prodigues par le fondateur de cette technique : JEFF 



COOPER himself. Un de ceux-ci etait normalement reserve aux membres du ministere de la 
justice. II s'agissait d’un cours de combat a la riot gun. Pourtant, FREDDY SEMOULIN 
n’hesite pas a entrainer d’autres membres Grangers aux forces de l’ordre. Panni ceux-ci, BOB 
LOUVIGNY, patron d'une firme de gardiennage (la BDRI) et MARINO, toujours lui. De 
plus, est-il nonnal que Ton tolere dans une federation dite de sport, une section (projet 
DORAO), formee uniquement de policiers, de gendannes, services de fonnation, police 
militaire et tous autre service de securite (securitas, GMIC, Bainks, etc) ainsi que les tireurs 
civils IPSC en possession d'un permis de port d’anne (decision IPSC Belgium du 13.03.85) 
afin de leur 

RESERVER UN ENTRAINEMENT ENCORE PLUS REALISTE ?!?! 

Quel est done le but poursuivi par la Surete de l’Etat, en noyautant le comite de direction de la 
federation beige du tir pratique, en m’eliminant de cette federation sans aucun motif, en 
bafouant completement une decision de justice dument signifiee et en autorisant en 1984 
certains tireurs meme civils a s’entrainer a des « assauts infernaux » ? 

Je n’ose imaginer de reponse !!! 

TITRE EN GRAS 


Le 7 mai 1985 est une date terrible pour moi. 

Le matin, j’avais rendu visite a mon collegue, Jean-Paul PETIT, de la prison de Forest et 
j’avais pris l’aperitif a son domicile. Le midi, je pars manger avec mon ami Francis (qui est 
aussi mon medecin) dans un restaurant, et lorsque je rentre a la prison, je vois un des policiers 
qui avait fait partie de l’equipe de mon arrestation, devant ma porte privee, en face de la 
tourelle. II est de faction, cela ne fait aucun doute. Je m’attends au pire et je dois dire que 
franchement, ce fut le pire. 

A peine sorti de la voiture, un policier me reconnait et se dirige directement vers moi en 
m’intimant: 

« II faut rentrer dans votre maison. Je vous suis parce que nous devons aller au palais de 
justice ou j’ai des questions a vous poser. » 

Je rentre avec lui par la tourelle et la, il m’indique que ses collegues sont dans la cour de la 
prison, de faction devant l’autre porte. La personne d’ASSUBEL, coincee, avait ete menacee : 
« Si vous continuez a persister que vous n’avez pas vu VAN ESBROEK, vous etes complice 
dans une affaire de recel et vous allez en prison immediatement. 

Les policiers en ont profite pour faire dire a l'agent d’ASSUBEL que c’etait de moi que venait 
l’idee de son silence et que plus ou mo ins, je lui avais force la main. 

Le premier interrogatoire : la nuance se revelait etre « plus ou moins » ! 

Le deuxieme : c'etait tout a fait clair et net: je lui avais carrement force la main pour qu'il se 
taise afin de ne pas me compromettre ! 

L'interrogatoire dure cinq minutes. BORSU estime qu'il a ce qu’il faut comine materiel et je 
suis amene deux heures plus tard devant madame le juge destruction LYNA, qui me dit tres 
clairement: 

« Monsieur BULTOT, il y a un nouveau fait, je vous inculpe en plus d’escroquerie et cette 
fois-ci, vous retournerez en prison... mais cornme detenu ! » 

J'explique que je n'ai pas voulu mouiller la personne d’ASSUBEL. Elle ne veut rien entendre, 
mes explications ne l'interessent absolument pas. 

Je sors de son bureau. 

Les gendarmes me mettent les menottes et on me descend au rez-de-chaussee, au local des 



detenus. La, je dois dire que cela fait un grand bruit: les gendannes passent tous devant ma 
cellule. Les chauffeurs des fourgons cellulaires qui me connaissent tous puisque ce sont des 
surveillants de prison, ameutent directement la prison de Forest et c'est ainsi que lorsque je 
suis mis dans le fourgon cellulaire et que j’arrive a Forest, tous les employes sont la, le regard 
anxieux, le regard etonne. 

BULTOT arrive, les menottes aux poings pour etre ecroue a la prison de Forest!!! 

La prison avait naturellement ete avertie et mon collegue Jean-Paul PETIT aussi, chez qui 
j'avais done pris l'aperitif le matin. 

TITRE EN GRAS 

Je suis amene dans ma cellule. La reaction des detenus me voyant arriver est deconcertante. Je 
m’attends non pas a des cris, mais tout au moins a des huements. En fait, il y eut un grand 
silence quand je suis arrive. Par apres, les detenus, en passant devant la porte de ma cellule 
viennent me dire bonjour. Le soir meme, je me retrouve avec du chocolat, du cafe, etc... Tous 
les detenus s'etaient groupes pour partager et me donner les petites choses autorisees par la 
cantine, en attendant que je puisse moi-meme faire mes premieres provisions. J'ai ete tres 
sensible a cet etat de choses. 

La porte d’une cellule qu’on entend refermer pour la premiere fois sur soi fait vraiment un 
bruit qu'on ne peut jamais oublier. Tout s'est deroule tres vite et je ne comprends pas la raison 
d’un tel acharnement. Je reste assis, hebete, fixant d’un ceil torve ce w.c. chimique de camping 
qui devient mon symbole de la decheance. 

Ma premiere pensee est pour mon fils Cyriaque. Je n’ose imaginer le choc que lui causera 
l’annonce de mon arrestation. Lui qui est toujours si Tier de son Papa, lui qui est la coqueluche 
des surveillants a qui il adorait serrer fierement la main, comment Arlette va-t-elle lui 
annoncer ? Je revois sa naissance et je me rememore la joie et la fierte d’avoir cree cette tete 
blonde. Ma tristesse sera de ne pas lui avoir donne une soeur. Entre Arlette LICHTERT et 
moi, l’ambiance s'est rapidement deterioree durant des annees. Elle n’a jamais su renoncer aux 
cigarettes et a la boisson. Son penchant pour la bouteille va se repercuter sur notre interieur. 
Depuis quelques annees, il fait sale et desordonne a la maison. J'aurai la honte 
supplemental, dans les dossiers judiciaires, d'y voir mon logis decrit en termes vraiment 
degoutes. Nous restons cependant de longues annees malgre la pression de ses parents qui 
veulent detruire le menage a tout prix. Je n’empecherai jamais Arlette de voir ses parents, ni a 
Cyriaque de visiter ses grands-parents. Plus tard, je paierai cher cette « bonte ». Mais pour 
l’instant, seul dans cette cellule hostile, je me couche sur le lit en fermant les yeux, j’imagine 
tres fort Cyriaque en train de me sourire. Cette image pure me relaxe un peu et sans m’en 
rendre compte, sonne par les evenements, je m’endors sereinement. 

Le lendemain, la dure realite me toise a nouveau. J'avais refuse d'etre isole des autres detenus. 
Je dois done me mettre a la promenade, etre confronts a mes ex-pensionnaires. Les marques 
de sympathie de la veille me laissent entrevoir ce premier contact sans trop d’apprehension. A 
mon arrivee dans le preau, une gene reciproque s’installe et je commence a marcher cornme 
tout le monde. Deux surveillants restent a l’entree et je constate que les cameras de 
surveillances sont braquees sur moi. Le preau de ma section est tres visible de la section des 
femmes. La aussi, grace au tam-tam des prisons qui veut que rien ne soit secret, les detenues, 
toutes a leur fenetre, scrutent dans ma direction. Apres une vingtaine de minutes ou je marche 
seul, un petit groupe s'avance resolument vers moi ! Mon sang se fige, mais je feins 
l’indifference, du moins, je l'imagine... Or, le groupe affiche une mine qui se renfrogne au fur 
et a mesure de son approche. Je saurai plus tard, que mes traits de visage se revelaient 
franchement hostiles ! Neanmoins, le plus grand de la bande m’aborde en me proposant une 



cigarette. Par ce geste, je me detends et declenche l’hilarite du groupe en declarant: 

« Je ne fume pas, mais si tu as un petit whisky a m’offrir, je suis preneur ! » 

Aussitot, je suis entoure et presse de centaines de questions ! 

Des qu'ils ne m'apercoivent plus parce que noye par une vingtaine de detenus, les surveillants 
accourent, persuades que Ton me fait subir un mauvais sort. Surprise enorme pour eux de me 
voir parler et plaisanter au milieu de mes nouveaux compagnons d’infortune. Au repas de 
midi, tout le monde voudra m'avoir a sa table. Je deviens tres vite le conseiller pour les conges 
penitentiaries, les demandes de liberation conditionnelle, etc, etc. 

Lorsque mon fiston vint me visiter pour la premiere fois, j’aborde un sourire force en le 
voyant derriere cette vitre inhumaine. Sa tete blonde ne comprend pas que SON Papa soit 
arrete. 

Commence alors pour moi la lente desintegration des rapports humains. En prison, on ne 
communique pas, on triche ! J’entre d’emblee dans cette sinistre mascarade qui consiste a faire 
croire aux siens : « Que tout va bien et qu’il ne faut pas s’en faire pour moi ! » La famille 
replique sa partition tout aussi fausse : 

« Ne fen fais pas pour nous, nous tenons le coup ! » 

Cette farce dechirante, j'apprendrai a la jouer sur tous les tons, sur tous les modes, avec 
derriere le sourire, l’envie de hurler et de hurler encore. 

Mon statut au sein de la prison m’ecarte aussi des avantages du detenu nonnal. Je suis detenu, 
mais je suis aussi directeur de prison. Les detenus et meme certains surveillants modelent leur 
attitude en fonction de la perception plus aigue de fun ou de l’autre de mes « statuts ». Un 
petit nombre de surveillants me demontrera rapidement sa franche hostilite. Ainsi, deux jours 
plus tard, lors de ma premiere comparution devant la chambre du conseil du tribunal 
correctionnel, j’ai la honte de me presenter en jeans et veste de cuir car Arlette n’a pas encore 
recu l’autorisation de me transmettre un costume. VAN ESBROEK est quant a lui 
parfaitement habille. L’effet est deplorable !!! La premiere comparution est primordiale ; la 
chambre decide en effet du maintien ou non du mandat d’arret. Maitre Guy FRANCOIS, 
completement horrific par le spectacle de ma tenue, expliquera avec clarte que le maintien ne 
se justifiait pas. L’enquete etant terminee et l’argent recupere. Le differend qui m’opposait a 
VAN ESBROEK ne pouvait etre resolu par la detention. Madame LYNA, juge d’instruction, 
prend la parole pour affirmer que de nombreux devoirs sont encore a prescrire. Elle demande 
le maintien du mandat. Le Substitut, Madame HANGERHAUSEN se bomera a une phrase 
laconique pour reclamer aussi le maintien. J’assiste ainsi a ma premiere parodie de justice ! 
Pendant les quatre mois de detention, Madame LYNA va reclamer mon maintien a fin 
d’effectuer certains devoirs mais plus jamais je ne serai interroge ou confronts durant ma 
detention preventive. Je verrai, lors de mes differentes detentions en Belgique, un simulacre 
de justice ou tous les coups sont pennis a fin de maintenir la detention. La verite n’est plus le 
but mais un accessoire. Le mensonge et l’imprecision seront monnaie courante. Monsieur 
JOOSTEN, President du tribunal, decide de maintenir mon mandat. 

En regagnant ma cellule, l’ecoeurement efface en moi le directeur de prison. On veut faire de 
moi un detenu et bien je vais me considerer et me comporter comine tel. 

A l’exterieur, les medias me reservent une publicite tapageuse. J’ai droit a la premiere 
information des journaux paries et televises. Ma photo, en position de tir, apparait a la une de 
tous les joumaux. 

Loin d’etre impressionne, Pepe reunit tous mes amis et pendant ces quatre mois 
d’enfermement, je recevrai une moyenne de dix lettres par jour. Ce fantastique cordon 
ombilical maintiendra mon moral et surtout ma pugnacite. 



Ayant appris par les medias l'histoire de mon bateau, les detenus m'affublent d’un nouveau 
surnom : « 1'Amiral ! ». 


Plusieurs incidents vont encore compliquer la situation et la rendre intenable. Des tables sont 
disposees au centre de l'aile de la prison qui est done ainsi amenagee en refectoire. Durant la 
semaine, les detenus ont le droit de consulter le menu affiche pres de la porte du bureau des 
surveillants. Voila trois repas dont le dessert reste invisible. Je prends mes renseignements 
aupres d’un detenu travaillant a la cuisine et j’apprends en meme temps que d’autres detenus, 
qu'un surveillant indelicat repart regulierement avec les desserts. Les detenus decident alors 
de ne pas sortir de table si le dessert est a nouveau escamote. Et le lendemain, lorsque la 
cloche s'agite signalant la fin du repas, les quatre-vingt detenus continuent a deviser et a rire 
joyeusement a table. N’ayant pas l’intention de me desolidariser, je reste moi-meme assis. 
Stupefaction du chef de quartier qui a nouveau sonne... en vain. Aussitot, le chef surveillant 
est alerte. En Belgique, il est appele « l’Adjudant». II sonne a son tour et cette fois, un 
immense eclat de rire lui repond ! II demande alors d’une voix forte les motifs de cette mini¬ 
rebellion, mais personne ne daigne lui repondre et les rires fusent a nouveau. Alertes par le 
centre, de nouveaux surveillants arrivent en renfort tout en restant derriere la grille de l'aile 
qui nous isole du centre. Sentant la situation devenir perilleuse, je me leve et me dirige 
tranquillement vers l’Adjudant. Comme par magie, les detenus se taisent, retenant leur souffle, 
ne voulant rien perdre du dialogue. 

« Monsieur l’Adjudant, les detenus ont decide de quitter la table lorsque le repas sera termine, 
c’est-a-dire lorsque le dessert sera servi ! » 

L'Adjudant promet le dessert pour le soir ! 

Les detenus manifestent alors bruyamment leur reprobation. Des que je reprends la parole, le 
silence s'installe a nouveau. 

« Desole, mais coniine on nous prive pour la quatrieme fois de dessert, c’est le dessert 
maintenant ou nous ne quittons pas nos places ! » 

Salve d’applaudissement chez les detenus et air completement decontenance de l’Adjudant. 
Pour lui, la situation est stupefiante : le directeur de prison est devenu meneur d’emeute ! 
L'agitation grandit parmi les surveillants devant le regard amuse des detenus. Soudain, un 
chariot de la cuisine se presente avec les desserts convokes. Les detenus applaudissent a tout 
rompre et pendant que je regagne ma place, ils m’accompagnent sur fair des lampions 
« Merci BULTOT, merci BULTOT, merci !!! » 

Je me rends aussitot compte que je viens de compromettre gravement mes rapports futurs 
avec [’administration. 

Un autre incident suivra de peu de temps l’episode du dessert. 

Lors d’une visite, j'explique a Arlette que les trafics d’alcool et de drogue se rencontrent 
beaucoup dans cette prison. Les detenus se ravitaillent relativement facilement. J'ai pu ainsi 
voir de larges quantites de marijuana et d’alcool cachees dans les bouteilles thermos de 
certains surveillants. En tant que directeur, j’avais mene une campagne impitoyable a ce type 
de surveillants. Vu de l'autre cote de la barriere, ces trafics semblent moins epouvantables et 
le fait de pouvoir deguster parfois son petit aperitif revet une sensation de bien-etre du a 
l’alcool et a l’attrait de la chose defendue. J'avais narre a Arlette ma joie naive d'avoir re$u une 
petite gorgee de whisky. Or done, lors d’une visite, Arlette m’aborde d’emblee avec un regard 
gene, elle m'avoue apres cinq minutes avoir dissimule un billet de mille francs dans une paire 
de chaussettes !!! Je suis effare, c'est la cachette la plus connue et la plus recherchee. Au 
moment ou je lui demande de quitter rapidement la cabine pour recuperer mon colis, un 
surveillant ouvre ma partie de cabine (separee en deux par une vitre) et m’escorte vers le 
surveillant responsable de la visite. La paire de chaussettes est en evidence sur la table ainsi 



que le billet de mille francs. Ma confusion est vraiment a son comble et je ne sais comment 
m’expliquer. Le surveillant, tout aussi confus, me declare etre oblige de dresser un rapport 
disciplinaire. Le lendemain matin, je suis done amene devant Michel GEORGE, directeur 
adjoint et en charge ce jour-la du reglement disciplinaire. Je connais bien Michel, il etait 
inscrit a mon club de tir qu'il quitta suite a mes ennuis pour rejoindre celui de MARINO. II fit 
aussi derriere mon dos une cour pressante a Claudine. J'attendais done ses paroles avec 
interet. 

Je rentre dans la salle et apres un furtif regard, Michel me parle en gardant son regard baisse 
vers le dossier. Son tic nerveux a l’oeil (sorte de mini clin d’oeil intempestif), s'accentue au fur 
et a mesure de la conversation. Je lui demande de transferer toute la responsabilite de facte 
d’Arlette sur ma personne. Je suis pret a etre puni meme severement en echange du maintien 
de ma visite. Magnanime, il me decernera une admonestation et apres fen avoir remercie, je 
quitte son bureau alors qu'il maintient inexorablement son nez vers le dossier ! 

L'incident de la chaussette sera colporte dans toutes les prisons beiges et je serai longtemps 
l’objet de quolibets amuses ! 

Enfin, un dernier incident provoque ma mutation vers la prison de Louvain. Monsieur Jean- 
Paul PETIT, directeur principal, m’accorde un travail afin de briser la monotonie carcerale. 
J'accompagne un surveillant en dehors de f enceinte de la prison pour me rendre cinq cent 
metres plus loin. A cet endroit existe un vieux batiment qui doit etre restaure pour y loger le 
nouveau centre d'orientation penitentiaire. Le jardin desole la vue par une decennie de 
negligence. Je suis charge d'y abattre les arbrisseaux. Lors de mes sorties joumalieres, je 
deambule sur la voie publique en tenue penitentiaire ce qui me provoque une gene 
supplementaire. Par contre, j’entrevois tres vite les avantages a tirer de la situation. Trois jours 
apres finitiation de ce travail, j’ai la joie de rencontrer « fortuitement » ma soeur accompagnee 
par CYRIAQUE mon fils. Je peux enfin le serrer contre moi et fembrasser, chose impossible 
dans le box vitre de la visite. Nous faisons ensuite un brin de route ensemble jusqu'au vieux 
batiment. Ma soeur m’a reserve une autre petite surprise. Elle deballe un morceau de fromage 
de chevre (j’adore) et une bouteille de vin. Le surveillant sourit et tourne la tete afin de 
simuler qu’il n’a rien vu. Soudain, au moment de vider mon verre, un jeune surveillant 
apparait. Ses yeux s'allument sous ses lunettes foncees et je peux y entrevoir une lueur 
mauvaise. Le soir, je suis demis de cette fonction. 

Devant la division des surveillants a mon egard, JEAN POL PETIT me transfert a la prison de 
LOUVAIN. Le trajet sera terriblement penible. Le fourgon cellulaire n’arrive a LOUVAIN 
qu’en fin de parcours. A chaque prison etape, un lot de surveillants vient maladroitement me 
'visionner ' ! Vers 17 heures, j’arrive a LOUVAIN epuise d’enervement contenu. 

Le debut s'annonce mal ! 

Parce que selon un surveillant je marche trop au centre du couloir, il me reprimande 
vertement en m'indiquant que je devrais montrer l'exemple. Comine il fait chaud et qu'il est 
completement debraille, je me contente de fexaminer de la tete aux pieds avec une moue de 
reprobation. Le message est passe... il se tait aussitot ! Ma cellule degouline de tristesse de par 
sa couleur passee. J'apprehende le futur en ces lieux. 

Pourtant l'avenir me fera decouvrir cette prison sous des aspects plus humains, je n'aurai 
jamais plus aucun probleme avec les surveillants qui se reveleront meme tres gentils. Un 
nouveau personnage vient aussi d’entrer tres discretement dans ma vie : DODO ! Pour la 



presenter, revenons au mois d'avril 1985 ! 

CLAUDE LEROY, premier substitut du Procureur du Roi, ex-conseiller au cabinet de JEAN 
GOL, vient d’etre arrete ! Le scandale est enorme de par les fonctions de l'interesse ! La 
Justice le soupconnc d’avoir remis un dossier ultra-secret (undercover) de la police a un gang 
international de traiiquants de drogue ! Le dossier contient les noms des indicateurs de la 
police. Une affaire de haute trahison ! CLAUDE LEROY avait deja recolte quelques 
problemes disciplinaires pour un certain laxisme envers quelques casinos. Mais de par son 
abord souriant et sympathique, l’annonce de son incarceration surprend beaucoup de monde. 
Alors qu'il croupit sous les liens de la detention, CLAUDE LEROY presse son epouse 
DOMINIQUE MERSCH de prendre contact avec ARLETTE. II me vantera en ces tennes 
aupres de son epouse : 

« Tres bon directeur mais il ne montera jamais, il est fiche du titre d’extreme droite au cabinet 
de JEAN GOL. » 

Or, CLAUDE LEROY s'occupait precisement de fadministration penitentiaire lors de son 
passage dans ce cabinet! Les deux epouses vont se rencontrer et bientot, je recois une lettre 
de DOMINIQUE. Le ton de la lettre devoile une rage contenue contre la Justice, mais aussi 
un esprit tres frondeur. 

N’ayant pas perdu mon sens de l'humour, je m'amuse a lu envoyer une lettre taquine sur elle- 
meme, non sans louer les vertus de son epoux. Or ce dernier est vite denigre par quelques 
detenus yougoslaves qui semblent en connaitre long sur la vie mouvementee qu'il menerait en 
secret. Mes yeux s'ecarquillent et mes oreilles se tendent lorsqu’il est decrit comme un noceur 
et un joueur ! Ces detenus me sortent des noms de compatriotes grades par des « dons » tres 
genereux. L'homme aurait-il trompe son monde a ce point ? Mais pour l'instant, dans la 
solitude de ma cellule, je relis la derniere lettre de DOMINIQUE. Piquee au jeu, elle replique 
sur le meme ton. En peu de temps, sans s'etre vus, nous correspondons comme de vieux amis 
et une complicite etonnante se developpe au fur et a mesure de nos lettres. Elle refuse de 
m’envoyer sa photo et je ne decouvrirai son image que le jour de ma liberation. 

Mon premier preau a LOUVAIN frola la catastrophe. Les detenus ne me connaissaient pas et 
ignorent ma bonne reputation de BRUXELLES. Ils ne voient en moi qu'un directeur de prison 
dechu et beaucoup de directeurs ne jouissent pas d’une reputation sympathique. A peine entre 
dans le preau, un groupe menacant s'avance. Cette fois, plus de doute, leurs intentions sont 
claires ! Pluto t que de reculer, je me dirige vers le groupe et feignant d’ignorer la peur, je 
declare tout de go : 

« Bon, vous voulez la bagarre, je suis d'accord mais comme je suppose que vous n’etes pas 
des laches, qui est le premier ? » 

Ils sont estomaques et rapidement leur desunion s'affiche ! Je profite de mon avantage et 
designe un membre du groupe en l’engageant a frapper. Ils ne s'attendaient pas a cette attitude 
et devant le ridicule de la situation, un des detenus se met a pouffer, vite imite par tout le 
groupe ! Je me mets egalement a rire, le ridicule m’a sauve ! Neanmoins, je serai isole par les 
detenus et cette solitude me pese ! 

Afin de reagir, j’apprends par coeur la chanson de J.-J. GOLDMAN « Je marche seul ». Cette 
melodie me tiendra compagnie pendant mes deux mois a Louvain, je la fredonne pendant que 
j'arpente resolument le preau chaque matin. 

Un double suicide pendant mon premier week-end a Louvain me marque profondement. Je 
reanalyse scientifiquement la portee sociale et psychologique de l’enfermement sur l’individu. 
Je m'apercois que cette analyse n'a jamais pu etre realisee DE L’INTERIEUR par un 



scientifique qui vit sa detention aussi dans sa chair. Je realise depuis deux mois quelle 
aberration cette mesure peut receler, je realise que l’enfermement est plus monstrueux et plus 
inhumain que les peines corporelles. Je me promets fermement de faire part de cet aspect lors 
de ma liberation. Mettre mes tripes et mon cerveau a nu et expliquer aux scientifiques que 
cette prison ne merite en rien l’etiquette d'une peine moderne et adaptee a la morale du 
XXeme siecle. La prison detruit non seulement la vie sociale, psychologique, affective et 
sexuelle de l’individu, mais elle aneantit aussi les families en les marginalisant a outrance. Les 
families paient plus que le detenu, les families avalisent les responsabilites du delinquant en 
souffrant pour lui! La femme privee de son mari se retrouve sans ressource. Obligee de 
travailler, elle entrera dans n'importe quel emploi alin de nourrir la famille. Les enfants se 
voient aussi priver de leur pere en prison et de leur mere au travail. II faut aussi payer l'avocat. 
II faut aussi supporter les regards des voisins, il faut aussi accepter les pleurs des enfants 
rentrant meurtris par les remarques a la cour de recreation. II faut feindre, il faut garde la tete 
haute, il faut tricher avec soi-meme pour ne pas sombrer dans la depression ! Enfin, il faut 
aussi encaisser les remarques ou les menaces des « amis » du mari, complices en panique des 
revelations que le detenu pourrait faire ! La femme doit tout subir et remercier le legislateur 
d'avoir impose une peine « compatible » avec les droits de l'homme !!! Je me promets 
formellement de denoncer ces injustices des ma sortie. 

Un matin, alors que le soleil jette ses rayons narquois sur le preau, j'assiste a une scene 
revoltante. Un nouveau detenu, age d’une soixantaine, se voit agresser par cinq solides 
gaillards. Le nouveau marche avec des bequilles car il est unijambiste. L'ayant renverse en 
shootant ses Cannes, le groupe s'eloigne visiblement satisfait. L'action s'est deroulee tres vite 
mais n’a pas echappe a l’attention de tous ni meme des surveillants. Pourtant, personne ne 
reagit!!! Je cours vers le malheureux et je l'aide a se relever. Aussitot le groupe revient vers 
moi fair menacant. La rage m'etrangle mais je peux quand meme les injurier de laches. Le 
groupe, pret a frapper m'injurie a sont tour parce que je suis occupe a aider un violeur d’enfant 
!!! Cette nouvelle me paralyse ! En prison, le code d’honneur veut que les delinquants qui s’en 
sont pris a des enfants, subissent le mepris et l’hostilite des autres detenus. Je me vois done 
soutenant un homme de soixante ans qui ne possede plus qu'une jambe mais qui a aussi 
commis le crime horrible de violer une fillettc de six ans !! 

Meduse et ecoeure par la situation, je m’entends bafouiller un : 

« Je ne savais pas ! » embarrasse. 

Je me tourne vers l’handicape dont le visage est devore par la peur ! Les surveillants feignent 
d’ignorer la situation, eux aussi detestent les pointeurs (violeurs) d’enfants. Le groupe attend 
ma nouvelle reaction, l’handicape s'accroche a ses Cannes, cornme une marionnette 
lamentable, son oeil me supplie de le proteger. 

Je me tourne vers le groupe : 

« Foutez lui la paix, il a deja deguste ! » 

Le groupe s'eloigne lentement tout en me menacant de represailles. L'infinne alors s'approche 
de moi et me tend la main. Je fais un effort monstre pour ne pas lui balancer mon poing dans 
la figure et devant mon immobilite et mon regard profond de mepris, il empoigne ses Cannes 
et sautille jusqu'a la cahute du surveillant. Il restera la jusqu'a la fin du preau. Une nausee 
m’envahit, j’ai vraiment envie de vomir ! Cet evenement me revient souvent en memoire. Il 
marquera aussi le debut d’une franche hostility a mon egard. Je serai de temps en temps 
bouscule ou injurie mais jamais firappe. 


Le surveillant appelle, nous rentrons dans nos clapiers. En cellule, je possede une petite 
television ache tee par l'intennediaire du service cantine. L'ecran n’est pas toujours d’un grand 



secours pour le detenu. Certes, il fait passer le temps. Mais qu’il est dur pendant cette periode 
estivale de regarder les reportages de vacances a la mer ou de la foire du Midi. Les rires des 
autres font mal ! Les joies des autres me rappellent tellement la decheance sociale ou je me 
trouve. Je me surprends parfois a insulter les gens du petit ecran ! En prison, on reagit avec les 
tripes, on n’en a cure de la bienseance. Quand, dans l’exigu'ite de ma cellule, j’insulte a haute 
voix des personnages qui defilent a la television, je libere une agressivite que je sens croitre 
en moi et qui me submerge ! Je crie a ces imbeciles heureux qu'il y a des prisons ou les gens 
souffrent... ou les gens meurent !!! Je prefere ce comportement stupide a l'abattement qui 
laisse le detenu se desintegrer lentement devant la fenetre grillagee de sa cellule. Je pense a 
VERLAINE detenu a la prison de MONS et qui ecrivait: 

« Le ciel est, par-dessus le toit 
Si bleu, si calme ! 

Un arbre par-dessus le toit 
Berce sa palme. » 

L'ete marque aussi la justice penale en co'incidant avec les vacances judiciaires. Du coup, les 
cours et tribunaux sont affectes par l’absence des magistrats en titre des dossiers. En general, 
le juge remplacant, se borne a confirmer les decisions anterieures et peu de liberations sont 
ainsi realisees. Je suis oblige d'etre conduit a Bruxelles pour la comparution devant la 
chambre du conseil et je suis ramene a Louvain le jour-meme. Cette regie generale va souffrir 
une exception dont je me souviendrai toujours. Suite aux manques d'effectifs, la veille de la 
fete nationale, aucun transport n’est en mesure de me ramener a Louvain et je suis amene a la 
prison de Forest pour quelques jours. Mes ex-collegues ne m’accueillent pas au greffe et je 
suis incarcere dans une cellule repoussante de crasse. Cette cellule n'a visiblement plus ete 
nettoyee depuis des lustres et les murs, verole de taches brunatres accompagnent un lit dont 
les couvertures donnent la nausee ! N’ayant rien recu a manger au palais, je demande poliment 
au surveillant de quoi me nourrir meme legerement... II me montre de la nourriture dans la 
gamelle mais je lui retorque qu'elle presente un etat avarie ! II maugree et me promet de me 
degotter « un petit quelque chose » ! II revient effectivement 15 minutes plus tard avec un 
cruchon de cafe et des tranches de pain. Le cafe est firoid, aussi froid que cette geole infame. 
Pourtant, je suis heureux de m’en verser une bonne tasse. Assis silencieusement devant ce mur 
aux taches d'excrement, je m’arrete de boire a la premiere gorgee, j'ai plein de paillettes dures 
dans la bouche... des rognures d’ongles ! Je recrache le tout dans le W.C. de camping installe 
dans la cellule et mon corps se contracte de spasmes. Je dois vomir mais mon estomac vide ne 
me renvoie que de la bile brulante. Pendant quelques minutes, je serai meme secoue de 
soubresauts qui me donnent une douleur terrible. Lorsque je me calme enfin, je me jure bien 
d’invectiver copieusement Jean-Paul PETIT, le directeur principal, a notre prochaine 
rencontre. 

Abattu physiquement et moralement, je me couche sur ce lit puant. Des larmes de rage 
descendent lentement en brulant mes joues. Je contemple aussi ma tenue penitentiaire. Suite a 
un retard interne, les vetements penitenciers ne sont pas arrives a temps au vestiaire et je suis 
affuble d’un pantalon sans bouton et sans fermeture. La chemise trop petite ne peut non plus 
etre boutonnee. Je me calme progressivement. Sous le coup de l'emotion, je m’endors 
lentement sous ces couvertures crasseuses. Au reveil mon cauchemar ne s'est pas efface. Je 
suis envoye aux douches ou on echange ma chemise contre une encore plus mal en point: pas 
de col, pas de bouton et meme pas de manche. Je suis oblige de me promener au preau devant 
les regards completement meduses des detenus, en soutenant mon pantalon et en ayant ferine 
ma chemise en nouant les deux pans. Heureusement, ce calvaire est interrompu par la visite. 



Devant mon accoutrement, ARLETTE ne peut s'empecher d'eclater en sanglots. Je lui 
demande d’intervenir directement aupres de la direction generate. En tant que directeur je 
n'exige aucune faveur mais il est inadmissible que je sois traite mo ins humainement que les 
autres detenus. Arlette aura contact avec le nouvel inspecteur general, Monsieur LEFEBVRE, 
qui auparavant etait mon premier conseiller. Sa promotion m’a toujours surpris. En general, la 
politique l’emporte sur la competence, ainsi la nomination du nouveau directeur general des 
prisons en provenance de la ... Surete de l'Etat ! 

Monsieur LEFEBVRE est un homme competent et efface, tout le contraire de son 
predecesseur JANSSEN. Je ne sais les termes qu'il emploiera aupres de la direction de Forest, 
mais une demi-heure apres le depart dArlette, un chef de quartier tout affaire, vient me 
chercher pour me conduire au vestiaire. Dix minutes plus tard, j’en sors habille avec un 
nouveau pantalon, une nouvelle chemise, un nouveau pull etc. Je jubile interieurement en 
esperant que JEAN POL PETIT de directeur, a du recevoir un « savon » maison. Je serai aussi 
change de cellule, non par la volonte de la direction mais de la part d’un aide completement 
inattendue d'un detenu celebre. 

Lors du repas de midi, le surveillant ouvre la porte et un detenu servant remplit l'assiette avec 
de la nourriture disposee sur un chariot chauffant. Le servant n’est autre que MARCEL 
CASTRIS (le Gros Marcel) un des plus grands trafiquants de drogue d’Europe. Je suis etonne 
de le voir a ce poste etant donne la suspicion que tous les directeurs ressentent a l'egard des 
trafiquants. MARCEL CASTRIS connait bien ma repugnance vis-a-vis de son sale travail 
mais malgre ce fait, il se declare navre de me voir detenu alors qu’il sait tout le bien que les 
prisonniers disent de moi. Devant mon air stupefait, il me promet de me faire changer de 
cellule le jour meme !!! 

Un detenu qui dirige une aile !?!? 

Des 15 h., je serai change de cellule et mis dans une pistole. Cette demiere est une cellule 
legerement plus vaste situee en bout d’aile. Decidement, j’apprends vraiment plus en trois 
mois de detention qu’en sept ans de direction ! 

Je me sens done tout ragaillardi et le moral de combat revient en surface. Je m’endors done 
cette nuit-la avec calme, et j’entrevois a nouveau l’avenir avec serenite. Je suis reveille par des 
demangeaisons insoutenables dans le bas ventre. Je me gratte furieusement avant de decouvrir 
avec horreur que mes poils sont couverts de vermine : des morpions !! Les couvertures de la 
veille m’avaient infecte avec ce fleau ! Le spectacle est ecoeurant, mes poils grouillent de 
cette saloperie ! A l’arrivee du surveillant pou le petit dejeuner, je lui demande de m’inscrire 
en premier pour la visite medicale. Ensuite, je prends du papier et ecris a JEAN POL PETIT 
une lettre vitriolee que je ne ferine pas afin que le personnel puisse aussi en prendre 
connaissance. J’y denonce l’hygiene deplorable de son etablissement et lui explique que ce 
genre de vermine a disparu depuis longtemps meme des bordels les moins bien tenus !! J’ai 
l’impression au ton que j’emploie que ma lettre doit fumer et sentir le soufre ! J’y emploie mon 
style le plus poli mais aussi le plus acide et le plus mordant! Je lis ensuite mon ecrit avec 
delectation, il n’y manque plus que la trace de mes dents afin d’y imprimer mon profond 
mepris. Heureusement, le jour meme, le medecin me donne un shampoing special et apres 
m’etre soigneusement lave, je constate avec bonheur la disparition de ces parasites. 

Le lendemain, je repars avec soulagement a Louvain ! Lors de mon passage a la chambre du 
conseil, je juge d’instruction de remplacement a demande mon maintien en detention en vue 
de l'accomplissement d’un dernier devoir. Un mensonge de plus, demontre plus tard dans le 
dossier, mais qui permettra a Madame VELU qui remplace Monsieur JOOSTEN de confirmer 
mon mandat ! Comine d’habitude, j’interjette appel de cette decision. Voila trois mois et demi 
que je suis en detention et je ne suis jamais interroge. Je trouve que la mesure est comble et je 



decide de denoncer cette mascarade en ecrivant une lettre ouverte au ministre de la Justice, 
JEAN GOL, lettre dont j’envoie une copie a tous les joumaux. J'y explique la maniere dont le 
Parquet comprend la notion de presomption d’innocence. J'y rejette la detention preventive 
comine pilori moderne face a la population. J'ai la chance de voir cette lettre largement 
repercutee par les medias avec des commentaires positifs sur mon intervention. 

Entre-temps, PIERRE-PAUL (PEPE) a ouvert un cafe restaurant rue de Dublin a Bruxelles. 
Connaissant son sens de l'humour parfois scatologique, je ne suis pas surpris de connaitre le 
nom de l’etablissement: LE PLEIN POT. 

PEPE, en mon honneur, a decore l’etablissement avec de grandes affiches de Lucky Lucke 
(mon surnom de directeur). La fiesta est deja programmee pour ma liberation. A Louvain, en 
attendant, je recois regulierement mes dix lettres par jour et la visite de mon ami FRANCIS 
qui est aussi mon toubib !! M’ayant sous la main et suite a un cas de sida decouvert a la prison 
de Louvain, il va proceder a un large check-up de ma sante. FRANCIS est un veritable ami 
mais il se montre ecoeure lors des remises des resultats sanguins : mon foie fonctionne a la 
perfection. Ses visites me font le plus grand bien car je peux le voir en dehors du parloir 
ordinaire ! Il sera reellement un artisan de mon moral de fer. Du cote de la prison, je recois 
aussi, de par mes trois mois de prevention ecoules, une premiere visite a table sans la vitre 
pour nous separer. C'est tout tremblant que je rentre dans la salle ! ARLETTE et CYRIAQUE 
sont aussi tremblants que moi ! On n’ose a peine s'embrasser ou se toucher. Brusquement on a 
rien a se dire, les mots ne viennent pas ou alors difficilement. Cette visite que nous esperions 
depuis si longtemps se deroule dans une atmosphere surrealiste. Chacun essaie de profiter de 
la joie de l'autre mais l'emotion nous etreint tellement qu'elle nous gache cette premiere visite. 
Lorsque la cloche retentit, nous nous quittons desappointes, mais presque soulages. Nous 
sommes restes ensemble pendant une heure sans pouvoir nous exprimer ! CYRIAQUE 
m’embrasse sans comprendre ! C'EST CELA AUSSI LA PRISON !!! 

Lorsque je rejoins ma cellule, je peux liberer ma peine et ma rage !! Je plonge sur mon lit et 
hurle dans l’oreiller avant de pleurer comme un gosse ! Je me vengerai, oh oui je me vengerai 
!!! 

TITRE EN GRAS 


Le 30 aout 1985, le fourgon cellulaire me conduit a nouveau a Bruxelles pour ma 
comparution devant la Cour d’Appel. Il fait beau dehors ! Pendant le trajet, je me contorsionne 
pour essayer de decouvrir le spectacle de la rue. Il n'y a pas de fenetre a l’arriere de ce petit 
fourgon cellulaire. Nous sommes separes des gendarmes par une grille et en plus nous 
sommes menottes. Il faut done essayer de surprendre la vie exterieure par le pare-brise du 
chauffeur !! Voir tous ces gens aux terrasses des cafes ou qui s'affairent dans la rue devient 
une vision presque irreelle. Je les envie, j’en viens meme a les hair tous ces passants qui ne 
connaissent pas leur bonheur d'etre fibre. 

Comme d’habitude, je suis amene dans les cachots du palais de Justice de Bruxelles. Une 
honte !! Ces cachots nous laissent une petite place d’un metre cinquante sur un metre 
cinquante et parfois on y est entasses pendant des heures a six ou sept detenus ! L'air y est 
irrespirable et le son assourdissant. En general, les detenus etrangers s’apostrophent d'un 
cachot a l’autre afin de preparer une version commune devant le tribunal. Quand trente ou 
quarante personnes se helent ainsi, ce cachot devient vraiment l'enfer ! 

« BULTOT » 



Mon nom est crie par le gendarme. Aussitot un grand silence se fait!! Comine d’habitude, 
tous les detenus des differents cachots s'agglutinent a la petite lucarne de la porte, 

« BULTOT va passer !! » 

Lorsque je passe menotte devant eux, souvent le silence, parfois un mot d’encouragement, 
jamais une injure ! 

Les gendarmes me retirent les menottes dans le pretoire, j'y decouvre un Maitre GUY 
FRANCOIS avec un sourire d’encouragement plus marque que d’habitude. II me glisse a 
l’oreille que le nouveau President de la Cour n’est pas de ceux qui se contentent d’enteriner 
mais « Qu'il ecoute avant de prendre une decision !! » 

La rage contenue en moi se transfonne aussitot en espoir fou ! Le procureur General repete 
devant la cour son petit lai'us connu et archiconnu : 

« II reste des devoirs a accomplir ! » 

Toujours sans les preciser, bien entendu !! Maitre FRANCOIS prend a son tour la parole ! II 
demontre qu'aucun devoir n’a ete effectue en quatre mois et qu'en ce qui me concerne, 
l'instruction etait deja tenninee AVANT ma detention. Maitre FRANCOIS n’eleve pas la voix, 
il ne fait pas d’effet de manche, il decortique, il explique, il demontre !! 

Le President me demande alors de m’exprimer !! 

Je suis effare, je n'ai rien prepare, voila quatre mois qu'aucun magistrat ne m’a demande de 
prendre la parole. Je pense avoir dit que mon avocat avait parfaitement resume la situation 
mais je n’en suis plus tres sur car l’emotion m’etranglait et fausse ma memoire. 

Les gendarmes me reconduisent alors aux cachots de l’annexe du palais. Ces cachots sont plus 
grands et servent de salle d’attente pour les transferts vers les prisons. A midi, je refuse la 
nourriture qu'on me propose, j’ai un tres grand noeud dans l’estomac. Je regarde et regarde 
encore les graffitis imbeciles ecrits sur les murs. Les heures me paraissent des jours et les 
minutes des heures. A 14 heures, « mon » gendanne de Louvain apparait avec un papier en 
main. Il ouvre mon cachot et me menotte. 

« Alors ? » lui dis-je d’une voix eteinte ! 

« Vous etes libre ! » me dit-il simplement, « l'arret vous est favorable ! » 

J'encaisse la nouvelle comine un formidable coup de poing, les lannes jaillissent, 
incontrolables, mes jambes refusent de me porter et je dois me tenir au mur !!! Je vais sortir 
de prison, je suis libre ! Je sais que je dois encore effectuer la levee d’ecrou a Louvain, mais je 
ne peux y croire. Arrive pres du bureau de la permanence, je suis congratule par les 
chauffeurs des fourgons et certains gendarmes. Je souris betement au travers de mes yeux 
humides, je dis n’importe quoi, je suis toujours sous le choc !! Ce n’est que pendant le trajet 
vers Louvain que je reviens enfin sur terre. Je regarde avidement dehors et je trouve cette 
autoroute merveilleuse pour une fois. Durant le voyage, un autre detenu me confie son degout 
pour la justice, il vient d’etre confirme !! Je m'apitoie faussement sur son sort ! Je suis libre et 
je vais sortir ! 

Arrive a l’etablissement, le greffe est deja au courant. On m'indique que ma famille a deja 
telephone pour connaitre mon heure de sortie, qu’on a deja prepare un maximum de papiers et 
que dans une demi-heure, je pourrai sortir. Renvoye dans ma cellule pur y ranger mes objets 
personnels et replier mon paquetage, je renverse tout maladroitement, mes mains tremblent 
tellement fort!!! Je distribue mes friandises aux servants et j’attends enfin qu'on vienne me 
chercher. J'ai empile mes affaires personnelles n'importe comment !! Enfin, le surveillant 
apparait. Il me conduit a Monsieur PEETERS, directeur adjoint, qui resume la levee d’ecrou a 
sa plus simple expression. Bref passage au greffe et ensuite, comme tous les detenus liberes 
du monde, je prends mes innombrables sacs en plastic comportant mes petits tresors de 



detention (cartes postales, dessins, calendriers ou Ton compte les jours) et je me dirige vers le 
couloir de sortie. A travers le carreau de la grande porte, je distingue Arlette, et une vingtaine 
d'amis !! Une derniere signature du surveillant portier et la porte s'ouvre !! 

Je tombe dans les bras d’Arlette : JE SUIS LIBRE !!! 

L'ambiance est a la folie, les amis rient, m’embrassent, pleurent. Personne ne sait comment se 
comporter ! Bref, apres quelques minutes d’euphorie, mous decidons de nous rendre dans le 
cafe le plus proche en attendant mes parents qui doivent venir avec Cyriaque. Les prisons ont 
ceci de commun avec les eglises, elles ne sont jamais tres eloignees d'un bistrot ! 

Arrives dans un brouhaha indescriptible sous l’oeil goguenard du patron, nous commandons 
une biere, breuvage que je n’ai plus bu depuis de longs mois. Ah ! comine cette biere est 
douce et fraiche au palais et comine son gout de liberte lui donne une saveur incomparable !! 
En degustant avec delice cette premiere biere, je detaille les amis qui se sont precipite en 
catastrophe. Un couple retient plus mon attention : Dominique M. et Christian P., ils sont 
crasseux et plein de peinture. Ils repeignaient leur appartement a Bruxelles, lorsque le 
telephone annonce la nouvelle de ma liberation. Ils ont tout plante et sont la, sales mais avec 
un sourire de joie que je n’oublierai jamais. Un autre terrible sourire : Paola ! Une des 
premieres a venir au club de tir, une vraie amie. C'est aussi la femme de Francis, mon toubib 
qui n’a pu venir a cause de ses consultations. Derriere ses grandes lunettes, ses grands yeux 
ont pris un eclat inconnu, le rire et l'emotion leur donnent une brillance particuliere. 

Bien-sur, Pepe est de la partie... Pas question de feter les premieres minutes sans sa presence. 
Son enonne sourire me transmet mieux que n'importe quelle parole son bonheur de me voir 
libre ! Une petite lueur malicieuse m'indique aussi que la soiree fiesta ne sera pas triste... Tout 
le monde parle en meme temps, me presse de questions, n’attend pas la reponse pour en 
reposer une autre. Les boissons vont aussi defiler a un rythme qui commence a m'inquieter ! 
Soudain, la porte s'ouvre... Mon fils !! 

Je bondis de ma place et l’enlace coniine un fou ! 

« Papa est libre, fiston, Papa est libre ! » 

La table s'est faite silencieusement et retient son souffle avec respect devant notre etreinte. 
Mes parents ensuite me plongent dans les bras... toujours sous l'oeil bon enfant du cafetier qui 
en a vu d'autres ! 

Les verres continuant a se succeder dans l’enthousiasme, je telephone au cabinet medical de 
Francis. II me met en garde et me propose de passer chez lui afin de recevoir une medication 
pour tenir le coup le restant de la journee ! Comine je suis dans la cabine telephonique, j’en 
profite aussi pour telephoner a Dominique, epouse de Claude LEROY ! Je lui annonce ma 
liberation avec joie et pudeur a la fois. Je sais comine il est frustrant d’apprendre la liberation 
d’un autre lorsqu'un etre cher reste emprisonne. Nous n’employons pas le ton enjoue de nos 
lettres, une certaine gene nous bloque devant ce premier contact oral. Elle me promet de venir 
a la fete et hardiment, je lui envoie une grosse bise en attendant les autres. Nous quittons 
ensuite le cafe dans la bonne humeur generate. Je repousse gentiment l'offre de mon pere de 
prendre le volant de sa voiture. Je ne marche plus, je ne touche plus le sol, je suis dans un etat 
second ! 

Je rentre a mon domicile ou je prends un bon bain qui semble me purifier de la prison. 
Ensuite, je me rends, avec Cyriaque et Arlette, chez Francis qui me fait une injection de 
nootropyl, injection sensee me proteger d’une cuite trop rapide lors de la fiesta ! Vers 19 
heures, j’entre enfin dans le nouvel antre de Pepe : LE PLEIN LE POT. II y a mis des 
guirlandes et tous les amis et copains vont defiler pendant la soiree. Pepe m’a accueilli en 
m’offrant un T-shirt de CAVANA et un gros boulet de format en plastic qui m’est directement 



fixe sur la cheville... l’ambiance et le decor sont plantes ! 


Meme la gendarmerie est a mon insu de la fete. Installes dans une camionnette banalisee, les 
gendarmes photographient toutes les personnes entrant dans le bistrot. Ignorant cette presence 
parasite, je me defoule joyeusement devant tous ! Quant au trois grammes de nootropyl, son 
action ne fut que symbolique, je sombre vite dans une douce ivresse euphorisante, je suis fibre 
et heureux ! Le soir, avertis par la presse radiophonique et televisee, d’anciens detenus et 
certains caids du milieu viennent me congratuler au Plein Pot, parmi eux, RAMADAN 
DODAC et son epouse. J'en suis etonne mais ravi ! 

Soudain, Arlette vient me presenter une dame venue me feliciter. En face de moi, une jeune 
femme mal a l’aise, en tailleur impeccable, a la limite de la suffocation en me voyant hilare, 
ivre, en T-shirt et avec un boulet au pied. Je decouvre Dominique LEROY, epouse du 
substitut emprisonne. Son embarras me rend encore plus amuse et dans mon euphorie, je 
decide de la « decoincer » ! Je la fais done asseoir a cote de moi et completement chamboulee 
par le spectacle que je lui offre, elle finit par sourire et par se detendre. C'est la fete, je ne 
veux personne de triste. Je l’invite meme a danser en lui faisant une cour que je crois discrete ! 
Personne ne s’en offusque, je suis le roi, je suis surtout solidement enivre ! 

Je ne peux decrire la fin de la fete, je me retrouve le lendemain matin dans mon lit. Je me 
souviens encore que Pepe a offert une enorme spaghetti party mais mes souvenirs restent 
vagues. 

Arlette me decrira mon attitude et c'est tres gene que je telephone a Dominique qu'hier soir 
j'avais rebaptisee « Dodo » ! Amusee, elle me pardonne bien volontiers mes « avances » 
maladroites et me promet sa venue a la maison pour la soiree intime que je donne. A son 
arrivee, je me sens mal a l'aise, j’ai meme du mal a la reconnaitre, vu mon etat de la veille ! Je 
lui trouve beaucoup de charme et un des plus merveilleux sourires que je connaisse, mais 
cette fois, je garde une attitude reservee. Cette demiere cree une legere gene mais un interet 
mutuel, commence dans nos lettres, se developpe cependant tres vite. Pourtant, pendant 15 
jours je n’aurai plus aucun contact avec elle. Pepe, quant a lui, la trouve fort a son gout, ce qui 
a le don de m'agacer mais j’ai le soin de ne pas le montrer ! Pendant ces deux soirees, une 
absence remarquee : Claudine. Durant ma detention, nous avons rompu afin de redonner une 
complete chance a mon couple avec Arlette. Celle-ci pour sa part a promis de na plus boire... 
Le lendemain je conduis Cyriaque a la rentree du college Saint-Michel. II a reussi son annee 
malgre les evenements et je suis tres fier de lui. J’inaugure aussi cette sensation desagreable de 
la confrontation avec des gens inconnus. Dans la cour du college, plein de parents devisent 
avec les professeurs. Je ne passe pas inapersu et je ressens une blessure brulante au coeur de 
voir le malaise provoque par ma presence. Plus les gens feignent d’ignorer ma presence et plus 
cela fait mal ! Par contre, lorsque je suis detaille du regard, je me sens comine un animal rare 
et malfaisant! Cet interet des gens pour ma personne va profondement me perturber et me 
changer de caractere. II faut paraitre fierement et se donner de la contenance ! Pour les gens, 
je suis un DETENU, libere certes, mais 
POUR TOUJOURS UN HOMME QUI SORT DE PRISON ! 

La directrice de l'ecole primaire du college, Madame FRANCOIS, epouse du commandant 
FRANCOIS qui eut des demelees avec la justice pour l'usage de ses techniques a l'americaine 
dans la lutte contre la drogue, m’accueille avec une gentillesse qui m'emeut! Elle sait ce que 
represented les griffes de la justice et les cicatrices indelebiles qu'elle laisse. Elle me felicite 
de ma liberation et m’encourage pour l’avenir. 

Tout au long de ma vie, je serai toujours etonne de ces felicitations recucs apres mes 



nombreuses incarcerations. Les gens vous felicitent comine si vous aviez accompli un exploit 
alors que bien souvent vous n’etes qu'un pion passif deplace au gre de l’humeur des juges ou 
des policiers. Neanmoins, ces marques de sympathie me vont toujours droit au coeur et 
mettent bien du baume sur les saignees causees par une justice aveugle de mechancete. 


DODO PARLE... 


Ma premiere rencontre avec Jean BULTOT remonte au 30 aout 1985, jour de sa liberation 
apres sa premiere detention preventive concemant la fameuse « affaire des titres ». Au travers 
de la correspondance que nous avions echangee pendant qu'il etait « pensionnaire » a la prison 
de Louvain secondaire, l’esprit de fhomme m’avait plu. Au moyen d’un plume vivace, il 
maniait l'humour et la philosophic avec talent, et ses encouragements amicaux m’avaient aide 
a passer bien des mauvais moments. 

La soiree du 30 aout est deja avancee lorsque je vais enfin avoir l’occasion de le rencontrer. 
Dans le cafe « LE PLEIN POT », appartenant a Pierre-Paul DE RYCKE et ou a lieu une petite 
fete en l'honneur de la liberation de Jean, je ne distingue d’abord personne de connu. Je me 
sens timide et gauche, il y a beaucoup de bruit, beaucoup de monde et comine je n’ai jamais 
voulu regarder aucune photo, je ne sais meme pas a quoi ressemble « mon » fameux directeur 
de prison ex-detenu. Soudain, apparait devant moi un homme de taille moyenne, l’oeil et le 
cheveux tres noirs, un boulet de bagnard en plastic attache a fun de ses pieds et habille d’un 
tee-shirt dont l’inscription me firappe immediatement. 

« DEPUIS QUE JE SAIS QUE JE SUIS UN OBSEDE SEXUEL JE REGRETTE 
AMEREMENT TOUT CE TEMPS OU JE L'ETAIS SANS LE SAVOIR » CAVANA 

Evidemment, cela ne correspondait pas du tout a l’idee classique que je me faisais d’un 
directeur de prison. Jean a deja passablement arrose ses retrouvailles avec sa liberte et ses 
amis mais parvient tout de meme a se souvenir qui je suis et me place d’emblee a ses cotes 
pour le souper. Durant toute la soiree il fait tout naturellement avec moi exactement ce qu'il 
fera pendant toutes ces six annees suivantes que nous allons passer ensemble : il me fait rire, 
il m’intimide, il me fascine par ses idees, il m'emeut beaucoup et me fait pleurer. Il m'emmene 
a la decouverte d’un autre monde et deja il entrouvre des portes que je meurs d’envie de 
pousser et qui pourtant me font peur. Je le soupconnc d’etre terriblement intransigeant, sans 
nuances et d'attendre toujours de ceux qu’il aime qu'ils se depassent sans cesse et aillent au- 
dela d'eux-memes. Je ne sais pas si je le trouve sympathique, beau ou laid, certains de ses 
cotes m’enervent deja parce que je le sens dominateur et possessif mais je sais que je me 
trouve face a un homme, un vrai et je tombe, en quelques heures, eperdument amoureuse de 
lui! 

TITRE EN GRAS 


Une semaine apres ma liberation, Pepe m’apporte un message de RAMADAN DODAC 
surnomme « RAMA ». 

Apres un luxe de precaution oratoires que je ne lui connaissais pas, RAMA m'annonce que je 
suis en danger de mort et qu'un « contrat » a ete conclu sur ma tete. Je suis completement 
estomaque et effare !! Mais qu'est-ce qui se trame encore ? 

Devant mes yeux agrandis de stupeur, RAMA m’explique calmement que je suis au centre 
d'une cabale qui me depasse et qu'un certain Alain MOUSSA a ete charge de m’abattre. Je me 
crois en plein milieu d’un atroce cauchemar ! 



RAMA poursuit en me declarant qu'il vaut mieux que je prevoie mon depart vers d'autres 
cieux car le pire pour moi est encore a venir ! Quand a la menace de MOUSSA, il me promet 
d’arreter ce projet mais je dois absolument rester sur mes gardes. 

Si ce n’etait la personnalite de RAMA qui a repris l'heritage de Michel DEWIT, le dernier vrai 
« parrain » de Bruxelles, je pourrais croire a une declaration pleine d’elucubrations fantasques, 
mais RAMA n’est vraiment pas n'importe qui ! Officiellement, il est le patron d’un taverne- 
restaurant situee chaussee de Charleroi a Bruxelles : Le Jambon !! 

Dans l’ombre, RAMA dirige le milieu criminel albanais, le plus puissant de Bruxelles. Il 
controle ainsi tous les bars situes pres de la gare du Nord. Rien de ce qui se produit dans le 
crime ne lui est etranger si ce n’est la drogue dont il a repugnance (me dit-il, mais declaration 
qui s'averera fausse tres longtemps apres sa mort) 

Je vais souvent le revoir et j’apprends ainsi beaucoup de choses interessantes. Il connait bien 
DORAO. Du temps ou ce dernier sevissait a Bruxelles, RAMA me raconte qu'un jour 
l’inspecteur etait venu tenter de le racketter !! 

RAMA lui avait propose de s'expliquer aux poings, ce que DORAO avait accepte. RAMA, 
perllde, lui demanda cependant de laisser son arme de service au barman et ils sortirent 
s'expliquer. 

« Pour une belle bagarre, ce fut une belle bagarre ! » 

m’avoue RAMA tout hilare. Il ajoute encore, tout guilleret de sa perfidie, qu'avant la bagarre, 
il a ordonne a son barman de demonter l’anne de DORAO, d’en garder le chien et de remettre 
les pieces restantes dans un sac en plastique. Ce qui fut fait! 

Cette histoire, RAMA me la raconte alors que je suis accompagne d’un ami. Il m'affirme qu'il 
possede toujours ce chien ! 

Lors d’un autre passage au JAMBON, il me met une fois de plus en garde : 

« On te prepare un costume sur mesure, et on va t’impliquer dans un serieux bourbier ! » 

Lors d’une discussion sur les tueries du Brabant Wallon, il me dit avec colere : 

« Ces crapules de tueurs n’ont rien a voir avec nous ! Le milieu n'est en rien mele a cette 
boucherie ! Tout cela est commandite d’en haut! » 

RAMA me devoile aussi les raisons d'une telle sympathie a mon egard. Outre ma reputation 
d’homme de coeur repandue aupres des detenus et de leurs families, j’avais aussi sauve la vie 
de MICHEL DEWIT, le dernier « parrain » du milieu criminel beige. En 1982 ou 1983, ce 
grand truand est hospitalise au centre medico chirurgical penitentiaire situe dans l’enceinte de 
ma prison. Monsieur DEWIT se revele tres malade et sa tension arterielle atteint le maximum 
sur le tensiometre : 30 !! Sa vie est reellement en danger et il necessite de toute urgence un 
medicament appele CATAPRESSAN! Ce medicament n’etait pas de stock a l’etablissement, 
de plus, nous sornmes dimanche et il faut trouver une pharmacie de garde ! Le medecin me 
demande de m’en occuper et par telephone, je joins un maximum de pharmacies ouvertes. 
Apres de nombreux appels, je finis par degotter une boite a Vilvorde, soit a 20 km de la prison 
t 

Devant cette situation, je requisitionne la police de Saint-Gilles a fin d’aller querir en urgence 
le precieux medicament. Faisant diligence, la police, toutes sirenes hurlantes, me rapportera le 
CATAPRESSAN dans l'heure. Je revois encore avec amusement la tete des policiers lorsque 
je leur ai appris qu'ils venaient de sauver la vie du Parain de Bruxelles. MICHEL DEWIT 
apprendra mon action et en parlera plus tard a ses lieutenants. C'est ainsi, entre autre, que j'ai 
toujours joui de l'estime de « l’elite » delinquante. 



Je vais aussi avoir le grand plaisir de revoir DODO. 

Les festivites de ma liberation se sont estompees et nous pouvons avoir nos premieres vraies 
conversations. Celles-ci sont animees et profondes. Un fait pourtant suscite sa curiosite : 

« Comment peut-on etre d’extreme droite ? » 

En fait, pour sa famille et ses amis, je suis d’abord d’extreme droite avant d’etre qualific de 
directeur de prison ou de delinquant. Nous debattons souvent de la realite actuelle du 
nationalisme et c'est avec un immense plaisir que je peux echanger mes idees avec elle. Notre 
relation n’a pas fair de plaire a tout le monde. Comment peut-on frequenter des « neo-nazis » 

? 

La sympathie que certains m’avaient manifestee s'estompe parfois des que Ton connait mes 
opinions politiques. DODO ne s'isole pas dans un carcan de tabous intellectuels et avec une 
curiosite grandissante, elle ecoute mes propos. A son tour, elle defend ses positions politiques 
et nous devisons cornme de tres vieux amis, parfois jusque tard dans la nuit. Elle m’apprend la 
premiere ce que je suppose depuis longtemps : son mari CLAUDE LEROY lui a revele que 
mon dossier au ministere de la Justice est barre en rouge avec la mention « EXTREME 
DROITE ». 

Nous sortons parfois prendre un verre en copain, sans jamais oublier de rendre visite a PEPE, 
bien entendu ! 

En plus de son charme et de son sourire (inimitable, rappelons-le) DODO possede une tres 
bonne cave en partie foumie par les cadeaux rccus au cabinet de JEAN GOL lorsque 
CLAUDE LEROY y etait conseiller. La redistribution des « petits cadeaux » avait lieu une 
fois par semaine et c'est ainsi qu'en tres agreable compagnie, j'ai deguste les pots de vin du 
Ministre. DODO me demontre une force de caractere peu commune. Elle a appris par la 
police judiciaire la double vie mouvementee de son mari mais elle veut se battre a ses cotes 
jusqu'a la fin du proces ! J'essaie de lui donner un maximum de confiance en elle car le proces 
de son mari se profile coniine une epreuve tres difficile et tres mediatisee. Cornme je lui 
accorde une tres grande confiance, je lui devoile mon projet de faire la lumiere sur la force qui 
me nuit dans l'ombre et meme de denoncer si je les trouve, les auteurs des tueries du Brabant 
Wallon. 

DODO PARLE... 


La visite derriere le carreau est terminee. Je rejoins le troupeau de femmes dociles pour 
descendre le grand escalier qui mene a la cour de la prison de Saint-Gilles ou Claude Leroy 
est detenu depuis six mois. La nausee me prend deja et je redoute l'attente devant la lourde 
porte de la prison. Depuis quelques semaines, a peine franchie cette porte, je me precipite 
pour me cacher entre deux voitures et cassee en deux, je vomis en pleurant sur mon infortune, 
ma rage et mon impuissance et surtout mon degout pour cette nouvelle vie que j’apprends. Au 
dehors, aujourd’hui un ami m’attend ! 

Je lui ai avoue hier cet horrible « rite-de-la-nausee » et je me sens maintenant tellement 
honteuse de me montrer a lui dans cet etat. II me prend par le bras et me dit qu'il comprend, 
mais qu'il faut que je marche un peu et encore un peu. Avec une infinie patience, jour apres 
jour, je le retrouverai apres la porte, gagnant chaque fois avec lui quelques metres sur ma 
peine et ma honte. 

Au bout d’un mois a peu pres, Jean me conduira ainsi jusqu'a son jardin, puis sa maison ou, 
avec un de ses trop rares mais si merveilleux sourire et me posant sur la tete une branche 
d’arbre, il m'offrira avec beaucoup de tendresse « la palme de la plus grande bataille gagnee 
depuis Waterloo ! » Des mois plus tard, le 4 janvier 1986, soit la veille de mon anniversaire, 
Jean arrivera a la maison en tenant contre son etemel blouson de cuir noir, un enorme bouquet 



de fleurs, toutes blanches ; a l’interieur de ce bouquet de purete, je trouvera la cle absolument 
enorme... celle de la prison de la grande porte d’entree de la prison de SAINT-GILLES !!! 
C'etait, me dit-il alors, en souvenir de mes angoisses passees et vaincues et surtout en symbole 
du respect de notre liberte mutuelle. Je possede bien-sur toujours cette cle, elle a voyage avec 
moi au PARAGUAY et en AFRIQUE DU SUD et sa photo a paru dans certains joumaux. 
Mais je trouve qu'elle n'a pas sa place ici, en BELGIQUE. 

TITRE EN GRAS 


Maintenant que mes pensees politiques sont devoilees, je prends ouvertement contact avec le 
parti qui represente le plus mes idees politiques : FORCES NOUVELLES. En fait, je n'y suis 
pas inscrit mais FRANCIS DOSSOGNE, le leader du FRONT DE LA JEUNESSE, est un 
ami. Je l'ai rencontre par hasard au JONATHAN que son agence pourvoie en portiers surs, et 
depuis lors, nous avons eu de multiples conversations et bu de nombreux pots ensemble. Je 
crois savoir aussi que c'est suite a une intervention en sa faveur au ministere que je suis fichc 
d'extreme droite. 

La veille de son incarceration pour purger trois mois de prison (Le tribunal l’avait condamne 
pour creation de milice privee) Francis me telephone pour prendre un dernier godet d’homme 
libre ! Par ironie du sort, il est incarcere le lendemain dans ma prison ! Je lui promets d’etre 
present lors de son ecrou ! Le lendemain, je le vois arriver avec son billet d’ecrou. Comine 
tout le monde, il est penaud et triste et je m’efforce de rendre la procedure moins austere ! 

Je resterai un bon moment avec lui, je sais que la premiere heure en prison est atroce ! Un 
mois plus tard, une grace royale va liberer les detenus dont il reste moins de six mois a 
accomplir ! Francis doit done etre parmi les beneficiaires ! Or, son nom ne figure pas sur la 
liste, par contre arrive une note du ministere nous enjoignant de liberer Monsieur 
DOSSOGNE un jour avant les autres, a condition qu'il signe tout un tas de restrictions. Parmi 
celles-ci... promettre de ne pas renverser l'Etat par la force ?! Quant aux voleurs, violeurs, 
escrocs, violents... ils peuvent sortir le lendemain sans aucune condition ! Je presente done la 
chose a FRANCIS DOSSOGNE et devant cette discrimination qui prouve parfaitement que 
Francis DOSSOGNE est un prisonnier politique, je lui enjoins de refuser cette premiere grace 
et d’attendre un jour de plus ! Ce qu'il fit!! Le lendemain, le ministere refuse de le liberer avec 
les autres detenus s'il ne signe pas toutes ces conditions. Je telephone au service des Graces du 
ministere en reclamant le document de son elargissement! On me repond que tant qu'il ne 
signe pas, il ne sera pas grade. Cette reponse me met en colere et je leur declare que l’arrete 
royal ne stipule aucune reserve politique et que selon l'arrete FRANCIS DOSSOGNE doit 
etre libere ! 

- Occupez-vous un peu de vos affaires, Monsieur BULTOT, ceci ne vous regarde en rien, 
vous etes la pour executer et non pinailler les decisions ! 

- Puisque vous le prenez comine cela, si je ne re^ois pas l'ordre d’elargissement de Monsieur 
DOSSOGNE aujourd’hui, je me verrai contraint d’alerter la presse ! 

Mon interlocutrice reste un moment sans voix. Puis : 

- Pourquoi vous interessez-vous done tellement a cet homine, est-ce un ami ? 

- Oui, Madame, et il a droit a etre traite comine n'importe quel detenu ! 

- Vous avez de droles de frequentations, Monsieur BULTOT, je vais voir ce que je peux faire. 
Le soir meme, FRANCIS DOSSOGNE est libre ! 

Le soir meme, JEAN BULTOT est fiche d’EXTREME DROITE. 


« La BELGIQUE est un pays ou les libertes de pensee et dissociation sont garanties » ; 
CONSTITUTION BELGE ?!?!? 




Quant a DANIEL GILSON et au local du parti, ils sont parfaitement inconnus pour moi ! 

FRANCIS DOSSOGNE et moi-meme, allons un nous avoir une conversation incroyable... 

II connait des infonnations incroyables tres precises sur les tueries du Brabant Wallon, et nous 
decidons de mettre toutes nos connaissances en commun. Premier nom qu'il me devoile : 
BRUNO VAN DEUREN. Je sursaute excite a l'extreme. C'est le meme nom que ce detenu qui 
se confessa a moi, il y a quelques annees. 

FRANCIS DOSSOGNE m’explique : 

« VAN DEUREN a utilise une arme provenant de l’attaque de l’annurerie DEKAISE ! (Ces 
armes ont servi dans d’autres tueries !). Elies etaient entreposees dans un cafe a Diegem, 
ancienne chaussee d'Haecht. Ce cafe est denomme : DE POMP ! 

Un membre de la famille de VAN DEUREN est terrorise par Bruno, ce dernier est du genre 
tres violent. Je me souviens en effet, qu’il avait ete puni a la prison pour racket sur les autres 
detenus et qu'il presentait une faille et un gabarit impressionnant. Un jour, ce membre de la 
famille s'est con lie tres prudemment a un ami d’extreme droite ! 

Cet ami promet de l’aider et prend contact avec FRANCIS DOSSOGNE, leader d’extreme 
droite bien connu ! 

Mais voila, Francis me stupefie par la suite de son recit. II m'affirme que de par ses 
connaissances dans les milieux judiciaires, et de par sa propre experience, les enquetes sur les 
tueries sont VOLONTAIREMENT sabotees et qu'il est delicat d'aller denoncer VAN 
DEUREN !!! 

Serait-il aussi devenu fou ?? II refuse en tout cas de me citer ses sources, mais son accent est 
categorique. J'apprendrai toutefois, apres ma liberation du 5 avril 1991 (que j’espere definitive 
!!) que Francis avait rapporte cette information a la police de Bruxelles, section judiciaire, un 
an auparavant... sans resultat. Lors d'une conversation ulterieure, il me mettra en garde contre 
le Parquet de Nivelles, le juge SCHLICKER, et le Procureur du Roi DEPRETRE. 

Pendant ce mois d’octobre 1985, je fais plus ample connaissance avec le parti FORCES 
NOUVELLES. 

DANIEL GILSON en est incontestablement fame, Francis n'y etant plus tres actif!! 

Quand on entre dans ce « repaire de Nazis » on est tout de suite frappe par l’atmosphere 
lourde et tendue du local !...la buvette est le grand centre d’attraction et en fait d’univers a la 
Kafka decrit par certains, l'ambiance y est bon enfant et les dernieres blagues sont recherchees 
avec plaisir ! Bref, un endroit relax qui etonne toujours les amis que j'y emmene !! 

Au courant de mes problemes, Daniel me lance comine idee que je pourrais me refaire une vie 
en Amerique latine, au PARAGUAY ou en ARGENTINE. 

- Nous disposons de quelques contacts par la et tu pourrais y recevoir les infonnations utiles 
pour t'y installer. 

Je rencontrerai un peu plus tard une personne habitant en Amerique latine et cette perspective 
va rapidement faire son chemin dans mon esprit. Arlette est loin d’etre tentee par l'aventure. 
Nos relations ont deja repris la situation anterieure a ma detention et l’idee de l'eloignement de 
ses parents lui semble insupportable ! Cyriaque est trop petit pour comprendre l'etendue d’une 
telle situation. Lorsque j’en parle a Dodo, elle estime qu'il s'agit d’une bonne idee a condition 
de voir les possibility de se realiser socialement sur place. Or, de l'argent... je n’en ai pas ! Par 
contre suite a la conversation avec la personne latino-americaine, j’apprends que bon nombre 
d'Europeens placent leur argent en noir dans ces pays et parfois, lorsqu'on connait bien ses 
interlocuteurs, avec de plantureux benefices. 

Le mieux est done d'y aller faire une tournee de prospection et je decide de m’y rendre des que 



les audiences du proces de CLAUDE LEROY seront terminees. Ce dernier, mis au courant de 
mon projet de rechercher les auteurs des tueries du Brabant Wallon, me met en garde par 
l’intermediaire de Dodo du danger d’une telle demarche ! L’idee de mon depart au 
PARAGUAY lui semble par contre une tres bonne initiative. 

Les elections legislatives approchent a grands pas : elles sont prevues pour le 13 octobre. 

Cette fois, foin de tiedeur, il faut participer ! 

Pour des raisons judiciaires evidentes, je ne peux me presenter moi-meme. Mais ARLETTE 
m’etonne par sa pugnacite : elle accepte de s'inscrire sur la liste de la Chambre des 
Representants. 

Je telephone a mon pere : 

« Papa, si tu veux lutter contre l'injustice et virer les pourris, tu dois aussi militer ! » 

Et mon pere accepte a son tour son inscription sur les listes du Senat. 

FRANCIS DOSSOGNE demande a PEPE de militer a son tour : 

« PEPE, tu connais tellement de monde... » 

Et Pepe accepte sans rien connaitre du tout a la politique ! 

Pourtant, quelques jours plus tard, commcncant a trouver la chose amusante, PEPE va 
declencher sa propre campagne electorale. S’entourant de dessinateurs de bandes dessinees, il 
cree un slogan tout a fait personnalise et parfaitement dans SON optique de l'Extreme Droite : 
AVEC PEPE, VOTEZ POUR LA BOUFFE, LA DOUFFE, ET LA TOUFFE !!! 

La douffe etant un terme bruxellois pour designer la cuite ! Le Parti s'agite mais le sourire de 
PEPE desarme ses detracteurs ! Malgre son slogan accrocheur, il ne recoltera que 36 voix 
tandis qu'ARLETTE ramasse 38 voix. 

PEPE sera repris plus tard dans la presse, comme un militant actif de l'Extreme Droite ?!?! 

Claude est en meilleure forme depuis l'assassinat de son indie JULES MONTEL (Assassine 
en promenant son chien). Peu apres ce meurtre, le Conseiller a la Cour d’Appel WEZEL qui 
s'occupe de son affaire, se deplace exceptionnellement jusqu'a la prison pour y entendre 
CLAUDE LEROY. La procedure normale est le transfert du detenu vers le cabinet du juge. 
Conversation de juge a inculpe ou de Frere a Frere Franc-Macon ? 

Juste apres cette conversation, le conseiller WEZEL cloture l’instruction et inscrit l'affaire a 
l’audience. Il est a noter que le conseiller GUY WEZEL venait juste d’etre nomine a ce poste 
important, auparavant il etait juge destruction a Nivelles et il etait en charge du dossier des 
tueurs du Brabant Wallon. Il n’a decouvert aucun suspect ! 


Je telephone a mon pere : 

- Papa, si tu veux lutter contre l'injustice et virer les pourris, tu dois aussi militer ! Et mon pere 
accepte a son tour son inscription sur les listes du Senat. 

Francis Dossogne demande a pepe de militer a son tour : 

- Pepe, tu connais tellement de monde... 

Et pepe accepte sans rien connaitre du tout a la politique ! 

Pourtant, quelques jours plus tard, commcncant a trouver la chose amusante, pepe va 
declencher sa propre campagne electorale. 

S'entourant de dessinateurs de bandes dessinees, il cree un slogan tout a fait personnalise et 
parfaitement dans son optique de l'Extreme Droite : « Avec pepe, votez pour la bouffe, la 
douffe et la touffe !!! ». La douffe etant un terme bruxellois pour designer la cuite ! Le Parti 



s'agite mais le sourire de pepe desarme ses detracteurs ! Malgre son slogan accrocheur, il ne 
recoltera que 36 voix tandis qu'Arlette ramasse 38 voix. Pepe sera repris plus tard dans la 
presse, coniine un militant actif de l'Extreme Droite !?!? 

Claude est en meilleure fonne depuis l'assassinat de son indie Jules Montel (assassine en 
promenant son chien). 

Peu apres ce meurtre, le Conseiller a la Cour d’Appel Wezel, qui s'occupe de son affaire, se 
deplace exceptionnellement jusqu'a la prison pour y entendre Claude Leroy. La procedure 
nonnale est le transfert du detenu vers le cabinet du juge. Conversation de juge a inculpe ou 
de Frere a Frere Franc-Macon ? 

Juste apres cette conversation, le conseiller Wezel cloture l’instruction et inscrit l'affaire a 
l’audience. 

II est a noter que le conseiller Guy Wezel venait juste d’etre nomine a ce poste important, 
auparavant il etait juge ^instruction a Nivelles et il etait en charge du dossier des tueurs du 
Brabant Wallon. Il n’a decouvert aucun suspect! 

Au mois d'octobre 1985, j’achete un ticket d’avion avec depart pour le Paraguay le 17 
novembre 1985 et retour le 17 decembre 1985. 

Je rencontre Borsu sur la place Keym de Watermael-Boisfort, en compagnie du Grand 
Philippe et je l'avertis de mon depart. Maitre Guy Francois ecrit a madame Lyna, mon juge 
d’instruction, pour lui signaler mon voyage d’un mois. 

Dodo m'assure aussi qu’elle a deja en tete des noms de personnes qui seraient peut-etre 
disposees a placer de l’argent en noir. 

Debut novembre, Daniel Gilson me demande un service tres special. Il a ete contacte par un 
groupe d’extreme droite etranger qui a absolument besoin d’un petit lot d’annes (six au 
maximum). 

Vu l'attitude de la justice beige a mon egard, je n’hesite pas a accepter et a me mettre a la 
recherche des dites armes en noir. 

Je vais done prendre contact avec les differents tireurs que je connais. 

Au meme moment, le proces de Claude Leroy debute avec tout le tintamarre que Ton 
prevoyait. 

Proces a peine imaginable ! 

Alors qu'il etait amene par une cohorte de gendannes, Claude pouvait pendant les 
interruptions d’audience deviser avec sa femme et ses amis. 

Chaque jour, j'accompagne Dodo au proces de son mari. 

Elle s'y montre tres courageuse car certaines prostituees sont chaque jour assises au premier 
rang de la salle d’audience. 

Il est une chose de savoir et une autre de voir !! 

Pendant le proces, je decouvre un personnage tres particulier : Yvonne Deschuteneer, 
surnommee Bobonne Champagne ! 

Elle vient temoigner contre Claude, elle a paye une sonnne importante alin qu'il s'arrange de 
par ses fonctions a rayer une decheance du droit de conduire. 

Par contre cette dame, au meme proces, est poursuivie par une congregation religieuse : « les 
freres maristes » pour une escroquerie de 135 millions FB ! 

Le President fait mander le « frere econome » a la barre afin qu’il puisse presenter ses griefs. 
Tres a l'aise, le Frere explique que Bobonne Champagne a emprunte de l'argent a sa 
congregation, argent qu'elle n’a jamais remis ! 

Lorsque le President lui demande les raisons d'une telle somme, le Frere lui repond a la limite 
dela syncope : 

- Elle avait besoin de choses et d’autres ! 



Toute la salle retient son rire, il est tres clair que le Frere n'ose avouer la verite ! 

Devant ses reponses evasives, le President le renvoie a son couvent et le pauvre Frere (sic) 
doit etre soutenu par deux membres de sa congregation pour sortir du pretoire, ses jambes ne 
le portent plus. 

Je m'amuse beaucoup de la scene, je suis loin d’imaginer que Bobonne Champagne est deja 
intervenue dans ma vie. 

Bien plus tard, j’apprendrai qu'elle est en contact tres secret avec le cure Paelinkx de Wieze, 
celui d’ou proviennent les fameux titres de Van Esbroek ! 

Lors d'une interruption d’audience, Claude m’appelle et me serre la main. 

A ma stupefaction, il me chuchote a l’oreille que le lendemain il me remettra un document qui 
va m’aider dans mes recherches ! 

Et effectivement, le lendemain, quelle n’est pas ma surprise de recevoir pendant une 
interruption d'audience, un dossier ultra-secret de la B.S.R. (Brigade Speciale de Recherche) 
de la Gendarmerie, ecrit par le sous-officier Balfroid, et ce, au nez et a la barbe des gendarmes 
de faction !! 

Il faut dire qu’il regne une ambiance tres relax et que les gardiens sont tres discrets. Claude 
n’est pas trop tracasse : une partie des magistrats qui le jugent est aussi Franc-Macon ! 

De retour chez moi, ma stupeur s’agrandit a la lecture du dossier. 

Il s’agit d’un dossier sur les dessous de l’affaire Dekaise ! 

On peut notamment y lire ce qui ne fut jamais publie : la fa?on precise dont l’agression s’est 
deroulee ! 

Cest ainsi que, completement assomme, j’y redecouvre exactement ce que Bruno Van Deuren 
m’avait explique et qu’il n’avait absolument pas pu lire dans la presse, a savoir, par exemple, 
qu’il etait venu recuperer du materiel sous forme d’expedition punitive car Dekaise n’a pas 
respecte son contrat. Voici done le troisieme element de la culpabilite de Bruno Van Deuren 
dans l’attaque de l’annurier !! 

Je prends aussitot contact avec Francis Dossogne pour lui faire part de cette decouverte ! Je 
lui remets une copie du dossier. 

De son cote, Francis me revele encore un autre dossier encore plus surprenant: l’affaire Pinon 

M 

Du temps ou il est reporter aupres du magazine « Nouvel Europe Magazine », Francis a un 
jour une reunion de redaction epoustouflante. Il est a noter que ce magazine est fiche 
d’extreme droite. 

Le redacteur en chef, Monsier Lecerf, declare a ses redacteurs avoir recu la visite d’un 
medecin psychiatre tres particulier. 

Voici comment Monsieur Lecerf narre les faits que lui a rapportes ce medecin : 

- Je m’appelle Pinon et il faut signaler un scandale atroce au public. Ma femme organise des 
orgies et des mineurs d’age d’un home de la Protection de la Jeunesse ont ete « pretes » par un 
juge de la Jeunesse !! 

Parmi les participants a ces orgies, il n’y a que du beau monde ! 

Lecerf reprend sa respiration avant d’oser continuer : 

- Entre autres, il y a le ministre Van Den Boeynants, le Substitut du Procureur du Roi 
Monsieur Depetre, le General en chef de la Gendannerie Monsieur Beaurir et ...et... le prince 
Albert de Belgique, le propre frere du roi !!! 

Lecerf continue avec difficulty : 

- Deux jeunes mineurs qui ont participe a une de ces orgies auraient ete assassines afm de les 
empecher de raconter cette soiree !! 


La nouvelle est enorme pour ce comite de redaction, et apres la stupeur, l’incredulite s’installe 



Chaque journal dispose d’un lot d’informateurs et fatalement, Lecerf aussi !!!! 

On suppose que Lecerf aurait pris contact avec Christian Smets, commissaire a la surete de 
l’Etat!! 

Ce dernier ecrit parfois des articles dans le magazine, mais sous un nom d’emprunt. Smets 
aurait aussitot declare toute cette affaire ridicule et stupide et pour cause.... Smets est aussi 
l’amant de madame Pinon, mais cette information est evidemment ignoree de Lecerf. 

De plus, le redacteur en chef n’est vraiment pas tres chaud pour se meler d’un scandale aussi 
enorme !! 

Apres l'information jugee tres sure, en provenance de l’informateur de Lecerf, le comite tombe 
d’accord sur l’inanite des propos de ce psychiatre. 

Le magazine ne bougera done plus. 

Devant la decision du « Nouvel Europe Magazine », Pinon se tourne vers « l’autre extreme » : 
le journal pour. 

Ce journal est en effet repris dans les publications de gauche et meme d'extreme gauche. Son 
redacteur en chef, Monsieur Garrot, est par contre emballe par ce scandale et decide de le 
publier. 

II n’en aura pas le temps, le journal sera incendie criminellement. 

Les auteurs... des militants d'extreme droite dont on ne connaitra jamais le commanditaire. 

En tout cas, les dirigeants de « Forces Nouvelles » sont tres acharnes a expliquer que ce 
groupe a ete manipule par quelqu'un qui a voulu faire croire a un acte politique. 

Par contre, l'enquete semble savoir que des motards impliques dans l’incendie, seraient partis 
du cafe « De Pomp » a Diegem... le meme cafe ou les annes volees chez Dekaise furent 
entreposees !!! 

En 1982 ou 83, il s’en souvient plus avec exactitude, Francis Dossogne est toujours en contact 
avec Paul Latinus. 

Paul Latinus est un des dirigeants d’un groupe clandestin dont deux membres seront juges et 
fun condamne a la prison a perpetuite pour le meurtre d’un couple de la rue Pastorale a 
Anderlecht. 

Ce mouvement clandestin est le Westland New Post ou plus simplement le W.N.P. 

Ce groupe etait en majorite forme par des homines en provenance des Forces Nouvelles. 

Au depart, ils vont espionner le centre de l’O.T.A.N. a Bruxelles et y derober certains 
documents secrets qu'ils photocopient et envoient a des homines politiques pour prouver 
l’inefficacite des mesures de securite. 

Ensuite, ils vont suivre des cours de formation de filature. Leur professeur est recouvert d’une 
cagoule, mais sera identifie plus tard : Christian Smets, encore lui, surnomme « le Canard » a 
la Surete de l'Etat. 

Deux membres vont assassiner un couple a Anderlecht. Les deux accuses s'appellent: Marcel 
Barbier et Eric Lammers. Barbier est condamne a la perpetuite, Lammers est acquitte. 

Pendant le proces d’Assises, le Canard vient temoigner : 

- Je donnais des cours a fin d'infiltrer ce milieu d’extreme droite. Je ne connaissais rien des 
meurtres. 

Surprise : deux de ses collegues, commissaires eux aussi a la Surete de l'Etat, surnommes Le 
Chien et Le Lapin (une vraie menagerie !) viennent temoigner du mensonge du Canard. Ils 
etaient les seuls en charge de cette mission et le Canard n'etait pas charge de l’extreme droite 
!!! 

Ces deux commissaires seront ecartes de leur fonction. Le Chien devra meme se soumettre a 
un examen psychiatrique. 



Latinus n’est pas present, on l’a retrouve pendu a son domicile avec un fil de telephone qui se 
rompt a une traction equivalent a la moitie de son poids !!!! 

Mais en revenant maintenant a la conversation entre Dossogne et Latinus, ce dernier exhibe 
de sa mallette un dossier constitue par l'affaire Pinon. 

Dans ce dossier, s'etalent les memes noms qui furent donne par Pinon a Lecerf. 

Dossogne repousse le dossier. 

- C'est du bidon !!! 

Or Latinus, lui, est parfaitement persuade de la valeur de son document. 

Le lendemain de son « suicide », sa maison sera fouillee par la Surete de l'Etat, la brigade 
speciale de recherche de la gendannerie, la P.J. de Bruxelles et la P.J. de Nivelles. 

Le juge Schliker de Nivelles proclame la veracite de la version suicide et... enterine le dossier 
!!! 

Pendant sa detention a la prison de Saint Gilles, Barbier est en contact avec le substitut Claude 
Leroy, detenu lui assi ! 

Ils travaillent tous deux a la bibliotheque de la prison. 

Barbier declare a Claude Leroy : 

- II y a bien un dossier Pinon et le W.N.P. a ete charge de recuperer a un poste de gendannerie 
le dossier repressif de prise en adultere de madame Pinon avec le Canard !!! 

Plus tard, Pinon change de version, il s'agit d’une medisance basee sur la jalousie. II faut 
savoir cependant qu’il a un dernier sursaut en 1988, ou il porte plainte pour menace de mort en 
1981 et 1982 en provenance du... Canard !!! 

Plainte sans aboutissement, car elle est deposee apres les cinq ans de prescription de Taction 
penale ! 

Depuis, le suicide de Latinus est souvent remis en cause par les magistrats. A Textreme droite, 
on ne prononce plus le mot de « dossier bison » !!!!! 

Pour Tinstant, le proces de Claude Leroy se termine et je peux assister a la demiere audience 
avant le prononce. J'ai entendu le requisitoire du Procureur General, il requiert 5 ans 
d’emprisonnement. Le requisitoire sera tres dur compare a la peine relativement modique 
reclamee en fin de son discours !! 

A T epilogue de ce proces ou je passais toutes mes journees, je me trouve disponible pour 
rechercher les annes pour Daniel Gilson. 

Comme j'ai tout a fait confiance en lui, et que je dispose d’un peu d’argent pour le Paraguay, 
nous tombons d’accord pour que j’achete moi-meme les annes et il me remboursera a la 
livraison. 

Aux environs du 5 ou 6 novembre 1985, un des premiers tireurs avec lequel je prends contact 
n’est autre qu’Antoine Delsaut!! 

Je lui demande s’il ne desire pas me vendre Tune ou l'autre arme en noir qu’il possede. Je lui 
expliquer etre aussi a la recherche d’une ou de deux mitraillettes « modernes » Uzi ou Beretta 
ou Ingram !!! 

Je ne me mefie absolument pas de sa reponse... 

-Je ne possede pas d’arme en noir et malheureusement, je ne sais pas f aider. Or il ment !!! Et 
je m’en etonne !!! 

Lors d’une perquisition menee plus tard a son domicile, on saisira une demi-dizaine d’armes 
en noir. Elies seront eminences a la P.J. de Bruxelles, ou elles disparaitront, recuperees par un 
service superieur (en clair, recuperees par la Surete de l’Etat !). 

Ce que j’ignore totalement et que je suis a cent lieues de deviner : Delsaut enregistre ma 




communication telephonique... d’ou ses precautions oratoires !!! 

Les autres amis, suite a mes ennuis judiciaires recents, preferent s'abstenir !!! 

Je vais done contacter un trafiquant d’annes bien connu et avec lequel j’avais eu des 
conversations alors qu'il etait detenu : Jean Baugnet. 

II ne dispose pas de mitraillette, mais peut me fournir cinq annes toutes neuves sur le champ 


Le soir meme, je prends livraison de quatre revolvers S.W. 38 special tout neufs dans leur 
boite d’emballage mais aux numeros soigneusement limes et d’un pistolet FN 9mm court. Je 
lui regie la somme de 110.000 FB. 

Le lendemain, de bonne heure, j’apporte le tout a Daniel Gilson. II attend que son 
interlocuteur le recontacte, ce qu'il doit faire incessamment! J'accepte done de patienter un 
peu pour le remboursement mais je suis presse, nous soinmes le 13 ou le 14 novembre et mon 
depart pour le Paraguay est fixe pour le 19. 

Au Plein Pot, j’organise une reunion avec Francis Dossogne et l'assistante sociale qui a 
recueilli comine moi les propos de Van Deuren. 

En effet, les crapules du Brabant Wallon viennent encore de tuer sauvagement des innocents 
sur deux parkings de super-marche Delhaize. 

Le 27 septembre 1985, apres la premiere attaque a Braine-L’Alleud, qui laisse trois morts, 
aucune alerte speciale n’a ete prise pour proteger les autres super-marches. 

Une heure plus tard, les tueurs ont remis cette boucherie a Overijse, cinq victimes s'ecroulent 

M 

Le 9 novembre, ils attaquent le Delhaize d’Alost, un gosse de 14 ans qui roulait a velo est 
crible de balles !!! Huit personnes sont hachees par les balles !!! 

Apres avoir perpetre leur horrible forfait, les tueurs conduisent leur vehicule au bois de la 
Houssiere. 

La, ils mettent consciencieusement le feu a leur voiture, a tel point qu'il sera completement 
impossible d'y retrouver le moindre indice. 

Par contre, ils vont se deplacer de cinq cent metres pour bruler certains papiers !?!? 

On va ainsi trouver des cheques voles aux super-marches, afin de bien authentifier qu'il s'agit 
reellement d'une action des tueurs. 

En plus de ces cheques, les tueurs vont deposer un jeu de rebus pour les enqueteurs : on 
trouve a moitie calcines des commandes a distance pour videos, des revues de tir, une 
encyclopedic sur les armes et les munitions, un ticket de train Bruxelles-Ostende, une photo 
dont on ne voit plus que le crane blond d'un enfant, un morceau de papier ou on distingue les 
mots manuscrits suivants : genou, ventre, centre de doul... 

II est etrange de constater le soin apporte a l’incendie de la voiture et la destruction « baclee » 
de tels indices !!! 

II faut savoir que mon fils est tres blond et celui de Claudine Falkenburg aussi. 

Claudine prend regulierement le train pour se rendre a Ostende ! 

Mon ennemi invisible doit maintenant diriger les enqueteurs vers moi ! 

II lui faudra juste une petite semaine !! 

J'organise done une reunion au Plein Pot le 13 ou 14 novembre 1985. 

L'assistante sociale est de gauche, je dirais meme tres a gauche. Elle-meme, dans les milieux 
qu'elle frequente a aussi entendu parler des difficultes que rencontrent certains enqueteurs. 



Certains elements nous donnent a penser que les tueries seraient liees a l'affaire Pinon !! 


Un aubergiste, Van Camp, a ete assassine et la liste de ses clients, emportee par la 
gendarmerie a disparu !!! 

Van Camp connait tres bien le ministre Van Den Boeynants ! 

Les epoux Fourez-Dewit sont assassines sur un parking de station d’essence, la nuit a 
Nivelles. D'apres un informateur de l’extreme droite, Fourez aurait foumi des mineurs aux 
partouzes et la fille de Dewit aurait ete violee lors d'une de ces parties. On n’est done pas loin 
de penser a une vaste affaire Kennedy ou, malgre ce pays (U.S.A.) a la democratic, tous les 
temoins appeles devant la commission Warren ont ete assassines ou suicides !!! 

Nous determinons notre but: trouver un homme de l’appareil judiciaire capable de remonter a 
la tete de cette hydre monstrueuse : les tueurs du Brabant Wallon. 

Le souvenir du « suicide » de Latinus nous crie de prendre enormement de precautions. 
L'affaire peut se reveler dangereuse et meme tres dangereuse !! 

Comine il ne reste plus tellement de temps avant mon depart pour le Paraguay, je passe le plus 
clair de mon temps a parler avec Dodo. Je la sens amoureuse, moi je ne le suis pas... encore ! 
Par contre, je suis fascine par son charme et son sourire ! Plusieurs personnes qu'elle a 
rencontrees lui ont montre de l'interet pour un investissement au Paraguay. 

Contact sera pris des mon retour ! 

De plus, Dodo, lors d’une visite a Claude Leroy en prison, revient porteuse d’un message. 

- Claude souhaiterait que tu prennes contact avec Monsieur Lammers qui vient d’etre libere 
recemment. II a une proposition a te faire pour l'Amerique latine. 

Monsieur Lammers est le pere de l'accuse qui fut acquitte dans le proces du W.N.P. 


15 novembre 1985. Annexe du Palais de Justice de Bruxelles. 

Le quatrieme etage de 1’annexe du Palais de Justice abrite le Parquet de Bruxelles. Un jeune 
magistrat fringuant vient d’avoir un contact tres particulier, une information qui doit rester 
secrete lui est revelee. 

II prend sa plume et, conformement a ses instructions re 9 us, Monsieur Bart Van Lyssebeth, 
Substitut du Procureur du Roi, ecrit consciencieusement: 

« Avons appris que Monsieur Jean Bultot dissimule en son domicile des objets de nature 
suspecte, entre autre des armes et des munitions » !!! 

Le soir meme, Dodo et moi prenons rendez-vous chez le coiffeur « Yvo Di Maggio » afin de 
« me faire beau » en vue de mon voyage ! 

Daniel ne recoil toujours aucune nouvelle. 


16 novembre 1985. Prison de Saint-Gilles 

Vers 9 heures du matin, Dodo arrete son vehicule en face de la prison. Je la rejoins aussitot et 
nous demarrons dans la bonne humeur en direction de son coiffeur pres de la place de 
Brouckere. 

A peine ai-je pris le volant, que je remarque une Opel noire dans mon sillage, avec une 
antenne telephone. 

A l’epoque, les policiers, gendarmes ont quasi le monopole de ce type d’installation ! 



Quelques manoeuvres me permettent de verifier que nous sornmes bel et bien suivis. 


Au Palais de Justice : Annexe. 

Monsieur Bart Van Lyssebeth reprend sa plume et ecrit: 

« Je demande que l’information enregistree sur Jean Bultot soit mise a l’instruction et que Ton 
procede a une perquisition a son domicile. » 

Cette filature met dodo dans une rogne indescriptible ! 

Je decide aussitot de nous debarrasser de 1’importun ! 

Direction : la petite ceinture routiere de Bruxelles ou se nichent de nombreux tunnels 
souterrains !!! 

Le gendanne barbu nous suit benoitement !! 

Alors que je roule sur la petite ceinture, au lieu dit « Porte de Namur », je mets mon 
clignoteur vers la droite et me mets sur la bande de circulation adequate. Le barbu nous suit 
toujours aussi benet ! 

Au tout dernier moment, je braque sur ma gauche et je reprends la petite ceinture. La 
manoeuvre est si rapide que le barbu n’a pas le temps de reagir ! 

Sa tete dcconfitc decouvre en regardant dans notre direction le doigt du milieu de la main de 
Dodo agite en signe de ... au revoir !!!! 

Je suis moi-meme surpris de la reaction de ma passagere et lorsque nous arrivons chez le 
coiffeur, nous sornmes toujours occupes a rire en pensant a ce pauvre pandore !!! 

L'apres-midi, Dodo me laisse sa voiture non sans me recommander de recuperer ses bagues 
qu'elle a oubliees chez le coiffeur ! Ce que je fais ! 

Je me rends ensuite chez Monsieur Lammers. 

II m'explique qu’il souhaite commercer avec l'Amerique du Sud dans le cadre de pieces 
d'occasion pour voitures. 

Je le quitte vers 19 heures et je rentre chez moi. 

A peine sorti de la voiture, plusieurs gendarmes en civil m’entourent, me fouillent sur la rue et 
fouillent la voiture. 

Leur chef s’appelle Fievez, un gringalet aux cheveux longs. 

En fouillant la voiture, il trouve une lettre laissee par Dodo, il s’agit d’une lettre de l’avocat de 
Claude Leroy, Maitre Roger Lallemand. Sur l’enveloppe figue l’en-tete de l’avocat. Sans 
vergogne, Fievez ouvre l’enveloppe !! Je lui intime d’arreter. Sa lecture est formellement 
interdite, mais malgre le nouvel en-tete de l’avocat sur la lettre elle-meme et sa signature en 
bas de page, Fievez va lire toute la missive !!! 

Il me demande de pouvoir perquisitionner mon domicile, et pendant que nous en discutons, 
arrivent d’autres vehicules de la brigade speciale de recherche... avec un mandat de 
perquisition du juge d'instruction, Madame Cudell !!! 

En mon domicile de la prison, l’officier qui vient d’entrer va se montrer tres grossier. Il faut 
dire que j’avais completement oublie le geste « amical » de Dodo ce matin !!! 

En me fouillant tres sommairement, ils ne trouvent pas les quatre bagues en diamant logees 
dans la poche de ma veste en cuir. 

Arrive dans mon corridor, mon premier reflexe consiste a deposer ma veste au porte-manteau. 
Comine ils ont Fair de s’eparpiller dans la maison, je rouspete aupres de l’officier pour que les 
gendarmes fouillent piece par piece en ma presence ou celle dArlette, comine le prevoit la loi. 

Devant Arlette et Cyriaque tout tremblants, l’officier m’aboie : 

- Ta gueule ! Je fouille comine j’ai envie et si tu m’emmerdes, je te fous les menottes et je 



t'attache au radiateur !!! 


Ils vont fouiller partout en emportant le reste de mes munitions, des photographies d’armes et 
meme des bidons vides de poudre a recharger mes munitions. 

Ils trouvent mon billet pour le Paraguay et des dollars que j’avais en prevision du voyage. 

Ils en notent les caracteristiques, mais ne les saisissent pas ! 

En trouvant dans le grenier une boite contenant des photos et parmi celles-ci, une photo 
d’Arlette en tenue d’Eve, Fievez me crache : 

- Alors, Monsieur Bultot, on fait dans le porno ? 

Pas gene quand on a un enfant d'avoir un esprit pareil !! 

Ils embarquent tout le materiel... et m’embarquent aussi !!!! 

Dans la Renault qui nous emmene, je suis avec Fievez et un autre gendarme assez lourdaud. 
Fievez triomphe : 

- Alors Monsieur Bultot, il parait qu’on connait bien les ambassades, surtout celle du Zaire ? 
Je reste coi d’etonnement. 

Ou veut-il en venir ? Je ne connais personne au Zaire et encore moins a l’ambassade. 

- Je ne comprends pas ce que vous me voulez et encore moins le but de cette perquisition. 

- Pourtant, notre action a ete commandee de tres tres haut!!!! 

Je comprends de moins en moins ! 

Arrives a la rue de Fouvain a Bruxelles, siege de la B.S.R., je suis amene dans un local ou je 
suis photographic. 

Fe gentil et bien poli officier de gendarmerie (dont la devise en Belgique est « servir »?!?!) 
me laisse avec Fievez et son gros nounours d’acolyte. 

Ensemble, nous faisons l’inventaire des biens saisis. 

- 700 grammes de poudre, 700 cartouches diverses, plus trois photos polaroid. 

Je signe l’inventaire et il me declare que je suis a la disposition du Procureur du Roi, done je 
vais passer la a l’amigo (cachot de police du centre de Bruxelles qui sert de depot d’ecrou a la 
capitale). 

Auparavant, ils viennent m’accompagner a mon domicile ou, en prevision d’une nouvelle 
arrestation, je me change rapidement de vetements. 

J’explique a Arlette l’origine des bagues dans ma veste et apres avoir bu une biere (je sens 
confusement que je vais devoir m’en passer pour... un certain temps) je repars accompagne de 
mes Dupont et Dupond a l’amigo de Bruxelles. 

J’y passe une nuit affreuse, dans un cachot dont l’ouverture de la ventilation est en connexion 
avec le garage de la police. 

Un bruit infernal auquel s’ajoutent les coups de gueules de quelques ivrognes dans les autres 
cachots. 

Par contre, le local est propre et le policier de faction se montre tres poli ! 

Cela se remarque vite apres l’elegance de ces messieurs de la B.S.R. de Bruxelles !!! 

Fe lendemain matin, je suis conduit a l’annexe du Palais de Justice. 

Apres une courte attente, je suis introduit aupres de Monsieur le Substitut Van Fyssebeth. 

Ce jour-la, Dodo, avertie par Arlette, recupere ses bagues et prend aussi le billet d’avion en 
cas de retour des bien-polis !!! 

Monsieur le Substitut Van Fyssebeth est assis en face de moi ! 

Je suis seul avec lui dans son cabinet ! 

Coniine je viens de passer la nuit a l’amigo ou une bande d’ivrognes a braille une bonne partie 
de la nuit, il est euphemique de penser que je suis de bonne humeur ! 



Et pourtant, l'homme me fait une bonne impression ! 

II m'explique que normalement, il n’est pas de service, mais qu’il a ete mande personnellement 
par Monsieur Poelman, Procureur du Roi de Bruxelles. 

- Voyez-vous, Monsieur Bultot, je cherche dans toutes les directions possibles afin de trouver 
quelqu’indice dans le cadre des tueries du Brabant Wallon. La perquisition, dont vous avez 
fait l’objet hier, a ete commanditee par une « autorite superieure ». 

II poursuit d’un ton rassurant: 

- Nous n’avons rien trouve d’illegal a votre domicile, mais je souhaiterais quelques precisions 
sur les annes que l’on voit sur cette photo. 

II me tend la photo polarold saisie la veille, et pour cause, la photo est ancienne et j'ai vendu 
ou cede ces armes depuis longtemps. 

Tout lui semble nonnal, il ne me dit rien du nunchaku (deux batons relies par une chaine, 
l’anne favorite de Bruce Lee) et des couteaux de chasse repris sur la photo. Malheureusement, 
en decrivant ces demiers, je les qualifie par megarde de « poignards ». 

Il m’interroge aussi sur mon voyage au Paraguay et tres discretement sur mes opinions 
politiques ?!?! 

Monsieur Van Lyssebeth semble satisfait de mes explications ! 

- Je ne vois rien de reprehensible dans ce materiel banal de pratiquant de tir, je vais done faire 
mon rapport a Monsieur Poelman qui prendra la decision finale a votre egard, mais en ce qui 
me conceme, vous pouvez etre rassure ! 

Il poursuit sur le meme ton : 

- D'ailleurs pour etre tout a fait a l’aise, voulez-vous signer que vous etes d’accord de ceder a 
l’Etat les munitions ou poudre de tir qui seraient eventuellement excedant selon l’expertise ? 

Il n’y a aucune raison de refuser et je signe ! 

Puis pour me prouver ses bonnes intentions : 

-Desirez-vous un petit cafe ? 

J’accepte bien volontiers, surtout apres les emotions de la soiree et de la nuit. Tout en prenant 
le cafe, il continue a me rassurer et il me parle avec chaleur de son metier qu’il considere 
cornme une vocation. 

Il se fait fort de mettre toute son energie en oeuvre pour decouvrir les responsables des tueries. 
Toute ou'ie en sirotant le cafe, je decide de le tester un peu : 

- Et si vos recherches aboutissaient a fimplication de certains de vos superieurs ? 
Contrairement a mes previsions, il ne se retranche pas devant l'honneur intouchable de la 
magistrature : 

- Je le denoncerais quelle que soit sa position ! 

Une question aussitot me vrille l’esprit: 

« Van Lyssebeth est-il un homme de valeur ou un tres bon comedien ? » 

J'opte pour la premiere solution ! 

Je me lance a l'eau : 

-Je connais quelqu'un qui pourrait vous apporter des informations tres utiles sur les tueurs ! 

Il me regarde sidere ! 

Par prudence et par correction, j’ai decide de lui donner des renseignements uniquement si 
Francis Dossogne donne lui aussi son accord de les reveler a ce magistrat. 

Je poursuis sous son oeil tres intrigue : 

- Il y a deux conditions a ces revelations. Premierement, je dois telephoner pour en discuter 
avec un informateur, et deuxiemement, je dois etre sur que vous remontrez la filiere sans ses 



contenter de pincer l'executant! 

- Monsieur Bultot, vous avez ma parole de magistrat que je ferai tout le necessaire ! Quant au 
telephone, utilisez done celui-ci, sur mon bureau ! 

Francis est a son domicile. Prevenu de mon arrestation, il se montre inquiet quant a ma 
situation. 

Je le rassure et lui parle des mots d'apaisement de Van Lyssebeth. 

Par contre, il se montre moins certain que moins quant a la bonne foi du magistrat. Cette 
conversation a lieu devant le nez du Substitut qui ecoute, sidere et meduse ! 

La proposition suivante va nous mettre d’accord Francis et moi: 

- Francis, tu viens voir le magistrat, tu vois aussi un peu par toi-meme comment tu le trouves, 
et tu ne lui donnes qu'une seule information, par exemple, tes connaissances sur l'affaire 
Dekaise. En fonction de son action, on pourra plus tard lui donner d'autres infonnations ! 

Le magistrat souhaite voir Francis de suite et rendez-vous est pris pour dans la demi-heure ! 

Cette conversation nous a amene a l’heure du dejeuner et Monsieur Van Lyssebeth s'excuse de 
devoir me renvoyer au cachot en attendant la decision de Monsieur Poelman, Procureur du 
Roi de Bruxelles. 

- Il vous faudra patienter un peu, Monsieur Bultot, je dois faire rapport et malheureusement 
c'est aussi l'heure de table pour Monsieur Poelman ! A partir de 14 heures, j’aurai sa reponse 
mais une fois encore, soyez rassure, je ne vois aucune infraction !! 

Completement rasserene, et Her d’avoir enfin trouve un magistrat qui ose prendre ses 
responsabilites, je descends serein au cachot. 

Peu apres, Francis Dossogne debarque dans le cabinet de Van Lyssebeth. D'apres Francis, le 
magistrat se montre fort interesse par ses revelations sur Bruno Van Deuren (implique dans 
l'attaque de l’armurier Dekaise). Francis lui revele aussi que les declarations a la police de 
Bruxelles, section judiciaire, ne furentpas suivies d’effet. 

Le magistrat promet de faire une enquete approfondie et le rassure en ce qui me concerne. 
Neanmoins, Van Lyssebeth declare a Francis que mon cas est examine par le Procureur 
General de la Cour d’Appel, Monsieur Van Honste (Un Franc-Macon). 

Francis quitte aussi le cabinet du magistrat avec un peu d'espoir dans le coeur ! 

A 15 heures, les gendarmes ouvrent ma porte, ils doivent me conduire chez le juge 
d’instruction... 

Le substitut a requis mon mandat d’arret !!! 

Un coup de gourdin sur la tete m'aurait fait moins d’effet! 

Je comparais devant Madame le juge Coppieters Wallant. Elle me pose une ou deux questions 
sur les objets saisis en mon domicile, mais il est evident qu'au genre de question qu'elle me 
pose, elle n'y connait rien en poudre ou en munitions ! 

Par contre, elle m'interroge longuement sur mes opinions pobtiques et toutes mes connections 
avec 1'extreme droite !! 

Pendant une heure, je subis ainsi un veritable interrogatoire politique. J'ai cependant la 
satisfaction de beaucoup lui mentir car je trouve le procede vraiment repugnant. A la fin de 
cette brillante violation des droits proteges par la Constitution, je lui signale avec force que 
Monsieur Van Lyssebeth n’a, quant a lui, rien trouve de reprehensible et je lui demande de me 
laisser fibre car l’expertise demontrera mon innocence ! 

Tres severe, elle m'assene : 

- Votre cas est grave, monsieur Bultot, je vais y reflechir. Je vous ferai savoir ma decision tres 
vite ! Je dois au prealable conferer... 

Elle appelle les gendarmes qui me ramenent au cachot ! Je ne peux malheureusement 
communiquer avec personne, il m’est impossible de contacter qui que ce soit. De toute facon. 



il est trop tard pour prevenir Francis Dossogne du traquenard que le Parquet Judiciaire vient 
de me mijoter ! 

Une nouvelle fois, la porte de mon cachot s'ouvre ! 

Le gendanne tient un papier d’une main et de l’autre... une paire de menottes !! 

- Vous etes arrete ! 

II me tend le mandat d’arret et aussitot m'enchaine, direction le panier a salade (fourgon 
cellulaire) qui me renvoie en detention a la prison de Forest! Pendant le trajet, je me 
rememore les paroles de Francis Dossogne : 

- Le dossier des tueurs du Brabant Wallon est un dossier dangereux pour celui qui veut y 
mettre son nez ! 

Claude Leroy aussi m'avait prevenu ! 

En regardant ces menottes d'infamie (mais pour qui ?), je prends la decision de tout faire pour 
sauver ma peau. II me faudra done mentir dans mes prochains interrogatoires et declarer que 
je ne sais rien ! 

Jean Pol Petit, prevenu, m’attend au greffe ! En lisant le mandant d’arret, lui aussi comprend 
vite que la situation n’est pas nonnale. Je suis inculpe pour les motifs suivants : Fabrication 
illegale de munitions, depot illegal de munitions, depot illegal d’explosifs, cession d’armes 
illegales (le nunchaku et les poignards), vente d’anne a feu sans autorisation (un pistolet 
lance-fusees tres ancien a Andre Paysserant, celui qui m’avait vendu son bateau). 

Depuis la creation de la loi sur les munitions et les exp Iosifs, je suis le premier en Belgique a 
etre detenu pour infraction a cette loi !! 

Or nous sommes plusieurs milliers de tireurs en Belgique a recharger nos munitions nous- 
memes ?!?!?! 

Le materiel de rechargement est en vente libre aupres de tous les armuriers beiges !! 

Jean Pol Petit va se montrer tres affable et me place a l’aile des travaideurs hors-cedule ou 
j’accepte un emploi a la buanderie. Un emploi hors-cedule est toujours une benediction pour 
un detenu, le temps semble s’ecouler plus vite ! 

Le soir meme, Maitre Guy Francois vient me rendre visite. II se montre un instant 
decontenance, il n’a jamais eu a defendre un client dans une tede matiere, et pour cause, 
puisque je suis le premier en Belgique. 

Etant criminologue et specialiste en armes, je vais par l’intermediaire d’Arlette et de Dodo, 
constituer un dossier qui prouve l’inanite d’une tede inculpation. 

Deux jours plus tard, je comparais devant la Chambre du Conseil pour decider du maintien de 
mon mandat d’arret. 

Des mon entree dans la salle, Maitre Guy Francois se dirige vers moi pour me saluer et 
m’encourager. Or, je suis « gonfle a bloc » et pret a en decoudre avec le juge. Pendant que le 
gendarme m’enleve les menottes, Monsieur Joosten, President du tribunal, me lance d’une 
voix forte et etonnee : 

- Alors, Monsieur Bultot, que venez-vous done encore faire ici ? 

Je lui reponds sur le meme ton : 

- Je coinpte sur vous pour me l’apprendre, Monsieur le President. 

Il se montre decontenance tandis que je rccois dans le dos un coup de poing de mon avocat. 
Maitre Fran£ois utilisera regulierement son message muscle lorsqu’d estime que son client 
turbulent depasse la mesure... J’avoue que j’en recevrai quelques-uns tout au long de mon 
aventure en Belgique et meme apres mon retour en 1990. L’avantage de ce type de message 
est qu’d est rapide et discret et, soyons franc, symbolique sans etre douloureux ! 

L’audience continue par le rapport assez depite de Madame Coppietrers Wallant: 

-Nous avons procede a une perquisition et trouve des quantites d’armes et de munitions. 
Neanmoins, Monsieur Bultot reste en deca des quantites a ne pas depasser. 




- Quelles sont les quantites ? demande Jossten. 

-Nous avons decouvert 700 grammes de poudres... la loi en autorise ... 2 kg !! 

Madame Coppieters Wallant s'engage rapidement sur une autre voie : 

-Nous avons decouvert aussi que Monsieur Bultot a dispose d’armes illegales et nous 
cherchons a les localiser. 

Elle semble soulagee d’avoir sorti un argument de poids.Mais Monsieur Joosten commence 
lui aussi a sentir l’arnaque : 

- Quelles armes ? Sa voix forte resonne dans le pretoire. 

Je commence a le trouver sympathique. 

Madame le juge est sur la sellette, c'est elle qui est interrogee. 

- Des poignards et un nunchaku, Monsieur le President. 

Devant le sourire narquois du President, elle poursuit rapidement: 

- Monsieur Bultot fabriquait aussi des munitions de fa$on illegale, il n’est ni armurier, ni 
artificier. 

Pas de chance pour le juge Coppieters Wallant, le President Joosten s'adonne lui aussi au tir ! 
II me regarde avec un leger etonnement et me demande : 

- Comment fabriquez-vous des munitions ? 

- Monsieur le President, je les recharge et... 

II me coupe instantanement: 

- Vous ramassez les douilles et vous les rechargez a la maison ? C'est cela ? 

- Oui, Monsieur le President. 

II se toume vers Madame Coppieters Wallant: 

- Dites, tous les tireurs que je connais utilisent le meme procede et aucun d'eux n’est armurier 

t 

Mine deconfite du juge, je suis ravi, j’aimerais bien embrasser le President! 

Le Substitut, Monsieur Lemage, vient a la rescousse du juge d’instruction : 

- Le probleme. Monsieur le President, reside dans le fait que nous ignorons pour qui Bultot 
recharge. Lors de la premiere perquisition de la P.J. dans l'affaire des titres, les policiers 
n'avaient vu aucune munition et aucun materiel de rechargement. Comme Bultot a vu son 
arme saisie par Madame Lyna, on est inquiet de penser, par ces temps de terrorisme a la 
destination des munitions rechargees par Bultot. 

C'est a mon tour d’etre sidere. Tout ce materiel etait present lors de la premiere perquisition et 
certaines fuites organisees vers la presse m'avaient valu des articles ou je possedais « tout un 
arsenal » ! Mon avocat intervient en soulignant done cette invraisemblance, mais le President 
a bien compris sans la plaidoirie de Maitre Lran^ois. 

- Monsieur Bultot, je peux deja vous annoncer que je vous libere ! II n'y a pas de charges 
serieuses pour que je decide le maintien. 

Et il me sourit. 

Ah ! Que c'est beau le sourire d'un magistrat qui vous rend votre liberte et votre dignite ! Je 
rentre tout heureux a la prison ou j'emballe mes petites affaires. Je reprends confiance, il 
existe encore des magistrats independants. 

A 15 heures, je suis appele au greffe. Le parquet a interjete appel, je suis maintenu en 
detention ! Je n’ose vous decrire ma rage de retour en cellule ! 

Le lendemain, je suis extrait de ma cellule et conduit a l’annexe du palais de justice. Elle est le 
siege du Parquet et aussi de la P.J. 

Aux environs de 10 heures, deux policiers en civil me sortent du cachot et m’amenent, 
menotte, aupres du Big Boss de la P.J. : le commissaire Lrans Reyniers. 

Des qu'il me voit entrer dans son bureau, il se montre outre a l'egard de ses homines. 



- Comment ? Vous avez mis les menottes a Monsieur Bultot ? Retirez-les immediatement! 
Puis, se tournant vers moi cornme si je l’avais quitte la veille apres un bon verre : 

- Tu vas bien ? C'est pas trop dur pour toi ? 

Et je recois ainsi du tutoiement qui se veut amical. Je suis sur mes gardes et je reponds en le 
tutoyant aussi. II me presente un siege et commande.. une tasse de cafe. II me revele alors le 
but de cette rencontre : 

- Tu vois, ne fen fais pas, mes deux officiers vont refaire leur temoignage car ils ont ete 
distraits et n’ont pas fait attention a ton materiel de rechargement. Tout va done s'arranger 
pour toi ! 

Je ne dis rien et, un peu etonne de mon manque de gratitude, il poursuit d'un ton suave : 

- Tu vois, je t'ai appele car je sais que tu es un type bien et que tu as voulu aider la Justice. 

Moi aussi, je suis un type cornme toi et nous pouvons collaborer ensemble. Mais 
naturellement, j'ai besoin d’informations. 

Je ne vais pas tarder a connaitre ce que je crois a tort etre le mobile de cette conversation. 

- Peux-tu me dire ce que Francis Dossogne est venu raconter au Substitut Van Lyssebeth ? 
Nous y voila ! Je prends un air angelique de collaborates zele et lui repond avec conviction : 

- Malheureusement, Francis n'a jamais voulu se conifer a moi, et j’aimerais le savoir moi- 
meme. En tout cas, je ne dispose d’aucune information ! 

Sans se demonter, il poursuit son interrogatoire deguise : 

- Et a l'extreme droite, avez-vous une idee de la raison des tueries du Brabant Wallon ? 
Reponse bien mensongere : 

- Nous pensons a un racket contre les super-marches ! 

Mon ton convaincu semble le rassurer. Il procede alors a un changement de tactique : 

- En tant qu’expert de tir, peux-tu me dire qui est apte en Belgique a manier la riotgun avec 
une telle dexterite ? 

- Il faut proceder a l'examen de la liste des participants aux cours donnes a Hensies chez 
Freddy Semoulin par le Colonel Jef Cooper. 

- Enfin, une derniere question, mais auparavant, je dois te reveler un secret bien garde de 
l’instruction que les joumaux ne sont jamais parvenus a recevoir : les tueurs ont employe des 
balles rechargees, qui pourraient bien etre du calibre 7,65 mm. 

- Je ne connais personne car le tir pratique n’utilise que du 9 mm minimum. 

La tasse de cafe est terminee et il me raccompagne lui-meme et sans menottes jusqu’au 
cachot. 

Apres son depart, les detenus jasent et sifflent: « Bultot, balance ! » 

Etre ou sembler etre en bons termes avec le grand patron de la P.J. n’est pas une bonne 
reference vis a vis des autres detenus ! 

Le lendemain de cette rencontre, je suis appele au parloir de la prison. Le gringalet et son 
nounous m’accueillent avec un sourire de Saint-Nicolas. He oui ! Fevez et son acolyte de la 
B.S.R. ! On dirait Laurel et Hardy ! 

Fievez aborde la conversation sur un ton tres amical: 

-Monsieur Bultot, je regrette ce qui vous arrive, mais les ordres venaient de tres tres haut! 
Decidement, mon ennemi invisible ne prend meme plus la peine d’etre discret ! 

Il poursuit, sur de son effet: 

-Moi aussi, cornme vous, je suis revoke par l’injustice et ma force dans l'appareil judiciaire est 
que je suis suffisamment grade pour m’introduire partout et pas assez pour me faire remarquer 

- il porte le grade de sous-officier. Devant cette belle logique, il croit marquer des points et 
continue hardiment: 

-Si vous me dites ce que Dossogne a raconte a Van Lyssebeth, je pourrai faire mon enquete et 
moi, j’obtiendrai des resultats. 

Et matamore par dessus le marche ! 



Je lui reponds tout miel: 

-Pourquoi n’allez-vous pas le demander a Van Lyssebeth ou a Dossogne ? 

II s'attendait a mieux, mais il s'accroche. 

-Dans ce genre d’affaires difficiles, il faut se montrer tres discret. Je prefere rester dans 
l’ombre. 

Je cesse monjeu avec lui, et avec froideur, je lui lance : 

-Tant que je porterai ce costume de penitentiaire, je n’aiderai personne. Et de toute facon, je 
ne sais rien ! 

Decontenance, il essaye par la bande : 

-Mais enfin. Monsieur Bultot, je suis sur qu'en tant que President d’un club de tir, vous avez 
du entendre certaines informations, par exemple concernant le type de balles utilisees par les 
tueurs. 

Je reQois une decharge electrique. En un eclair, je decouvre le piege. 

Si je lui parle des munitions rechargees et que Reyniers dement me l'avoir revele, j’apporte 
une information « top secret» que seuls les enqueteurs et... les tueurs possedent. 

Je garde un caline apparent et, tres sechement, declare : 

-Je vous ai deja dit que je ne sais rien ! Maintenant, j’estime que cela suffit, je rentre en cellule 
! 

Dans celle-ci, je tremble encore longtemps de leur vilenie. 

Quelques jours plus tard, alors que je me rends au parloir de la visite familiale, je rencontre 
Ramadan Dodac... il est aussi detenu. 

En grande vitesse, il m’explique qu'il a rencontre Alain Moussa et qu'apres une solide bagarre, 
il lui a envoye deux « pruneaux » dans la « panse ». Il me sourit, content de lui. 

-Cette ordure est toujours vivante, mais elle a compris qu’elle n’avait pas interet a te toucher ! 
Je n’ai pas le temps de repondre que le surveillant nous enferme dans nos parloirs individuels. 
A la fin de la visite, il a encore le temps de me souffler : 

-Il est venu trainer dans un de mes bars, et maintenant, nous sornmes cinq a etre detenus car 
personne ne veut avouer que je suis le tireur, meme pas Moussa ! 

Nous regagnons ensuite chacun notre aile respective. Je ne le reverrai plus durant ma 
detention mais effectivement, les journaux decrivent ce qu'ils considerent comme un « 
reglement de compte dans le milieu ». 

Moussa jouit (sic) d’une reputation terrible, d’ailleurs, dans ce milieu criminel, il est 
surnomme « le flingueur ». Une pensee stupide m’amuse : dorenavant, il risque d’etre 
rebaptise : « le flingue ». 

Plus ou moins huit jours apres mon arrestation, je comparais devant la Cour d’Appel pour le 
pourvoi interjete par le Substitut Lemage contre ma liberation. En entrant dans le pretoire de 
la Chambre des mises en Accusation, mon sang se glace. Je n’ai jamais vu une Cour avec fair 
aussi severe. Les phrases du Procureur General tombent comme autant de couperets de 
guillotine : 

-Bultot a failli a sa mission de fonctionnaire. La population est en droit de s’inquieter des 
violations repetees de la loi par un de ceux charge de la faire respecter. En cedant des armes 
prohibees, Bultot met en peril la securite publique et la population ne pourrait comprendre 
qu'il soit libere. Je reclame done la revision d’elargissement de Bultot et son maintien sous les 
liens du mandat d’arret ! 

Tout ce cinema pour une photo ou apparaissent cinq couteaux de chasse et un nunchaku ! 

Mon avocat a beau expliquer qu'il ne s'agit que de couteaux et d’une matraque, rien n'y fit. Les 
magistrats me regardent avec une hargne peu communie qui me fait froid dans le dos. Je crois 
ressentir l’ambiance des tribunaux d'Inquisition : ma tete n’aurait pas valu cher ! 



La Chambre des Mises en Accusation reforme la premiere decision et motive la sienne en 
recopiant mot a mot le requisitoire du Procureur General ! 

En Belgique, on emprisonne pour possession d’une photo ! 

Deux jours plus tard, je suis amene a pied de la prison de Forest a la prison de Saint-Gilles. 
Les prisons sont contigues, mais il est penible de parcourir cinq cents metres sur les trottoirs 
tout en etant menotte a un surveillant. 

Sur place, dans la cour de la prison de Saint-Gilles, Madame le juge Coppieters Wallant, les 
deux membres amnesiques de la P.J. (Beaudesson et son adjoint) et Lauret et Hardy, soit 
Fievez et son nounours. 

Nous entrons tous en mon domicile ou, apres m'avoir fait quelques ameres remarques sur le 
desordre qui y regne, Madame Coppieters Wallant ecoute la declaration depitee et stupide des 
flics de la P.J. : 

-Nous n’avions pas remarque les munitions ni le materiel de rechargement car nous etions a la 
recherche de titres de banque ?! 

Elle leur jette un regard eloquent, ils s'ecartent un peu du groupe. Le surveillant technicien qui 
a procede a l’installation de la machine a recharger (fixce par quatre enormes boulons) vient 
aussi temoigner de son travail... quatre ans plus tot ! Bref cette confrontation se termine tout a 
mon avantage. 

Le 16 decembre 1985, je comparais a nouveau devant Monsieur Joosten. L'accueil est pour le 
moins surprenant: 

-Comment ? Vous etes encore la ? Le Parquet a ose faire appel ? 

-He oui ! Monsieur le President. 

Je n’ose ajouter plus, mon avocat se tient juste derriere moi. Monsieur Joosten se tourne 
aussitot de mauvaise humeur vers le juge, Madame Coppieters Wallant pour ecouter son 
expose. 

-Monsieur le President, nous avons verifie les destinations des armes et l’anciennete de 
l’installation de rechargement de Bultot. La localisation du nunchaku a pris pas mal de temps. 
Mais je ne m’oppose pas a la liberation. 

Monsieur Joosten, narquois : 

-Alors, qu’est devenu le nunchaku ? 

-Nous avons demande a Interpol si... 

Elle n’a pas le temps de continuer, Monsieur Joosten explose : 

-Quoi ? Vous avez alerte Interpol pour un nunchaku ? 

Fortement embarrassee, elle poursuit neanmoins : 

-Oui, Interpol du Royaume-Uni, afin de controler les dire de Bultot. 

-Et alors ? 

-He bien... (leger silence tres embarrasse), il ont repondu : « What is a nunchaku ? » (Qu’est- 
ce-qu’un nunchaku). 

Le President sourit, tres amuse. Je fais un immense effort pour ne pas eclater d’un rire bruyant 
et revanchard. Le President se rembrunit et me declare : 

-Monsieur Bultot, je vous libere a nouveau. J’espere que cette fois, le Parquet n’osera plus 
aller en appel ! 

Le Parquet est represente par la mignonne Substitut Angerhausen dont le texte prefere est 
normalement: « Je demande le maintien », cette fois, elle se contente de susurrer, 
embarrassee : 

-Cest Monsieur Poelman lui-meme qui prend la decision... 

Cette fois, il n’y a pas appel et je suis libere pour la deuxieme fois. Je ne passerai done pas les 
fetes de fin d’annee en prison. Neanmoins, le message que je viens de recevoir avec force est 



tres clair : connaitre des informations sur le Brabant Wallon et les communiquer au Parquet de 
Bruxelles et vous voila prison ! 

Lorsque je sors, Dodo m'apprend qu'elle a remis mon billet d'avion a l’agence de voyage et 
que la soinme remboursee (50.000 fb) avait ete demandee de facon pressante par Francis 
Dossogne, celui-ci envisageant des ma deuxieme arrestation mon depart anticipe pour 
l’etranger. De toute facon, il est clair maintenant que le climat beige est devenu tres malsain 
pour ma personne. II faut done bien preparer mon prochain voyage qui, cette fois-ci, ne 
comportera qu’un aller simple. 

Pendant ma detention, j’apprends le verdict inflige a Claude Leroy : 18 mois de prison ferine. 
Je le rencontre au Reveillon de Noel ou je suis invite avec ma petite famille. Comine il ne 
dispose que d’un conge de trois jours, Claude ne m’accorde pas enonnement de temps. Je le 
remercie pour le dossier Dekaise et il continue a me mettre en garde : 

-Ta deuxieme detention doit f avoir ouvert les yeux, j’espere ! 

Il est vrai que se battre pour la Justice contre la Justice me semble tres difficile, dangereux, 
voire impossible. En prenant un maximum de contacts avec des gens connaissant le Paraguay, 
il devient opportun d’ouvrir un compte dans une banque americaine a fin d’y faire transiter 
l’argent « noir » des investisseurs ! 

L’annee 85 se termine. Je pense raisonnablement que le pire est passe... helas ! 

1986 debute par un firoid impressionnant. La temperature moyenne de Bruxelles stagne aux 
environs des -12° centigrades. 

L’Europe semble figee et pourtant l'ennemi va se reveler plus dynamique que jamais ! 

Jean Gol est toujours ministre de la Justice ! 

Le 6 janvier 1986, Dodo m’invite chez elle a fin que je lui commente un de mes films preferes 
qui passe ce soir a la tele : « les chiens de la guerre ». Coniine le film est suivi d’un debat et 
que Dodo s’interesse a mes gouts, je vais done lui commenter le film et le debat. Si le film est 
excellent, le debat par contre se montre reellement mediocre et je m’enerve un peu en 
entendant debiter autant de stupidites. Pendant la soiree et a mesure de mon enervement 
croissant, je bois de l’excellent whisky et lorsque le debat se tennine, je me sens 
passablement... « fatigue ». Au moment de prendre conge, Dodo s’apercoit - et moi aussi- que 
je ne suis plus en etat de prendre le volant en toute securite. Elle me propose done de dormir 
chez elle et m’attribue la chambre de sa fille qui maugree devant cette intrusion. 

7 janvier 1986 

7hl5 : je descends a la salle a manger de Dodo (qui habite Watermael-Boistfort) avec un air 
vaseux et une tete qui pese une tonne. Je dejeune avec Dodo et les enfants. Peu apres, la 
voisine vient les chercher pour les conduire a l’ecole. 

8h : Le pere de Dodo passe comine chaque matin lui dire bonjour et prendre quelques affaires 
dans le garage. Ma presence ne l’enchante guere ! 

8h30 Monsieur Van Den Boeynants, ex-premier ministre, entre dans le pretoire du tribunal 
correctionnel. Il est inculpe de firaude fiscale pour plusieurs dizaines de millions de francs 
beiges. 

Le President du tribunal lui presente un siege de velours nonnalement reserve a un magistrat. 
V.D.B. le recuse poliment. Il ne manque plus que le collier a fleur ! 


8h30 : Madame Michele Bertrand, apres avoir conduit ses enfants a l’ecole, vient s’enquerir 
aupres de Dodo du programme de la joumee pour le magasin qu’elles gerent en cornmun et 



nous prenons ensemble une tasse de cafe. 


9h45 : J'accompagne Dodo jusqu'a son magasin, l'aide a ouvrir son volet et peu apres l'heure 
d'ouverture, soit 10 heures, je rentre chez moi. 

L’apres-midi, completement « remis a neuf », j’embarque Dodo et nous decidons d’aller 
prendre un verre au « Plein Pot » chez Pepe. Francis Dossogne s'y trouve et nous parlons des 
projets paraguayens. J'ai le cafard. Pour me faire plaisir et me changer les idees, Dodo me 
propose d’aller au cinema en fin d’apres-midi, voir un film qui devrait me plaire : « Les 
chacals entre eux ». Nous discutons du choix du cinema et de l'heure de la seance au « Plein 
Pot », ce sera l'Eldorado. 

Alors que nous montons les escaliers du cinema. Dodo me designe un homme barbu qui nous 
croise. Apres reflexion, je reconnais un des mercenaires du debat televise de la veille. 

Le film nous deceit terriblement et cette journee ne nous semble en rien particuliere des 
autres. Et pourtant... 

Un singulier personnage se trouve aussi au cinema, mais je ne le remarque pas. II s'agit de 
Madani Bouhouche. II parait qu'il est accompagne de son epouse. C'est un ancien gendanne 
de la B.S.R. qui a ouvert avec Robert Beyer (aussi un ex-gendarme), sa propre agence de 
detective prive. De meme, il a cree son propre club de tir. Comine il se montre un partisan 
acharne du calibre 9 mm, il a baptise son club : « le parabellum ». L'etrange hasard de ma 
presence en meme temps que lui au cinema, ainsi que celle du mercenaire, va longtemps 
perturber les enqueteurs. 

Mais pour le moment, a Nivelles, au Parquet, c'est le branle-bas de combat a la recherche du 
meurtrier de Juan Mendez. 

Les epreuves de ces derniers mois nous ont fort marques, Dodo et moi. Nous sentons une 
sourde agressivite poindre en nous. La Belgique commence a nous faire horreur ! Tout au 
moins, sa... « justice ». 

Lors d’un repas que nous prenons a l’Universite Libre de Bruxelles (notre berceau a tous 
deux), nous tombons fascines par une publicity de voyage en Califomie pour la somme de 
12.000 fb aller-retour ! Moins cher qu'un week-end a Paris ! 

Nous nous informons, mais il n’y a plus de places disponibles. Par contre, pour 10.000 fb, 
People Express offre le voyage aller-retour a New York. Or, ma tante matemelle habite New 
York et je fus bien re?u l'annee derniere. Sur un coup de tete, nous reservons deux places pour 
le 16 janvier 1986. Nous avons vraiment besoin de nous retrouver hors de cette boue. A nos 
conjoints respectifs, nous insisterons sur l'utilite de voir les banques pour le transit de l’argent 
pour le Paraguay. Nous sornmes tres excites a l’idee de nous retrouver dans un univers ou Ton 
est pas oblige de se retourner a chaque instant pour voir si l’on est suivi. Le fait de nous 
retrouver seuls pendant une semaine nous rend febriles et, malgre tout, anxieux. 

Ma tante Rita nous logera, done pas trop de firais en perspective. 

Le 15 janvier, soit la veille du depart, un article dans le journal « La Derniere Heure » se 
montre tres tendancieux quant a l'explication du meurtre de Juan Mendez. Il faut chercher 
dans les milieux d’extreme droite et dans le milieu des tireurs. 

Or en 1982, sans le savoir, j’ai participe a une competition de tir ou cet ingenieur de la F.N. 
etait aussi inscrit. Neanmoins, je ne le connaissais pas. En lisant cet article, je declare, amuse, 
a mes amis : 

-Vous allez voir qu'ils vont encore essayer de me coller cette affaire sur le dos ! 

Mais demain, c'est le depart et cet article n’alterera pas ma bonne humeur ! 

Dodo et moi poussons un large soupir de soulagement lorsque l'avion decolle. Nous avons 



l'impression d’un bapteme qui laisse toute la souillure derriere nous. Arrives a New York, je 
telephone a ma tante pour lui signaler ma presence et celle de Dodo et, apres avoir mis nos 
bagages en consigne, nous nous rendons a son domicile avec un bouquet de fleurs. 

Surprise, elle est absente. Or elle est censee nous accueillir. Nous attendons un peu chez la 
voisine et puis, nous retournons au centre-ville ou nous nous inscrivons dans un hotel. 

Le soir, je parviens a joindre ma tante Rita par telephone, elle me decoche : 

-J'ai appris par ton pere que tu avais fait deux fois de la prison. II n’est pas question que 
j'heberge un repris de justice qui, en plus, s’amene avec une « creature » inconnue ! 

Le coup est solide mais, la laissant a sa mesquinerie, je vais passer huit jours fabuleux a 
visiter New York avec Dodo et a m’emerveiller de son enthousiasme. Nous achetons aussi des 
tee-shirts inedits afin de les revendre en Belgique et compenser les depenses de l'hotel avec le 
benefice realise. Nous prenons les renseignements aupres des banques. 

Bref, a part tante Rita, un sejour parfaitement reussi qu nous ramene au bercail avec une 
provision de tonus. Le 23 janvier, le lendemain de notre retour, le journal « La Derniere Heure 
» se dechaine a nouveau pour l’affaire Mendez et titre : « Huit facons d’expliquer le meurtre 
de l’ingenieur commercial de la F.N. ». 

La huitieme fag on n’est autre que ma culpabilite. Je suis cite nommement, cette fois, je n’en 
souris plus ! 

Comine il s’agit d’un style hypothetique, quoique fortement appuye, je ne peux poursuivre 
l’auteur de cet article en Justice. 

Je m’attends done a etre entendu par le Juge d’instruction, mais rien ne vient et l’angoisse 
commence a m’etreindre. Je pressens un nouveau drame mais je ne sais comment reagir. Une 
chose est certaine, le climat est devenu vraiment trop malsain pour moi. 

Je commence done a faire la tournee des amis et de la famille pour faire mes adieux. Lors de 
cette tournee, Daniel Gilson se montre aussi inquiet. Personne n’a pris contact avec lui pour 
les armes fournies : ca sent le gros traquenard a plein nez !!! 

Apparemment, il n’est pas vise car il n’a fait l’objet d’aucune perquisition. De plus, le parti est 
epargne. 

La suite des evenements me designera cornme veritable cible. 

Neanmoins Daniel Gilson me paie de sa poche plus de la moitie de la somine due. Il a aussi, 
par precaution, dissimule les annes dans une mallette aupres d’une amie sure. 

Le 23 ou le 24 janvier, Claude Leroy beneficie d’un conge penitentiaire d’une seule journee. Il 
purge sa peine a la prison de Nivelles (dite prison des intellectuels). A peine franchi le portail, 
il declare tout de go a Dodo qu’il doit absolument me voir. 

Cest ainsi que je les rejoins au restaurant « Le Pere Yvan » a Saint-Gilles. 

Claude m’affirme que je dois partir tres vite car fair va devenir irrespirable pour moi en 
Belgique. 

D’ou tient-il cette information qu’il m’affirme etre de toute premiere importance ? Il ne le dit 
pas. 

A mon tour de parler : 

-Claude, as-tu entendu parler du dossier Pinon ? 

Il accuse mal le coup, mais il me repond embarrasse : 

-Non, jamais entendu parler ! 

L’entretien se prolonge avec l’excellent calvados du patron et Claude finit par m’avouer que 
oui, il en a entendu parler : 

-Mais c’est de la dynamite, il ne faut surtout pas y toucher ! 

Par Francis Dossogne, j’avais appris que certains dossiers de personnages importants avaient 
ete « degrossis » par le ministre Jean Gol. Claude, de plus en plus mal a l’aise : 

-J’ai fait parvenir moi-meme les dossiers complets des affaires van den boeynants et Mathot 
dans les mains de Jean Gol. Il n’y avait pas que des volets fiscaux. 



Cette fois, je n’en tirerai pas plus sur ces dossiers, mais il termine par cette confidence 
etonnante : 

-Je sais que Frans Reyniers, le commissaire en chef de la P.J., et Van Honste, le Procureur 
General, connaissent tout des affaires des tueries du Brabant Wallon ! 

Dans mon esprit, certaines choses deviennent plus claires. 

Le surlendemain, soit le 26 janviers 1986, j’emprunte la mini rouge de Dodo pour me rendre 
une demiere fois chez mes parents. 

Je n’ai toujours pas achete mon billet d’avion. 

Arlette pense que nous pourrions reprendre une nouvelle vie conjugale au Paraguay et se fait a 
l’idee du depart. 

Coinme sa directrice a la Creche « Le Nid » a Ixelles la traite comine une pestiferee depuis les 
elections, et depuis les interrogatoires qu'elle a subis lors de mes incarcerations, elle n’est plus 
aussi desenchantee de quitter la Belgique, malgre l’eloignement de ses parents. 

Les miens habitent a Charleroi et je decide de les visiter. Du domicile de Dodo a Watermael- 
Boitsfort, je dois passer par le lieu-dit: « Pont de Groenendael » pour m'y rendre. 

A cet endroit, je bifurque vers la droite en direction de Charleroi. Un peu apres fhippodrome, 
mon oeil est attire dans le retroviseur par le manege de deux voitures qui semblent faire une 
course cote a cote. 

Au moment ou elles me rattrapent, une voiture se colle litteralement a mon pare-chocs arriere 
et l'autre, qui ressemble a une grosse fiat, se porte a ma hauteur et reste a ma hauteur une 
fraction de secondes... 

A la place du passager, un homine arme d’une arme au canon long (fusil ou mitraillette, je ne 
sais)... 

Je realise en un instant et je bloque a mort pendant que la Fiat me fait une queue de poisson et 
me bloque aussi a fond. 

La voiture arriere m'evite de justesse et grace a la petitesse de la mini, j’embraye en premiere 
et fait demi-tour sur place. 

Les deux autres vehicules restent dans leur immobilite et cinquante metres plus loin, je peux 
passer sur les bandes de circulation inverse grace a un trou dans la borne centrale. 

J'accelere a fond et je ne vois personne dans le retroviseur. 

Mon pied reste colle au plancher... toujours personne dans le retroviseur. 

J'arrive avec le teint verdatre au magasin de Dominique. 

Je tremble coinme un gosse, j’ai peur. 

Par apres, je serai incapable de decrire les voitures ou les passagers ; j’ai vu l’arme et j'ai reagi 
tres vite. Chaque fois que j'y pense, j'attrape des crampes aigues dans l’estomac. 

Dodo me rassure et me reconforte coinme elle peut. Mais que puis-je faire ? 

Allez porter plainte a la police me semble directement exclus. Je n’ai absolument plus 
confiance dans la Justice beige et en l'absence de preuve, je risque de faire les frais d’une telle 
demarche. D’autant plus qu’une certaine presse essaye de focabser ma personne dans le cadre 
du meurtre de Mendez. Mais une autre question me tenaille : « vont-ils recommencer et qui 
sont-ils ? ». II faut m’anner ! J’en arrive a cette conclusion ultime. 

En l'absence d’une Justice qui protege le citoyen, il faut que je me defende moi-meme. 

Aussitot dit... loin d’etre fait. J'alerte mes amis de mon ex-club de tir, mais personne ne veut 
me preter ou me vendre une arme, meme en noir. Je contacte Daniel Gilson qui attend 
desesperement son contact, il est toujours encombre avec ces armes. Le soir meme, je 
recupere un 38 special tout neuf. Heureusement, il me reste quelques cartouches non saisies. 
Plonge ainsi dans une situation inextricable : je suis arme par peur de la Justice ! 

Le soir me revoit chez Dodo qui est aussi horrifiee par l’aberration de la situation. La 
television nous tient compagnie jusque tres tard et je m’endors dans le divan. 



Le lendemain, soit le 27 janvier 1986, comme elle doit se rendre a l’enterrement d’un de ses 
proches, Dodo garde sa voiture et me prete celle de Claude Leroy. Je rentre chez moi vers 
neuf heures et je me debarbouille. 10 heures : je sors de mon domicile. La, derriere, une 
voiture... le gendarme barbu qui m'a file lors de ma deuxieme arrestation. Tout le dangereux 
de la situation me saute immediatement aux yeux. S’il m’arrete, alors que je suis porteur d’un 
38 special au numero lime et que la presse me designe comme un assassin potentiel, je suis a 
nouveau candidat a l’arrestation et a la detention prolongee, meme ... tres prolongee. 

En une fraction de seconde, je me decide : il faut fuir le pays. 

La G.S. de Claude est garee a proximite et avant que le flic ait pu realiser quoi que ce soit, je 
demarre en trombe. Je roule coniine un fou. Un vaste parking souterrain s'offre a moi, la 
voiture s'y engouffre. Je telephone a Dodo, mais elle n’est pas encore rentree. Je telephone a 
Claudine, a son travail. 

-Claudine, je dois te voir d'urgence ! Je fen prie, invente n’importe quoi mais rejoins-moi au 
bas de l'ascenseur de ton building. 

Devant le ton de ma voix, elle arrive sur-le-champ. Je l’embarque et nous partons tres vite pres 
de la creche ou travaille Arlette. Claudine se charge de prevenir Arlette de venir a un petit 
restaurant. Elle se doute d’une catastrophe. Elle arrive deja toute blanche d’emotion. 

-Nous partons aujourd’hui ! 

Elle vacille legerement, mais je dois continuer tres vite : 

-Les flics sont derriere moi, il faut vider le compte en banque maintenant. Travaille comme si 
de rien n'etait et de retour a la maison, tu embarques le strict necessaire, mes diplomes 
universitaires, les tiens et mes diplomes de tir. 

Je lui debite le tout sur un ton qui m'etonne moi-meme. Je suis calme, methodique et resigne. 
Claudine ira chercher Cyriaque au college et le gardera chez elle en attendant de plus amples 
instructions. 

Arlette s'en va a la banque et je repars avec Claudine, direction le cafe « Francois Villon » 
pres de l’universite de Bruxelles. 

Je parviens cette fois a joindre Dodo qui s'effondre presque au telephone. Elle va arriver. 
Francis Dossogne, contacte, promet aussi sa venue. Je demande un journal au patron et 
j'emballe mon anne. Je confie le parquet a Claudine pour qu’elle le transmette a Pepe afin qu'il 
s’en debarrasse. Elle me promet aussi d’aller chercher Cyriaque au college et de lui annonce le 
depart avec management. Le moment des premiers adieux est venu. Au moment ou je 
l’embrasse, Claudine fond en larmes. Je reste penaud, ne trouvant pas les mots a dire. Ensuite, 
elle s'en va tres vite. 

Peu apres, Dodo arrive toute tremblante. Elle est a peine arrivee que Francis Dossogne 
debarque aussi dans le cafe. Un veritable conseil de guerre se deroule alors de ce bistroquet 
d’etudiants. Je veux quitter la capitale dans l'heure et me rendre pres de la frontiere francaisc 
en attendant Arlette et Cyriaque. Dodo recuperera Arlette a la sortie de la maison et l'aidera 
dans ses deplacements. 

Francis viendra a Mons me rejoindre au cafe d'un membre du parti qui nous aidera a passer 
discretement la frontiere. Francis me conduira avec ma famille jusqu'a Paris. 

Un probleme inattendu surgit: il n'a plus l’argent de mon ticket, il a eu une depense imprevue 
et il a utilise la somine a des fins personnelles... Il me promet neanmoins de me le faire 
parvenir la-bas. Dodo me sauve en me promettant son aide. Francis nous quitte, il va 
organiser le voyage en France. Dodo part la derniere. Je vais me montrer tres dur, il ne faut 
pas craquer... pas maintenant. 

J'ai envie de hurler comme une bete, je joue le dur, fro id et sur de lui... a l’interieur de moi, je 
grelotte comme un gosse ! Quand je vois Dodo s'eloigner a pas pesants, j'ai envie de faire « 
peter » le Palais de Justice et son ministre Jean Gol ! 

Je sens monter en moi une haine d’une intensity incroyable. Mon tremblement interieur secoue 



maintenant tout mon etre... je sens mes dents qui claquent incontrolables, mes mains ne 
m’obeissent plus, mon corps se rebiffe... il sue la haine et la rage pour cacher sa tristesse et sa 
peur. 

Je me retrouve seul et je me rends en bus a la gare. Je regarde partout, scrutant les visages 
pour essayer de reconnaitre un flic en civil... je viens de commencer ma vie d’homme traque ! 

Dodo parle : 

« Je me sens glacee dans ce « Francois Villon », pourtant si vivant de souvenirs de tant de 
joyeuses guindailles. Jean, assis en face de moi, est tellement blanc et ses yeux encore plus 
noirs sont a la fois tristes et affoles. Pourtant, c'est d'un ton calme et resolu qu’il me parle, qu'il 
me dit ses raisons de partir si vite et qu'il m’explique ce que j’aurai a faire pour lui faciliter son 
depart. Pendant cette conversation, je le regarde, je le fixe, je m'hypnotise dans sa vision dans 
l'espoir peut-etre de l'avaler en moi, afin de ne plus jamais le perdre. Lorsque nous avons fini 
de parler, tout mon corps tremble a l'interieur et je ne sais comment j’ai la force de me lever. 

Je voudrais me blottir dans ses bras mais il refuse tout geste de tendresse et je comprends qu’il 
se protege lui-meme. Je pars, sans me retourner, avec la promesse qu'il me donnera de ses 
nouvelles des que possible et la certitude que dorenavant, je suis la seule personne en laquelle 
il placera toute sa confiance pour ses rapports avec la Belgique. 

Belgique, ce pays infame que je hais et qui le chasse, ce pays qu'il aime encore par-dessus 
tout et qui le maudira pendant six ans. 

Dans la soiree, j’irai chercher Cyriaque chez Claudine et le conduirai a sa maman. Quand il 
me dira au revoir a son tour, je pourrai donner a Cyriaque un double baiser d’adieu : un pour 
lui-meme avec toute l'affection que je lui porte et un pour son papa a transmettre avec tout 
mon amour. » 

Arrive a Mons, je me dirige a pas lents vers mon dernier bistrot beige. Le patron est averti et 
j'attends jusqu'a 22 heures l’arrivee de ma famille. 

Arlette est livide et Cyriaque montre des signes de panique. J'essaye de rassurer tout le 
monde, mais une premiere epreuve nous attend : nous devons absolument quitter la Belgique 
sans voir de gendannes. On ne sait si l'alerte a ete donnee, mais il ne peut etre question de 
prendre des risques. Francis Dossogne est accompagne par Daniel Gilson. Nous embarquons 
vers 23 heures dans la voiture, direction : la France. 

Le patron de cafe nous precede. Comine frontalier, il connait les passages non surveilles de 
nuit. 

Daniel demande de rechercher une cabine telephonique ou il prend un dernier contact avec 
l’Argentine. Il revient de la cabine avec un sourire qu'il veut encourageant: 

-Pas de probleme, vous serez attendus a l'aeroport des qu’ils connaitront le jour et l’heure de 
votre arrivee. 

La voiture s'arrete... la, a 100 metres de mon pays. 

Encore 100 metres et je serai un exile. 

Pourtant, seul un drapeau francais nous indique le changement de pays. Situee au milieu d'une 
rue, la douane, muette, me semble tellement sinistre. 

Arlette et moi, nous nous regardons avec des larmes dans les yeux. Nous soinmes en cavale 
pour le restant de nos jours ! 

La route me semble morne et monotone. Cyriaque dort et j'ai peur de l’avenir que je lui 
prepare. Arlette s'endort, ainsi que Daniel. 

Francis et moi, nous conversons afin de tenir eveille. Nous arrivons a 4 heures du matin a 
l'aeroport Charles De Gaulle. Completement vide, l'immensite de l'aeroport vous ecrase. Seuls 
quelques travailleurs nettoient les couloirs. Nous devons attendre pendant pres de trois heures 
l’arrivee d’un employe des Lineas Argentinas. Catastrophe : si j'achete les tickets d’avion a ce 



guichet, je dois payer 70.000 fb par personne pour un aller simple et je dispose en tout et pour 
tout de 220.000 FB. Impossible de partir dans de telles conditions ! Une seule solution, 
continuer le voyage jusqu'en Espagne et embarque sur Lineas Paraguyayas, la ligne aerienne 
la moins chere d’Amerique Latine. Nous embarquons a nouveau dans la voiture, direction : 
gare d’Austerlietz. Le train pour Madrid demarre dans une heure. Nous prenons le petit 
dejeuner au buffet, Daniel me remet les coordonnees du contact en Argentine. Celui-ci est le 
seul habilite a nous mettre en contact avec la personne qui nous receptionnera au Paraguay. 
Dernieres embrassades sur le quai ! Nous sortons nos croix celtiques de dessous nos chemises 
et les arborons fierement. A la fenetre du train, le mot « adieu » me vient aux levres mais ne 
parvient pas a sortir. C'est vraiment un mot atroce. Le train demarre lentement et nous faisons 
signe a n’en plus pouvoir. Nous sommes seuls partis vers un destin inconnu et lourd de 
menaces. Nouvelle angoisse : la douane espagnole. 

En presentant mon passeport, je feins une complete indifference. Pourtant, j’ai une crampe 
d'estomac. Des qu'il me remet le document dument estampille, je vis un intense soulagement. 
La liberte se rapproche. Arrives le soir a Madrid, nous nous installons dans un tout petit hotel 
a fin de passer inaper£us. Le voyage en train de la frontiere jusqu'a la capitale est lent et 
monotone. Madrid transit aussi sous la neige. Avant de nous coucher, j'invite la famille dans 
un petit restaurant. J'essaie d’egayer la soiree en parlant d’un avenir sous les tropiques ou le 
soleil nous baignera de ses rayons toute l’annee. Je decris des paysages de carte postale... 
bref... je frime. Nous y allons meme des premiers sourires. Soudain, le journal televise, qui est 
branche au-dessus de nos tetes, nous decouvre l'explosion de la navette spatiale americaine 
avec sept cosmonautes dont une femme. En temps normal, nous regarderions avec un 
pincement de coeur, mais dans les circonstances actuelles, cette vision d’horreur supprime nos 
sourires durement gagnes. Nous redevenons moroses. 

Le lendemain matin, je me rends seul a l'aeroport de Madrid. Malgre le froid, le soleil se 
montre et degage les vilains nuages du ciel de la capitale. 

Lieneas Paraguyas n’a plus de place disponible avant une semaine. C'est trop long, je crains 
mon signalement par Interpol, d’autant plus que l'absence d’Arlette a du etre remarquee et 
probablement signalee. Je parcours les bureaux de differentes lignes aeriennes. Iberia, trois 
places pour cet apres-midi direction Buenos Aires, 150.000 FB, je prends. 

La tete de l'employe vaut de for suite a notre conversation : 

-Je cherche trois places d’avion pour l'Amerique du Sud, rapidement, aujourd’hui si possible. 
Buenos Aires ou Asuncion. 

De retour a l'hotel, nous prenons nos maigres affaires : Arlette a pris le minimum de bagages 
pour ne pas se faire remarquer par les gardiens en sortant de notre domicile prison. 

Arrives a l’aeroport, nous dejeunons en regardant decoller les avions. Cyriaque est heureux de 
ce fantastique bapteme de fair, mais Arlette ne pipe mot. J'achete un Assimil pour apprendre 
l’espagnol car mon vocabulaire se limite a : « si, no, gracias, por favor ». 

Je telephone a Daniel Gilson pour lui donner les coordonnees du vol et ensuite a Dodo. Elle 
me reaffirme sa volonte de venir bientot me voir. Le dernier contact avec l'Europe s'acheve 
done sur cette promesse. 

En decollant dans cet immense Jumbo, nous nous tenons la main. Adieu l'Europe, l'Amerique, 
nous voici ! 

Une escale nocturne a Tenerife et le matin apres un vol de 12 heures, nous arrivons a Buenos 
Aires vers 10 heures du matin. Nous sommes tout febriles et decontenances, ici c'est l'ete et le 
thermometre lumineux de l'aeroport indique 28°. Nos bagages sortent les derniers de 1'avion et 
nous arrivons bons derniers dans la salle d’arrivee. Nous ressemblons a des martiens : les gens 
sont tous en chemise legere et bronzes, nous portons de gros pull de laine, pantalons en 
velours et... des bottes. Vite, vite, nous scrutons tous les visages pour reconnaitre l’ami qui 
nous attend... personne. Ce n’est pas possible ! Nous attendons pendant une heure, toujours 



personne. L'angoisse nous gagne. Je change un peu d’argent et je telephone a la personne qui 
devait venir, elle ne bredouille que quelques mots de francais. Heureusement,j’arrive a la 
contacter et elle me donne les coordonnees pour rejoindre son domicile. Son ami qui devait le 
conduire a l’aeroport n’est pas venu. L'homme nous recoil avec chaleur et malgre le barrage 
des langues, on n’arrete as de parler ou plutot de gesticuler pour nous faire comprendre. Son 
epouse nous rejoint un peu plus tard et grace a ses connaissances en francais, elle peut nous 
decrire la personne et surtout le pays qui nous attend. Le lendemain, apres une agreable soiree 
passee a folatrer dans Buenos Aires, nous reprenons l'avion, direction notre nouvelle patrie : 
le Paraguay. 

PARAGUAY 

Notre arrivee au Paraguay le 31.01.1986 est a la fois un soulagement et un choc terrible. Alors 
que nous avions deja legerement souffert des moustiques et de la chaleur a Buenos Aires, je 
crois mourir sous le coup de chaleur de l’aeroport d'asuncion. 42° a l’ombre ! 

Quasi irrespirable. Nous nous presentons a la douane mais il faut disposer a l’epoque de 
guaranies et non de dollars. Je suis autorise a sortir et pres de la vitre ou stationne le public, un 
homme se tourne vers moi: Monsieur Graziani, un Italien en exil depuis six ans pour un 
meurtre qu'il n’a pas commis et pour lequel la Justice de son pays mettre huit ans avant 
d’admettre son innocence. 

II m'a reconnu grace a Cyriaque et a ses cheveux tres blonds et done tres rares dans la region. 
C'est a peine si je retiens mes larmes. En me voyant en pull de laine et en bottes, il se revolt 
lui-meme fugitif depuis tellement de temps. 

Ici aussi les mots sont superflus, les regards suffisent. Il nous conduit dans un hotel et le soir 
meme, je le mets au courant de mes ennuis, de mes craintes et de mon manque total d’idee de 
m’en sortir dans ce pays. 

Le tres maigre capital que j’apporte, soit plus ou moins 70.000 B n’est pas de nature a le 
rassurer et encore moins a me tranquilliser. 

Le meme apres-midi de notre arrivee, une pluie tropicale s'abat sur la ville et nous soinmes 
surpris par l’incroyable densite de cette eau qui deferle sur nous. En une demi-heure, trente 
centimetres d’eau dans les rues ! 

Les gens, devant nos regards stupefaits, se dechaussent et marchent pieds nus dans la rue. 

La premiere nuit dans cet hotel garde pour moi un souvenir dont je m'amuse beaucoup 
aujourd’hui. Ainsi que toute personne qui met le pied pour la premiere fois en Amerique du 
Sud, je me suis enquis aupres de Monsieur Graziani des problemes dus aux animaux et surtout 
aux insectes indigenes. Rien de grave, a l’exception de l’araignee veuve noire et d’un insecte 
appele « chaga », sorte de gros moustique qui vous pique, pond ses oeufs dans votre corps. 

Ces oeufs remontent jusqu'au coeur et on en meurt, plus ou moins six mois plus tard. 

La veuve noire est courante mais peu agressive. Quant au chaga, rarissime, il se confine aux 
abords des frontieres du Bresil. 

Durant cette premiere nuit, je ne peux dormir. Arlette et Cyriaque s'ecrasent litteralement de 
sommeil. Impossible de m’habituer au bruit de la climatisation. Vers deux heures du matin, je 
me rends a la salle de bains, alors que je n'ai toujours pas dormi. M’asseyant sur le siege ad 
hoc, tout en continuant a reflechir, je leve les yeux en etudiant, comine on peut le faire dans ce 
genre d'activites, la porte de la salle de bain. 

Mon sang se glace. La devant moi, en plein milieu de la porte... un chaga tel qu’on me l'avait 
decrit. L'insecte qui tue est a cinquante centimetres de moi... Pauvre hebete, bloque par un 
processus deja entame. Je me raisonne pour rester calme et des que la situation me le permet, 
je me leve lentement, me rend dans la chambre ou se trouvent mes chaussures. Au retour, 
avec une violence inou'ie, j'ecrase cet insecte repugnant qui s'eparpille ainsi dans toute la salle 



de bain. J'alerte en anglais le receptionniste qui vient aussitot s'en rendre compte. Sans se 
demonter, il s'excuse et me promet de faire desinfecter la chambre le lendemain. Cet incident 
me tient eveille toute la nuit. Ce n’est que le lendemain que j’apprends qu’il s'agit d’un simple 
cucaracha ou cafard tres cornmun dans toute l'Amerique du Sud. J'en ris encore aujourd'hui, 
mais n’oublie jamais l'effroi que cela m’avait cause. 

Les jours suivants, je les consacre aupres de l'avocat charge de m’enregistrer aupres du service 
de rimmigration. Je lui explique mon cas particulier, mais il me rassure de par le fait que je ne 
possede toujours pas un easier judiciaire vierge. 

A l’epoque, je suis uniquement soupconne de recel de titres et de detention illegale d’explosif. 
Monsieur Graziani nous trouve une maison meublee a louer avec un petit bail de trois mois. 

Le loyer s’eleve a 80.000 guaranies, soit $80. 

Nous decouvrons aussi cout de vie derisoire, ce qui nous sauve provisoirement, vu le peu 
d'argent dont nous disposons. 

L’espoir de recommencer un vrai couple avec Arlette est deja completement estompe. 
L’obligation de devoir vivre tout le temps ensemble n’a rien arrange. 

Cyriaque est inscrit a l’ecole francaisc d’Asuncion. Au debut, le directeur, monsieur Defaisse 
va se montrer tres comprehensif. Je lui explique toute la situation et le danger de me faire 
reperer par Cyriaque. Il me promet la discretion et de m’avertir directement si qui que ce soit 
venait a l’interroger sur Cyriaque. 

Pendant un mois et demi, grace a mon nouveau sauveur, j’etudie les possibility de travail 
dans le pays et, apres un voyage memorable dans le Nord du pays (le chaco ou la queue de 
l’Amazonie), il en ressort que l’unique maniere valable de gagner de l’argent est le travail 
touchant aux bovides. 

1986 enfante en effet une annee ou un travail d’elevage bien con£u peut faire esperer un gai de 
100% a l’annee. 

Mars 1986 : 

Nous sornmes en exil depuis un mois et demi. 

Je n’ai pas cesse d'avoir des nouvelles de Belgique. Et pourtant personne ne connait mon 
adresse... sauf Dodo. Meme pas mes parents. Mes amis, Francis Dossogne et Pepe, souvent 
accompagnes par Dodo, m’envoient des cassettes radio desopilantes afin de me maintenir le 
moral. 

Ici, au Paraguy, je ne connais aucun beige et ma tentative de contact avec jean-Marie Paul et 
Beatrice Bosquet (deux beiges recherches pour meurtre d’un arabe) s’est soldee par un echec. 
L’alcool aidant, les cassettes se terminent toujours par un maximum de gags et de 
plaisanteries. 

Dodo nous revele aussi une nouvelle stupefiante : Claude Leroy, alors qu’il vient d’etre mis en 
liberation conditionnelle, la previent de ce que nos cassettes sont interceptees, ecoutees, 
enregistrees puis reexpediees par la Surete de l’Etat. 

A l’epoque. Monsieur Devlieghere, commissaire haut grade a la Surete de l’Etat, s’occupe de 
mon cas. Il est sumomme Tarass Boulba de par une tete coiffee a la boule de billard. Il s'agit 
done d’un tres brillant cerveau. Il est franc-macon et a contact avec Claude Leroy. 

Au depart, il donne l'information afin de proteger l'epouse d'un « Frere ». Plus tard, en 
remerciement de ses nombreux mensonges que je demonterai plus loin, il deviendra le 
nouveau Directeur General des Etablissements penitentiaries. 

En Belgique, le vice paie. 

Des l’annonce de cette surveillance, nous incluons dans nos cassettes des phrases idiotes avec 
un accent reel de sincerite. Tarass Boulba et son equipe s'arrachent les cheveux pour 
decouvrir le sens des messages. Nous ne pouvons malheureusement les voir a l’ouvrage, mais 



l’idee que des super-flics depensent un temps fou a decoder pourquoi « le chat tourne autour 
de la table » ou « je n’ai plus de dentifrice » nous rend joyeux coniine des gamins fiers de 
leurs farces. On a vraiment peine a croire qu’ils ne flairent pas le tour qu'on leur joue. 

Huitmars 1986 

Dodo arrive. Elle vient me visiter et dans ses bagages... pepe. Je suis fou de joie...je suis 
emu... je ris...je pleure... je vais organiser la fete. A l’epoque, il n’existe pas de fleuriste a 
Asuncion, je me vois done dans l’obligation d’accueillir Dodo avec des fleurs achetees ... a 
une echoppe du cimetiere ! 

Comme elle me l'avait demande, je lui ai loue une villa pour un mo is dans un beau quartier de 
la capitale. Nous menons une fete terrible et pourtant, Dodo n’est plus tout a fait la meme. Elle 
degage une agressivite terrible. Mon depart et le contrecoup de mes detentions et de celle de 
Claude font mise a plat. Les interrogatoires et la decouverte de la double vie de Claude font 
mechamment marquee et c'est une femme amoureuse certes, mais une femme revancharde 
que je trouve en face de moi. 

Claude vient d’etre libere et elle doit maintenant faire un choix pour sa vie future. Claude a 
prevu de nous rejoindre. Elle panique a l’idee de sa venue. Je lui remonte le moral comme je 
peux en l'assurant maintenant que les perquisitions, interrogatoires et attentes dans les parloirs 
de prison font dcfinitivcmcnt partie du passe. Mais les choses ne lui semblent pas aussi claires 
et je decouvre ma Dodo qui rit et ma Dodo qui pleure. 

Le temps sous les tropiques se montre particulierement idyllique. 

Le matin (je loge chez Dodo), nous nous levons tres tot pour regarder le lever du soleil, et a 
ces moments-la, nous decouvrons des petits coins de paradis. Dodo decide d'acheter une Jeep. 
Quel vehicule et quels souvenirs ! 

Un soir, alors que j’etais rentre chez moi, Pepe decide de sortir Dodo pour lui remonter le 
moral. 

Passablement emeches, ils se trompent de chemin, ne voient pas les sentinelles et se 
retrouvent en plein milieu de la caserne de la garde personnelle du President Stroessner. Les 
lampes de poche les braquent de partout ainsi que les mediants yeux noirs de leurs fusils 
d'assaut (de bons F.A.L. beiges). 

Pepe sombre un instant dans la panique : 

-Dodo, surtout ne fais pas marche arriere ! Arrete, vite ! 

Puis, il decide d'arranger la situation. II ne parle pas espagnol, il a oublie ses papiers et Dodo 
aussi, ils sont en etat d’ebriete et ils sont dans une zone strictement interdite. 

Par ses gestes et son humour, Pepe detend la situation et les militaires vont meme leur 
indiquer la bonne route. 

Nous parlerons aussi affaire et en attendant l’arrive de Claude, nous visiterons Graziani. Le 
travail de ganaderia (elevage de boeufs) semble aussi a Dodo un bon investissement et par 
correction, elle attend Claude avant d’investir dans le premier troupeau. Sur mes conseils, 
Dodo va essayer de reprendre une vie commune avec Claude... je n’aurai jamais ete aussi 
stupide de ma vie ! 

Claude arrive a l'aeroport et nous l'accueillons coniine un heros libere. Pourtant, son arrivee 
cree rapidement des problemes. La vie conjugale de Dodo est detruite, c'est pourquoi nous 
prolongeons nos discussions jusque tres tard dans la nuit. Claude donne son accord pour que 
Dodo investisse son propre argent et nous achetons le premier troupeau. Nous louons de 
bonnes terres pour les engraisser. 

Lors de ce premier voyage, Claude ne parle pas des relation de Gol et de Kaida (patron du 
casino de Namur, truand notoire en France). Pourtant lors de sa detention, il m’avait fait dire 
entre mes deux arrestations que, vu mes capacites, je pourrais peut-etre trouver un travail de 
directeur de securite dans un grand casino. 



Par contre, il me decrit beaucoup ses collegues et certaines affaires « bizarres » qu'il connait. 

Je decouvre ainsi les vraies hierarchies installees au Parquet ainsi que les tendances politiques 
ou philosophiques de chacun. 

II m'explique la pratique judiciaire et je comprends avec enormement d’etonnement et 
d’indignation que l’independance des juges et des substituts n’est que theorique. 

Chez les substituts, je pouvais comprendre, mais... chez les juges ! 

Prevoyant de multiples retours, Dodo loue aussi une maison, avenida Brasilia. Je suis done sur 
de la revoir bientot. 

La fin du mois est marquee par quelques remarques dans les journaux beiges qui pensent que 
je me suis enfui au Paraguay. 

Avril 1986 

La prison de Gand a toujours servi de modele aux autres prisons de Belgique. 

Son directeur, un peu megalomane, a meme reussi a obtenir des vitraux pour decorer l’enonne 
centre de son etablissement. 

A part l’esprit particulierement repressif de la direction, cette prison se revele confortable avec 
des installations sanitaires dignes de ce nom. Elle abrite actuellement une bande de truands 
celebres : la bande « De Staercke ». 

Ces malfaiteurs sont inculpes de plus d’une centaine de mefaits, allant du hold-up au recel. 
Panni cette bande : VanEsbroeck, celui de l'affaire des bons de caisse et des videos. 

Les « De Staercke » ont ete « balances » par Van Esbroeck dans l’affaire des titres mais 
curieusement, tres curieusement, ils ne sont pas poursuivis. Panni la bande, Alain Moussa, le 
« flingue » par Ramadan Dodac. Enfin, last but not least, puisque Van Esbroeck a avoue son 
vol de videos, je suis “repris” panni la bande. 

A l’epoque, les tueries du Brabant Wallon sont sous la loupe de deux groupes d’enqueteurs : le 
groupe Delta et le groupe dit Cellule du Brabant Wallon, sous la houlette du juge Schliker de 
Nivelles (celui que les enqueteurs d’extreme droite accusent de saboter volontairement les 
enquetes). 

Les deux groupes se detestent et vont jouer a la guene par le truchement des temoins qu'ils 
vont reellement tenoriser. 

Pour le groupe Delta : ils suivent la piste de De Staercke. 

Pour la cellule B.W. : ils ont capture des sortes de forains, plus ou mo ins marginalises qui 
avouent ou retractent selon que l’interrogatoire soit muscle ou tres muscle. 

Le directeur de la prison de Nivelles intervient meme en faisant photographier un suspect de 
retour d’intenogatoire, c’est odieux ! 

Les super-marches Delhaize ont decide de motiver la recherche des criminels en offrant une 
prime de 10.000.000 de francs beiges a toute personne susceptible de fournir des indications 
permettant d'idcntificr les tueurs. 

Le 8 avril 1986, le sous-officier Marc Lemmens de la B.S.R. de Termonde retire les menottes 
a Van Esbroeck, toujours surnomme « Dikke Leopold ». 

Ce dernier va faire une deposition capitale pour la decouverte de la « verite ». 

Voici le proces verbal historique : le P.V.736B.S.R. Tennonde 8 avril 1986. 

En prenant bien soin d’omettre le nom de son ami, le commissaire Godefroid de la P.J. de 
Bruxelles, Dikke Leopold explique qu’il m’a connu en tant que directeur de prison. Ensuite, il 
embraye sur un « scoop » : 

-Bultot m’a demande de receler des objets voles afin d’alimenter la caisse de son parti 
politique. Il sait que je suis un grand specialiste de ce genre d’activites et il a ose me parler 
sans vergogne ! 

Van Esbroek feint son offuscation : 

-Je n’en revenais pas, venant d’un directeur de prison ! Je n'ai done donne aucune suite ! 



Puis franchement outre : 

-Mais un soir, il est venu me relancer jusqu'a mon domicile ou il me dit qu'il est un des 
elements moteurs du Front de la Jeunesse (or ce mouvement est dissout. NDLA) 

Plus tard, il me montre des homines en unifonne nazi et il m'indique que le Baron de 
Bonvoisin est un des chefs ! 

Devant l’etonnement du sous-officier, d'ailleurs accompagne par un inspecteur de la P.J., Marc 
Itterbeke, il ose tout: 

-D’ailleurs, Bultot a des reunions avec Leon Degrelle (President du parti Rex, condamne a 
mort par contumace et en exil en Espage, NDLA) chez de Bonvoisin et Degrelle est amene 
sous la protection des gens de la Surete de l'Etat! Bultot n’aime pas les Grangers et il pense 
que je suis de son bord, or je suis membre du parti socialiste et j’ai meme une carte du parti. 
Pas gene pour un sous de ses inepties, il poursuit: 

-J'ai vu le club de tir de Bultot, les cibles sont representees par des dessins de femmes et 
d'enfants. 

J'y ai vu Bouhouche et Mendez. Ils ont fair bon amis tous les trois. 

Il assene alors le coup de grace : 

-Bultot a revendu les armes volees au groupe special d’intervention de la gendannerie en 
1981. Elies ont ete distributes a des groupes d’extreme droite. 

Il doit surement avaler sa salive avant de continuer : 

-En mars 1985, Bultot m’a propose de prendre part a des entrainements commandos afin de 
participer a des actions visant a destabiliser l’Etat. Je serais paye 200.000 FB par mois. J'ai 
refuse, je rappelle que je suis membre du parti socialiste. 

Apres ses « revelations », Van Esbroeck joue le grand jeu et demande protection : 

-J'ai aide la justice mais ma vie est en danger. Il ne faut plus m’envoyer des les prisons de 
Forest ou Saint-Gilles : les homines de Bultot y sont toujours puissants. Le lendemain, il 
poursuivra sur le meme ton en disant que je suis corrompu et que j’accepte de l’argent pour 
faire avancer les dossiers : argent pour mon parti politique. 

Il osera de meme : 

-Bultot a un jeu monopoly special ou les cases de terrains sont representees par des camps de 
concentrations et la prison par une chambre a gaz ! 

Apres avoir pretendu, le 23 avril 1986, dans le P.V. 886, redige par les memes policiers, qu’il 
avait ete menace de mort, Dikke Leopold se revele enfin : 

-J'ai fait ces declarations pour soulager ma conscience. Mais je dois aussi avouer que je suis 
interesse par la prime offerte par les supermarches Delhaize. Comine je risque aussi ma vie 
pour ces declarations, j’espere que le tribunal en tiendra compte. 

Devant toute cette pourriture, j'aurai une satisfaction en 1987, le tribunal tient compte de son 
aide et... le condamne a vingt ans de prison ! 

Le lendemain de la premiere declaration de Van Esbroek, le journal « la Derniere Heure » du 
9 avril titre : « Est-il nonnal qu'un directeur de prison organise des parcours du combattant ? » 
L'article donne de fausses informations sur ma competition de tir et demande a ce que Ton 
procede a ma recherche. Comme par hasard, on se felicite de Van Esbroek pour l'aide qu'il 
apporte a la Justice ?! 

A partir de ce moment, je deviens la cible de la presse beige qui s'etonne de mon depart au 
Paraguay et n'y voit que la preuve de ma culpabilite dans le meurtre de Mendez. La 
persecution odieuse de ma famille et mes amis va bientot commencer. 

En avril 1986, la cellule Delta commence son offensive par une perquisition des clubs de tir 
pratique et saisit un nombre incalculable de douilles usagees. 

Le mois suivant, notre vieille connaissance, Jean-Pierre Marion, armurier n°024 a Saint- 
Gilles, escroque un autre armurier en lui vendant 3 mitrailleuse M.G. 42 ... qui ont ete rebutee 
par le banc d’essai obligatoire de la F.N. (Fabrique Nationale d’armes de guerre de Belgique). 



Fievez de la B.S.R. enquete sur cette malversation qui vaut a Marino ses premiers ennuis 
judiciaires. II est poursuivi devant le Tribunal correctionnel. Loin d’etre assagi, Marino 
recidive dans la delinquance le mois suivant. 

Lors d’une perquisition a son domicile, les enqueteurs decouvrent 10 revolvers non inscrits 
dans son registre d’annurier. 

-II s'agit d’armes deposees par un armurier de Gilly, pretend-il avec un sourire angelique. 
Malheureusement pour lui, l’enquete decouvre son mensonge. 

Voila notre Marino et son complice, le trafiquant d’armes Jean Baugnet, a l’interrogatoire chez 
l’as des as, le super flic, le gendarme infaillible : l’adjudant-chef Guy Goffinon de la B.S.R. 
Celui-ci est accompagne par le gendarme Tinant qui lui, se montrera toujours correct tout au 
long des annees. 

Sumom de Goffinon : « Le Gof » Surnom de Tinant: « bebe joufflu » ! 

Chez Goffinon se trame alors un commerce peu reluisant: Marino m’accuse d'avoir participe 
a un tralie illegal d’une centaine de 357 Magnum et Baugnet (le meme qui m’a foumi les 5 
armes en novembre 1985, peu avant ma deuxieme arrestation), m’accuse de trafic de 150 
armes avec l’ambassade du Zaire et le M.S.I. (Parti politique italien de droite represente au 
Parlement europeen). 

Le mensonge de Marino se montre trop gros que pour etre utilise en Justice mais celui de 
Baugnet semble plus interessant. 

Le proces verbal de Baugnet est envoye dans mon dossier aupres de madame Coppieters 
Wallant. Celui de Marino est garde a usage interne et en recompense de bon et « loyal » 
service, Marino n’est pas poursuivi pour les dix annes en noir trouvees a son domicile ! 

Quant a Baugnet, interroge plus tard par le juge d’instruction de Nivelles, il reviendra 
largement sur ses accusations n'avant pus qu'un seul pistolet 7,65 MM... Ce PV, lui, ne sera 
pas transmis dans mon dossier ! 

Au Paraguay, j’accompagne toute une famille d’indigene dans le nord du pays a la pointe de la 
Bolivie. 

Mission : abattre quelques jaguars deja vieux qui ecument les maigres troupeaux locaux. 

Le jaguar vieillissant n’hesite pas a s'infiltrer dans les estancias et peut abattre trois ou quatre 
bovides en une nuit. 

Les paysans du nord dont pauvres et possedent a peine une dizaine de betes chacun. La 
decouverte de la jungle profonde m’emerveille mais la chaleur et les moustiques temperent 
rapidement mon enthousiasme. 

Alors que je me baigne pres d'une marre je suis assailli par une nuee de moustiques. Les 
compagnons viennent directement a mon secours, mais je suis atteint par plusieurs centaines 
de piqures. 

Une heure plus tard, je suis couche, atteint par la fievre. Heureusement, nous soinmes sur le 
chemin du retour. La pluie... la pluie nous tombe dessus, comine seule une pluie tropicale peut 
le faire. Nous soinmes bloques en pleine jungle, impossible d’avancer sur cette route 
detrempee ! Une semaine plus tard, nous arrivons enfin a Asuncion. Mes amis me debarquent 
directement a l'hopital italien. Le medecin m’ausculte et m’envoie : 

-II se peut que vous soyez atteint par le chaga ! Demain, nous aurons le resultat des analyses 
sanguines. 

-Et si c'est positif ? 

-Vu la reaction de votre corps, il vous reste un mois a vivre ! 

II m'assene la nouvelle comine s'il m’apprenait que j'ai une simple grippe ! Je sors affole de 
l'hopital pour telephoner a Dodo. La nuit se traine, se traine... 

Le lendemain, j'apprends qu’il ne s'agit que d’une infection generalisee due aux moustiques. 

Je respire ! 



Cette expedition m’a cependant inocule un autre virus : celui de la jungle ! 

La jungle, on l'adore ou on deteste ! Elle ne laisse jamais indifferent. 

Apres quelques differents contacts chez les acheteurs de viande, je decide de gagner ma vie en 
ramenant du gros gibier pour les restaurants : sangliers, carpinchos (cochon d’eau), chevreuils 
et caimans 

II m’arrive ainsi plusieurs aventures, certaines droles, d’autres franchement cauchemardesques 
! 

Une fois par semaine, je pars avec un indien et ma camionnette et nous allons chasser le long 
du Pilcomayo, un fleuve qui fait frontiere entre l’Argentine et le Paraguay. 

Le cochon sauvage est un animal particulierement dangereux mais a chaque fois, j’en ramene 
6 ou 7. 

Je chasse aussi le caiman, dont la chair est succulente, surtout la queue. 

Mais aller recuperer un caiman blesse est une oeuvre particulierement dangereuse ! II faut 
savoir que le caiman est un animal qui se complait dans les bras de riviere bourres de piranhas 
dont il se nourrit. 

De plus, les possibility de tuer un caiman restent tres minimes. 

II faut absolument lui loger la balle entre les deux yeux et pas un centimetre a cote. Une balle 
dans le corps n’a aucun effet sur lui. 

Lors d’une chasse memorable, je me mets a l'aflut le long d’une riviere. Je sais qu'elle est 
bourree de carpinchos (rongeurs de la taille d’un pore) et de Yacares (caimans). 

Soudain, de l'autre cote de la riviere, sort le plus grand caiman qu'il me fut donne de voir. Une 
bete de trois metres, plus ou moins cent kilos, alors qu ele caiman generalement ne depasse 
pas le metre cinquante. 

Je suis a quarante metres et je m’apprete a tirer avec le plus de precision possible avec ma 
Winch, 357 Magnum. Mais voila, une vingtaine de moustiques m'assaillent le visage. Au 
moment ou je tire, un moustique me pique la paupiere. L'excuse est belle pour annoncer que 
je l'ai rate ! Le monstre est touche et en traversant la riviere, les bras haut leves en tenant ma 
carabine, je suis accompagne par mon indien et son chien. 

Le caiman a plonge. Moment delicat, car je ne sais s’il est mort ou blesse. Je sonde avec un 
baton et brusquement, il reapparait pour happer le pauvre chien ! 

Je degaine mon Colt 45 et vide mon chargeur sur le caiman qui replonge aussitot. Plus de 
caiman...et plus de chien ! 

Cette chasse allait vraiment etre une des plus mouvementees de ma vie. 

Le meme apres-midi, nous nous rendons avec un peon (ouvrier agricole) de l’estancia vers un 
autre bras de la riviere ou grouillaient les caimans. Seuls leurs yeux sont visibles et en 
fonction de leur ecartement, il est possible d’en evaluer la taille. Il y en a de belles longueurs 
et nous nous divisons. Luchon, mon indien et le peon partent une bonne centaine de metres en 
amont. Les caimans en nous voyant avaient directement plonge dans les eaux glauques du 
bras de la riviere. 

Je rentre moi-meme dans l'eau jusqu'au niveau du nombril non sans un certain frisson. On a 
beau savoir que le caiman n’attaque pas l'homme, le specimen de ce matin me restait en 
memoire. En outre, le nombre eleve de caimans est revelateur du nombre encore plus grand de 
piranhas dont ils se nourrissent. 

En langue Guarani, « pira » veut dire poisson et « na » veut dire diable. Piranhas = poissons 
du diable ! 

Signalons la richesse de cette langue : Femme se dit Kuna, soit « ku » qui veut dire langue et 
« na » qui veut toujours dire diable : Femme = langue du diable !? 

Nerveux dans la riviere, j’attends la reapparition des caimans. Soudain, pres de mes 
compagnons, un aboiement de chien, suivi par une dizaine de coups de feu. Une gerbe 
d’ecume... un carpincho debusque par le chien vient de plonger. Cet animal qui peut atteindre 



60 kilos est un excellent nageur et peut rester longtemps sous l’eau. 

Lucho patrouille le long de la berge quand une minute plus tard, il surgit a bout de souffle a 
trois metres de moi. 

La surprise est enorme de part et d'autre, elle se transforme chez lui en terreur et chez moi en 
un melange de pitie et de honte ! 

J'hesite et comine il est a bout de souffle, il ne peut replonger. La necessity de ramener de la 
viande et de nourrir ma famille l’emportent et, pas tier de moi, je l'abats d’une balle dans la 
tete. Il coule aussitot. Le probleme n’est pas simple : Un carpincho abattu dans l’eau ne 
reapparait qu'une demi-heure plus tard environ. Dans ce cas present, il a coule a grande 
profondeur dans une riviere dont le courant se montre assez fort. Nous voila dans l’obligation 
de surveiller les berges sur cinq cent metres. Surprise, il reapparait tres vite et a seulement 
cent metres de l’endroit ou je l'avais tire. Je demande a l'indien d’aller le chercher mais la 
profondeur est grande et ni lui, ni le peon de l’estancia ne savent nager. On voit a la surface 
une tache brune a environ 15 metres du bord. Je me deshabille et plonge pour aller le 
chercher. Nager tout nu dans une riviere infestee de caiman et de piranhas est une sensation 
particuliere... je n’ai jamais trouve de tenne pour la qualifier ! 

Je nage avec difficulte a cause du courant et au moment de saisir le dos de l'animal, je vois 
sous l'eau une sorte de tache blanche appartenant a l’animal. Etait-il malade ? Je la verrai bien 
sur la berge. Je l’accroche, mais pas moyen de le faire bouger alors qu’il flotte. De plus je sens 
un tourbillon pres de mes jambes. Je pense abandonner, mais la mort de cet animal ne peut 
etre gratuite et c’est au bout de plus d’une demi-heure de lutte que je ramene l’animal sur la 
berge. 

La, je crois defaillir : la tache blanche, c'est le crane tout propre de l’animal ou sont encore 
accroches quelques piranhas. En arrivant sur la berge, j'ai compris ce qu'etait ce tourbillon : je 
tirais d’un cote... et les piranhas de l'autre... et j’etais tout nu ! 

De ma vie, je n’ai jamais eu aussi peur de fag on retrospective ! Ce genre de chasse, outre le 
fait qu'il est tres dangereux, est loin d’etre vraiment lucratif. Le moindre probleme automobile 
dans la jungle et la glace entreposee dans la glaciere a vite fait de fondre. En principe, je 
prends de la glace pour huit jours. Le voyage pour se rendre sur place dure deux jours, deux 
jours de chasses et deux jours pour rentrer. 

Il m'est arrive deux fois de rester embourbe et de devoir ainsi jeter toute la viande. Un 
embourbement peut se solutionner dans le meilleur des cas en quelques heures, dans le pire... 
en quelques jours de travail achame. 

Plus tard, j’abandonne cette activite pour me lancer dans le commerce des chevres. 

En Belgique, Monsieur Jean Gol, ministre de la Justice m’offre un beau cadeau d’anniversaire 
en ce mois de mai. 

Au mepris de toute decence, il me demet definitivement de toutes mes fonctions, motif: 
absence irreguliere... Or de par ma suspension, il m’etait interdit de me presenter au travail. 
Signe du debut de ma persecution : aucun media ne s’en emeut! 

Le 15 mai, Dodo revient seule au Paraguay. Elle me semble plus calme et nos retrouvailles 
sont fantastiques. Nous partons ensemble visiter le troupeau qui a fair de bien grossir. Je lui 
apprends aussi a chasser. La jungle la fascine egalement et nous adorons la sillonner. 

Au mois de juin, le Mundial de football met le Paraguay en effervescence. Le pays s'est 
qualifie et chaque goal est salue dans tout le territoire par des salves de petards ou des 
detonations d'armes a feu. 

Le jour du Belgique-Paraguay est un jour memorable. En face de ma maison se dresse une 
gargote infame mais qui possede la TV. 

Nous assistons au match dans un local surchauffe par les supporters. Pour faire cornme tout le 
monde, je decharge en fair mon revolver lors du goal de la Belgique. 

Quelques jours plus tard, Claude telephone, affole... l’inquisition beige vient de debuter. 



Le 13 juin, le groupe Delta attaque en force ! 

Tous les membres de mon club sont perquisitionnes et toues les armes et materiel de 
rechargement sont saisis. 

Par la meme occasion, mes parents, mes soeurs, mes amis, Pepe, Claudine, et Claude Leroy 
n'echappent pas a la mesure. 

Les journaux commencent a evoquer la possibility de mon inculpation dans les tueries du 
Brabant Wallon. Certains parlent de « verifications », d’autres coniine « la Demiere Heure » 
m'impliquent plus avant en declarant que Bouhouche et le De Staercke sont mes amis ! 

Le pouvoir politique montre son emoi et les socialistes reclament une commission 
parlementaire car quelques deputes apprennent certaines aberrations sur la maniere dont les 
enquetes sont menees. 

Jean Gol descend dans l’arene : 

-II n’est pas question de creer une telle commission qui ne pourrait que gener les enqueteurs ! 

II poursuit sur un ton convaincant: 

-Quant a la Surete de l'Etat, c'est un outil impeccable ! 

Dodo se prepare a retourner en Belgique. Elle s'attend aux pires ennuis et j’ai vraiment le coeur 
gros de la voir partir en connaissant les problemes qui l'attendent. 

Prise par f emotion et ne connaissant pas l’espagnol, elle n’entend pas a l’escale de Madrid 
qu'elle doit changer d’avion. Ce fut la seule et unique fois que les Lineas Paraguay 
demanderent le changement d'avion pour Bruxelles. 

A faeroport de Zaventem, le groupe Delta a prepare une surprise. Suite a une fausse 
information, ils sont persuades que je voyage dans le meme avion que Dodo et que je vais 
essayer de rentrer incognito en Belgique. 

Le dispositif mis en place par le Capitaine Sack du groupe Delta est impressionnant... 

II n'y a pas moins de 57 gendannes en tenue de combat qui encerclent l’aire de debarquement 
de l’avion ainsi que le transit. 

Dodo, ignorante de sa mauvaise destination, atterrit toute stupefaite a Francfort ! A faeroport 
de Zaventem en Belgique, le branle-bas de combat est indescriptible... pas de Bultot, pas de 
Dodo ! 

Seuls les bagages arrivent a destination. 

Claude Leroy et les enfants, venus attendre Dodo sont aussi stupefaits que les gendannes. 

Tout d'abord, Claude avait l'assurance du Delta que Dodo n'aurait aucun ennui a la douane 
beige, mais elle devait se presenter en leur bureau le lendemain. 

L'absence de Dodo et f arrivee de ses bagages le plonge aussi dans l’inquietude. Mais, au 
meme moment, se joue une autre piece dans faeroport. Pepe est la. Non pour attendre Dodo, 
mais pour venir accueillir Ramadan Dodac qui revient du Mundial de football au Mexique. 
Rama (abreviation de Ramadan) debarque tout joyeux au milieu d'un groupe de Beiges encore 
excites de fambiance mexicaine. II est affuble d’un immense sombrero et est porteur d’un faux 
passeport! 

Son sourire s’estompe vite des qu’il apergoit le dispositif policier en place. A peine passe la 
douane, il refile rapidement son passeport a Pepe et veut se diriger a toute vitesse vers la 
sortie, mais un flic fa reconnu. 

Ils sont aussi entoures par une nuee de gendannes et embarques dans leur bureau. 

Leur ebahissement s’agrandit avec l’interrogatoire : 

-Ou est Bultot ? Pourquoi revenez-vous le meme jour que lui ? Pourquoi Pepe est-il la ? 

Rama et Pepe se depetrent difficilement de ce bourbier d’autant plus qu’ils ignorent le retour 
de Dodo. 

Heureusement, ils n’accordent pas trop d’importance sur la « perte » du passeport de Rama. 
Pepe, grace a son humour, s’en sort bien aussi malgre la peur au ventre : le faux passeport de 
Rama est toujours dans sa poche. 



Des qu'ils sortent, apres deux heures d’interrogatoire, ils rencontrent Claude qui, entre-temps 
par un coup de 111 a ses beaux-parents, attend maintenant l’avion de Francfort! 

Aussitot qu'ils le voient, les deux comparses le mettent en garde et s'en vont tres vite... Rama 
avouera : 

-Je n’ai jamais eu autant de m... dans ma vie que depuis que je connais Bultot! 

A l’arrivee de Dodo, elle est aussitot arretee. Une femme du service de securite, trop zelee 
veut meme la fouiller corporellement... Dodo s'y oppose. 

Elle est amenee au poste de gendarmerie et subit un interrogatoire tres sec, une seule question 
-Ou est Jean Bultot ? 

Devant le refus de reponse, ils ne peuvent que s'incliner. Les bagages seront fouilles avec un 
soin tout particulier, meme le tube a dentifrice est demonte ! 

Le 2 juillet, la commission de la justice de la Chambre rejette definitivement la proposition 
des socialistes. 

Mes amis connaissent maintenant le terrorisme policier. Claudine en est la principale victime. 
Elle est perquisitionnee deux fois par le groupe Delta. 

La cellule du Brabant Wallon ne veut pas etre de reste, elle perquisitionne aussi. Plus tard, la 
cellule de Jumet viendra egalement. 

Dodo n'est perquisitionnee qu'une seule fois, mais subit le maximum d’interrogatoires. La 
procedure est ecoeurante : les gendarmes viennent chercher Claudine a son travail et l'amenent 
devant les collegues et le patron de son bureau. Dans son magasin, Dodo voit arriver les 
gendarmes avec le feu bleu clignotant sur la voiture. Ils entrent toujours aux heures 
d'affluence et orient d'une voix forte : 

-Madame Leroy, nous venons vous chercher pour interrogatoire ! 

Pepe dans son cafe « Le Plein Pot » vend aussi de la petite restauration le midi aux etudiants 
du lycee tout proche. Pendant une semaine, les gendarmes viennent chaque jour proceder a 
des controles d’identite dans son etablissement et ce, a l'heure de table... le resultat est 
desastreux ! 

Des qu'un ami est convoque par un groupe, il recoil l’ordre de telephoner a l’autre groupe pour 
le signaler. 

Bien souvent, le jour d'une convocation a Nivelles, les gendarmes de Termonde viennent 
chercher le temoin tot dans la matinee et l’embarquent pour la journee dans leurs bureaux. 
Apres interrogatoire par un groupe, le temoin est systematiquement appele par l'autre groupe 
aux fins de connaitre les questions posees. Dans ce climat de terreur, Pepe organise la defense 
passive. II cree des challenges : le challenge du plus perquisitionne, celui du plus longtemps 
interroge, aux plus nombreux deplacements, etc. 

Les flics ont une obsession, mon adresse. Or, de par ses controles sur les cassettes, il y a 
longtemps que le service de Monsieur Devlieghere (alias Taras Boulba) de la Surete de l'Etat, 
possede mes coordonnees. 

Au Paraguay, j’ai obtenu ma carte d’identite nationale et mon avocat a prevenu les autorites de 
la specificite de mon cas. Meme la-bas, etre emprisonne pour une photo avec des poignards 
leur semble tout a fait anonnal ! 

Ils me regardent des lors cornme un refugie politique. Quant a mes revenus, je continue mon 
job de chasseur professionnel ! 

Une rage sourde m’etreint a chaque fois que j’apprends une nouvelle perquisition ou un nouvel 
interrogatoire ! 


Arlette ne tient pas le coup ! Elle s'est remise a boire de facon effrayante ! Un soir de juillet, 



je la trouve dans un tel etat que je dois la faire hospitaliser. Les medecins la garde quelques 
jours a l'hopital Bautista. Elle refuse de chercher du travail. Coniine je l'ai emmenee au 
Paraguay, elle estime que c'est de mon devoir de la nourrir. Apres 20 ans de travail 
d’infirmiere, elle considere qu'elle en a fait assez ! 

En Belgique, la terreur bat son plein. Chaque groupe a son propre systeme de persecution. 
Ainsi le groupe Delta convoque les temoins dans ses propres bureaux a Termonde, ce qui 
occasionne pas mal de frais. Sur place, ils interrogent pendant des heures et des heures, posant 
surtout des questions sexuelles. 

Les femmes interrogees par l’equipe du capitaine Sack sont litteralement agressees de 
questions sur ma vie sexuelle. 

Elies sont soumises a des questions tres precises du type : 

-Comment Bultot vous a-t-il draguee ? Quand avez-vous fait l'amour ? Quelle est sa position 
preferee ? A-t-il des desirs particuliers dans ce domaine ? 

Un vrai scandale ! 

Et quand, deux ans plus tard, j’eus l’occasion de rencontrer le capitaine Sack dans le cadre de 
la commission rogatoire, je ne pus m’empecher de lui demander si ses gendannes etaient tous 
des pedes ou des impuissants pour avoir ecrit des milliers de pages sur ma fa?on de baiser. II 
me repondit qu’il n'y en avait pas des milliers et que cela servait a definir mon profil 
psychologique ! 

Apres les obsedes sexuels de Termonde, voyons maintenant ce personnage qu'est le super-flic 
des flics, son excellence, l’adjudant Goffinon de la B.S.R. de Bruxelles. Glorifie par Maurice 
Sarffati (alias Serge Dumont). Goffinon ou Le Gof (pour les intimes) represente une des plus 
grandes ordures dont peut s'enorgueillir la gendarmerie beige ! 

Chez lui, pas de cris, pas de hurlements, simplement des menaces de mort! 

II est au courant de la cohesion qui existe entre mes amis et il met tout en oeuvre pour la 
detruire. La description du personnage vaut le coup d’oeil. La cinquantaine bien sonnee, 
toujours tire a quatre epingles, cheveux gomines, Monsieur Goffinon voudrait paraitre plus 
coniine un haut magistrat que comine un simple sous-officier de gendarmerie. Au depart, il 
est un peu maniere et condescendant. Dame ! Monsieur Goffinon a fait tomber tant de tetes 
qu’il se croit vraiment parvenu. Sa derniere grande cible serait de s'offrir sa tete a mon 
palmares. Cette fois, cependant, il va echouer malgre la virtuosite a manipuler les gens qu’il 
interroge. Le Gof travaille d’abord en douceur. Chez lui, pas de gifle, et pas de coups 
Il rassure. A la limite, il se montre meme paternaliste sans cependant se departir d'une legere 
suffisance de lui-meme. Le ramage s'accorde avec le plumage ! 

Laissons-le parler ainsi qu’il l'a fait a ma famille et a mes amis : 

-Jean (cote paternaliste protecteur) est, d’apres mes informations, un chic type, toujours pret a 
rendre service, pas du tout le genre violent que la presse essaye de demontrer. En fait, Jean, de 
par son bon coeur n’est absolument pas un extremiste et il ne ferait pas de mal a une mouche. 
Alors, pourquoi lui coller l'etiquette d'extreme droite ? 

Le temoin est mis en con fiance, il poursuit: 

-Il n'a rien a voir avec ces neo-nazis violents qui attaquent les Arabes dans la rue. Il faut lui 
retirer cette etiquette politique malsaine et son cas sera surement examine avec bien plus de 
clarte et de bienveillance ! 

Il faut avouer que mes parents furent impressionnes par cette touchante declaration. Et meme 
Lrancis Dossogne minimisa aupres de lui mes relations avec le parti Lorces Nouvelles. 

Un premier bon point pour Le Gof qui voulait que mes amis lui signent des deux mains sa 
maniere de voir et plusieurs, croyant m'aider, mettent leur signature au bas de ce beau piege ! 
Beau piege ? Mais pourquoi done ? 



En fait, ce mielleux personnage escompte bien me faire passer pour un delinquant de droit 
commun aupres des autorites paraguayennes. II veut absolument leur demontrer que je ne suis 
pas un politique mais un delinquant ordinaire ... et ainsi obtenir mon extradition ! 

Comine mes amis me telephonent au Paraguay apres chaque interrogatoire, je me rends 
compte du piege et j'agite la sonnette d’alarme. Ici, au Paraguay, je ne suis pas sous la pression 
policiere et avec le recul, je me rends mieux compte des agissements du personnage. J’ai vu 
juste ! 

Au prochain interrogatoire de Dodo, il essaye d’aller plus loin encore en demontrant par une 
brillante mais fielleuse theorie que mes idees ne sont meme pas d’extreme droite. 

Dodo, avertie, lui retorque que je suis fier d’etre nationaliste et que jamais, quelque puissent 
etre les circonstances, je ne veux etre degage de mon ideal. Surpris, le Gof insiste. Dodo tient 
bon. Le vernis du Gof se craquelle, il devient alors rouge ecarlate, ce qui est chez lui un signe 
de colere contenue. Comment ose-t-on contrarier sa Seigneurie ? 

Le Gof est un vicieux mais certainement pas un imbecile. Vieux singe, il a plus d’un tour dans 
son sac. Il veut bien, grand prince, que Ton se mefie de lui, mais vu les circonstances, il va se 
resoudre a expliquer a Dodo que ma vie est en danger, mais lui peut encore me sauver la mise 

-Madame Leroy, l’heure est grave. Jean est en danger de mort. Il faut comprendre la situation. 
Pepe n’est pas un ami de Jean. Pepe connait les grands truands et est a leur solde. S’il s’est 
rendu au Paraguay, c’est dans l’unique but de reperer les lieux afin d’en rendre compte a ses 
chef. 

Dodo est interloquee... 

-Pepe a mis aussi Jean dans des situations scabreuses avec photos compromettantes. Si vous 
ne m’aidez pas, Pepe va retourner au Paraguay pour descendre Jean ! Voulez-vous etre 
responsable de ce meurtre ? Si vous aimez Jean, il faut m’aider a le sauver. Il faut me croire ! 

Il pense avoir marque des points, alors commence la tentative de division : 

-Surtout ne rien dire a Jean, car il ne vous croira pas et telephonera a ce qu’il croit etre son 
ami. Pepe devra en referer a son chef et c’est alors votre vie qui sera en danger ! Il faut me 
croire si vous voulez sauver Jean ! 

Dodo est serieusement ebranlee, il essaye l’estocade : 

-Pour preuve de ma bonne foi, je peux vous donner une infonnation ultra secrete : Claude va 
retourner au Paraguay en meme temps que Pepe pour voir s’il accomplit bien sa mission, car... 
Claude Leroy travaille pour la Surete de l’Etat! Il met a mort: 

-Jean est en danger, il faut m’aider ! 

Apres un sermon pareil de plusieurs heures, Dodo sort de son bureau completement 
assommee et ne sachant plus que faire. Un vrai lavage de cerveau ! 

Le Gof lui a propose, en echange de sa protection, que je lui fasse parvenir ma declaration ou 
j’actais tout ce que je connaissais dans les differentes affaires en cours. Dodo est aneantie et, 
apres une grosse crise de lannes, elle me telephone. 

Elle sait que je suis la seule personne qui peut vraiment la conseiller. Des que j’apprends le 
travail du Tartuffe, je suis pret a exploser mais la detresse de Dodo m’en empeche. Je lui 
conseille d’aller voir Pepe et de lui raconter tout ce que Le Gof lui a assene ! Je l’envoie en 
toute confiancc. Pepe est un veritable ami et le restera tant que je serai en vie. Toute 
tremblante et toute genee, Dodo explique ce qui lui est arrivee et n’omet pas de raconter ses 
doutes et ses craintes. Lantastique, Pepe la prend dans ses bras en lui disant: 

-Pauvre petite, qu’est-ce qu’il fen a fait voir ! 

Le Gof essaie aussi la meme tactique avec mon pere, mais avec certaines variantes. 

-Si Jean nous dit tout, il n’aura plus rien a craindre ! Par contre, si on pense qu’il connait des 
choses, un bon fusil a lunettes pourrait le faire taire, meme au Paraguay. 



Mon pere me telephone completement affole, j’ai beaucoup de mal a le rassurer. 


Debut juillet, ma soeur debarque a Asuncion. Elle est la premiere de ma famille a nous visiter 
et 1'emotion nous etreint. Elle nous decrit avec horreur les perquisitions familiales. 

Arlette et moi allons lui faire decouvrir le Paraguay et pour la premiere fois, je me rends au 
Bresil ou nous visitons les merveilleuses chutes d’lguacu, lieu de toumage du film « Mission 
». 

Le 19 juillet, Dodo revient au Paraguay pour les vacances, accompagnees des enfants. 

Le Gof lui a remis un message et le groupe Delta de Termonde a fait de meme ! Proposition 
du Gof: si j’ai des revelations a faire, je les couche sur un papier et quand Dodo rentre en 
Belgique, un helicoptere de la gendarmerie viendra le chercher en bout de piste, car l’avion y 
sera immobilise. Elle sera ensuite transportee directement dans la cour de la gendarmerie. 
Dodo lui a revele que je connaissais certains faits sur le Brabant Wallon et son attitude a 
change, il veut maintenant etre le premier a recevoir mon temoignage ! 

Tennonde se montre beaucoup plus materialiste et plus en accord avec « leur » sens de 
l'honneur : nous continuous les interrogatoires et perquisitions tant que Bultot ne prend pas 
contact avec nous ! 

Les gendarmes du groupe Delta remettent alors le numero de telephone de leur pennanence. 
Mais pour l’instant, je ne m’occupe pas des objectifs des flics, je veux faire oublier a Dodo et 
aux enfants les affres de leur vilenie. 

Avant de partir voir le troupeau, Claude a le temps de telephoner pour signaler a Dodo qu'elle 
doit vendre le troupeau, il a besoin de cet argent de fa?on urgente. Par telephone, il ne precise 
pas le but de ce retrait, mais Dodo lui fait conliance. Les enfants de Dodo et Cyriaque 
sympathisent sur la route de la jungle. Naturellement, nous tombons en panne... pour la plus 
grande joie des enfants. Tous adorent la jungle, l’estancia et le cheval. 

A Concepcion, nous decidons une courte promenade d’apres-midi... nous revenons deux jours 
plus tard, toujours suite a une panne de la jeep. 

De retour a Asuncion, je telephone a Tennonde. 

J'exige de parler directement avec le juge d’instruction Troch. Il est absent et je serai en 
communication avec le juge Tas. 

Je pose une premiere condition : j’accepte de parler a la condition que le groupe Delta laisse 
definitivement mes amis et ma famille en paix. Le juge acquiesce. 

Ma seconde condition : je ne veux parler qu'avec le juge et en fonction de mes revelations, il 
doit garder cette conversation confidcntielle. Je ne veux aucune represailles sur mes proches. 

Il me donne sa parole de magistrat de garde le secret et... embraye l’enregistreur devant son 
staff reuni. Il en fait un proces verbal et au mois de septembre, toute la presse en parle ! 

Dans cette conversation, je lui explique l'affaire Dekaise, l'affaire Pinon et les declarations de 
Claude Leroy sur Jean Gol. Pour la toute premiere fois et d’une maniere officielle, l'integrite 
du Parquet de Nivelles est mis en cause. Je donne cinq noms dont il faut absolument se mefier 
: le Procureur general Van Honste et le commissaire en chef Reyniers (source de Claude 
Leroy), le Procureur du Roi poehnan (vu ma deuxieme detention), le Juge Schlicker et le 
Procureur du Roi Depretre (sources d’enqueteurs policiers sympathisants d’extreme droite). 

La conversation se deroule tres courtoisement et, cornme un simplet, j'ai conliance dans la 
parole du magistrat. Avant le retour de Dodo, je lui confie aussi un message pour Le Gof, 
message tres court de cinq lettres. Dodo m'a explique son interrogate ire au sujet de l'affaire 
Mendez ou elle a du crier pour que Le Gof daigne prendre sa deposition m'innocentant dans le 
cadre de ce meurtre. 

Dodo et ses enfants repartent le 28 aout 1986 et elle n’est pas inquietee a l'aeroport. Pendant 



plusieurs semaines, le Parquet de Termonde va donner l'illusion d’avoir une parole. 

Le meme mois, la presse beige est lancee sur un nouveau temoignage. Un temoin anonyme 
(cela va de soi) a reconnu Beatrice Bosquet pendant une des tueries. Or Beatrice Bosquet est 
en fuite depuis 1981... au Paraguay. Elle et son compagnon sont toujours faussement accuses 
du meurtre d’un arabe, accident qui fut largement mediatise et qui vit Jean Gol au devant 
d’une manifestation anti raciste. Ce temoignage est vite abandonne, mais il sert a discrediter le 
Paraguay : pays de neo-nazis et de desesperados de tout poil sous la ferule sanglante du 
President Stroessner. 

De septembre a novembre 86, la presse se dechaine. 

« La Demiere Heure » procede a son etiquetage : il y a trois filieres pour les tueries : la 
Lorraine, les De Staercke et la filierc noire de... Bultot. 

Ensuite, dans la presse se cree le concept des trois B : Bouhouche, son complice, Beyer et... 
Bultot. 

Les families des victimes s’emeuvent du peu de resultats des enquetes. Elies envoient un 
message a tous les journaux reclamant une fois encore une enquete parlementaire sur les 
tueries. Devant l'emoi provoque par leur detresse, Jean Gol doit encore appuyer de tout son 
poids pour refuser cette enquete. La presse mitraille de tous cotes. Le « Pourquoi Pas ? », 
magasine, s'interroge : « Bultot est un fasciste, fanatique d’extreme droite ! Combien de Bultot 
trainent encore dans les arcanes du pouvoir ? ». 

Un des enqueteurs de l'affaire Mendez prend contact avec moi au Paraguay. 

Il me donne une nouvelle stupefiante : dans un des proces-verbaux relatifs a l'affaire Mendez, 
il y a le temoignage du firere de Mendez expliquant que quelques jours avant de mourir, et 
plein d’angoisse, Mendez declare : 

-« Les tueries », c’est encore cette crapule de Jean Gol qui est dans le coup ! 

Sur mon insistance angoissee, l’enqueteur me confirme que ce P.V. existe bien. Je sens qu'il 
faut diffuser cette infonnation, mais comment ? 

En Belgique, Dodo est de sortie avec Francis et Pierre-Paul. Comine d’habitude, ils ont 
emporte un magnetophone qu’ils placent au centre de la table du restaurant. Et commencent 
leurs joyeux babils. Soudain, Francis declare : 

-Rene Haquin ! 

Et en effet, le fameux joumaliste judiciaire du journal « Le Soir » vient d’entrer accompagne 
de son epouse. Haquin remarque vite Francis Dossogne car il a ecrit un livre sur 1’extreme 
droite. Il vient done saluer la table d’un air « desinteresse », ce qui lui permet de connaitre 
ainsi les autres personnes de la table. Apres les presentations, il se montre tres interesse par 
Dodo. Les journalistes connaissent tous les voyages de Dodo au Paraguay ! 

Plein d’espoir, il me debite alors un petit discours sur la cassette me demandant de venir 
m'interviewer. Enfin une possibility de m'exprimer ! 

J'accepte, et lorsque Dodo revient me voir le 25 octobre 86, elle m’annonce l’arrivee de Rene 
Haquin pour le debut du mois de novembre. 

La presse flamande, qui jusqu’ici avait ete plus moderee que la presse francophone, m’attaque 
tres violemment par le biais de « De Morgen », journal gauchiste. En faisant semblant de 
disposer de tres nombreux informateurs, le journal diffuse les declarations de Van Esbroek et 
le rapport Jonathan. 

Mais une autre nouvelle vient apporter de l’eau au moulin de mes detenteurs. « On » vient de 
decouvrir que l’ecriture sur le morceau a moitie calcine et laisse par les tueurs au bois de la 
Houssiere pourrait provenir de... Claudine Falkenburg ! 

Un expert est designe et seulement avec les mots : « ventre », « genoux » et « centre de doul 
», il authentifie avec certitude l’ecriture de Claudine. 

Monsieur Guillaume signe done le P.V. d’expertise avec cette reconnaissance. Claudine ne 
reconnait pas sa propre ecriture ! Elle lache cependant que cela ressemble plutot a l’ecriture 



d’une jeune fille. Mais pour l’expert Guillaume, il n’existe aucun doute quant a la propriety de 
cette ecriture. 

Aussitot, le branle-bas de combat, perquisition et re-interrogatoires de tout le monde ! 

Certains journaux croient meme savoir que ce texte a ete ecrit par Claudine pendant la 
conference que j’ai donnee avec OTT lors du seminaire Defense-Security. Or elle etait absente 
pendant la conference. D'autres informations (iltrent aussi concernant les voitures des tueurs. 
Ils ont « blind e » leur voiture avec du Kevlar (sorte de ouate mais qui protege des balles). 

Or, lors de ma demonstration, j’ai fonnellement proscrit le Kevlar qui, pour moi, n’empeche 
pas l'effet traumatique. Par contre, la P.J. et le groupe d’intervention de la gendarmerie en sont 
de fervents defenseurs... 

Degoute par cette boue, j’emmene Dodo dans la jungle, si belle et si fascinante. Dans ce decor 
paradisiaque, je parviens a lui faire oublier la Belgique et sa honteuse Justice. Elle 
m’accompagne aussi dans mon negoce des chevres. II faut d’abord discuter longuement les 
pris (rien n’est rapide au Paraguay), ensuite capturer les chevres au lasso, les abattre et les 
vider. 

Dans la glaciere, je peux transporter jusqu'a 30 chevres pretes pour la boucherie. Un leger 
contretemps nous accapare et le jour de l’arrivee de Rene Haquin, nous venons tout juste de 
revenir de la jungle ; les chevres sont toujours dans la glaciere a l’arriere de la Ford F 1000. 
Apres notre depart de l'aeroport, je prends un maximum de precautions a fin de seiner toute 
personne qui aurait suivi le journaliste. Rene Haquin reste meduse de ma premiere demande, 
mais il m’aide decharger les chevres au marche local. II vient habiter chez nous et participe 
aux firais du menage. Nous dejeunons au Jardin Botanique d’Asuncion qui recele aussi le 
Jardin Zoologique. Rene sourit sympathiquement, mais depuis plusieurs mois, la prose des 
joumalistes m'a rendu mefiant. 

Soumoisement, je l’invite a boire de la cana, alcool de canne du Paraguay. Toute personne qui 
en boit pour la premiere fois sombre toujours dans une ivresse debordante. On peut etre 
habitue a n'importe quel alcool... celui-ci rend « legerement » fou. Mon but: connaitre ses a 
priori. 

Helas pour moi, le resultat se montre different de mes esperances et Rene, touche comine les 
autres, se met a escalader la cloture du lamas pour verifier la bande dessinee de Tinton ou « 
Quand lama fache, lui toujours faire comine ca ! Et le lama crache ! » 

Devant les gardiens ahuris, Rene galope derriere les lamas qui le fuient. Fes gardiens me 
demandent d’intervenir, mais je suis occupe a photographier Rene avec son propre appareil. 
Bref, il revient et cet evenement, en me faisant rire, m’a curieusement rapproche du 
personnage. 

Dodo et moi soinmes invites a visiter une estancia a vendre dans le nord. Rene nous 
accompagne. C'est un compagnon charmant, mais il s'inquiete beaucoup dans la jungle de ma 
desinvolture paraguayenne. 

Embourbes (tiens, encore une fois !), nous soinmes contraints de passer la nuit a la belle 
etoile. Nous dormons par terre, nos selles en guise d'oreillers. 

Rene est inquiet, nous soinmes coinces dans une zone de jaguars et de ... cannibales ! Dodo et 
moi, habitue deja a la philosophic quasi musulmane du Paraguay : « Tu meurs quand c'est 
ecrit! ». Nous nous endormons paisiblement, l'anne a portee de main, soit, mais 
completement decontractes. Rene, lui, veille au feu toute la nuit! Pendant le voyage et 
pendant les haltes, Rene va me poser ses questions. Elies sont directes et franches. Pas de 
demi-teintes ! Des son premier propos, il m’avoue qu'il a rencontre des enqueteurs surs de ma 
culpabilite. 

Son interview se montre encore plus un interrogatoire qu'une conversation amicale. Je 
reponds a toutes ces questions et j’avance aussi mes accusations. Le courant est bien passe 
entre lui et moi. 



Dodo parle : 

« J'ai passe une nuit idyllique, comme toujours lorsque je dors a la belle etoile, aux cote de 
mon amant. Je m'etire a n’en plus finir dans la douce moiteur de cette jungle qui m’est 
devenue familiere et que je ne redoute plus trop. 

Je me sens bien et belle, comme devait se sentir Jane avec Tarzan... mais c’est parce que je ne 
possede pas de miroir et devant l’oeil goguenard de Rene Haquin et le franc eclat de rire de 
moqueur de Jean, je me doute un peu de l’etat de mon visage et de mes cheveux. L'indien lui 
ne dit rien et je remercie en mon for interieur ces inevitables regies de hierarchie qui existent 
ici, au Paraguay et qui obligent au moins fun des trois homines a se tenir coi face a mon 
physique hollywoodien ! 

Apres plusieurs heures d’effort, la camionnette est enfin degagee et nous reprenons notre 
route... helas sans avoir pu nous rafraichir. 

Oubliant la beaute agressive du paysage, ne defilent plus devant mes yeux que les images 
ancrees dans ma memo ire par la civilisation modeme : en reve, je me glisse dans un delicieux 
bain mousse tandis qu'une musique douce accompagne chacun de mes lents mouvements ; 
sortie des mains expertes d'une estheticienne, rajeunie de dix ans (au moins !), je me laisse 
aller aux doigts de fee d’un coiffeur de reve qui ne cesse de tarir d’eloges sur la beaute soyeuse 
de mes cheveux. 

Et au moment meme ou je vais enfiler la robe la plus sexy qui soit, un cahot epouvantable me 
precipite contre la paroi et ...un bidon d'essence qui se repand sur moi. 

Je maudis Jean, la camionnette, la jungle, toute l'Amerique du sud et c'est au milieu de mes 
cris et de mes injures que nous arrivons a la plus belle estancia que j'ai jamais eu l’occasion de 
voir. 

Tout un groupe de personne nous attend deja ... eux sont arrives la veille en avion-taxi. 

En un seul coup d’oeil, je repere les femmes, en petite robe bain-de-soleil, coiffees, 
manucurees, parfumees et plus sucrees que le plus ecoeurant des sucres d’orge. 

En les voyant se precipiter vers Jean, tres style « Camel Trophee » et lui jeter des coups d’oeil 
prometteurs, je regrette sincerement avoir con lie mon calibre 12 a l'indien. 

Tout de meme, apres avoir servi l’aperitif a ces « heros de la jungle », l'une de ces poupees me 
propose d’aller me rafraichir dans une salle de bain. J'ai envie de l’embrasser, pour la bonne 
nouvelle ... et puis lui refder un peu de ma crasse ! 

L'eau chaude delicieuse coule sur moi et j’oublie mes dernieres petites miseres. Je me savonne 
vigoureusement les cheveux, la mousse glisse doucement sur mon corps je me detends 
completement et soudain... plus d’eau ! 

Je toume les robinets dans tous les sens, rien ne vient. Je hurle pour appeler quelqu'un, le 
savon me pique les yeux et je vois a peine Jean qui est rentre dans la salle de bain et qui est 
ecroule de rire devant le spectacle que je lui offre. II me faudra attendre pres d’une demi-heure 
enfermee dans la douche et les cheveux degoulinants de shampoing pour que le reservoir soit 
a nouveau rempli et que je puisse terminer ma toilette. Pendant ce laps de temps, j’ai eu tout le 
loisir de maudire cet endroit, ce pays de demeures et de me traiter moi-meme de cretine 
integrate pour m’etre laissee entrainer dans cette aventure avec un homme qui, au lieu de 
compatir a mes graves problemes feminins d’ordre esthetique, sirote tranquillement son pastis 
et flirte outrageusement avec de vielles mal fardees ! 

Avec le recul cependant, lorsque je me trouve bousculee dans la rue par des gens aussi gris et 
aussi tristes que le climat beige, je repense a ces courses dans la jungle et je regrette le temps 
ou je me trouvais crottee, fatiguee, si peu feminine mais si pres de Jean et de la Verite ». 


De retour en Belgique, Rene Haquin publie un reportage ou il defend mon innocence mais, il 
se refuse a publier mes accusations. 



Plus tard, des bruits circuleront que Rene Haquin m’a paye 300.000 FB pour cette interview. 
Je m’inscris, et lui aussi, totalement en faux contre ce mensonge. 

Je n’ai jamais demande ni recu un franc pour les interviews que j’ai accordees. 

Les nombreux joumalistes qui m'ont visite au Paraguay ou en Afrique du Sud peuvent en 
temoigner. 

En Belgique, les plongeurs de l'annee ont recupere un butin particulierement impressionnant: 
dans l'eau du barrage de Ronquieres, ils remontent des armes et des coffres voles pendant les 
tueries. 

L'expertise est formelle : ce sont les annes des tueurs. Mais le plus extraordinaire, c'est que 
cette compilation d’armes au meme endroit prouve de facon irrefutable qu'il y a un lien entre 
toutes les attaques. 

Une compilation... une vraie signature narquoise ! 

Les tueurs se jouent de la justice. 

Au Paraguay, je decide de clarifier la situation familiale. J'avoue a Arlette que je suis 
amoureux de Dominique... mais je reste amoureux d’elle aussi. 

La nouvelle est difficile a digerer, mais la situation sera plus tard acceptee par nous trois. 
Dodo reste pour les fetes et attend Claude qui doit venir avec des investissements. Les enfants 
sont de la partie et Pepe est attendu avec sa femme. Autre surprise : Claudine vient aussi nous 
visiter en grand secret de sa famille qui estime qu'elle a deja eu « assez d’ennuis comme cela 
». 

Nous allons done nous retrouver a toute une bande pour passer Noel et Nouvel An. Quelle 
fete en perspective ! 

Auparavant, le 18 decembre, la R.T.B.F. programme une emission intitulee « au nom de la loi 

». 

Theme de remission : les tueries du Brabant Wallon. 

Cette emission se tourne essentiellement vers une responsabilite possible de l'extreme droite 
dans les massacres. Le presentateur effectue son enquete aupres de la Federation du Tir 
pratique. Un responsable est interviewe et declare, la main sur le coeur, que la Federation est 
un organisme au-dessus de tout soupcon et que d’ailleurs, ils ont ejecte tous les fascistes qui 
ternissaient leur beau mouvement. II se montre pas peu fier de mon expulsion. 

Ce responsable n'est autre que ... Francis Dorao. L'emission ne signale a aucun moment 
l'appartenance de Dorao a la P.J. de Liege ni ses accointances avec la Surete de l’Etat. Pas de 
mention non plus de sa paternite du rapport sur le Jonathan et sur moi-meme. 

Et enfin, rien sur son activite consistant a m’expulser de la Federation alors que le Tribunal 
des Referes de Bruxelles l'a expressement interdit. 

Apres le rapport que Pepe me fait au telephone de cette emission, je suis ecoeure ! 

Une autre personne me telephone sa rage devant la prestation de Dorao : Ramadan Dodac. 

-J'ai vu remission et cette salope de Dorao (le feminin chez les truands indique un profond 
mepris). 

Furieux, il me dit: 

-Je vais t'envoyer le chien de son arme et une surprise qui te pennettra de le casser et de lui 
fermer sa grande g... ! 

II est vraiment en colere. Puis parlant d’autre chose : 

-II parait qu'il fait magnifique dans ton pays ! 

-La beaute du pays et son climat en font vraiment un paradis ! 

-Alors je vais venir te rendre visite et voir pour investir ou peut-etre meme m’installer. En tout 
cas, j’arrive bientot! 



Nous cloturons notre conversation sur l'annonce de sa visite. Je n'aurai jamais plus la moindre 
nouvelle de Rama : le lendemain, il est assassine ! 

Officiellement, il aurait tente d'abuser de sa fille de 16 ans et elle aurait tire sur son pere. Or 
toute personne qui connait Rama peut facilement temoigner de l'impossibilite de son geste ! 

Le debut de l’enquete lui-meme se revele tres malsain : la P.J. de Bruxelles ne sera appelee sur 
place que quatre heures apres les gendarmes et ce contrairement a tous les usages ?! 

Maitre Motte de Raed, qui est l'avocate attitree de Rama et qui lui montrait une certaine 
affection accepte de defendre la fille de Rama. 

Pour terminer ce triste chapitre, je suis surpris d’apprendre que quelques jours apres ce 
meurtre, l’epouse de Rama s'enfuit avec un des barmans de son etablissement. Je ne verrai 
done pas la surprise conernant Dorao. 

Ces reveillons qui devaient etre une fete toument vite au desastre ! 

Apprenant l’arrivee de Claudine, Arlette telephone a ses parents pour qu'ils lui envoient son 
ticket de retour. Cyriaque veut rester avec son papa. Le surlendemain, trop heureux de 
l'aubaine, les parents Lichetert telexe un ticket d’avion pour le 24 decembre. Le jour de 
l’arrivee de Claude et de Claudine restera inoubliable. 

A peine rentres de l’aeroport, nous recevons un coup de fil de Pepe, toujours en Belgique : 
toute la presse publie en choeur : « Claude Leroy, Claudine Falkenburg, Pierre-Paul DeRrycke 
et Francis Dossogne s'enfuient au Paraguay ! » 

Claude telephone directement a Rene Haquin du « Soir » et remet les choses en place. Le plus 
etonne est Francis Dossogne qui fait de meme avec la presse. Pepe nous rejoint deux jours 
plus tard avec Lilly, son epouse. J'ai heureusement la chance de pouvoir dialoguer avec 
Claude avant que n’eclatent les grosses disputes. Il est porteur d'une demande emanant... du 
cabinet de Jean Gol. Je dois lui donner les possibility d’obtenir un faux passeport et d'une 
protection locale pour un truand installe en Irlande. Ce pays va bientot signer un Traite 
d'extradition avec la Belgique et il est urgent pour un ressortissant beige en fuite dans ce pays 
de pouvoir « changer d’air » ! 

Ainsi done, c’etait vrai... Claude retravaille pour Jean Gol ! 

Pour des raisons de securite, il n’a pas un contact direct avec lui, mais tout transite par la 
secretaire prenommee Francoisc. 

Claude m’explique que le financement occulte de la campagne electorale de son ex-toujours 
patron avec l’argent de Kaida (truand francais qui a aneanti la bande des Zemour dans la lutte 
pour le controle des casinos, voir l’excellent livre du commissaire Letellier : « Les demiers 
seigneurs de la pegre. ») 

Au parquet, Claude avait en charge des casinos. 

En souriant, il me raconte l’anecdote suivante : 

-Pour tous ses services, Kaida aurait bien voulu etre citoyen d’honneur de la Ville de 
Bruxelles, mais Jean Gol ne parvient pas a convaincre le bourgmestre de la capitale. Afin de 
faire un geste, j'ai ete mande pour arranger sa citoyennete d’honneur dans ma propre 
commune : Watennael-Boitsfort! Et le tour a reussi ! 

Les reveillons vont ensuite sombrer en disputes. A part Pepe et son epouse, tout le monde va 
se chamailler ! Arlette decide cependant de rester. Le refus de Cyriaque de l’accompagner a 
beaucoup pese dans la balance ! 

Esperons une annee 1987 plus reposante et sans turpitudes policieres ! 

Debut janvier, l’annee demarre en fanfare : un greffier de la Justice du Juge Schliker 
declenche une bombe. Voila plusieurs fois qu'il reclame un dossier que le Juge garde 



obstinement dans son tiroir...or ce dossier doit etre ajoute aux pieces de Justice de la Bande 
des Borains. Devant l’obstination de son Juge, l'huissier en refere a ses superieurs... 

Stupeur, branle-bas, agitation, effroi... le dossier n’est autre qu’une expertise balistique du 
B.K.A. (Bundeskriminalamt) de Wiesbaden qui innocente un membre de la bande des borains 
t 

Schliker a maintenu ce rapport cache dans son tiroir pendant 9 mois ! 

Somme devant la Cour de Cassation de s’expliquer, le juge Schliker, responsable de la 
recherche des tueurs du Brabant Wallon, de l’affaire Latinus, de l’affaire Pinon et de l’affaire 
Mendez, declare : 

-Je n’avais pas trouve de traducteur valable et il s’agit d’un regrettable malentendu entre mon 
greffier et moi-meme, qui est a la base de ce depot tardif! 

Je jubile, je fais des bonds de joie ! 

Enfin, une de mes accusations actees par le Juge Tas de Termonde vient a jour de facon 
eclatante : le Juge Schliker sabote les enquetes ! 

La Cour de Cassation lui retire l’Affaire des Borains... puis plus rien ! 

Je m’attends alors a une decision enfin musclee contre cet odieux personnage ... rien ... rien du 
tout! 

II est toujours Juge et continue a sevir a Nivelles !? 

Ainsi done, rien n’a change en Belgique ! 

Au mois de fevrier 1987, mes parents debarquent a l’aeroport President Stroessner. Demotion 
est vive, je pensais ne plus jamais les revoir ! 

Papa m’explique qu’il est oblige de prendre sa pre-pension. A sa compagnie d'assurance ou il 
porte le titre d’inspecteur administratif, la direction voit d’un tres mauvais oeil qu’un de leur 
representant porte le nom desormais honni de Bultot ! 

Lors de ses reunions d’inspecteurs, il entend dans son dos la reflexion d’un nouvel inspecteur : 
-Cest lui, le pere de l’assassin ? 

Chaque fois qu’un client visite parle de la similitude de son nom et du mien, mon pere est fier 
de dire que je suis son fils et il me defend bee et ongles. Ce n’est pas du tout, mais alors pas du 
tout au gout de la direction. On lui souffle qu’il est preferable de prendre sa pre-pension de 
fagon... spontanee ... avant... 

J’apprends aussi de sa bouche que mes soeurs subissent le meme genre de problemes ! Une 
frange de la population, tres influencee par les medias, procede vis-a-vis de ma famille a un 
Mac Carthisme de tres bas etage ! 

Alors que je m’apprete a montrer les fameuses chutes bresiliennes a mes parents, un nouveau 
coup de tonnerre le 9 mars 1987 : « Un mandat d’arret international est lance contre moi ». 
Cette nouvelle, largement repercutee par la presse, m’emprisonne definitivement dans les 
frontieres du Paraguay. Cette decision releve du groupe Delta, mais Le Gof garde les 
honneurs de la presse : il desire venir m’interroger. S’il vient, je fais un malheur ! Avant de 
retoumer, mon pere me promet son aide afin d’acheter une estancia avec Dodo. Dodo reste 
cinq mois en Belgique et la pression policiere a diminue sensiblement. Elle a definitivement 
rompu avec Claude et a entame une procedure de divorce. Elle viendra s’installer 
definitivement au mois d’aout ! Au mois d’avril, je recois un coup de telephone d’une vague 
connaissance dont je ne veux pas reveler le nom et que j’appellerai Jacques. 

Il m’annonce sa venue au Paraguay pour quelques jours. Je ne dois rien prevoir, son hotel a 
deja recu sa reservation. Ma curiosite grandit en attendant son avion. Qu’est ce que ce type 
peut bien faire au Paraguay ? Des que je l’apcrcois, il me decoche son plus beau sourire et 
pendant le trajet qui nous mene vers le centre ville, il m’assomme : 

-Je viens de la part de la famille Mendez. 

Une douche glacee ne m’aurait pas fait plus d’effet. Dans ma tete, toutes les alannes s’agitent, 



j'accelere insensiblement et, discretement, je degage le crosse de mon pistolet 45 que je porte 
du cote gauche lorsque je conduis. Jacques poursuit en me voyant changer de teint: 

-Le frere de Mendez ne croit absolument pas en votre culpabilite mais souhaite que vous 
puissiez lui donner toutes les infonnations dont vous disposez. 

J'acquiesce bien volontiers, mais je procederai d’abord a une verification en Belgique. Lorsque 
je suis certain que Jacques est bien envoye par la famille Mendez, je lui donne toutes les 
informations en ma possession ! Jacques, de son cote m’apporte aussi un precieux concours. II 
me confirme la phrase de Juan Mendez avant sa mort parlant des tueries, Mendez declare : 
-C'est encore cette crapule de Jean Gol qui est dans le coup. 

Je m’excite a l’idee de connaitre ce que le ministre de la Justice a repondu au Juge qui a 
normalement du l’apostropher sur cette phrase, mais j’apprends que par suite de son immunite 
parlementaire, Jean Gol n’a pas ete entendu... 

Autre nouvelle importante, le frere de Juan Mendez, surnomme Jo, decouvre dans ses bureaux 
un intrus. Celui-ci prend la fuite, mais Jo a le temps de bien 1’examiner. Get intrus se revele 
etre Jean Francois Calmette, le garde du corps de Christian Smets, alias le Canard, lors des 
cours de filatures donnes au W.N.P. Que fait cet homme d'action de la Surete de l'Etat dans 
les bureaux du frere de Mendez ? 

Etrangement, Calmette ne sera pas inquiete !? 

En prenant conge de Jacques, mes pensees s’envolent: je suis intrigue par la presence du 
Canard dans nombre de dossiers : Affaire Pinon, Affaire du W.N.P. et maintenant 
Affaire Mendez. Le Canard est sous les ordres directs de fadministrateur Raes de la Surete de 
l'Etat qui, lui-meme obeit directement a ... Jean Gol 

La phrase de ce dernier me revient en memoire : « La Surete de l'Etat est un outil impeccable 
». Peut-etre mais pour qui ? 

Dodo revient le 10 juin avec de bonnes nouvelles. Un investisseur beige va bientot arriver et 
elle dispose, grace a son pere, d’un premier capital pour acheter notre estancia ! (une estancia 
est une ferine a vocation d’elevage de bovin). 

Nous lisons febrilement les annonces immobilieres et nous partons dans le sud avec le Beige 
fraichement debarque, appele Philippe. Nous desirons visiter une petite estancia de 470 ha 
(une estancia digne de ce nom doit normalement comporter 1000 ha sinon on l’appelle un 
Rancho !) 

La route qui nous mene vers notre objet de convoitise se revele tres difficile et accessible 
uniquement avec un vehicule tous-terrains. Nous nous y rendons en jeep. 

Dans ce village, les indigenes n’ont jamais ete en contact avec des Gringos (tenne pejoratif 
designant les Europeens et les Americains). L'accueil ou plutot la douche firoide nous paralyse 
un peu. En arrivant au centre du village Potrero Esteche (200 habitants), nous arretons la jeep 
devant l’Ahnacen du village. Comine partout au Paraguay, l'almacen sert de magasin, de 
bistro, de lieu de bavardages, de dancing, etc. En nous voyant arriver, tous se levent et se 
tassent contre le mur du fond ; dans leurs yeux brillent la mefiance. L'ambiance est surreelle, 
personne ne dit mot. Le proprietaire de l’estancia nous sourit et essaye gauchement: 

-Ca ira mieux quand ils vous connaitront ! 

Dodo est decouragee par cette ambiance glaciale. La nuit nous entoure depuis longtemps 
lorsque nous arrivons enfin au rancho que nous avons decide d'appeler « estancia ». Meme 
accueil de la part du personnel ! II est tard et les « gringos » partagent la meme « chambre » 
(grange serait un tenne plus approprie). Des balles de contons encombrent les quatre coins de 
la piece. 

En pleine nuit, un cri lugubre retentit dans la piece, j’empoigne la lampe de poche et degaine 
mon 45... Philippe, notre invite, est debout la machette a la main, les yeux completement 
vides... il est somnambule ! 



En lui parlant tout doucement, je le desarme et il se recouche. Bref, un fou de plus dans le 
village ! Avant de donnir, Dodo m'affirme qu’elle n’achetera jamais cette estancia qui lui fait 
horreur... Huit jours plus tard, nous signons la convention d’achat. 

Avec le soleil, les choses s’arrangent et la beaute du lieu est apparue pleinement. De retour a 
Asuncion, le 30 juin 1987, j’annonce la nouvelle a Arlette. 

A peine arrive chez moi, Dodo me telephone et d’une voix angoissee me demande de la 
rejoindre a l’instant. Dix minutes plus tard, je la decouvre livide. 

-Assieds-toi, me dit-elle, et sois fort! 

La Cour dAppel de Gand vient de te condamner a trois ans de prison ferine pour l’affaire des 
videos ! 

Je la regarde fixement, hebete, ne sachant que dire. 

Des larmes de rage ou de desespoir, je ne sais, me brulent les yeux. Soudain, je me leve et 
j’explose. 

Je marc he par grandes enjambees en criant toutes les injures que je connais, meme en guarani, 
la langue indigene. Pendant de longues minutes, Dodo essaye de me calmer mais rien n'y fait, 
jusqu'a ce que les lannes me terrassent, me laissant abattu devant cette monstruosite. 

Dodo m’enlace doucement: 

-Ne fen fais pas mon chat, de toute facon, c'est ici ta nouvelle patrie et tu n'as plus rien a 
foutre d’eux ! 

Le lendemain du prononce de 1'arret de la Cour dAppel de Gand, le Juge Troch decerne un 
mandat d’arret a Philippe De Staercke pour participation aux tueries du Brabant Wallon, le 
groupe Delta essaye ainsi de justifier sas propre existence. 

Dodo repart pour la derniere fois. Elle va chercher les enfants et nous allons tous vivre dans 
ce merveilleux pays qu'est le Paraguay. 

Au mois de juillet 1987, lors d'une des nombreuses communications telephoniques que nous 
echangeons, Dodo se montre optimiste pour mon probleme judiciaire. Un des enqueteurs qui 
s’est toujours montre tres poli, a eu avec elle une discussion interessante. 

Le Capitaine Rousseau lui affirme qu'il croit en mon innocence et qu'il est pret a me 
rencontrer, m'interroger et demontrer ma bonne foi. 

Je suis sur mes gardes mais le Capitaine Rousseau a droit a ma reconnaissance. Lorsque Dodo 
a ete interrogee par Le Gof, et que ce dernier refusait categoriquement d’acter son temoignage 
dans lequel elle affirme que j’etais chez elle le matin du meurtre de Mendez, elle pique une 
crise de rage et hurle sur Le Gof. La porte s'ouvre brusquement, le Capitaine Rousseau 
apparait et, gentiment, calmera Dodo. 

Le Gof devra s'executer et prendre la deposition. J'accepte done d’ecouter cet officier au 
telephone. 

-Monsieur Bultot, je me doute de l'enfer que vous traversez mais il y a des enqueteurs qui 
croient en votre innocence et j’en fais partie. Si vous acceptez de me rencontrer, nous 
pourrons deblayer pas mal de contre-verites. 

Son accent parait sincere mais dans mon for interieur, je garde un scepticisme profond. 
Comine je suis pret a discuter... dans de bonnes conditions, j'accepte de le recevoir et j'y 
ajoute, en finale, une petite perfidie de mon era : 

-D'accord, Capitaine, mais je ne veux pas d’entourloupe, vous venez seul ! 

-Vous avez ma parole d’officier ! 

Aie, la phrase a ne pas dire, apres ce que j’ai vecu, une parole de flic ou de magistrat ne vaut 
guere tripette. 

-Non, je prefere votre parole d'homme ! 

Quand je la re^ois, j'y vais de ma filouterie. 

-Bon, je vous recevrai a mon estancia mais je vous previens que la route est longue de 85 km 
et qu'elle n’est praticable qu'a cheval. 



(C'est faux, on peut s'y rendre en jeep). 

Apres un leger moment de silence, il me repond : 

-Soit, je demanderai a la section equestre de la Gendarmerie de me donner des cours. 

II vient de gagner des points. 

J'espere que le courant passera aussi bien avec lui qu'avec Rene Haquin. 

Huit jours plus tard, soit le jour de la Fete nationale, il est arrete pour tentative de chantage 
aupres d’une tenanciere d'un sauna-bordel. 

Le 28 juillet, un medecin psychiatre est designe pour fexaminer. Ensuite... plus de nouvelles ! 
Entre-temps, une nouvelle me surprend : les « heritiers » de Dodac se chamaillent et son 
restaurant est completement incendie le 7 juillet. 

A la Chaussee de Charleroi a Saint-Gilles, « Le Jambon » camoufle encore aujourd’hui ses 
murs calcines derriere des panneaux publicitaires. 

Le 15 aout 1987, Dodo me revient definitivement. Les enfants sont contents a l’expectative de 
decouvrir l'Estancia. 

Celtes et fiers de l'etre, nous la baptisons Excalibur (du nom de l’epee magique du Roi 
Arthur). 

Puisse cette nouvelle epee magique nous proteger du mal: C'est-a-dire de la Justice Beige. 

Les trois enfants raffolent de l'Estancia, pour et pour nous, nous vivons le paradis sur terre. 
Avec le Capadaz (regisseur) Filomeno, nous analysons les possibility agricoles de l'Estancia. 
Nous voyons grand, soit une production du 20 Ha de coton. 

La population commence a nous sourire, nous nous integrons lentement mais surement. Les 
enfants Cyriaque, Quentin et Sophie, entrent a l'Ecole Francaisc le ler septembre. 

Cyriaque a brillamment reussi son annee precedente et est tout heureux d'accueillir Quentin 
dans sa classe. 

Arlette et moi avons demenage dans un autre quartier ; Arlette a decide de chercher du travail. 
Au Paraguay, existent deux sortent d’hopitaux. Premierement, les hopitaux de l'Etat: pour y 
travailler, il faut la carte du parti Colorado, le parti du President. 

Deuxiemement, les hopitaux prives qui sont tous d’obedience religieuse et pour y travailler, il 
est imperieux de presenter une lettre de recommandation de son pasteur ou de son pretre. 
Ensuite, mais ensuite, seulement... on analyse le diplome d’infirmiere. 

Helas pour Arlette, nous ne sornmes pas impliques dans la politique du Pays et nous soinmes 
athees. 

Les enfants se montrent heureux de leur nouvelle ecole et Cyriaque est ravi d’avoir, non 
seulement un ami de plus mais aussi un Beige dans sa classe. 

Nous prevoyons de feter la rentree scolaire dignement ce week-end. Mais samedi, a 8 heures 
du matin, le telephone sonne de Belgique, Dodo decroche et manque de s'evanouir. 

Elle me regarde avec des yeux effares et d’une voix a peine audible, me souffle : 

-Un temoin fa reconnu sur photo et pretend que tu as assiste a la tuerie de Nivelles ! Toute la 
Presse t'accuse a nouveau. 

Comment suis-je reste debout ? Mes jambes tremblent, je me sens devenir bleme, j'ai la chair 
de poule ! 

Comment osent-ils ? 

Je ne parviens meme pas a exploser, la nouvelle me scie mieux qu'une tronconneusc. 
Lentement, je fais signe non de la tete mais je suis incapable d’articuler un mot. Pour la 
premiere fois de ma vie, je sens la syncope me gagner. Dodo s'affole devant mon teint 
cadaverique, le coup est trop violent et trop bas... je suis K.O. ! 

Quelques jours plus tard, une certaine partie de la presse montre sa franche suspicion vis-a-vis 



de ce temoin. 

J'apprends ainsi que ce temoin me reconnait sur photo... 4 ans apres les faits. 

Mais ce n’est pas tout, les circonstances de son temoignage procede du pus pur ridicule. II « 
joggait » a 23 heures et m’a reconnu alors que « je portais une perruque a boucles blondes et 
une fausse barbe » !? II ne manque plus que l’age du capitaine ! 

Cette prise de conscience d’une partie de la presse me remet en selle. J’ai ete serieusement 
ebranle, Sab par toute cette boue mais voila, les avocats defenseurs des Borains qui vont 
bientot comparaitre devant les Assises, agitent deja l’etendard de l’erreur judiciaire : 

« Toutes les pistes n'ont pas ete explorees, entre autres, cette piste noire ou Bultot drague pas 
mal de soupQons : les papiers brules du Bois de la Houssiere et un temoin qui l'a formellement 
reconnu a Nivelles ». 

De mon cote aussi, j’espere en decoudre avec mes detracteurs. 

Le pere de Dodo devient aussi un « homine en colere ». Trop, c’est trop ! 

De part des relations familiales, il prend contact avec le Substitut De Jonckhere qui s’occupe a 
Jumet de la nouvelle cellule du Brabant Wallon. Le Substitut est interesse par les paroles du 
pere de Dodo : 

-Jean est un type bien qui ne demande qu’a le prouver. S’il peut trouver un interlocuteur 
valable, je suis sur que tout peut s’aplanir. 

Alerte, le juge Lacroix prend rapidement contact avec Monsieur Mersch (le pere de Dodo). 

Le Juge montre son accord de me parler au telephone et meme plus, il en est ravi car il sent « 
sa » Cour d’Assises deriver vers la catastrophe. Il doit etre en mesure de produire mon 
interrogatoire ! 

Le pere de Dodo nous telephone et m’annonce la bonne nouvelle. D’un cote, je suis heureux 
d’avoir la possibilite de m’exprimer, de l'autre, je me rappelle avec acuite que chaque fois que 
j’ai voulu aider la Justice, elle m’a mechamment paye en retour. 

Bof, je prends le risque. De toute facon, que pourrait-il m’arriver, ici, au Paraguay ? 

Des que je suis en communication avec Monsieur le Juge Lacroix, il me coupe net la parole : 
-Ne parlez pas trop, Monsieur Bultot, je ne suis pas sur que ma ligne ici au Palais ne soit sous 
ecoute... Monsieur Mersch m’a donne votre numero, je reprends contact avec vous cet apres- 
midi mais d’un endroit sur !? 

Je suis etonne que meme les juges soient sous ecoute mais la situation de la Justice en 
Belgique sombre dans un tel etat de folie que sa parole me parait credible. 

Monsieur Lacroix me telephone a nouveau du domicile d’un de ses commissaires de la P.J., 
Monsieur De Vroom. 

Mon propos est clair : 

-J’accepte de vous recevoir et de parler franchement mais il faudra tout acter et je ne veux 
aucune arnaque ! 

-Je vais essayer de venir mais ce sera difficile d’obtenir l’autorisation. 

Quelques jours apres cette conversation, il prend contact avec Monsieur Mersch : 

-Dites a Jean Bultot que je n’ai pas recu l’autorisation de me rendre moi-meme au Paraguay, 
mais que je peux y envoyer des enqueteurs surs. 

-Pourquoi ne pas le dire vous-meme ? 

-J’ai re?u l’ordre fonnel de ne plus avoir de contact avec lui ! 

Lorsque Monsieur Mersch me communique cette nouvelle, Dodo et moi sornmes sur le point 
de partir pour l’Estancia. 

Nous devons donner les ordres necessaires a la plantation de coton. 

Je retelephone moi-meme au Juge. S’il ne peut venir, je ne parlerai qu’a deux flics : Ruth et 
Laclan. 

Ces deux gendannes font partie de la trop petite elite des flics corrects et courtois : il y a 



maniere et maniere de faire son travail ! 

-Impossible, Monsieur Bultot, je ne peux choisir et c'est le commissaire De Vroom qui sera 
envoy e. 

-Ca, jamais ! 

-Et pourquoi done ? De Vroom est un homme integre, je m’en porte garant. 

-De Vroom est un franc-ma^on et son parrain de loge n'est autre que Claude Leroy ! 

Comine Claude est toujours en relation avec Gol qui est aussi Franc-Macon, je me mefie de 
De Vroom. 

-Je vais voir ce que je peux faire mais je pense que c'est De Vroom ou personne. 

Et il ajoute : 

-Au fait, Goffinon voudrait venir aussi ! 

J'explose : 

-Si Le Gof vient, il n’aura besoin que d’un aller simple ! 

Le Commissaire De Vroom me telephone : 

-Monsieur Bultot, je viens d'avoir un contact avec le Juge, je peux de suite vous rassurer : je 
ne suis plus Franc-Ma£on, pour moi c'est de l'histoire ancienne. 

Cynique, je lui demande : 

-Il n'y a plus de promotion possible ? 

Il encaisse bien. 

-Cela ne m'interesse plus, mais je suis cornme Monsieur Lacroix tout pret a prendre votre 
declaration. Je vous signale cependant que je ne pourrai venir seul: le Parquet de Nivelles et 
de Termonde veulent aussi envoyer leur delegue. 

En entendant « Nivelles », je rugis a nouveau : 

-Si Le Gof vient, je ne reponds de rien ! 

Je me calme un peu et finis par lui dire : 

-Bon d’accord, j’accepte de vous recevoir mais je ne dirai rien aux autres enqueteurs. 

De Vroom me declare qu'il doit encore obtenir l'accord pour l’argent du voyage et nous 
decidons de reprendre contact des mon retour de l'Estancia. 

Portero Esteche, Estancia Excalibur. 

Dodo et moi photographions avec joie le demarrage du premier labour. A l'Estancia cornme 
dans toute la region, il n'y a pas d’electricite, ni eau courante etc. 

Tout fonctionne au kerosene et je possede le seul frigo de la region a plus de 40km a la ronde. 
Un des peons se fait mordre par un Jarara (serpent venimeux et tres agressif) et gace au serum 
entrepose dans le frigo, nous lui sauvons la vie ! 

Il reste cependant alite pendant une semaine avec une main qui a triple de volume. Le 25 
octobre 1987, nous rentrons a Asuncion, tout a la joie du travail accompli a Excalibur. 

Alors que je suis occupe a decharger la camionnette, la sonnerie du telephone retentit: le 
commissaire de police de mon quartier. Il est affole. Rapidement, il m’apprend la nouvelle : la 
police criminelle me recherche !?! 

Il n’en sait pas plus. 

Je le remercie de son avertissement et avant que j’ai le temps de raccrocher, quatre voitures 
arrivent en trombe devant la maison. Les portieres s'ouvrent, des civils armes de mitraillettes 
jaillissent des vehicules... les flics ! 

Je hurle a Dodo : 

-Les flics debarquent ! 

Et calmement (tout au mo ins en apparence), je vais au-devant d'eux. 

Alors qu'ils deverrouillent la grille du portail, j’ouvre la porte de la maison, je m’arrange pour 
qu’ils voient bien mes mains afin qu’ils constatent que je ne suis pas anne. 

Ils sont une dizaine ; leur chef, un bedonnant, me tend la main et tente de me rassurer : 

-Nous venons juste (sic) pour une petite verification ! 



II laisse des homines en armes pres du portail et entre avec six de ses homines. Ils 
perquisitionnent la maison mais sans rien deranger. 

Perquisition de pure forme : ils ne forcent meme pas une porte de placard recalcitrante. 
L'officier me demande si je possede une anne et, dans ce cas, de la lui apporter. 

Je me rends seul dans la chambre et quand je reviens dans la piece, en possession de mon 45, 
les policiers devisent entre eux et ne s’emeuvent pas de me voir une anne dans la main ! 

Je la depose sur la table et l’officier note ses caracteristiques. 

Tous se montrent tres polis et tres courtois. 

Apres avoir rempli son petit carnet, l’officier me demande de l'accompagner a son bureau pour 
une demiere verification Je ne suis pas dupe et Dodo non plus, qui pourtant, demande la duree 
de cette « verification ». 

-Cet apres-midi, si tout va bien, il sera de retour pres de vous ! 

Et il appuie ses paroles par un grand sourire sympathique. Je pars done avec eux, le coeur tres 
lourd, par la vitre arriere de la voiture, je regarde la maison qui s'eloigne... qui s’eloigne. 

Les voitures stoppent devant un batiment dont la reputation fait trembler tout le Pays : « 
Dpartamento De Investigaciones De La Policia De La Capital », le Service des enquetes de la 
Police de la Capitale. 

Je suis conduit courtoisement dans un bureau ou l’officier qui m’a amene debute son 
interrogatoire. L'ambiance est sereine et notre conversation se deroule dans un bon climat. 

Les questions me deroutent un peu : « Quel est mon travail, ou est l’estancia, le nom du 
regisseur de l’estancia, ... , bref, du « tres banal » ! 

Mon interrogatoire va durer deux heures. A la fin de celui-ci, l’officier se leve et me demande 
de le suivre. Nous allons dans le batiment voisin garde par un policier qui salue l'officier a 
notre arrivee. 

Au fond du couloir, un autre policier de faction derriere une table. Le commissaire, sans se 
departir de son sourire, prononce cette phrase terrible : 

Aqua esta el detenido Belga (voici le detenu Beige). Apres notre entretien quasi cordial, je le 
regarde sans comprendre. Il continue de sourire, me serre la main et s'eclipse ! 

Le policier m’intime l’ordre de le suivre. Nous montons un escalier de cour interieure et nous 
arretons sur le palier du premier etage. Une grille, un cadenas, nous y voila ! 

La piece que je decouvre mesure trois metres sur quatre. Le pan du mur donnant sur la cour 
est remplace par une large grille comportant une porte cadenassee. Dans la cellule, deux fits 
superposes, soit quatre couchettes ! Deux petites pieces a l'interieur de la cellule : une douche 
et un WC. 

Mais surtout, je decouvre une vingtaine de paires d'yeux a l’expression tres etrange. Personne 
ne parle. 

Lorsque la grille se refenne derriere moi, je reste un instant immobile, ne sachant que faire. 
J'essaye un timide « bonjour », qui a fair d’allumer un instant ces yeux amorphes mais pas de 
reponse. Apercevant une petite place sur la couchette du fond, je vais m'y installer. Apres 
quelques minutes de silence complet, et apres avoir verifie soigneusement que le policier etait 
bien descendu, les conversations reprennent a voix basse. 

Un detenu s'approche de moi: 

-Tu as de l’argent sur toi ? 

La question me surprend, mais je biaise : 

-Qu'est-ce que ca peut te foutre ? 

-A moi rien, mais si le maton le trouve, il va te la piquer ! 

-Ecoute, ce genre de conneries ne prend pas avec moi, je suis ici pour quelques heures, en vue 
d’un controle, done je n’ai rien a craindre ! 

Il me regarde, goguenard, et s'eloigne en ricanant. Les heures s'egrainent tres lentement. Il fait 



chaud dans cette piaule, il fait etouffant! Chaque fois qu'un maton apparait, le silence se fait 
brusquement, et chacun regarde dans le vide. 

Vers 19 heures, deux detenus sortent de cellule. Le policier qui les accompagne les ramene un 
peu plus tard, porteurs d’une enorme mannite. On recoil une assiette et une cuillere. Le 
couvercle se souleve... pour laisser apparaitre une tambouille innommable : une sorte de 
soupe brunatre ou baignent du puchero de derniere categorie (dechets de viande composes par 
des morceaux d'os entoures parfois d'un peu de viande), des gros haricots rouges et des 
boulettes de farine de mais. 

Heureusement, je n’ai pas faim, et j’espere toujours ma sortie dans la soiree. Le policier verifie 
que la « viande » est distribute avec equite. 

Le silence est revenu et le souper se deroule dans cette ambiance irreelle. A 21h30, les 
detenus se preparent pour la nuit. Du dessous des matelas, ils extraient de vieux cartons et les 
etalent par terre : leurs matelas ! Ensuite, ils se reunissent en rond et le plus vieux (d’une 
soixantaine d’annee) commence la priere. 

II lit des extraits de la Bible et, dans son oraison au Seigneur, il parle de tous en citant les 
prenoms. 

Etant athee, je reste a 1’ecart. Il interrompt son preche, et se tournant vers moi, me demande 
mon prenom. Jean est impossible a prononcer pour les hispanophones et il continue sa priere 
en demandant au Seigneur de proteger « Juan » pour les epreuves a venir. J’ai beau etre sans 
foi, cette priere m’emeut et m’interpelle dans les tripes. 

Le chef de chambree se revele etre le detenu qui m’a apostrophe sur mon argent. Il me designe 
une couchette, la partie superieure du lit de droite. Je le remercie de son attention, d’autant 
plus que sept personnes vont passer la nuit par terre, sur des pans de carton. 

Il est 22 heures, ma premiere nuit de detention paraguayenne commencer... J’examine la piece 
avec attention. Elle fut autrefois peinte en vert, mais la couleur est largement passee. 

Avant de se coucher, les detenus se sont introduit de l’ouate dans les oreilles, je ne vais pas 
tarder a en comprendre la raison. Un peu apres que le policier ait mis la veilleuse et eteint la 
lampe principale, ... « ils » sont la par centaines : les cucarachas (les cafards d’Amerique du 
Sud) sortent de partout! Sans vergogne, ils montent sur les corps des donneurs. Cest 
degoutant, je rejette les betes qui envahissent mon lit. Cest pire que degoutant, c’est vraiment 
repugnant! 

Je comprends l’usage de l’ouate qui empeche la vennine de penetrer dans les oreilles ou ils 
raffolent de pondre leurs oeufs ! Je m’endors sur de bien sombres pensees. A 6 heures, un 
policier vient proceder a l’appel ! Il ne parle que le guarani, langue dont je ne comprends que 
les rudiments. Nous devons nous mettre au garde a vous et nous compter. 

-Ocho ! (Huit). Je cris mon numero cornme les autres. Le policier me regarde alors avec 
interet, une lueur amusee brille dans son ceil. 

Il commence a me parler en guarani, mais j’arrete, devant son air courrouce, ses belles 
paroles, pour lui dire que je ne comprends que l’espagnol. Il reprend son discours en espagnol, 
un peu agace par mon interruption : 

-Ainsi done, c’est vous le Tueur de Belgique ? 

Je le regarde sans repondre, et surtout sans comprendre ! 

-Les policiers beiges vont bientot arriver, et il faudra tout leur dire. 

En terminant sa phrase, son visage se durcit, on dirait qu’il va mordre ! Apres son depart, les 
autres detenus me regardent avec curiosite, mais personne ne parle. 

Pour se detendre, un detenu se couche sur le sol, et commence a faire des pompages. 
Brusquement, sans qu’on l’ait entendu arriver, un policier en civil surgit. Les detenus 
marquent l’effroi et l’homme qui pratiquait sa gymnastique matinale se remet prestement 
debout. 

Le flic est hilare et decoche : 



-Ah ah ! On aime le sport! He bien, moi, je vais te gater ! 

Dans le coin, pres des escaliers, il empoigne un manche de brosse d’une longueur d’un metre 
vingt environ et il fait signe au detenu de s'approcher. 

II le fait mettre a genoux, et le pauvre est oblige de passer ses pieds a travers les barreaux. 

Le flic sourit, content de son effet, il attend plusieurs secondes en nous regardant. Tous les 
detenus regardent par terre, ou le mur, ou leurs genoux ! 

Moi, je fixe la scene, tremblant de ce que je devine. En me voyant le fixer du regard, le flic 
m’injurie en guarani. Je lui dis que je ne comprends rien. 

En espagnol, il me hurle l’ordre de ne pas le regarder en face. Je baisse la tete. 

Une seconde plus tard, le premier coup s'abat sur la plante des pieds du detenu. Un hurlement 
s'ensuit. Bien que regardant mes genoux, je peux distinguer la scene. Le flic prend un pas de 
recul et assene a nouveau un coup de baton sur les pieds. Un nouveau hurlement, puis un 
autre, et un autre... Je tremble de tous mes membres, mais comine les autres, je feins 
l’indifference ! Le detenu a genoux, saigne de la bouche, il s'est mordu la levre... Je ne bouge 
toujours pas, j'ai trop peur ! 

Le salopard continue, tranquillement, methodiquement ! Il firappe de toutes ses forces, et j’ai 
l’impression que les cris du pauvre type ajoutent a sa jouissance de sadique ! 

Enfin, il s'arrete, le supplicie sanglote coniine un gosse... personne n'a bouge... et moi non 
plus ! 

Je me traite interieurement de lache et de poltron, mais je n'ai rien ose faire. Une heure plus 
tard, Dodo vient me visiter. Cette visite a lieu en bas, pres du vigile de garde dans le couloir. 
Je m'efforce pour Dodo de paraitre naturel, mais c'est tres dur de feindre ! 

Pour la premiere et unique fois de ma vie, je vais lui mentir ! Je la rassure quant a mes 
conditions de detention, et elle m’apprend des nouvelles de l’exterieur ! 

En Belgique, la presse a annonce ma disparition ?! 

En fait, il semble qu'un « Officiel » ait voulu me telephoner de Belgique et que suite a notre 
presence a l'Estancia, il n'a pas re 9 u de reponse ! Il en a deduit hativement que j'avais disparu 
t 

Le pere de Dodo, en pleine colere, s'est rendu chez le Juge Lacroix pour savoir si mon 
arrestation procedait d’une manoeuvre de la Justice beige. Le Juge jure ses grands dieux qu'il 
n'y est pour rien et pour demontrer sa bonne foi, il accompagne Monsieur Mersch jusqu'au 
centre d’Interpol, ou les telex des 15 derniers jours lui sont soumis. 

Aucune demande n’a emane de Belgique...e t pourtant... le coup bas ne provient pas de la 
Justice beige mais bien des Affaires Etrangeres ! 

Une semaine avant ma rentree de l'Estancia, l'Ambassadeur beige au Paraguay, Monsieur 
Roger Tyhergein, debarque a Asuncion en provenance d’Uruguay ! 

Au Paraguay, il n’existe pas d’Ambassade de Belgique, mais l’ambassadeur en place en 
Uruguay remplit les deux fonctions. 

L’Ambassadeur rencontre Monsieur Michel Tonard, beige un peu louche, dans un 
etablissement sur la route de San Lorenzo, « La Trampa » (Le piege » ! 

Le soir de mon arrestation, Tonard, pour feter l’evenement, offre la tournee generate a 
l’etablissement « Le Brusselas », cafe uniquement frequente par des Beiges a Asuncion. Il 
confie au patron : 

-Mission accomplie et maintenant, je fete l’argent que j’ai touche pour ma lettre ! 

J'apprendrai plus tard, que je suis arrete car une lettre anonyme (une de plus !) m’accuse de 
trafic d’annes ... dans la jungle. 

Apprenant l’arrivee des policiers beiges, les autorites paraguayennes, apres verification des 
accusations contenues dans la lettre, me gardent au trou, a la bonne attention de mes flics 
nationaux. 

Le 28 octobre 1986, le Commissaire De Vroom de la cellule Brabant Wallon de Jumet, 



l'lnspecteur Doroane de la P.J. de Nivelles, et la Capitaine Sack de Termonde debarquent sur 
l'aeroport d’Asuncion, sous les crepitements des appareils de photos des reporters. 

Ils prennent immediatement leur quartier dans l’hotel le plus luxueux du Paraguay et peut-etre 
meme de lAmerique du Sud : l'hotel Exclesior ! 

A l'investigation, je m’installe dans l’horreur ! 

J'apprends que ma section ne doit comporter normalement que des voleurs et des « politiques 
» ! 

Chaque matin, vers 10 heures, quatre policiers en civil designent Tun d’entre nous. Ils le 
ramenent un peu avant le dejeuner... dans un etat pitoyable... la torture... Je suis detenu dans 
un centre de toruture ! 

Des que les flics s'effacent, nous entourons le supplicie. 

En general, nous bassinons son sexe bleui et parfois sanglant avec un peu d’eau froide. Les 
flics adorent les « Communicacion de larga distancia » (les communications pour l'etranger). 
Get affreux jeu de mot provient de la magneto de telephone de campagne qu'ils emploient 
pour envoyer des impulsions electriques surtout dans les parties genitales. 

Les detenus ont rebaptise la salle de torture « Antelco » du nom de la societe de telephone du 
Paraguay. 

Un matin, ils viennent me chercher ! 

Je pense defaillir mais je garde la tete haute. 

A chaque marche que je descends, une image de mes compagnons supplicies me revient en 
memo ire. 

Vais-je etre soumis aux chocs electriques ou flagelle aux fds electriques ou brule aux pieds 
ou... ou... ? 

Arrives au bas de l'escalier, nous nous dirigeons dans une autre direction que la piece Antelco. 
Je respire ! 

Les policiers m'emmenent... chez le coiffeur de la police. On me rase (les rasoirs sont 
interdits en cellule). Un flic me remet aussi une chemise propre apportee par Dodo, puis 
m'examine. II semble satisfait de mon aspect physique et nous repartons vers le bureau de 
mon interrogatoire. 

La porte s'ouvre. Je decouvre en plus d’un commissaire principal paraguayen aux epaulettes 
rutilantes, une jeune femme et trois Europeens. Inutile de me faire un dessin, je comprends 
immediatement qui sont ces Europeens. Le commissaire inspecteur Jose Runben Arias me fait 
approcher et explique a la jeune femme que je suis a la disposition de ces messieurs ! 

Je regarde droit dans les yeux les trois flics beiges que je n’ai jamais vus ! 

De Vroom me sourit timidement, Doroane de la P.J. de Nivelles me regarde sans trouver de 
contenance et Sack, le Capitaine du Groupe Delta, me fixe avec une lueur hostile ! 

La jeune femme est interprete et transmet le message a mes chers compatriotes ! 

Des qu'il peut prendre la parole, De Vroom m'explique : 

-Nous n'y somrnes pour rien dans votre arrestation, il s'agit d’une affaire interne au Paraguay ! 
L'interprete traduit fidelement ! 

En ecoutant De Vroom, Arias me montre un petit sourire amuse ! 

De Vroom poursuit: 

-Comine je vous l’ai dit, je ne suis pas venu seul... 

Je le coupe : 

-Je ne veux parler qu'a vous ! 

II me repond : 

-Soyez raisonnable, Monsieur Bultot, nous avons fait 12.000 KM pour vous entendre et 
maintenant que nous somrnes la, vous avez enfin la possibility de vous disculper aupres des 
differents Parquets Judiciaires ! 

En regardant l'oeil mauvais du capitaine Sack, il me vient l’idee d’en decoudre. He bien, soit! 



Allons-y pour la bagarre ! 

J'accepte done, mais j'y pose plusieurs conditions que je veux acter dans le Proces Verbal 
d’interrogatoire. 

J'enumere ensuite les conditions suivantes : 

Pas de questions sur ma vie strictement privee, pas de questions sur mes opinions politiques et 
pas de questions sur mon statut et mes activites au Paraguay. 

De Vroom qui dirige cette commission rogatoire se montre d’accord. Ceci etant bien etabli, 

De Vroom s'empare de son attache-case et en sort une lettre. Se tournant vers Arias, le sous- 
chef Interpol au Paraguay, il lui tient ce discours : 

-Nous avons pense que vous seriez interesse par la personnalite de Jean ; je vais done vous 
lire une lettre de detenu qui vous eclairera sur sa mentalite ! 

Je le regarde meduse et De Vroom commence sa lecture, fidelement traduite par l’interprete. 
La lettre est ecrite par Marcel Barbier, condamne a la prison a perpetuite pour le double 
meurtre cornmis a Bruxelles sous la ferule du W.N.P. 

II fut poursuivi egalement pour avoir tire des coups de feu sur son frere ! 

De Vroom a « omis » de presenter la reference morale dont il lit la prose. La lettre est 
adressee a une assistance sociale. 

Barbier me decrit comine un etre sans scrupules et immoral, qui profite de la detresse des 
detenus pour « piquer » leur femme (reference a Claude Leroy qui se trouvait en meme temps 
que lui, coniine servant, a la Bibliotheque de la prison de Saint-Gilles ! 

Il me souhaite un chatiment exemplaire pour ma vilenie ! 

Arias ecoute doctement en agitant la tete d’un air interesse et reprobateur. 

Quand il tennine sa lecture, De Vroom me fixe dans les yeux, et je fais de meme. Il a gagne le 
premier round ! 

Maintenant, je connais ses intentions agressives ! 

Notre entretien est interrompu par l’arrivee d’un photographe. Les flics beiges protestent en 
choeur, mais Arias les rassure : 

-C'est uniquement pour nos archives personnelles ! 

Je regarde dans le vide, De Vroom aussi, Sack dissimule sa bouche et une partie de son long 
nez derriere la main, et Doroane, le seul dupe, pose pour la photo. 

L'entretien preliminaire est tennine, cet apres-midi l'intenogatoire va commencer. 

Dodo obtient l'autorisation de me visiter pendant le dejeuner. Elle m'apporte aussi de la 
nourriture decente et des sous-vetements propres. 

Elle m’apprend surtout une nouvelle curieuse : la veille, vers minuit, elle a rccu un coup de fil 
de De Vroom qui lui declare qu’il est en mesure de negocier ma liberation. Dodo refuse tout 
net un marchandage douteux. 

De Vroom ne parle pas longtemps au telephone, il est agace par les flics en civil paraguayens 
qui epient ses moindres gestes. 

A l’exterieur de l’investigation, les journaux declenchent une campagne demente. J'y suis 
presente comine un trafiquant d’armes, de drogue ; comine etant l'assassin de Mendez, et 
responsable de nombreux meurtres. 

Les joumaux me decrivent souvent comine « piece clef » ou tous ces « sales trafics ». 

Vu l'attitude de De Vroom, je decide de repondre coup pour coup. J'indique a Dodo de 
rechercher l'article que Rene Haquin avait ecrit sur le President Stroessner. 

Article odieux ou il s’en prend meme au physique du President et a son « teint cireux de 
buveur de biere ». 

Elle doit le faire traduite d'urgence aupres d’un traducteur jure et le ramener chez le 
commissaire d’Interpol. 

Qu’elle indique bien que ce journal reflete largement l’opinion beige et celle de ses dirigeants 
qui autorisent la publication de tels articles ! 



Lorsque je revois les flics beiges l’apres-midi, ils sont sombres. 

La presse a deja publie la photo prise le matin. Des flics qui roulent des flics ! A mon tour 
d’ebaucher un sourire amuse ! Nous nous installons a une grande table ou les policiers beiges 
sortent leur questionnaire de leur mallette. 

Dans celle de Doroane : une paire de ... menottes. Je le regarde, amuse : 

-Alors... fetichiste ? 

De Vroom pose la premiere question, relative aux papiers trouves au Bois de la Houssiere. Je 
reponds en marquant des doutes certains quant a la certitude de l’ecriture de Claudine sur ces 
papiers. 

De Vroom pose sa seconde question mais, en fait, procede a un veritable plaidoyer pour 
Maitre Andre Guillaume. 

II inscrit done en page 2 de l'interrogatoire que « l’expert confinne sans aucun doute en page 
28 de son rapport qu'il s'agit incontestablement de l'ecriture de Claudine Falkenburg. D'autre 
part, entendue, Madame Claudine Falkenburg ne nie pas qu'il s'agit de son ecriture. 

II termine sa question bizarre ou aucune reponse n’est prevue par : « il appartient a madame 
Falkenburg de faire etablir une contre-expertise si elle l’avait mais elle ne l'a pas fait etant 
donne l’evidence de son ecriture dont elle a reconnu les conclusions ». 

Je me permets ici une petite digression : 

Le 17 septembre 1991, Madame A.M. Stroobants, graphologue et experte aupres des 
Tribunaux a etablit un rapport a ma demande. Paragraphe 2 et 3 : 

« II est tres difficile d’etablir un rapport d'expertise sur un document ne contenant que cinq 
mots. C'est insuffisant de determiner avec certitude a qui appartient l’ecriture tracee sur ce 
papier. D'autant plus que le document est calcine et petit. » 

De Vroom me montre une copie du fameux papier de la Houssiere.. .Ridicule papier de 10 cm 
sur 5 cm. 

-Pouvez-vous dire que ce n’est pas son ecriture ? 

-Non, mais je ne peux pas affirmer que c'est la sienne ! 

On en arrive par apres au temoigne du « jogger » (voir document). 

On me demande mon avis sur sa declaration. Ma reponse tant attendue par la Cour d’Assise 
tombe, laconique : 

-Je n’ai rien a repondre a ce temoignage pour le moins farfelu ! 

Ensuite, l'Affaire Dekaise m'est soumise. Cette fois, je refuse de citer le nom de Van Deuren. 
Le climat de cette commission rogatoire ne m'inspire absolument pas con dance ! 

Neanmoins, je parle du sabotage des enquetes en leur demontrant que j’avais averti le juge de 
Tennonde sur les agissements du Juge Schliker de Nivelles. 

L'interrogatoire se termine vers 19 heures. Je retourne en cellule, ereinte mais content de moi 
! 

Le maton du soir nous arrive de mechante humeur. II veut des lors se changer les idees. 
S’amusant d’un rien, il invente un jeu auquel nous serons souvent soumis. Nous devons faire 
le poirier, pieds contre le mur. Le premier qui tombe est mur pour une seance de « Larga 
distancia » ! 

Le flic a appele un de ses collegues et, devant ces pauvres marionnettes qui suent, la tete en 
bas, ils commencent les paris. Le temps se traine peniblement. Nous nous regardons avec 
l’espoir de la chute du voisin. Les douleurs commencent a chatouiller les bras... puis la vraie 
souffrance apparait! 

Les gouttes de sueurs ont fait place a un vrai ruissellement... il faut tenir ! Les deux flics, qui 
ont apporte un pliant, s'amusent beaucoup de la situation. Soudain, un jeune gamin de 16 ans 
s'ecroule sous le rire gras d'un des flics ! 

N’etant pas d’humeur trop mauvaise ou bien est-ce par faineantise, ils ne l'emmenent pas a 
Antelco, mais le gamin doit passer ses pieds par le grillage. 



Le perdant calme sa rage avec le manche de brosse. Le gamin hurle comme une bete. Le flic 
s'achame en l’injuriant: Porqueria, porqueria (sale pore). 

Ils s'en vont ensuite, couvrant toute la cour d’interieur de leur rire gras et bruyant. Des que le 
silence revient, on entoure le gosse. 

La peau a eclate pres des orteils, on tamponne avec un peu d'eau et on essaye de le calmer. II 
reste secoue de spasmes pendant plus d’une heure. Cette nuit-la, je dors sur les cartons, j’ai 
prete mon lit au gosse. Avant de se mettre au lit, le vieil argentin fait la priere. Je reste 
toujours a 1’ecart. Les homines prient le Seigneur de les aider et de les proteger. Je sens une 
sourde rage qui m’envahit. Comme peuvent-ils prier un Dieu d’amour qui permet de telles 
atrocites ? 

Dieu est juste bon a ce qu’on lui casse la g... 

Dieu qui est, parait-il, notre Pere a tous, qui voit tout, qui sait tout et qui est infiniment bon... 

« infiniment bon », quand j’y pense, je ricane... 

Un pere pareil, non, merci. 

Le lendemain matin, passage chez le coiffeur, inspection par 1’officier et direction : le bureau 
d’Arias. 

J’arrive le premier. Les flics beiges sont annonces mais pas encore arrives. Sur le bureau de 
Arias... les articles de presse de Rene Haquin et j’aperQois la traduction espagnole par le 
traducteur jure Samson. 

Bravo Dodo ! 

Arias arrive le premier. Je ne peux m’empecher d’attirer rapidement son attention sur les 
articles en insistant sur le fait que le Journal « Le Soir » est « quasiment l’organe de presse 
gouvernemental». 

II se renfrogne a la lecture, j’embraye rapidement: 

-les gens d’extreme droite, comme moi, desapprouvent totalement ce genre de litterature ! 

Au Paraguay, toucher a la personne du President ressort de la criminalite la plus grave ! Je 
retablis ainsi la balance avec la lettre lue par De Vroom ! 

Lorsque les flics beiges arrivent, Doroane, tout souriant, sort de son attache-case une 
plaquette en aluminium, souvenir de la P.J. de Nivelles. II re^oit un « gracias » peine poli. 
Doroane reste legerement interloque, tandis que je jubile interieurement. Le questionnaire 
continue. Auparavant, Doroane s’installe derriere la machine a ecrire pretee par le consulat 
beige. Au Paraguay, les machines sont de type Querty et Doroane ne connait que le systeme 
Azerty. Le consulat est alerte et apporte rapidement une machine a ecrire europeenne. Les 
questions me siderent parfois par leur caractere completement debile : 

-Avez-vous, a un moment quelconque, lors de vos fonctions de directeur, introduit des 
prostituees dans votre prison afin de les amener dans des cellules occupees par des etrangers 
afin de se moquer de ces derniers ? 

Autre question pour perdre du temps : 

-Comment fonctionne la procedure de liberation conditionnelle ? 

Alors qu'il suffit de le demander au Ministere de la Justice, Administration penitentiaire ! 

Par contre, ils m’apprennent par leurs questions, des elements tres interessants : 

« Dans les jours qui ont succede son arrestation, Bouhouche, malgre la preuve accablante que 
constituait l’expertise de son anne, a suggere aux enqueteurs d’orienter leurs recherches vers 
d'autres suspects. 

A cette fin, le precite a fourni une liste de trois noms parmi lesquels figurait le votre ! » 

En terminant cette journee d'interrogatoire, De Vroom m’annonce qu'ils ne viendront pas 
pendant le week-end. Monsieur Ceuppens, Consul de Belgique et richissime homme d'affaires 
au Paraguay, a decide de rendre agreable le sejour des trois policiers, il va les inviter a son 
domicile et leur faire visiter Chaco ! 

En sortant du bureau d’Arias, Doroane me demande discretement de lui decrire mes 



conditions de detention. Je pense qu'il a du entendre la reputation du batiment. 

-C'est dur, tres dur, surtout pour les autres. Moi, on ne ...me touche pas ! 

Doroane a Fair emu. Je me demande s'il me joue la comedie. Sur le trottoir, une indienne vend 
des petits gateaux de patisserie... Doroane me demande : 

-Vous etes a combien ? 

Je lui reponds : 

-A huit. Trois sont partis. 

Doroane achete huit petits gateaux. J'en oublie qu'il est flic, j’aimerais l’embrasser ! En temps 
normal, j’aurais refuse .. a l’investigation, nous vivons sur une autre planete ! 

Je distribue les gateaux et mes compagnons se regalent. 

Je constate que le vieil argentin n’est plus dans la cellule... j’observe et interroge du regard les 
autres en montrant la place vide qu'il occupe toujours. 

Un detenu me fait un signe de manivelle avec la main., .il est a Antelco ! 

Du coup, je ne mange pas mon eclair au chocolat et j’attends la venue du pauvre vieux. Deux 
brutes le portent jusqu'a la grille et le jettent par terre ! Des leur depart, nous nous precipitons 
pour l'aider. 

Son visage est tumefie et son penis saigne... nous n’avons que de l’eau firoide mais pour lui, le 
drame est ailleurs : ils lui ont casse ses lunettes, il ne peut done plus lire la Bible. Les autres 
detenus sont analphabetes. 

A 21h30, au moment de la priere, il m’appelle : 

-Juan, je sais que tu ne crois pas en Dieu, mais Lui, Il t’aime ! 

Comment peut-il encore croire apres ca ? 

Il continue insistant: 

-Peux-tu nous aider ? Tu es le seul qui sait lire et nous avons besoin de nous reconforter ! 

Je me retrouve dans le cercle de priere et il m’indique les passages a lire. Apres la priere, il 
vient discretement me dire : 

-Merci, tu verras, toi aussi, un jour, tu croiras en Dieu et tu te sentiras mieux ! Je ne veux pas 
polemiquer avec lui apres cette terrible journee.. mais je suis ebranle par sa foi ! 

Le samedi se deroule sans incident. 

Le dimanche, le jeune gosse qui etait tombe lors du jeu du poirier, essaye de s'evader alors 
qu'un flic lui fait laver sa voiture. 

On nous le ramene dans un piteux etat, incapable de marcher, la plante des pieds saigne 
abondamment il lui ont brule et flagelle les pieds avec du fil electrique. Le soir, le flic qui 
arrive pour la nuit, vient a la cage et veut aussi punir le fugitif. Il lui assene sur l'abdomen une 
vingtaine de coups avec le plat de son sabre et termine par un terrible coup de genoux dans les 
parties genitales. 

Le gosse ne peut plus hurler, sa voix est rauque et seule une sorte de feulement nous parvient 
encore. 

Le lundi, un commissaire vient me voir avant l’interrogatoire. Il souhaite connaitre mes 
impressions sur la fa$on dont se deroule l’interrogatoire et si les policiers beiges en sont 
contents. Les autorites paraguayennes veulent faire bonne figure. 

Il m'annonce aussi que je suis arrete officiellement pour une denonciation anonyme mais, 
qu'en fait, les autorites me gardent a la disposition des beiges. Des qu'ils seront partis, je serai 
fibre ! 

Cette nouvelle me reconforte et je descends en souriant chez le barbier. 

L'interrogatoire debute tres mal ! 

Alors que je reponds a De Vroom a une question portant sur des pots-de-vin que j’aurais 
touches, le capitaine Sack intervient et me lance mechamment: 

-Arretez de mentir ! Je sais que votre femme etait couverte de bijoux et de belles robes ! 
Devant ce mensonge ehonte, je lui decoche : 



-Vous, l’obsede sexuel, 9 a m’etonne que vous ne vous soyez pas manifesto plus tot! 

Je me tourne vers Arias : 

-Savez-vous que ces impuissants du Groupe Delta ont terrorise mes amies pour connaitre ma 
vie sexuelle ? 

Je hausse le ton : 

—Ils en ont meme ecrit des milliers de pages ! 

Sack intervient en haussant le ton a son tour : 

-C'etait pour etudier votre profd psychologique ! 

Je rencheris : 

-Vous voulez le voir a l'etat de repos ou en forme ? 

Le commissaire Arias et de Vroom nous calment tous les deux et De Vroom sort un instant 
avec ses deux acolytes. 

II revient et me promet qu'il n'y aura plus aucune question ou reflexion sur ma vie privee. 
Quant au capitaine Sack, il a le dernier mot: 

-Quand vous serez dans mon bureau, vous allez voir ce que vous allez voir ! 

Le 4 novembre 1987, l’interrogatoire est termine. On me remet les feuillets que je paraphe. 

Neanmoins, une chose est frappante : soit, sous le coup de l’emotion, je ne remarque pas la 
disparition de certaines questions, soit, dans le document final soumis a la Justice, des 
alterations ont ete effectuees, des questions importantes ont disparu : 

-Votre deuxieme arrestation a ete « commanditee » par la Surete de l'Etat qui vous accusait de 
partir au Paraguay avec 200 annes de poing dissimulees dans vos bagages : question disparue 
1 

Mon explication sur le dernier travail de Claude Leroy. 

En effet, ce dernier ne paie pas la pension alimentaire de ses enfants mais a promis a Dodo de 
lui envoyer bientot de l'argent. II travaille sur une grosse affaire : la recuperation des fonds 
Kirschen (vaste scandale lie au Parti Liberal et au milieu juif). Nombre de personnes, pour 
eviter l’impot, placaient d’importants capitaux en noir dans l’achat de diamants. 

Lorsque la police saisit le fichier des clients, tout y est cache ! 

Claude Leroy, un des rares non-juifs admis, est inscrit sous le code « Crete ». Le principal 
patron de cette machination, est libere sous caution. II s'enfuit en Suisse et decide de 
rembourser ses clients. 

Jean Gol charge Claude du transit des fonds entre la Suisse et la Belgique. Le voyage se fait 
par avion, done facile a reperer !) Information disparue ! 

Apres le depart des policiers, je me sens fatigue, mais content. S’ils verifient les deplacements 
de Claude Leroy, Jean Gol est par terre. 

Je rentre joyeux dans ma cellule infame. Je m’attends a une liberation imminente ! 

Dodo vient me visiter. En m'embrassant, elle me glisse une mignonnette de Whisky dans la 
poche. Je firemis a l’idee que le flic de faction ne s'en aperQoive mais heureusement, il n’a rien 
vu. 

La salle ou nous nous voyons se situe pres du couloir d’entree. Dans la piece, une porte ... 
Antelco ! 

Tout a la joie de la fin des interrogatoires, nous sornmes interrompus par du brouhaha. Un 
compagnon de cellule est amene par les quatre tortionnaires. 

Un des flics transporte des fils electriques dans sa main. Comine tous ceux qui descendent, le 
regard de l'homme est affole ! 

Dodo se toume vers moi, m’interroge d'un regard penetrant... elle n’ose croire ce qu'elle 
suppose! 

Un des flics l’apostrophe : 



-Qu'est-ce que vous foutez la ? Dehors, vite ! 

Dodo me regarde, la terreur se lit dans les yeux. Un flic l'empoigne et la sort dans le couloir, 
je ne la vois plus et je ne vois pas non plus le coup de pied qu'il lui decoche sur le tibia. 

C'est dur mais je sais que je vais enfin sortir ! 

Le soir, un commissaire nous apprend un nouveau jeu : il designe les « couples » et chaque 
partenaire doit gifler l'autre. Si le coup est trop mou, le commissaire frappe lui-meme mais 
avec ses poings. 

II empoigne aussi son petit siege de camping pliable et il compte : uno, les claques raisonnent, 
dos...tres...diez...cuarenta... cincuenta ! 

Nous soinmes tous a moitie groggy... le flic sourit... content! 

Pendant deux jours, la routine horrible avec ses coups et ses humiliations ! 

Enfin, un apres-midi, on vient me chercher ! Ca y est, je vais sortir ! 

J'ai des larmes d’emotion qui me brulent les yeux. 

Je veux prendre mes petites affaires... « plus tard » m’indique un des homines. 

Je leur souris, ils me rendent mon sourire. Je descends cet escalier de malheur et regarde deja 
la rue par la fenetre. Mes pas me dirigent vers le couloir donnant aux bureaux. 

Le flic m’empoigne le bras et me montre ... Antelco ! 

Je regarde, hebete, mais le deuxieme m’agrippe a son tour et me pousse dans cette fameuse 
piece de l'horreur ! 

Deux autres homines m'y attendent. 

Sur la table, des fils electriques jaunes et verts et une boite en bois de la grosseur d'un pain. La 
lumiere est artificielle ... les volets sont clos. Je tremble ! Brusquement, j'ai tres froid ! 

Celui qui semble etre le chef a peut-etre trente ans. Il commence : 

-Deshabille-toi ! 

J'essaie de protester, de dire qu'il y a certainement un malentendu. 

-Deshabille-toi ! 

Cette fois-ci, il a gueule ses ordres ! 

Je me deshabille done tout en essayant de comprendre et d'eviter ce que je redoute. 

-Le slip aussi ! 

Une fois nu, le plus grand vient par derriere et me menotte les poignets dans le dos. Ils me 
font asseoir sur une chaise de bois. J'ai froid, je grelotte. 

-Comment t'appelles-tu ? 

Pas le temps de finir ma phrase, je recois une gifle que je n'ai pas vue arriver et qui me 
projette hors de la chaise. Le temps de realiser ce qui m’arrive et les voila a quatre me 
bourrant de coups de pieds tout le corps et principalement les parties sexuelles. Je pousse des 
« ah », mais je ne crie pas ! 

Un coup de pied dans le foie me coupe net la respiration. J'ai l’impression que mes testicules 
vont eclater ! Ils epargnent mon visage ! 

Apres cette seance de coups de pieds, ils me laissent recuperer ma respiration et la leur : ils 
sont aussi hors d’haleine ! 

Ma bouche goute le sang et je n’ose plus bouger. Je prolonge ainsi ce temps beni sans coups ! 
Le plus grand m’empoigne et me met a genoux ! 

J'ai tellement mal que je garde le front a terre. 

Un des flics ricane : 

-Il veut peut-etre qu'on l’encule, ce pede ?! 

On me tire la tete en arriere par les cheveux et je suis force d’ouvrir la bouche pour y recevoir 
un baillon constitue par une sorte d’essuie degueulasse avec des taches brunatres de sang. Je 
regarde le chef, j’essaye, par mon regard, de lui faire comprendre qu’il y a une erreur. 

Vlan ! Le premier coup de baton s'ecrase sur la plante des pieds. Cette fois, je crie, je crie en 
serrant les dents et en mordant dans ce tissu puant. Un nouveau coup. Mon corps hurle ! 



Je voudrais dechiqueter l’essuie et les tuer tous ! 

Les coups se suivent, je hurle, je pleure, je transpire ! Je me laisse tomber a plat ventre mais 
les coups de pieds recommencent et on me replace dans mon attitude de « pede ». Les coups 
reprennent de plus belle ! 

Je voudrais tomber en syncope mais chaque coup me dechire la peau avec la meme douleur. 
Brusquement, les coups s'arretent! Je ne bouge pas... j’ai peur de la suite... et si c’etait fini ?! 
Ils parlent entre eux en guarani mais je n’ose lever la tete, je garde le front au sol. Un leger 
sifflement et cette fois, mon dos tressaille comine touche par l’electricite. Le plus grand que je 
reconnais par ses chaussures, vu ma position, a commence a me fouetter avec les fils 
electriques. J’en rccois surtout sur les fesses. Je pense que je vais mourir ! 

Cette fois, je pressens la syncope, je la souhaite de tout coeur. 

Le grand s’arrete ! Mon corps n’est plus q’une douleur : c'est sur, je vais mourir ! 

On me redresse par les aisselles et on me rassied. 

Je constate avec soulagement que le grand depose ses fils sur la table. On me retire mon 
baillon, plein de salives, de larmes, de sueur et de sang ! 

-Bien, Bultot, aujourd'hui, on a ete « gentils », mais il faut bien reflechir ! Nous, on est pas 
des brutes, on veut juste un peu d’argent! Nous en reparlerons demain ! 

Le grand me retire les menottes, je peux m’habiller. 

Quand je me penche, j’ai mal partout, et marcher me semble impossible. Lorsqu’il me voit 
esquisser mes premiers pas avec difficulty, le chef ajoute : 

-Pas de comedie, tu marches convenablement ou moi, je t’apprends ce que c’est de souffrir ! 
Effectivement, devant la menace, je marche quasi nonnalement, je pourrais meme marcher 
sur des moignons ! 

A mon retour dans la cellule, les compagnons me soignent les pieds et me felicitent: je n’ai 
pas eu droit a la « larga distancia ». 

Mais la joumee des travailleurs n’est pas terminee ! 

Dans la cellule, un jeune militaire de 18 ans a ete amene pendant qu’ils me « travaillaient » il a 
vole deux fusils militaires Mauser et les a revendus a des indigenes de la jungle ! 

Une demi-heure plus tard, « mes » bourreaux viennent le chercher. En me voyant rentrer, le 
petit militaire a compris ce que je venais de subir. Il transpire de trouille, il cherche de l’aide 
parmi nous, mais que pouvons-nous faire ? 

Pendant que les autres me bassinent les pieds et mes testicules avec de l’eau firoide, le militaire 
est interroge a Antelco, du moins, nous le supposions ! 

Nous apprenons qu’il a essaye de s’enfuir ! 

Il est ramene deux heures plus tard, le visage est tellement tumefie qu’il est meconnaissable. 

Ils ont du le porter ! Une grande tache de sang souille sa veste du cote de l’epaule gauche, il a 
pris une balle dans le dessus du bras ! 

Les flics nous insultent et nous avertissent de « bien regarder ce salopard car tous ceux qui 
sont tentes de s’enfuir subiront le meme traitement ! » 

Sur ce, un officier degaine son 38 special, baisse la veste de la loque humaine, pince le bras et 
tire dans le gras du bras. 

La figure tumefiee hurle et tombe devant la grille. 

Il n’a meme pas de menottes, il n’a plus la force de bouger ! Une nouvelle flaque de sang 
apparait! 

Nous regardons tous nos genoux ! 

Les flics poursuivent entre eux la conversation en guarani pendant une dizaine de minutes, 
puis l’emportent en le tirant par son col ! 

Le militaire n’emet plus que de gargouillis incomprehensibles. Ses yeux sont tellement 
tumefies qu’on ne sait s’il nous regarde. 

On n’entendra plus jamais parler de lui ! 



Mon vieil Argentin s'approche de moi: 

-Tu vois que tu as de la chance ! Toi, ils te moderent, remercie Le Seigneur ! 

Le lendemain, Dodo me fait parvenir une salade dans un Tupperware. Elle n’est pas autorisee 
a me voir ! 

Le flic qui monte le plat, l'ouvre devant moi. II regarde, hume, goute, puis il sourit: 

-Cest bien trop bon pour une crapule de tueur cornme toi ! 

II ouvre sa braguette et pisse dans le plat! 

II ouvre la porte et me le tend. 

-Bouffe ! Bouffe tout! 

-Plus tard... 

-Maintenant, me hurle-t-il. 

Et il degaine son revolver. 

Avec ma cuillere, j’essaie de presser les feuilles de salade contre le bord du plat afin d’en 
extraire le maximum d’urine ... et je mange ! 

Il me fait avaler tout le plat ! 

Quand il s’en va, je suis tellement casse que je reste la cornme un pantin desarticule, je ne dois 
meme pas vomir ! 

Ils ne viennent pas me chercher aujourd’hui, mais ce soir, le flic de faction nous fait jouer au 
jeu des claques... 

Le soir, apres la priere, je parle un peu avec le vieil Argentin. Il m’avoue etre un juif converti 
et qui vit sa religion avec force ! 

Moi, par contre, mon atheisme s’est transforme en Antechrist! 

L’Argentin sejourne illegalement dans le pays et les flics veulent obtenir une procuration sur 
son compte en banque ! Mais la banque argentine qui a eu vent de son arrestation et qui 
connait les moeurs de la Investigacion a bloque tous ses comptes. Voila trois mois qu’il vit 
cette situation inextricable ! 

Le lendemain matin, ils viennent a nouveau me chercher pour Antelco ! 

Le debut de l’infame ceremonie est inchange : 

-Deshabille-toi ! 

Ils me placent directement les menottes dans le dos et le grand apporte l’essuie, ce meme 
essuie qui sert de baillon a toutes les bouches de supplicies ! 

Une fois le baillon place, le chef me tient un court discours : 

-Ecoute, on sait que tu es une crapule de criminel qui a tue des innocents dans ton pays, ca 
c’est ton affaire ! Mais on sait aussi que tu as touche beaucoup d’argent pour tes saloperies, 
alors, tu vas nous dire ou tu as planque cet argent! 

J’ai les yeux exorbites et je lui fais de grands signes que « non », je lui indique que je veux 
parler et je marmonne avec l’essuie en bouche ! 

Il ne retire pas le baillon, mais continue : 

-Alors, les policiers de ton pays sont de tels menteurs ! 

Je viens de comprendre. Ah ! Les salauds, les crapules ! 

Je bouge la tete en marmonnant, il faut qu’il m’ecoute, il le faut ! 

Le plus grand m’attache la poitrine contre le dossier de la chaise avec des fils electriques. Le 
chef, en souriant, approche avec la boite en bois. A l’arriere, une manivelle. Il extrait de la 
boite deux fils denudes sur les vingt derniers centimetres. Il enroule un fils autour de mes 
testicules et l’autre juste en dessous du gland ! 

Il me regarde encore en souriant. Je veux qu’il m’entende, je crie a travers le baillon qu’il doit 
m’ecouter, que je suis un refugie politique. 

-Nous allons vite savoir qui ment ! 

Me dit-il sans ses departir de son sourire, et il tourne prestement la manivelle ! 

Je hurle a me faire sauter les poumons, les cordes vocales ... tout! 



Mon bas-ventre me donne l'impression de se dechirer et c'est comme si, avec un baton, on me 
repoussait les organes genitaux dans le ventre ! 

Je le regarde d'un air terriblement suppliant! 

Pour la premiere fois de ma vie, je supplie ! 

Je lui fais des grands signes que « non » avec la tete mais ... deuxieme decharge... Ce n’est pas 
possible ! Je dois etre dechire de partout, je ressens mon ventre coniine s'il etait en bouillie ! 
Troisieme decharge ... Je continue a hurler et mon attention est attiree par un clou depassant 
du mur. Je vais fixer mon attention sur ce clou, nouvelle decharge ... ne plus penser ... juste ce 
clou, ne plus souffrir, juste regarder ce clou encore, encore et encore ! 

Pendant les trois semaines a venir, je vais subir une dizaine de seances de ce genre ! Chaque 
fois, je me sers de ce clou pour m’aider a tenir le coup ! 

Je n’aurai « droit » qu'une seule fois a la larga distancia, mais je serai chaque fois flagelle, et 
par deux fois, brule aux pieds par des cigarettes. Lorsqu 'ils comprennent que les policiers 
beiges avaient menti, mes bourreaux me reclament ma signature pour leur ceder l’estancia ! Je 
refuse categoriquement. Un jour, mon avocat est alerte par un des policiers : 

-Si Bultot persiste, ca peut tres mal finir ! 

II contacte directement Dodo a qui j'ai toujours soigneusement cache mon traitement. 
Seulement, elle a remarque mon amaigrissement anormal: dix kilos en un mois ! Elle en est 
affolee, et des qu’elle apprend par la bouche de favocat que je suis torture, elle commence 
immediatement les tractations pour payer ! 

Elle parvient a eviter la vente de l’estancia et s'en sort avec trois payements echelonnes ! Le 
jour ou l'affaire est conclue, un de mes bourreaux vient me chercher : 

-Tu es libre, je te souhaite bonne chance ! 

Depuis le debut des tractations, je ne suis plus torture. Quand ils viennent chercher un 
compagnon, ils m’envoient un bonjour amical ! 

Mon psychisme est completement detraque, car chaque fois qu'ils m’epargnent, je leur souris 
de reconnaissance ! 

Aussi, lorsqu'il vient me liberer, je lui serre la main et je lui balbutie : 

-Merci, merci beaucoup ! 

II me faudra une semaine avant de redevenir « normal » et avant de les hair profondement. 
Deux jours apres ma liberation, Hugo Mercks, du journal « Gazet van Antwerpen » debarque 
a la maison. Je lui narre l’interrogatoire des policiers beiges et mes accusations contre Jean 
Gol, 1 ’intouchable ! 

J'omets de lui parler des tortures, j’en ressens une profonde gene ! 

C'est d’ailleurs par ce livre que pour la premiere fois, Cyriaque et Dodo apprendront ce qui 
m’est reellement arrive a l'Investigation ! 

Un informateur de Belgique m’apprend une nouvelle importante : une dame a temoigne 
devant les autorites judiciaires de sa presence lors des pots-de-vin destines a Jean Gol. Une 
dame qui connait bien Yvonne Deschuteneer, alias Bobonne Champagne, alerte les autorites 
sur toutes les irregularites dont elle est temoin et parfois victime. 

Madame Paulette Gillet temoigne : 

-Bobonne Champagne s'est rendue chez le cure Paelinkx un mois ou deux avant le 
cambriolage de ce dernier. Je conduisais ma voiture et elle m’a demande de m’arreter devant la 
taverne Van Roy a Wieze. De la, elle s'est rendue a pied chez le cure Paeli nk x et elle a tout 
fait pour ne pas que je remarque sa reelle destination. Elle est revenue avec deux paquets 
formats « Indicateur de telephone » et un paquet conique terriblement lourd ! 

Dans la suite de son temoignage, madame Gillet se plaint amerement d'un classement sans 
suite ordonne par Claude Leroy dans une affaire de faillite. Elle pretend que son adversaire, 
un avocat du nom de Lescrenier, a deja eu quelques problemes d’indelicatesse vis-a-vis de 
certains de ses clients mais qu'il fut nomine Substitut du Procureur du Roi grace, encore une 



fois, a l'intervention de Claude Leroy ! 

Elle temoigne aussi dans l'affaire des freres Maristes : 

-Lorsque j’accompagnais Bobonne Champagne chez les freres Maristes, elle etait toujours 
appelee par son prenom. Un jour, le frere econome, appele Victor Vennersch, me confie « je 
sais bien que c'est un revenu qu’on lui doit, mais parfois, elle exagere ! ». Chaque fois, elle 
ressort avec l’argent. 

Madame Gillet est formelle : le meme scenario se repete a la Trappe de Westmael, les 
redemptoristes rue Belliard a Bruxelles et un couvent a Malines. 

En 1988, le tribunal correctionnel de Bruxelles avalise la version de prets consentis par ces 
congregations et non rembourses par Bobonne Champagne et la condamne. 

II y en a pour pres de 200 millions de FB. 

Madame Gillet s'intrigue aussi des nombreux voyages de Claude Leroy a Vevey en Suisse ou 
il se rend dans une banque accompagne de l’avocat Henri Toussaint. 

Un jour, Bobonne Champagne, qui frequente aussi Jean Gol, montre une liasse de billets a 
Madame Gillet: 

-II y a la pour 100.000 FB, pour Jean Gol, mais j’en ai marre d’arroser celui-la ! Bobonne 
Champagne a cree une association : Les Amis du Casino de Bruxelles... qui ne fut jamais 
institue !? 

Pourquoi cet interet pour les casinos et d’ou provient tout cet argent aimablement « prete » par 
les riches congregations religieuses ? 

Madame Gillet denonce le tout a la gendannerie de Bruxelles qui transmet le dossier au 
Parquet. Le dossier est confie au Substitut Marschal (Franc-Ma^on) ... sans resultat ! 
Actuellement, Madame Gillet recoil des menaces de mort de la part d’inconnus ! 

Une fois que mon psychisme est un peu recupere, je decide de contre-attaquer. A 
l’investigation, apres chaque seance de torture, je me suis bien jure d’avoir la peau de Gol ! 

Je telephone aux joumaux qui, deja, ont eu connaissance du dossier (le vrai ou l’apeure). 

Une partie de la presse deduit que je n’ai rien apporte de neuf a la verite ! 

Sarfatty alias Serge Dumont declenche une serie d’articles au titre revelateur : « Les 
mensonges de Jean Bultot ». 

Par contre, la presse se montre intriguee par Jean Gol. 

Alors que le Gouvernement se dissout en vue des elections et que les ministres ne gerent plus 
les affaires courantes, Jean Gol, des reception du dossier de la commission rogatoire, s'envole 
au U.S.A. avec Albert Raes, le patron de la Surete de l’Etat, pour faire une visite au F.B.I. 
Personne dans la presse ne veut reprendre mes accusations. 

Personne sauf Hugo Merckx, du journal « Gazet van Antwerpen » qui revient du Paraguay. 

Le 2 decembre 1987, il titre : 

« J’accuse Jean Gol! » 

Des la parution de l’article, le scandale eclate avec force. La redaction du Journal re^oit deux 
cents appels telephoniques sur la matinee pour obtenir davantage de precisions. J’ai la joie de 
voir mes accusations reprises par la presse francaise. 

Le 3 decembre 1987, le journaliste Sylvain Ephimenco du Journal franca is « Liberation » titre 
sur toute la page, avec une photo de Jean Gol se tirant l’oreille : 

« Graves accusations contre le ministre de la Justice » 

Le reste de la presse beige, piege, ne peut que reprendre l’infonnation mais en insistant sur le 
fait que je parle sans preuve ! 

La nouvelle eclate huit jours avant le jour des elections generales... Maurice Sarfatty vient au 
secours de Jean Gol et me vitriole dans ses articles ... Jean Gol perd 35% des voix de faveur ... 
Le Parti Liberal accuse un serieux retrait! 

Le 31 decembre 1987, malgre les epreuves que je viens de subir, me voit heureux et ravi 
lorsque les douze coups resonnent ! David a touche Goliath ! 



L’annee 1988 marque aussi un vent de folie parmi la Justice. 

Le proces des Borains commence a Mons. 

Le President Robert Vereecke est a la barre ! 

Des avant le proces, la presse montre sa suspicion et titre : « Juge-t-on les vrais coupables ? » 
Le proces debute a peine que le Juge Schliker debouche dans le pretoire pour annoncer qu'une 
arme, un G.P. 9mm trouve dans la sauce bolognaise congelee dans le frigo de Bouhouche 
pourrait bien etre l'anne des tueries ! 

Le proces est suspendu ! 

Fausse alerte, il va reprendre un peu plus tard ! 

Par contre, Madame Bouhouche met en cause Robert Beijer, l'associe de son mari dans le 
cadre du meurtre de Mendez. 

Le Juge Schliker lance un mandat d’arret international mais Beijer se livre spontanement apres 
avoir rencontre la presse. 

II leur avoue avoir travaille pour la Surete de l'Etat. 

De Staercke, detenu de son cote par le Groupe Delta et aussi pour les tueries du Brabant 
Wallon, lance sa complainte : Rien de bouge ... il sent parfaitement bien que son arrestation 
est toute publicitaire ! 

Debut fevrier 1988, Bouhouche tente de s'evader avec la complicity de son epouse, en 
utilisant des ... faux gendannes. 

Toujours en fevrier 1988, Jean Gol decide aussi de « remanier » la cellule du Brabant Wallon 
en retirant six inspecteurs de la P.J. de l'Affaire. 

Dans une mise au point a la presse, il s’inquiete : 

« Des bruits sans fondements diffuses par certains medias, selon lesquels les autorites 
pourraient saboter l’enquete, et ce malgre le dementi fonnel des autorites... » 

On pourra gouter tout le sel de cette phrase lors de l’interrogatoire des magistrats a la 
commission parlementaire ! Jean Gol s'y montre toujours farouchement oppose ! 

Il ne pourra plus s'y opposer tres longtemps... le Gouvernement change, et de par ses 
mediocres resultats aux demieres elections, le Parti Liberal se voit releguer dans l’opposition. 
Les families des victimes respirent: Jean Gol n'est plus ministre de la Justice ! 

Il est remplace par Melchio Wathelet, jursiste et fds d’eleveur de pores ! 

Au mois d’avril, les Assises du Hainaut reprennent le proces des Borains. 

La population, par voie de la presse, apprend enfin grace a l’excellent President Vereecke, la 
maniere avec laquelle les interrogatoires, de la clique du Juge Schliker, sont menes. 

Il denonce les verifications elementaires non etablies, la facon dont les detenus sont « 
trimballes » de la P.J. de Nivelles, a la B.S.R. de Nivelles, a la B.S.R. de Wavre, a la P.J. de 
Charleroi, a la B.S.R. de Charleroi. 

Ensuite, Le Gof vient y faire un show tres remarque. Il refuse de repondre a la question de 
savoir si je connais quelque chose sur les tueries. 

-Secret de l'Instruction, je ne peux parler ! 

Pendant ce temps, les patrons de la Surete de l'Etat sont enfin interroges par le Juge Lacroix. 
Une partie de la presse diffuse la teneur de ces entretiens : le W.N.P. s'entrainait chez Bultot! 
Depuis le debut du proces de la filiere boraine, il apparait de plus en plus que la responsabilite 
de ces marginaux est fort peu probable... On se relance des lors sur la piste Bultot. D'ailleurs, 
dans leur plaidoirie, les avocats de la defense ne manquent pas de souligner que « ma piste » a 
ete negligee ! 

Auparavant, il est a signaler qu'a part Monsieur Raes, patron de la Surete de l'Etat, les 
magistrats instructeurs cites mettent en doute la these du suicide de Latinus (patron du W.N.P. 
en possession du dossier Pinon). 

Le 30 avril 1987, Verdict repris dans la presse : 

« cinq innocents traines cinq ans dans la boue ! » 



Je fete mes 36 ans sur cette bonne nouvelle : il existe encore des magistrats integres ! Au 
Paraguay, la vie suit son bonhomme de chemin mais des heurts apparaissent entre Dodo et 
moi. 

Elle a vecu tres difficilement ma nouvelle incarceration ou elle s'est battue comine une bonne, 
mais apres l’epreuve, comine en mars 86, elle subit une depression et nos relations en 
patissent. 

Le pays est en effervescence, en ce mois de mai 88, le Pape est de visite. Des dizaines de 
milliers de personnes se pressent pour l'acclamer. 

II s'entretient surtout avec l’opposition. Les amateurs de tranquillite sont inquiets... Un 
joumaliste de la revue Panorama, Peter Vermersch, vient me visiter a l'Estancia. 

II m'apporte aussi le premier livre consacre aux tueurs du Brabant Wallon. Ce livre ecrit par 
Gilbert Dupont, de la « Derniere Heure » et par Paul Ponsaers du « Morgen » s'intitule : « Les 
Tueurs ».Quand j’enprends connaissance, je manque de m'etrangler... apres de nombreuses 
erreurs sur des dates capitales. 

Les auteurs me designent indirectement comine le Cerveau des tueurs. J'ai le profil 
psychologique adequat: suffisamment intelligent, bien introduit dans le monde judiciaire, 
bien introduit dans le milieu criminel, extreme droite, expert en tir... et noceur ! 

Malgre l’opposition farouche de Jean Gol, le Parlement cree enfin une commission d’enquete 
sur la maniere dont la Justice fonctionne dans les grands dossiers du banditisme. 

Monsieur Coveliers prend indirectement contact avec moi pour que je puisse l’aider. Je lui 
telephone a son domicile : 

-Pas ici, s'il vous plait, Monsieur Bultot, mon domicile est sous haute surveillance, j’ai ete de 
plus visite par de « singuliers cambrioleurs ». 

Je lui envoie un rapport de cinq pages. 

Le 5 juillet 1987, « Het Gazet van Antwerpen » titre : 

« Jean Bultot accuse a nouveau Jean Gol ! » 

Mais les autres journaux restent persuades que je suis un menteur. Aussi, lorsque mon proces 
sur les titres de banque et mon arsenal trouve en mon domicile (une photo sur laquelle on 
distingue 5 poignards et un nunchaku) debute le 19 octobre 1987. Une bonne partie de la 
presse est prete a assister a ma destruction par le tribunal correctionnel de Bruxelles. 

Van Esbroeck temoigne contre moi. Alors que, l’annee precedente, la Cour d’Appel de Gand 
lui inflige le maximum (20 ans) et le designe ainsi comme un dangereux truand, le tribunal de 
Bruxelles, preside par Monsieur Golderg, ecoute quasi religieusement son temoignage « 
objectif » et« revelateur » sur Bultot. 

Le requisitoire du Substitut Dauchot restera dans les memoires comme une oeuvre admirable 
bourree de mensonges et de mechancete stupide. 

Monsieur Dauchot s’en refere a la parole de Van Esbroeck, tout au moins a la version qui 
l’interesse (Van esbroeck a change cinq fois de version dans le dossier). 

Ensuite, parlant des annes illegales, il va developper le temoignage de Jean Baugnet, ou ce 
dernier affirme que je trahque des annes vers l’ambassade du Zaire et le M.S.I. italien ! P.V. 
n° 1375 de la B.S.R. de Wavre. 

Pour rappel: cette declaration a ete extorquee par Le Gof lors de la decouverte chez Marino 
de 10 annes en noir fournies par Jean Baugnet. En echange de leur « bonne information », ils 
ne sont pas poursuivis. 

Se servant d'une lettre anonyme (enfin... signee par... les Amis de la Justice), Monsieur 
Dauchot parle de mes relations avec les grands truands. 

Il stigmatise aussi les quantites d’annes prohibees trouvees en mon domicile. 

Il termine : 

-Etant donne que Bultot etait investi d’une parcelle de pouvoir, nous voila devant un cas d’une 



gravite rarement atteinte. Aucune circonstance attenuante ne peut etre envisagee, il faut, dans 
le cas de Bultot, specialement tenir compte du fait qu'il etait considere comme un personnage 
au-dessus de tout soupcon ! « Bultot est un bon tireur, mais ce qu’il a fait plus vite que son 
ombre, c'est mentir ! » 

Tout ce show pour une photo ! 

« Le Soir » du 22 octobre 1988 titre : « Lourdes peines requises contre le fugitif Bultot ». 
Au-dessus de ce reportage, le journal a dispose un autre article judiciaure : « Tribunal 
Correctionnel de Bruxelles, les bourreaux de Christophe, punis de mort, condamnes a 5 ans. » 
L'histoire : deux parents ont baillonne un gosse de quatre ans et demi et font laisse mourir 
d'asphyxie sous une pile de linge. Ils sont condamnes a cinq ans de prison. Le 11 septembre 
1987, je suis condamne a la meme peine ! 

Je continue a etre indirectement en contact avec Monsieur Coveliers. Je lui demande ou en 
sont les recherches sur Van Deuren. 

II me fait repondre qu’il poursuit ses recherches. 

Pendant ce temps, les magistrats, avocats, flics et journalistes defilent devant la commission 
parlementaire. Le doute n’est plus permis : il y a bien eu sabotage de l’enquete. Pousse dans 
ses retranchements, lorsque le President de la Commission lui demande s'il y a eu des 
pressions pour freiner l’enquete, le Juge Schliker (encore lui !) declare : 

-Je ne reponds pas, je ne suis pas millionnaire, je ne veux pas perdre ma place ! 

Le grand patron de la P.J., Moens, refuse d’abord de temoigner, puis il change d’avis ! Taras 
Boulba (De Vlieghere) de la Surete de l'Etat vient a son tour donner un faux temoignage. Il 
affirme que des avant mon depart de la Belgique, la Surete de l'Etat connaissait mon itineraire 
et meme les numeros des billets d’avion ! 

A quoi rime ce mensonge ? 

Le Canard vient contredire son ex-patron, Taras Boulba au sujet d’un eventuel complot 
destine a la Belgique ! 

Un major de la Gendarmerie, Vernaillen, qui fut un jour agresse en son domicile par des 
gangsters inconnus, affirme qu'un certain Finne, abattu par les tueurs sur un parking de super- 
marche, lui avait devoile les premices d'un coup d’Etat, ou Ton retrouve coniine protagoniste 
le nom de l’ex Minsitre Van Den Boeynants ! 

Les enqueteurs ne savent plus ou donner de la tete, mais une chose est sure : il y a des 
complicites en haut lieu ! 

Dernier exemple : Monsieur Reyniers, Commissaire en Chef de la P.J. de Bruxelles declare 
que le dossier Pinon n'existe pas. Son adjoint, le Commissaire Marnette declare que le dossier 
se trouve dans le coffre fort de la P.J. 

On apprend aussi que Monsieur De Pretre, Procureur du Roi de Nivelles possede egalement le 
meme dossier dans son coffre. Pourquoi cela ne se trouve-t-il pas au greffe ? 

-Je veux eviter les indiscretions et proteger la vie privee des gens concernes par cette 
mysterieuse affaire. 

C'est done qu'il existe bien une affaire et que mes declarations sont exactes. 

A la meme epoque, je recois au Paraguay un dossier bien etrange. 

D'un infonnateur de Belgique, je recois le dossier qui fut pus tard appele : le dossier Vittorio, 
du nom d'un Borain qui aurait ete a la base de cette compilation. 

Car il s'agit bien d’une compilation fantastique de plus de 200 proces-verbaux relatifs aux 
dossiers du Juge Lacroix sur les Tueries du Brabant Wallon ! 

En lisant ce rapport, je sens un melange de joie et de rage m’envahir ! 

Ce dossier prouve indubitablement le sabotage des enquetes par les magistrats instructeurs. 

Le proces-verbal le plus interessant est sans conteste le P.V. 20547/87. En effet, ce P.V. 
reprend une liste d’autres P.V. dont les originaux ont ete remplaces par des copies et une autre 
liste de 10 P.V. disparus. 



Carton 3, farde : enquete Fourez-Dewit 

P.V. 13 piece 17 : Fourez allait souvent a l'auberge des Trois Canards (dont le patron s'est fait 
assassine par les tueurs). 

P.V. 20 620 : Les balles retrouvees apres autopsie dans le corps des victimes d’Oversijse en 
1985 n’ont toujours pas ete expertisees par le Juge Schliker en juin 1987. 

Dossier expertise de Cocu, page 38 : 

« Les transparents » de tombeur (expert) et des photos de Ceccaldi (expert) ont disparu en 
decembre 86... 

Piece 5 P.V. 1472 : les descendants de Fourez-Dewit tentent une extorsion de fonds pres du 
notaire charge de la succession. 

Piece 57 P.V. 923/83 : rapport de Goffinon :Hage Haroum est en rapport avec des diplomates 
beiges ainsi que le Prince Albert. 

Hage Haroun est Libanais et representant des Phalanges Chretiennes du Liban. Ces derniers 
paient leur commande d’armes avec l’argent des vastes cultures de hachisch de leur pays. 

Mais il y a plus grave : 

P.V 1822/84 piece 54 : dossier du parquet 11315832/82 Bxl 

Selon un infonnateur, es armes de Dekaise seraient enterrees dans le jardin d’une villa, photo 
a l’appui. Le Juge Schliker n'a rien fait. 

En ce qui conceme son predecesseur Wezel, qui fut nomine a la Cour d’Appel et qui instruisit 
l'affaire Claude Leroy, l’evidence saut aux yeux : 

Carton 16P.V. 2946 : Monsieur Otero, attache diplomate d’Argentine frequente assidument le 
restaurant « les Trois Canards ». La P.J. d de Bruxelles demande au Juge Wezl de faire une 
enquete sur cette personne « louche ». Le Juge Wezel a refuse. 

P.V. 3056 : Monsieur Gerard Vermup connait tres bien le restaurant « les Trois Canards ». La 
P.J. a demande de faire une enquete sur cette personne qualifiee cette fois de « tres louche ». 
Le Juge Wezel a refuse. 

P.V. 457/86 : Madame Yvonne Michiels declare aux autorites que son mari est parti 
subitement aux Etats-Unis apres avoir fait « des affaires louches ». II avait beaucoup d’argent 
sans travailler et connaissait tres bien Van Camp, patron des Trois Canards. 

Le Juge Wezel a refuse de faire une enquete. 

Bizarrement, tout ce qui touche aux Trois Canards est rapidement ecarte. J'avais rcgu, d'un 
infonnateur, la nouvelle suivant: les gendarmes, apres le meurtre, avaient saisi la liste des 
clients du restaurant les Trois Canards. Cette information m’a ete confinnee par Rene Haquin 
qui avait recu ce renseignement de la fille de la victime. 

Enlin. dans les documents interessants : 

Carton 17 P.V. 665 piece 206,298/83...308/83 : declaration du Sous-officier Balfroid BSR 
Wavre. 

Cela conceme TAffaire Charly Depauw (un grand ami de Van Den Boeynants) il est question 
de Mathot (cite dans la liste Pinon) et d’une cassette video dans un maison du Rouge Cloitre a 
La Hulpe. 

Il s'agit d'une cassette de moeurs impliquant diverses personnalites. Elle avait ete achetee par 
Charly De Pauw (assassine)(la parenthese precedente figure dans le texte) pour 140 Millions 



de francs beiges et une copie serait en possession d’un notaire. 

Devant tous ces documents, je telephone en rage au Juge Lacroix : 

-Alors, Monsieur le Juge, vous me demandez de prouver le sabotage de l’enquete alors que 
vous en avez toutes les preuves ! 

Et je commence a enumerer les P.V. 

II reste un instant sans voix, puis me declare : 

-Je n'ai pas a juger la maniere avec laquelle mes predecesseurs ont era bon de mener cette 
enquete ! 

-Oui, mais moi, je vais reveler ce scandale au public ! 

-Vous faites ce que vous voulez ! 

Je telephone ensuite au Depute Coveliers, Secretaire de la commission Parlementaire pour lui 
annoncer ma decouverte. 

Je lui demande un laissez-passer pour rentrer 8 jours en Belgique et m’expliquer devant la 
Commission elle-meme. 

Affolement du nouveau Ministre de la Justice Melchior Wathelet: 

-Ceci est rigoureusement impossible sur un plan juridique. 

Or, il suffit de demander aux Parquets Generaux de Gand et de Bruxelles de ne pas appliquer 
la mesure d’arrestation immediate qui me frappe ! 

Manifestement, le Ministre ne veut pas non plus de mon temoignage. 

Puisque le Ministre veut me bloquer, je donne par telephone la liste des P.V. disparas a 
Monsieur Coveliers. 

Le Juge Lacroix est mande d’urgence ! 

La television et les medias s’emparent de la nouvelle... 

Tout le monde attend de savoir si je dis la verite. 

Gerard Rogge, de la RTBF, me telephone : 

-Ton document est un faux, fais attention ! 

Lorsque le Juge revient pour la deuxieme fois repondre aux questions de la Commission 
Parlementaire, il sourit a tout le monde : 

-J’ai absolument tout en ma possession, les dossiers etaient simplement mal classes. 
Discretement, le President Bourgeois et le Secretaire Coveliers se rendent alors au siege de la 
Cellule du Brabant Wallon. Ils reclament les dossiers disparas et... retrouves ! 

Le Juge Lacroix refuse sous les motifs de separation des pouvoirs. L’affaire n’ira pas plus 
loin... 

Monsieur Depretre, Procureur du Roi a Nivelles, reagit violemment a ma demarche. Le 13 
decembre 1988, il ecrit une lettre personnelle et confidentielle a Monsieur Wathelet. Il s’y 
plaint amerement des Deputes de la Commission Parlementaire et de leurs ragots : une 
inexistante affaire des Ballets Roses, l’Affaire Pinon. 

« Certains de nos Deputes seraient-ils devenus des voyeurs ou des pornographes ? » 

« Vraiment, ou va cette Commission, mais il y a pis encore. Un autre membre de cette 
commission a eu des contacts avec Bultot, un veule debauche qui a sali votre administration 
penitentiaire. Selon ce que lui a dit Bultot, j’aurais fais disparaitre des pieces des dossiers du 
Brabant Wallon, avant qu’ils ne soient transmis a Charleroi apres le dessaisissement du Juge 
Schliker... Vous comprendrez ma profonde indignation ! » 

L’annee se termine dans la confusion la plus to tale. 

Une nouvelle ne passe pas inapersue : 

Bouhouche est libere par la Chambre du Conseil qui estime que sa detention preventive est 
bien trop longue. 

Vers le 20 decembre 1988, deux traands attaquent la bijouterie Deville a Berchem-Ste-Agathe 
(Bruxelles). 



Un des homines braque une Riot-Gun. Ils frappent le bijoutier et s'enfuient avec un butin 
estime a 8 Millions de FB. 

Une cliente de la bijouterie se revele etre une complice. Elle avoue le nom du Chef de 
l'operation : Bruno Van Deuren. 

En lisant 1’article de presse, je ne peux m’empecher de constater la similitude d’action dans 
l'attaque de la bijouterie et dans l'affaire Dekaise ! 

Va-t-on enfin l’arreter a fin que la Commission Parlementaire tente d’en tirer quelque chose ? 
Le 28 decembre 1988, Bruno Van Deuren est assassine par babes dans le dos ! II ne parlera 
plus jamais ! 

L'annee 1988 se termine sur cette sombre constatation ! 

Au Paraguay, le temps s’ecoule paisiblement jusqu’au mois de fevrier. 

En pleine nuit, Dodo me telephone. Je dors chez Arlette. 

-Jean, maman vient de me telephones 

La presse beige annonce que le Paraguay vit une revolution. 

Je souris tout d’abord en pensant encore a une manoeuvre pour discrediter le pays. Mais 
j’entends au loin des bruits sourds de detonation et le son caracteristique des helicopteres. 

Vite un coup de fil a un journal local qui m’engage a ecouter la radio sur la frequence d’une 
radio-libre... 

C’est bien la revolution ! 

Je retelephone a Dodo en lui recommandant de ne pas sortir. Vers 5 heures, elle me 
retelephone : 

un char s’est installe devant sa maison et mitraille le commissariat de police. 

-Garde bien les enfants au rez-de-chaussee et restez a l’arriere de la maison. Tenez-vous 
eloignes des fenetres. 

La police va tenter faiblement de riposter et des eclats provoques par des babes de la police « 
oment » maintenant le mur du jardin. 

Le lendemain, tout est termine ! 

La revolution renverse le President Stroessner et le remplace par un de ses cousins par 
alliance : le General Rodriguez. 

Certains commissariats de police ont tente de resister aux blindes de Rodriguez mais sans 
grand resultat. 

Les degats les plus importants touchent la caserne de la Garde Presidentielle. 

Le lendemain soir, je m’endors chez Dodo en me disant qu’on ne risque plus rien. Les 
malfaiteurs, pro(itant de la paralysie de la police, redoublent l’intensite de leurs larcins et 
volent... ma camionnette. 

Mon pere nous envoie de l’argent alin de regler la deuxieme partie du prix de l’Estancia. 
Malheureusement, notre pature nous demontre ses carences et le betail ne grossit guere. Nos 
investisseurs commencent a tirer une sombre mine ! 

De plus, notre trio, Arlette, Dodo et moi-meme, n’est pas du gout de tous. Les plus critiques se 
revelent etre les Beiges installes a Asuncion. Les femmes font la fine bouche, les homines 
jalousent. 

Nous trouvons cependant de nouveaux amis bien sympathiques aupres de l’Ambassade 
d’Afrique du Sud ! 

Ils frequentent le boucherie que nous avons inauguree pres de la maison. 

Un boucher beige m’a en effet enseigne les rudiments de son art et si je decoupe, Dodo 
s'occupe de ses pates qui recueillent un franc succes. 

Je recois aussi la gerance d’une porcherie et Arlette s'occupe avec le veterinaire des soins a 
apporter aux trois cents pores. 

Mes parents reviennent nous visiter et la maman de dodo aussi. Aucun d’eux n’apprecie cette 



situation de bigamie. 

La situation commence a tirailler ! 

Les Francophones, a la difference des Allemands, ne pratiquent pas beaucoup le solidarity 
commerciale : la jalousie l'emporte souvent sur l’entraide ! 

La boucherie ne remporte que peu de succes. 

Quant a la porcherie, celle-ci me pose d’enormes problemes. 

Ayant visite une porcherie universitaire a Pilar, je suis tres interesse par les propos du 
directeur de recherche. 

II m'affirme qu'il nourrit ses pores uniquement avec de la coco pilee. Or, ce produit s'achete a 
un prix ridiculement bas. En comptant sur la valeur de ce temoignage, je vais perdre beaucoup 
de betes et done, beaucoup d’argent! 

Au mois de juin 1989, l’inauguration de la Foire Internationale d’Asuncion donne un peu 
d’animation dans le pays. 

Lors de ces rejouissances, j’obtiens un renseignement capital pour notre avenir : je ne suis pas 
fiche sur la liste d’Interpol d’Afrique du Sud ! 

Un film publicitaire video acheve de nous convaincre de la beaute du pays. 

Cest dit... nous vnedons tout et on recommence une nouvelle vie en Afrique du Sud ! 

Nous nous delectons de prospectus et nous ebauchons nos projets d’avenir. 

Mais... 

Le 20 septembre 1989, je re^ois un coup de fil etrange : 

-Monsieur Bultot, je m’appelle Lekeu et je vous telephone de Floride pour vous annoncer 
l'arriver de Beijer ! 

-Beijer, l'associe de Bouhouche ? 

-Oui, exactement! II a eu quelques ennuis en Belgique, mais il vous expliquera. II ne souhaite 
que quelques renseignements. 

Je telephone de suite en Belgique pour connaitre les dernieres nouvelles et j’apprends que 
Bouhouche et Beijer sont recherches pour un nouveau meurtre ! 

Le jour du printemps, soit le 21 septembre 1989, Beijer me telephone. Nous nous fixons 
rendez-vous dans le centre d’Asuncion, devant une banque. 

Des que je l’aper$ois, je me doute qu'il a rencontre certains problemes. Son bras estplatre, il 
porte des traces de coups sur le crane - on y voit encore du mercurochrome et il marche 
difficilement. 

Il est, en plus, pale a faire peur. Il me demande de l’aider a s'installer dans le pays. 

En fait, il est au Paraguay depuis plusieurs jours, et sa recherche s'etait portee sur Jean-Marie 
Paul qu'il n’a pas decouvert. Il ne lui restait plus qu'a me contacter. Je lui marque directement 
ma franche hostility a son installation dans le pays. En attirant l'attention des autorites 
judiciaires beiges et locales sur les exiles beiges, on ne recolte que des problemes, or nous 
voulons vivre en paix ! Par contre, je lui promets de l'aider a quitter le pays clandestinement et 
a brouiller les pistes s'il m’aide dans la recherche de la verite dans l'affaire Mendez. Nous 
allons nous revoir a differentes reprises pendant une semaine entiere. 

Il m'explique d’abord son nouveau probleme : 

-Bouhouche m’a demande de l'aider dans une action de recuperation de creances. Il s'agit 
d’aller expliquer a un Libanais qu'il a interet a payer ses dettes de jeu (en provenance d’un 
casino), s'il ne veut pas de tres gros ennuis. 

D'un air qui veut me convaincre, il poursuit: 

-Je n’etais pas tres chaud pour ce genre d’expedition, mais Bouhouche avait besoin d'argent. 

Or, la creance est de 2.500.000 Frs, et nous devons toucher 25% en cas de reussite de notre 
coup de gueule ! J'aurais du me mefier du salopard qui nous avait indique le coup ! 

Je tombe des nues, il m'indique... Le Gof lui-meme ! 

Il poursuit: 



-L'Arabe devait etre seul, mais le coup a ete donne, nous etions attendus ! Des notre entree a 
l'adresse indiquee, trois autres Arabes nous agressent. Je n’ai pas le temps de me defendre. Je 
suis directement groggy, car un des Arabes m’assomme avec une sculpture en come 
d’elephant. Lorsque je me reveille, Bouhouche me traine vers la voiture. II m’explique que 
pour se degager, il a du tirer et il pense qu’il y a un mort. 

Je suis vite parti a l’hopital Saint-Pierre pour mon bras qui a ete pietine, et ils m’ont soigne 
sous le carnet de mutuelle de ma femme. Ensuite, Bouhouche et moi, nous nous sommes 
refugies en Espagne. La, je me suis rendu a l’hopital de Torremolinos ou le medecin m’a 
change le platre qui bougeait. (Il me montre l’attestation redigee en anglais, du medecin de 
Torremolinos qui atteste de la blessure de Beijer). Lui, voulait partir aux U.S.A., moi j’ai 
prefere le Paraguay ou personne n’imaginera que je me trouve ! 

Seulement lorsqu’il quitte l’Espagne, il prend l’avion sous son veritable nom. Aussi, depuis le 
23 septembre, toute la presse beige est suspendue a mon telephone. Au debut, je nie avoir 
rencontre Beijer, ensuite, je declare qu’il est deja parti. Beijer me parle aussi de V Affaire 
Mendez : 

-L’affaire Mendez nous a ete commanditee par la Surete de l’Etat, sous l’ordre direct de Jean 
Gol ! La raison en est un livraison d’annes a un Americain, appele Stowell, mais je n’en sais 
pas plus ! 

Je demande : 

-Qui a tire ? 

-Ce n’est pas moi ! 

-Cest done Bouhouche ? 

Il incline la tete en signe d’acquiescement, mais il ajoute aussitot: 

-Mais je ne denoncerai jamais quelqu’un qui vient de me sauver la vie ! 

Apres une demiere reunion avec Jean-Marie Paul et moi-meme, Beijer nous quitte en passant 
« en douce » le Puente de l’Amistad, qui relie le Paraguay au Bresil. 

Avant de partir, j’achete une lime et lui coupe son platre... il etait trop reconnaissable ! 

A la maison de Dodo, notre belle complicity commence a se degrader comine une peau de 
chagrin. Les disputes apparaissent, et prennent un rythme effrayant. Meme l’idee de depart 
vers l’Afrique du Sud ne rend plus le sourire. 

Soudain, le coup de tonnerre : Dodo decide de rentrer en Belgique. 

Je ne comprends pas, je ne comprends plus ! 

Aucune discussion ne peut la faire changer d’avis ! Je suis aneanti ! 

Au mois d’oetobre, Arlette me declare aussi sa volonte de rentrer en Belgique. Elle en a marre 
de moi, de la chaleur du pays et de l’exil. Cyriaque veut m’accompagner, mais je le raisonne : 
l’Afrique du Sud est encore un sol inconnu ! Je le convaincs de rentrer avec sa maman qui me 
promet formellement de ne jamais rien faire pour me separer de mon fils ! 

Le 14 novembre 1989, Arlette et Cyriaque quittent le Parguay. 

Le 21 novembre 1989, j’en fais de meme pour l’Afrique du Sud. 

Le 28 novembre 1989, Dodo et ses enfants rentrent en Belgique. 

Je suis seul! 

Pendant 10 heures, l’avion me transporte d’Asuncion vers Loz de Iguagu, puis decolle a 
nouveau pour Sao Paulo. Nouvel envoi pour Rio de Janeiro ! 

A l’aeroport, apres deux heures d’attente, je monte enfin dans le Jumbo de la South African 
Airlines... je foule deja le territoire de ma future patrie d’apotion. 

Pourtant, cette nouvelle solitude me terrasse ! 

Un nouvel atterrissage a Cape Town, dernier saut jusqu’a Johannesbourg. En sortant de 
l’avion, mes pas me dirigent lourdement vers le controle douanier. J’ai des raisons de craindre 
certains ennuis : pourvu que l’informatique rccuc de l’Ambassade d’Afrique du Sud au 
Paraguay concernant l’absence de mon nom dans le fichier d’lnterpol se revele exacte ! 



Je me balade avec mon passeport beige dont j'ai... trafique... legerement la prolongation de la 
validite. Mon sceau de radministration communale de Saint-Gilles ressemble presque 
parfaitement a l'original. 

Pour faire vrai, le nom du fonctionnaire cense representer cette dite administration est 
rebaptise : J. Martens : Pour signer cette oeuvre d’art de mon prenom. 

Martens : Pour rappeler le nom du premier ministre de la Belgique. 

Le policier prend mon passeport, l’ouvre... me devisage... tape son information dans 
l’ordinateur. 

Coinme mes mains tremblent, je les dissimule rapidement dans mes poches ! 

II me regarde a nouveau, puis... : 

-Welcome to South Africa, Sir ! 

Mon coeur bat la chamade, mes talents de faussaire m’ouvrent les portes du paradis ! 

Je m’arrete au buffet pour deguster une petite bouteille de champagne. 

Ma premiere boisson d’homme libere des frontieres du Paraguay. 

Je suis libre, mais seul ! 

Ce premier verre que nous aurions du prendre tous ensemble, me semble tellement amer. 

A quoi sert la liberte sans amour ? 

Apres quelques contacts avec l’extreme droite locale, je trouve rapidement du travail coinme 
instructeur de combat chez Monsieur Bartmann, Directeur General des Sprinkbok Patrols. 
Mon travail consiste a instruire une centaine de Noirs par mois alln qu'ils soient a meme de 
manier correctement une riot-gun. 

La finne qui compte six mille membres du personnel, est specialisee dans la protection des 
camions qui sillonnent les quartiers noirs sud-africains. 

Un camion, transportant meubles, pain ou biere est irremediablement attaque a Soweto, 
Kagisa, Sebokeng etc... s'il n’est pas protege par un garde arme, et bien arme ! 

J'ai informe correctement mon patron de ma situation. Cette franchise lui va a ravir, il m’a fait 
confiance et me voila ainsi Patron Technique de la branche armee de la Societe : 1500 Night 
Riders ! 

Les pertes sont lourdes. 

A mon arrivee a la Compagnie, les tues se chiffrent a pres de 150 homines par ans, dont la 
moitie se tuent eux-meme par mauvaises regies de securite personnelles. 

Je suis en Afrique du Sud ; afin de ne garder que les types valables, je vais employer une 
methode ... musclee ! 

R.T.L., depeche sur place, fera reportage de ma methode musclee mais malheureusement, le 
reportage omet de dire que je ramene le chiffre des pertes de 160 a 80 homines en une annee, 
avec un staff augmente de mille personnes. 

Si un Noir a peur de mes coups a l’entrainement, il sera incapable de reagir a une attaque de 
groupe. Le patron me suit dans mon optique. 

Depuis mon arrivee en Afrique du Sud, et devant ma solitude, je decide de consacrer ma vie a 
mon fils. Malheureusement, ses lettres se font rares. Je depense beaucoup d’argent en 
telephone, mais Arlette commence a couper tous les contacts. Lorsque je telephone a 
Cyriaque chez les parents d’Arlette, ils me raccrochent au nez, m’empechant de lui parler ! 

En decembre 1989, je decris le pays a Arlette et les possibility de travail pour elle. Elle refuse 
de venir... elle continue a mettre des barrieres entre Cyriaque et moi. Il m'ecrira sa derniere 
lettre le 7 fevrier 1990. 

J'ai repris aussi contact avec Dominique. Bien que je lui en veuille terriblement de notre 
separation, elle me manque cruellement. Je sens que de son cote, l’eloignement lui a ouvert les 
yeux et nous devons nous incliner devant la force de nos sentiments. Au mois de fevrier, je la 
convaincs de venir me rejoindre. Ses parents et ses enfants s’inclinent devant notre amour. 
Dans le cadre de mes nouvelles amities en Afrique du Sud, j'ai appris a connaitre les Boers. 



L'acces a leur coeur n’est guere aise mais je suis surpris de l’honnetete viscerale de ces gens. 
Beaucoup s’inquietent des mesures du nouveau President De Klerk. 

Je rencontre ainsi des Blancs en provenance du Congo beige, d’Algerie, de Namibie, de 
Rhodesie et du Mozambique. 

Partout chasses des qu’un pouvoir noir s’installe, ils savent tous que l’Afrique du Sud reste le 
dernier bastion africain ou, le fait d'etre blanc, reste une fierte et n’est pas punissable de tous 
les peches du colonialisme ! 

Les Blancs d’Afrique du Sud y sont installes depuis plusieurs centaines d’annees. 

Ils ne comprennent pas l’acharnement du gouvernement blanc americain a vouloir les chasser 
de leur patrie. 

Des que les Americains blancs ou noirs auront quitte le territoire de l'Amerique pour le 
restituer aux Indiens, ils pourront se permettre de faire des remarques ! 

Je me sens done tres proches de ces gens qui refusent d’etre chasses d’avantage de leur pays 
car moi aussi, j’ai ete chasse du mien ! 

Je milite des lors dans une frange dure d’extreme droite. 

Depuis la liberation de Mandela, les blancs d’extreme droite sont mecontents des nouvelles 
luttes raciales que cette grace a declenchee. 

Par contre, a mon travail, on ne sait plus ou donner de la tete. La tournee triomphale de 
Mandela en Europe et aux Etats-Unis rendent les Noirs beaucoup plus oses et agressifs vis a 
vis des blancs ! 

Le leader noir peut se targuer d’etre le seul communiste adule par les pouvoirs capitalistes 
alors que le communisme blanc s'effondre partout a l'Est! 

Lors d’une manifestation noire programmee par l’A.N.C. (parti de Mandela), certains cadres 
decident d’occuper l’autoroute au sud de Johannesbourg. Les esprits s'echauffent et une 
voiture, piegee par les manifestants, est videe de ses quatre occupants blancs. 

Le spectacle est horrible, ils sont massacres au panga (sorte de machette). Pas un seul journal 
europeen ou americain ne se fait l’echo de ce massacre... il ne s'agit que de Blancs ! 

Je decide de donner des cours de tir et de self-defense aux membres du parti. 

En un an et, partant de zero, j’aurai la joie d’avoir forme es instructeurs qui, eux-memes 
donneront cours a pres de six mille personnes. 

Le 13 mers 1990, alors que je telephone a Dominque, elle s’interrompt aussitot pour me dire 
que ma photo est sur l’ecran televise. Le journal televise de 19 heures se deroule avec cette 
information principale : Monsieur Wathelet, Ministre de la Justice, a demande mon 
extradition aux autorites d’Afrique du Sud. 

Je recois la depeche cornme une nouvelle douche froide, mais quand va-t-on enfin me foutre 
la paix ? 

Dominique ne change rien a ses plans... si je dois entrer dans la clandestinite, elle se battra a 
mes cotes. 

En raccrochant le combine, et malgre l'horrible information, je souris beatement. 

Dodo, non plus Dominique, mais ma Dodo est de retour ! 

Le 16 mars, 1990, elle me telephone du bureau d’un journaliste fantastique Rony Driessmans, 
du journal « Het laatste Nieuws ». 

Je lui dis que je pense avoir solutionne mon probleme judiciaire car j’ai trouve quelqu'un a 
epouser. Un long silence me repond, puis d’une petite voix resignee : 

-Tu as trouve une Sud-Africaine a epouser pour eviter l’extradition ? 

-Pas exactement... mais... veux-tu m'epouser ? 

-Mais, mais... 

-Dodo, c'est tres serieux ! Veux-tu m’epouser ? 

-Ouiiiiiii ! Un cri de joie ! 

Le journaliste ne comprend pas le joie de Dodo d'autant plus qu’il s'apprete a m’interviewer 




sur mes sentiments apres l’annonce du Ministre ! 

Je suis tout fou et tout heureux ! Je vais me marier ! Avec Arlette, nous avons vecu en union 
libre pendant 15 ans et Cyriaque porte son nom de famille. Mais cette fois, c'est bague au 
doigt ! 

Dodo telephone toute folle a ses parents : 

-Jean veut m’epouser, il m’a demandee en manage et j'ai dit oui ! 

-Ici, les flics perquisitionnent! Ils sont envoyes par le Juge Bulthe ! 

La Justice beige a encore firappe ! 

A propos de la Justice beige, je raconte partout en Afrique du Sud, une blague qui me provient 
de Pepe : « Un beige visite la Suisse. II s'informe aupres d’un homme du era : « comment est- 
ce possible d’avoir un ministre de la Marine en Suisse ? » Le Vlaisan lui retorque : « Vous 
avez bien un ministre de la Justice en Belgique ! » » 

En Belgique, la Justice vient de decouvrir les paquets que Dodo et Arlette ont envoyes du 
Paraguay en novembre 1989. 

Dans les boites dArlette, et selon notre accord, j’avais inclus mes affaires personnelles et 
certains documents. Coinme par hasard, un sac en polyethylene s’ouvre. 

A l’interieur de ce sac, le boite en carton s'ouvre « aussi » pour laisser juste apparaitre un 
document. 

Le douanier « vigilant » remarque ce document secret et appelle les autorites judiciaires. 
Decidement, le ridicule ne tue pas en Belgique ! 

Un de mes infonnateurs est des lors identifie : 

Jacques Lagasse de Locht, etudiant en joumalisme. 

II est aussitot arrete ! Motif: recel de documents judiciaires ! 

Aussitot, le Juge Bulthe ordonne une perquisition chez Dodo. 

A la requete du Groupe Delta de Tennonde, le meme Juge leur fait envoyer ma machette que 
j'utilisais a l'Estancia. Le Groupe Delta veut analyser « l’arme » pour savoir si elle n'a pas 
servi dans des tueries... 

En Afrique du Sud, R.T.L. et Ronny Driessmans viennent m'interviewer apres l’annonce du 
Ministre Wathelet annoncant la demande d’extradition. 

Le ler avril, je quitte mon travail, je veux me marier ... libre ! 

Le 10 avril, Dodo debarque a Johannesbourg. Des amis l'attendent et ils utilisent des 
subterfuges pour l’amener jusqu'a moi. Nos retrouvailles sont fantastiques, malgre les 
evenements, nous soinmes les plus heureux du monde ! 

Le 15 avril 1990, nous recevons une fausse infonnation selon laquelle un mandat d’arret serait 
lance contre moi. 

Le 16 avril, nous nous rendons chez des amis pour les saluer avant notre depart au 
Bophutatswana. Nous leur faisons part de notre regret de n'avoir pas pu nous marier. En un 
clin d’oeil, nos amis trouvent un Pasteur officiel et reconnu par l'Etat civil. 

Je vais le chercher a Pretoria et, le soir, devant les amis et la maman de notre hotesse, nous 
prononcons le « ja » fantastique en Afrikaans ! 

Dodo est devenue Madame Bultot! 

Nous passons notre nuit de noce sur les coussins du salon et pendant la nuit, les chats de la 
maison celebrent la fete a leur maniere en pissant copieusement sur nous. 

Le lendemain matin, nous partons vers notre nouvelle destination ! 

Nous soinmes fous de bonheur et personne ne nous le conteste, personne n'est jaloux ! 

Apres un bref sejour au Bophutatswana, nous decidons d'affronter le risque de mon arrestation 
et nous rentrons en Afrique du Sud. 

Je reprends contact avec mon patron qui me reemploi aussitot et qui prend Madame Bultot a 
l’essais. 



Nous vivons des mois merveilleux ! 

Suite au terrorisme grandissant en Afrique du Sud, les Blancs suivent de plus en plus les cours 
prodigues par mes moniteurs. 

Un groupe nouveau surgit et me demande une aide plus speciale. Les dirigeants m’exhortent a 
entrainer ses membres a des actions commandos. Un commissaire de la Surete du pays vole 
des armes a une caserne et prend le maquis. 

II s'appelle Rudolf Piet Skiet. 

II envoie ensuite une bande video aux differents medias ou il declare la guerre au 
Gouvernement. Sur cette video, il est entoure par quatre homines armes et en cagoules. J'ai un 
pincement au coeur, car il s'agit d'hommes que j'ai entraines ! 

Les Boers sont resolus a des actions desesperees, le monde les hait et veut leur imposer un 
neo-communisme a la Mandela. 

Un soir, le groupe se reunit pour preparer un plan afin de prevoir T elimination physique de 
certains membres du Gouvernement et de Mandela. 

Certains de nos supporters Grangers participent egalement a cette reunion dont un envoye de 
1'I.R.A. 

J'emets mon propre plan : l'utilisation de mortiers dont Tangle de tir serait prealablement 
etudie grace aux cartes d’Etat Major dont Techelle est tres precise. Suite a un calcul 
preliminaire, le mortier devrait etre fixe sur un certain angle en fonction de Tenvoie des 
projectiles. 

Le projet ne sera pas retenu... tout au mo ins en Afrique du Sud... neanmoins, un mois plus 
tard, cette technique est utilisee par 1'I.R.A dans une attaque contre la maison du premier 
ministre en plein coeur de Londres... 

Dodo et moi-meme allons vivre heureux comine nous l’avons jamais ete ! 

Une seule grande ombre a mon bonheur : malgre plusieurs lettre, mon fils ne me repond pas. 
Le 6 novembre 1990, a 14 heures, alors que je me rends au bureau du patron, deux policiers 
m’arretent. 

Ils sont porteurs d’un mandat d’arret en vue de mon extradition. 

Ils veulent me passer les menottes, mais je leur donne ma parole de ne pas m’enfuir, mon 
patron appuie ma requete. Soit, ils ne m’enchainent pas ! 

Lorsque j’embrasse Dodo qui, maintenant est devenue un personnage important de la 
compagnie, nos yeux se croisent et malgre notre detresse, je sens que nous allons nous battre ! 
Je suis embarque au commissariat de police de Kempton Park. 

Les inspecteurs m’expliquent que la Belgique, n’ayant pu fournir aucune indication quant a ma 
localisation, ont remonte la filiere en constatant mon mariage dans la commune de Kempton 
Park. 

Je marque Tetonnement. 

Toute la presse beige s'etait faite l’echo de mon travail d’instructeur aupres de la finne 
Sprincbok-Patrols et le gouvernement beige feint de Tignorer ! 

Vers 18 heures, un capitaine me declare que je suis fibre ! 

Il m'explique que mon patron a donne sa parole que je ne tenterai pas de m'enfuir. 

Plus tard, j’apprends qu’il y a eu une discrete intervention d’un service du Ministere des 
Affaires Etrangeres... 

Les policiers me raccompagnent meme en voiture jusqu'au bureau du patron. L'espoir renait ! 
Le Boss a mande son avocat a qui j’explique mon cas. Il me promet de tout essayer et 
Monsieur Bartmann m'indique sa volonte de faire jouer ses hautes relations. 

Je propose a ma femme de nous rendre dans un restaurant pres du lac ou nous habitons. 

Nous voila, en tete-a-tete, en amoureux, devant ce magnifique decor. 

Nous avons tout pour etre heureux, tout sauf la citoyennete d'un pays a la Justice propre. 

Je ne veux plus voir Dodo aux aguets, je ne veux plus de fuite. Malgre les huit ans de prison 



qui m’attendent et peut-etre une ou des inculpations pour meurtre. 

C'est decide, je me rends demain aux autorites ! 

Devant cette decision lourde de responsabilite, nous gardons un moment le silence ! Le lac est 
si beau et majestueux mais il ne parvient pas a effacer les images qui se presentent a l’esprit: 
des barreaux, des menottes ! 

Le lendemain matin, apres une demiere promenade la main dans la main, nous nous rendons 
chez l'avocat qui nous conduit au tribunal. 

Dodo parle : 

« Nous marchons dans les rues, main dans la main, et Jean me dit que c'est certainement notre 
derniere promenade ensemble avant longtemps. Le ciel est d’un bleu pro fond, le soleil 
commence a chauffer, les gens sont gais autour de nous, nous pourrions etre si bien... 

Un peu plus tard, dans la voiture qui nous conduit au tribunal de Kempton Park, l'avocat nous 
explique comment les choses vont se derouler. 

Je vois Jean dans le retroviseur, il est tendu, mais tres attentif. 

J'ai conliance en lui, mais... et moi ? 

Toute la nuit, nous avons parle, Jean et moi de sa decision. 

En paroles et avec ses bras rassurants autour de moi, cela ne me semblait pas trop difficile, 
mais maintenant... l’idee qu'il va a nouveau etre enferme, humilie, l’idee de ces longues heures 
que je ne manquerai pas de passer dans les salles d'attente des prisons pour le voir au travers 
d'une vitre pendant juste une demi-heure, l’idee surtout de ne pas savoir combien de temps 
cela va durer, tout cela me donne le vertige ! 

J'ai brusquement envie d’arreter tout, la voiture, le flot de paroles de Maitre Blake, le temps 
qui file... Je veux crier a Jean de fuir, qu'il n'y aura pas de Justice, que j’ai peur de l’avenir, de 
demain, de la minute qui va suivre si je dois la passer sans lui. Je mets la main sur son epaule 
et je sers tres fort, je vais lui parler... il se retourne vers moi, les yeux trop brillants... nous 
nous regardons longtemps, sans rien nous dire et dans cette conversation muette, il m'impose 
a nouveau sa decision et me supplie de l’epauler. 

Je m'incline definitivement devant ce choix terrible qu'il fait pour moi, je m’enfonce dans le 
fauteuil et, chose exceptionnelle, je ne dirai plus rien jusqu'au tribunal ou nous nous 
murmurerons une demiere fois cette phrase si banale et si pleine de sens : « je t'aime ». 

A l'audience, cela se passe assez vite. La solennite, l'hypocrisie et la froideur de la Justice sont 
internationales et identiques dans tous les pays du monde ! 

A la fin de l’audience, le bruit des menottes que Ton refenne sur le poignet de mon mari me 
bouleverse : jamais je ne pourrai m’habituer a ce claquement horrible qui, pour moi, bien plus 
que des barreaux devant une fenetre, est synonyme de privation de liberte ! 

Je me retrouve dans le couloir, seule, si seule dans ce pays tout d’un coup plus etranger. 

Les lannes coulent et j’en rage sans pour autant pouvoir les arreter. 

Tant mieux, la colere et la revoke sont depuis 5 ans mon meilleur soutien, le moteur de mes 
guerres, le seul probleme etant que je n’arrive pas toujours a limiter mon agressivite sur le 
point bien precis qui le merite. 

Je hais le monde entier pendant de tres longues minutes, d’une haine devorante et devastatrice. 
Lorsque Maitre Blake me rejoint et comprend mon etat, il s'empare gentiment de mes mains 
qui tremblent et me parle dans une langue que je ne comprends plus. 

Comine je reste figee devant la porte ou Jean vient de disparaitre, il me prend alors d’autorite 
par les epaules et m’entraine au dehors. 

Je demande a voir mon mari, tout de suite ! 

Normalement, c'est tout a fait impossible, mais je me montre tellement chi...et decidee que 
l’avocat m’accompagne aupres du commissaire en chef de la Police de Kempton Park ou Jean 
sera detenu pendant quelques jours. 



Cet homme se montre humain et tres fin : derriere mon ton cassant, desagreable et autoritaire, 
il devine ma detresse. 

II me donne l'autorisation de parler avec mon mari pendant 20 minutes et meme, je pourrai 
revenir le visiter chaque jour, lui apporter des vetements propres, du savon, un peu de 
chocolat. 

Du coup, mes remparts sont prets a ceder, et je sens a nouveau les larmes venir. Jean ne 
s'etonne pas du tout de me voir : 

-J'etais sur que tu parviendrais a obtenir une visite ! 

Durant ce premier entretien de detenu en Afrique, nous allons donner le ton de toutes nos 
conversations pour les mois a venir : une incroyable complicity s'etablit entre nous, que ni les 
vitres, ni les barreaux ne pourront casser. 

II y a une bataille a livrer ensemble et nous allons la gagner ! 

Je sens une force fantastique m’envahir au contact de mon mari et je le quitte « gonflee a bloc 
» souriante et presque chantante devant les yeux ahuris de Maitre Blake qui, decidement, ne 
comprend vraiment rien au « mode d’emploi » des femmes europeennes ! » 

Le President du tribunal ordonne mon arrestation en attendant de sieger pour une decision 
concernant une liberation sous caution. 

L'avocat demande directement une copie du dossier envoye par la Belgique ! 

Apres l’avoir lu, je suis heureux d'avoir pris la decision de me rendre. 

Noir sur blanc, ce dossier demontre que le Ministre Wathelet est un menteur ! 

Devant les cameras de television, il a declare le 13 mars 1990 qu’il avait demande mon 
extradition aux autorites sud-africaines, or... la traduction du dossier que la Belgique doit 
envoyer ne s’est terminee qu’au mois de juillet 1990 ! 

Le ministre m’a ainsi laisse tout le loisir de m’enfuir ! On ne demande pas avec autant de 
publicity l’extradition d’un homme qui est toujours en liberte et qui fut sumomme : le fugitif! 
Je renonce a toutes les possibilites d’appel et demande l’acceleration de la procedure 
d’extradition. 

En Belgique, la presse est deroutee mais m’accorde un bon point ! 

Les autorites judiciaires de Kempton Park m’envoient a la Centrale Penitentiaire de 
Diepkloof... 6000 detenus ! 

Coinme toutes les centrales du monde, le caidat est a l’honneur ! Il faut jouer des poings et 
savoir se faire respecter ! 

Lors d’un retour de detenus du palais de Justice de Johannesburg, un ancien de la legion 
etrangere m’aborde : 

-Cest toi Bultot ? 

-Oui, pourquoi ? 

-Je ne comprends rien, mais on a laisse entrer un type dans mon cachot au palais. Le type est 
francophone et a les cheveux plus ou moins en brosse ! Il m’a dit de te dire qu’il allait te faire 
evader entre ta sortie de prison et l’aeroport! Puis, il a frappe a la porte du cachot et il est 
sorti. Tu y comprends quelque chose, toi ? 

Je dois dire que je suis estomaque. Avant mon arrivee a la centrale, j’avais recu la visite de 
quelques amis politiques et fait part a la direction des commandos speciaux que je rentrais en 
Belgique de mon plein gre ! 

Il y a une entourloupe ! 

Des que je vois Dodo, je lui explique le danger : 

-En Afrique du Sud, la police est autorisee a tirer sur un fuyard ! 

Elle se bat comrne une lionne et avertit la presse par voie de lettre ouverte au ministre ! 

J’ai l’impression que ce dernier doit deja regretter son brillant mensonge du mois de mars ! 

Je suis place en section plus surveillee. 



Dodo part la premiere en Belgique alin de preparer ma defense. Elle explique a la presse ma 
volonte de venir m'expliquer et je l’envoie meme chez mes pires detracteurs. Mais depuis les 
deballages devant la Commission Parlementaire, les journalistes remettent certaines « bonnes 
sources » en question. 

La presse apprecie mon geste courageux et l’ambiance n’est plus aussi negative. 

Le 15 decembre 1990 

A 13 heures, quatre grosses voitures de la police secrete s'arretent devant le greffe de la 
Centrale. 

Elies sont occupees par 14 super-flics sud-africains ! 

On me menotte inconfortablement en me passant les poignets sous les genoux ... et nous 
parcourons 80 kilometres. 

Arrive a Waterkloof, aeroport militaire, je remarque directement un Cl30 Hercules (avion 
transporteur militaire) aux couleurs de la Force Aerienne Beige. Des que je suis extrait du 
vehicule, les pilotes et gendarmes beiges me mitraillent de leurs appareils photos. 

Je suis amene dans un petit local. 

Les policiers sud-africains me remettent aux mains des gendarmes beiges. 

Le lieutenant beige s'approche de moi: 

-Deshabillez-vous completement! 

Cette phrase me rappelle ce que j'ai du endurer au Paraguay par la faute de flics beiges. 

C'est done par cet ordre degradant que je reprends contact avec la Justice beige. 

Apres la fouille, un homme a lunettes s'approche de moi : 

-Veuillez signer ce document ! 

II me tend un papier avec cette inscription : « Je reconnais que je suis sain de corps et d’esprit 

». 

J'accepte de signer a condition de non seulement marquer la date, mais aussi l'heure. 

Par ce document, j'ai ainsi la preuve de ma remise aux autorites beiges. 

Ils ont maintenant 24 heures pour me signifier mon arrestation immediate ! 

Apres m’avoir fait signer ce papier, le docteur et les gendarmes entrent dans un mutisme 
surprenant. 

Soudain, la porte s'ouvre et l'attache d’ambassade beige fait son apparition. II m'apprend 
courtoisement que je vais etre extrade par avion militaire et que je pourrai recevoir le 
Walkman et la cassette que Dodo lui a remis pour mon voyage. 

L'idee d'avoir la voix de ma petite femme pendant le voyage me donne du reconfort et apres 
une poignee de mains qui surprend les gendannes, l'attache me quitte pour rejoindre la piece 
attenante d’ou emane un solide brouhaha. 

Un drink est en effet offert par l’Afrique du Sud aux autorites beiges ainsi qu'aux pilotes afin 
de mieux renforcer l'amitie de la « Nouvelle » Afrique du Sud et de la Belgique. 

Je constate avec mon esprit frondeur que la fete se deroule grace a moi et plein de fausse 
pudeur, je demande au lieutenant de gendarmerie s’il ne pourrait pas m’apporter un dernier 
verre de ce bon vin sud-africain, mais insensible a la plaisanterie, il me decoche un « Te faut 
te taire » qui... abreuve ainsi ma volonte de ne pas me laisser intimider par sa suffisance. 
J'entrevois deja un voyage d'enfer mais fort de l’amour de ma femme et fort de mon 
innocence, je decide de ne pas leur offrir l’image d’un homme vaincu mais au contraire celle 
d'un homme qui lutte de toutes ses forces pour son innocence. 

Je garderai cette attitude tout au long de mon proces mais je dois admettre qu'elle fut souvent 
dure a tenir quand l’emotion vous etreint et qu'il faut « paraitre » devant le public. 

Le drink etant termine, les gendannes me menottent dans le dos, et un gendanne a gauche et 
l'autre a droite, ils m’empoignent litteralement sous les aisselles. 

Nous sortons sous le crepitement des appareils photographiques des reporters sud-africains 



mais aussi sous les declics de membres de l’ambassade et merne de l’equipage de l’avion, la 
bete enchainee est enfin presentee au public. 

Une rage immense me submerge instantanement mais je vais paraitre et me battre a ma facon. 
Je prends done un air detache et peu avant d’arriver a l'avion, je m’arrete brusquement sous 
l'air etonne de l'assistance et je lance au lieutenant: « Pas si vite, il y en a qui n’ont pas fini 
leur film ». 

Un instant meduse, le lieutenant reprend vite ses esprits et je franchis les demiers metres sans 
presque toucher le sol. 

A tel point que je suis quasiment charge comine un colis dans l’avion. 

A l’interieur, cette fois, et malgre tout mon courage, la vision d’une cage a singe au beau 
milieu de l'avion et comine unique fret, m'amene les larmes aux yeux. 

Cette fois-ci et avec hargne, j'eructe vers les gendarmes : 

-Mais, bande de cons, vous ne savez pas que je me suis rendu et que si je rentre en Belgique, 
c'est parce que je me suis livre ? 

Le lieutenant me repond avec sa suffisance qui commence serieusement a me taper sur les 
nerfs : « En fonction de votre attitude, on verra ce qu'il faut faire ». 

Je suis amene cependant vers un siege de toile a l'avant du gros transporteur, a l’endroit ou se 
retrouvent trois ou quatre hublots. 

Un gendarme me retire les menottes que je porte dans le dos et qui ont mechamment entaille 
mes poignets. 

II me replace directement un bracelet de menotte au poignet droit et il fixe une chaine 
d’environ cinquante centimetres a l'autre bracelet. Il paracheve son systeme en fixant un 
bracelet d’une autre paire de menottes a l’autre extremite de la chaine et le deuxieme bracelet 
est fixe au pied de mon siege. 

Je ne suis pas dans la cage mais au lieu d’un fauve ou d’un singe, je suis enchaine coniine un 
perroquet a son perchoir. 

Un membre de l’equipage s'approche de moi et me remet un petit emballage qui revele une 
paire de boule quies. 

Je demande a pouvoir disposer plutot du walkman, mais le lieutenant me declare que Ton 
verra plus tard... 

Le membre de l’equipage m’engage a les mettre directement car le decollage est maintenant 
imminent. 

Effectivement, le premier moteur est lance et la carlingue vibre tellement par le bruit 
assourdissant que malgre ces protections dans l’oreille, le bruit se revele a la limite du 
supportable. 

Que dire alors lorsque les quatre moteurs vrombissent ensemble ! 

Lentement, le gros avion pansu qui devient ainsi ma premiere prison roule vers le debut de la 
piste. 

Au fur et a mesure qu’il s’approche du moment de decollage, mon coeur se serre et une pensee 
effroyable m’obsede : 

« Ai-je fait le bon choix et ne suis-je pas tout simplement en train de me mettre moi-meme la 
tete sous le billot ? » 

L'idee de Dodo en train de me regarder amoureusement et avec fierte me requinque et de plus, 
mon fils ne va-t-il pas me revenir ? 

L'idee de ce proces m’a obsede pendant des annees, ce combat, je vais enfin le mener et je 
veux surtout le gagner. 

Mes pensees s'arretent avec l’ebranlement particulierement lent du gros transporteur pour son 
decollage. 

La piste n’en finit pas de se derouler sous ses roues et je m’inquiete de savoir si la piste est 
assez longue vu l'acceleration tres modeste qu’il me semble percevoir. 



Nous decollons ! 

Les yeux rives au hublot, je vois cette magnifique terre d’Afrique disparaitre lentement. J'ai 
mal, je creve de mal en voyant l’evanouissement de cette terre qui m'a donne tant de joie et 
d’amour. 

Au revoir, mon Afrique, je te jure que je reviendrai avec ma femme, car c'est ici que nous 
aurons le bonheur ! 

Brusquement, je me sens dans un etat de lassitude extreme, je cesse de regarder par le hublot, 
je mets ma tete entre les mains et je reste ainsi prostre sans savoir combien de temps cet 
immobilisme me tiendra. 

Le bruit d’un plastic que Ton dechire me sort de ma torpeur. 

Un gendanne deballe une grande boite pleine de cannettes de boissons. II y a la des cocas, des 
eaux et meme de la Jupiler. 

Les gendarmes se servent une eau, tandis que le medecin s’octroie une biere. Un gendanne me 
demande si je desire une boisson et je lui confie qu’une biere beige apres de si nombreuses 
annees me ferait plaisir. 

Apres un coup d’oeil interrogateur a son superieur, il me presente une cannette de Jupiler. Je 
sirote lentement ma boisson et je m’interesse au decor de ma prison volante. 

La premiere moitie de l’avion, partie avant, ou je suis enchaine, recele done ma cage, qui 
presente une surface approximative de trois metres sur quatre. Je saurai bien plus tard, lors 
d’un meeting de la force aerienne, que cette cage sert de depot pour les deux roues su 
personnel de la base aerienne militaire de Melsbroek. 

La cage possede une civiere de secourisme et son coin arriere droit comporte un W.C., me dit¬ 
on, cache par une couverture tendue entre les deux pans de la cage. 

En face de moi, juste au centre de l'avion, des lanieres supportent d'autres civieres dont l'une 
est actuellement occupee par le medecin. 

A part mes trois pandores et le medecin, il y a outre l’equipage, un militaire de la force 
aerienne assis de l’autre cote de l’avion. 

Il me fait face mais nous sommes separes par les civieres aeriennes. Il evite d’ailleurs 
soigneusement mon regard. 

En dessous des civieres, des boites contenant outre les boissons, la nourriture necessaire pour 
le voyage ainsi que les bagages de mes trois gendarmes d’elite et du medecin. 

Quant a la seconde partie de l’avion ... elle est vide ! 

La biere ingurgitee, je demande a 1’officier de pouvoir satisfaire un petit besoin naturel. 

A peine ai-je emis ce souhait qui me semble tout naturel, que l’atmosphere se tend en un 
instant. 

« Vous etes sur que vous devez pisser ? » me retorque-t-il sur un ton peu amene ! 

« Ben, oui, je ne vois pas ce qu’il y a de mal a cela ! » 

Les gendarmes se levent alors tous le trois et commencent le plus tragi-comique reality-show 
qu’il me fut donne de connaitre. 

L’officier et un de ses homines se mettent un peu en retrait et degrafent la surete qui maintient 
leur arme dans le hoster. 

Je suis serieusement ebranle par ce manege, tandis que le troisieme detache la menotte qui 
relie ma chaine au siege. 

Il m’indique qu’a deux metres de moi se trouve une sorte de clapet vide-ordure qui est l’urinoir 
de l’avion. 

Il lache la chaine et je me retrouve devant cet urinoir vie-poubelle avec au poignet droit une 
paire de menottes reliees a une chaine, elle-meme reliee a une autre paire de menottes ! 

Mais a peine m’a-t-il lache, que ce dernier gendarme procede au meme cinema que ces 
collegues et je me retrouve ainsi avec devant moi un urinoir peu ragoutant et derriere moi 
avec trois gendarmes qui me lixcnt intensement avec tous trois, la main sur leur pistolet G.P... 



Bloque, je suis bloque ! 

J'essaye tous les trues possibles, j’imagine un robinet qui coule, les chutes d’eaux du Bresil, le 
Niagara, bref tout ce qu'on peut imaginer pour aider la nature... rien n'y fait ! Je me retourne 
passablement enerve et humilie, et leur demande un peu plus de discretion pour me permettre 
de pouvoir uriner a l’aise. 

« Nous avons des ordres ! » 

Je reessaye mais pas moyen et plus je m'enerve et plus je sens que je n'y arriverai pas. Je me 
retoume et declare « Tant pis, j’essayerai un peu plus tard. » 

Le gendarme vient rechercher le bout de mon « amarre » et me renchaine au siege. 

J'essaye alors d'ouvrir un dialogue, « On ne vous a jamais appris qu'une anne a feu est 
parfaitement inutile dans un avion et qu'un seul projectile peut tous nous tuer par 
depressurisation ? » 

« Nous avons des ordres. » 

Je me tais, puis me ravisant, redemande mon walkman. Cette fois, je le recois et malgre le 
volume pousse a son maximum, je n’entends que faiblement Dodo, mais qu’importe, je ferine 
les yeux, nous soinmes enfin seuls, elle et moi ! 

Dodo me parle de sa fierte d'etre ma femme et de son orgueil a porter mon nom. Je suis sous 
une douce beatitude mais voila que plus prosaiquement, ma vessie me rappelle a l’ordre de 
facon imperieuse. 

Je redemande done a pouvoir me rendre au « vide-poubelle ». 

L'oeil mauvais du lieutenant me renseigne sur son etat d’ame tres sensible a la detresse de ma 
vessie. 

Et e'est reparti, le meme cinema se repete avec le meme resultat... pas une goutte... 

Je recommence a m’enerver et cette fois, le ton monte au point que reveillant le medecin, 
celui-ci suggere que je puisse me soulager dans la cage, dans le W.C. derriere la tenture. 

Cette solution semble convenir a tout le monde et on me fait entrer dans la cage. En penetrant, 
je recois comine une douche glacee par le sinistre de la situation, me voila dans une cage... la 
Belgique m’extrade comine on transporte un animal de zoo. 

Je fais un immense effort pour ne rien montrer et j’ai hate de m'isoler un peu derriere cette 
couverture ne fut-ce que quelques secondes. 

Au moment ou enfin, ma vessie, moins traumatisee consent a se soulager, deux gendannes 
font irruption devant moi, apres avoir fait le tour de la cage. 

Je rage interieurement mais heureusement leur venu n'interrompt pas le processus commence. 
Ma rage est cependant temperee par mon soulagement organique. 

Je retoume vers l’entree de la cage qui entre-temps avait ete soigneusement fermee par une 
paire de menottes faisant fonction de cadenas. On l’ouvre avec moult precautions et on 
m’escorte a ma place. 

Je me rassieds et le perroquet reprend son perchoir. 

Apres de bonnes paroles, Dodo m’a mis mes morceaux de musique preferes mais le bruit de 
l'avion est tellement assourdissant que j'y renonce et que j’attendrai les escales. Mais au fait, je 
vais m’interesser un peu plus au voyage et a ses donnees techniques et j'essaye de parler avec 
le toubib qui a fair moins effarouche que mes pandores. 

Je n’ai pas le temps de mettre mon idee a execution que le lieutenant deballe d’un grand sac de 
l'armee tout un attirail photographique et une valise contenant une camera video. 

J'observe son manege avec attention, et je ne tarde pas a decouvrir le manege sordide qui se 
prepare. 

Le gendanne qui se tient a ma gauche, s'eclipse pour ne me laisser qu'avec le gendarme de 
droite qui, etrangement attrape des allures de matamore. 

Le lieutenant commence alors a me mitrailler de declics avec plusieurs appareils photos. II fait 
une pause et les gendarmes permutent leur place. 



Et ainsi l'autre pandore vient aussi poser a cote de moi avec la fierte du chasseur pres de son 
trophee, triste trophee en effet, enchaine comme un perroquet a son siege. Je sens de nouveau 
la rage m’envahir et le medecin intervient en me signalant que c'est l'escadron special 
d’intervention qui reclame ces photos pour des evaluations futures. Evaluation ou pas, mes 
nerfs sont sur le point d’exploser et je cherche desesperement une parade a cette exhibition 
tristement sordide. 

Au tour du lieutenant de venir poser pres de moi. 

A tout seigneur tout honneur, le lieutenant se fait Elmer par la camera video. 

Une idee saugrenue s'installe dans mon esprit et je decide aussitot de passer a l’action. Au 
moment ou l’officier s'assied a cote de moi en fixant la camera d’un air (enfin) heureux, je me 
toume vers lui en proclamant: « C'est celui-la que je prefere » et joignant le geste a la parole, 
je l’empoigne et je l’embrasse sur la joue. La vitesse avec laquelle il se releve, avec un air 
degoute et depite me met aussitot un baume merveilleux pour tout ce qui a precede. 

Les autres gendarmes ne savent quelle attitude prendre mais l’officier decrete que la seance est 
terminee. Judas serait fier de mon baiser. 

Pour feter l’evenement, je declare que je dois a nouveau uriner ! 

Le perroquet vient de prendre une revanche eclatante et ma vessie me signale qu'elle est elle 
aussi decoincee par ces derniers evenements. Un homme d’equipage apporte un repas chaud, 
tout le monde se calme. 

L'avion est toujours aussi assommant de bruit. 

Le docteur me glisse quand-meme une information importante, l'avion vole a du 550 
kilometres par heure et nous mettrons approximativement 24 heures pour rentrer en Belgique, 
soit le meme temps qu’ils mirent pour venir en Afrique du Sud. 

Ce chiffre de 24 scintille devant mes yeux... aucun mandat ne m’a ete signifie en Afrique du 
Sud..., done si le voyage comporte le moindre incident qui le retarde, ils devront me liberer a 
mon arrivee. 

Je mange de bon appetit, cette demiere pensee m’encourage secretement et on peut parfois 
rever meme si on est un perroquet. 

Apres le repas, j’essaye a nouveau de reprendre contact avec le medecin qui, cette fois, est 
sorti de sa torpeur. Nous engageons done le dialogue, tandis que le lieutenant s'installe a son 
tour sur la civiere. 

J'apprends qu’il n’est pas de la gendannerie mais qu'il s'est porte volontaire pour cette mission 
qui lui rapporte ainsi qu'a mes courageux gendarmes une prime de danger de 100.000 LB 
chacun ! 

La nuit enveloppe deja l'avion de son noir manteau, et la conversation avec le toubib me 
rasserene un peu. Le medecin tres circonspect, me devoile aussi avec enormement de 
difficulty que nous ferons escale a Kigali, capitale du Rwanda, mais que cette escale 
comportera quelques difficultes car le pays est en pleine guerre civile. La Belgique, glorieuse 
soutient cependant le regime en place et j’apprends que mon avion avait auparavant debarque 
du materiel « de premiere necessity » dans ce pays avant de venir me querir plus avant dans le 
sud. 

L'escale restera en effet un souvenir imperissable. 

A peine, le pilote vient-il nous avertir que nous nous posons dans une demi-heure, que le 
lieutenant sort de sa couche et commence a redevelopper des signes de febrilite. L'avion a 
peine pose, trois jeeps se dirigent aussitot vers le C130, l’encerclent tout aussitot et decouvrent 
des soldats locaux annes jusqu'aux dents de nos magnifiques armes beiges... des Lai ! 
L'equipage debarque pour se derouiller un peu les jambes car nous volons depuis dix heures 
environ. Le lieutenant sort a son tour et va parlementer avec un sous-officier noir arrive a bord 
d’une des jeeps. II revient penaud et me declare que l’avion a ete declare sous haute 
surveillance et que « le cobs special » n’est pas autorise a debarquer. Je me mets a rire devant 



l’officier beige interloque et lui declare tout de go : « Proposez-lui trois cigarettes et le tour 
serajoue ! » 

Le lieutenant me regarde avec une mauvaise lueur dans l'ceil, persuade que je me moque de 
lui, mais apres moult insistances et devant surtout mon grand etonnement, il ose retourner 
vers le sergent local qui apres quelques palabres et le precieux tabac, m'autorise effectivement 
a debarquer sous « tres haute surveillance » ! 

On sort done le perroquet! 

La nuit enveloppe l’aeroport d’un manteau noir sans lune et les homines armes qui entourent 
l’avion donnent a la situation un relent malsain que donnent tous les pays en guerre et aux 
abois. Quelques projecteurs blafards eclairent l’avion d’une faible lueur, mais le reflet de ces 
lumieres sur les armes des soldats rwandais accentue encor le sordide de la situation. 

A peine debarque, et bien que solidement enchaine au milieu de mes deux pandores, je vois 
avec surprise le sergent « fumeur » aboyer un ordre a ses subalternes. Ces derniers se 
precipitent vers moi, un Fal a la main... je ne suis guere rassure et mes deux gendannes 
accompagnes par le lieutenant se montrent aussi meduses. S’arretant a deux metres de moi et 
heureusement en « ne » pointant leurs annes « que » vers mes jambes, les trois soldats locaux 
vont nous suivre pendant notre promenade fantomatique... autour de l’avion. Pour resumer la 
situation, je suis enchaine a ma droite a un gendarme, un second marche a ma gauche, le 
lieutenant beige precede la marche et pour suivre, trois soldats noirs me suivent a deux metres 
avec une arme de guerre pointee sur mes jambes... joyeuse promenade en perspective ! 

Apres un premier tour, une camionnette de la force aerienne beige deboule a toute allure pres 
de l’avion. Je dois descendre de ce combi un bien sympathique personne, un adjudant qui 
d’office se dirige vers moi. L'homme souffre d’une legere claudication et devant mon escorte 
surprise, il me tend la main avec un large sourire. « Bonjour, Monsieur Bultot, je suis heureux 
de vous rencontrer, j’ai vu, il y a quelques jours, le reportage que R.T.L. a emis sur vous et je 
suis de tout coeur avec vous. » Sans me lacher la main, il poursuit devant l'assistance 
interloquee : « Et surtout bonne chance en Belgique, il y a des gens qui vous aiment bien ! » 

Je balbutie un merci, et il retoume vers le combi qui vient de debarquer quelques militaires de 
la force aerienne beige. L'escale durera une bonne demi-heure, temps necessaire pour refaire 
le plein de l’avion. 

Cinq ou six pilotes de Cl30 de la force aerienne seront done du voyage. Quelle n'est pas ma 
stupeur alors que mon comportement n’inspire aucune crainte pour mes pandores, de me voir 
boucler dans cette infame cage a singe. Le lieutenant m'explique qu'il est necessaire de 
m’enfermer dans cette cage pour la nuit. 

Je me sens a nouveau dans une rage noire, mais je m’abstiens de commentaires. 

La nuit est maintenant largement avancee. 

Peu apres le decollage, les homines de la force aerienne me regardent a la derobee et se 
sentent mal a l’aise de me voir dans cette cage. Ils ont fair d’en discuter mais je ne peux saisir 
leurs conversations a cause du bruit assourdissant qui regne dans la carlingue. Neanmoins, 
quelques uns me sourient d’un air gene et je decide d’aller leur parler... au grand dam de mon 
lieutenant. 

« Messieurs, je suis aussi un peu gene d’etre dans cette cage, mais j’ai ma conscience pour 
moi. » Le lieutenant m’intime a nouveau : « Te faut te taire ! » Mais l'occasion est trop belle et 
je poursuis : « Je me suis rendu pour que la lumiere soit faite et voyez comment le Ministre de 
la Justice me traite. Je ne suis pas sali par la situation, c'est celui qui a decide cette cage qui 
porte cette souillure ! » 

Et fier de mon petit laius, je repars m'asseoir sur ma civiere. 

Mais, ne voila-t-il pas que mon speech a fair de faire de l'effet chez les pilotes embarques. Ils 
se lancent dans une vive discussion et puis deux d’entre eux se dirigent vers les gendarmes 
pendant que les autres m'envoient un large sourire. Je me demande avec enervement ce qu'ils 



vont se dire. Je vois apres les paroles des « volants » le lieutenant secouer vivement la tete en 
signe de denegation mais les militaires insistent. Je regrette de ne pouvoir saisir la 
conversation, toujours a cause du bruit. Puis, fmalement, avec un geste de lassitude, le 
lieutenant semble acquiescer et je vois les miliaires retourner sur leurs bancs en me regardant 
avec un large sourire. 

Avec precaution, le lieutenant ouvre ma cage et m’apporte... trois cannettes de biere pour 
etancher une soif eventuelle pendant ma nuit. Les militaires me regardent avec une canette a 
la main et des que le lieutenant a ferine ma cage, je me dirige, les lannes aux yeux, vers ces 
militaires, et la biere a la main, je balbutie un merci et a votre bonne sante. Les militaires me 
reciproquent mes souhaits et c'est sur cette impression d’immense chaleur humaine que je 
m’etends sur ma civiere et que je rebranche le walkman et ainsi la voix de ma petite femme. 
Malgre l'horrible de la situation, je m’endors paisiblement, demain risque d’etre terrible. 

Au petit matin, nous nous posons au caire. Etrangement, notre avion eteint toutes ses lumieres 
et je reste a l'interieur. Vers 15 heures, l’avion atterrit en Belgique sur la base militaire de 
Beauvechain. Le pilote n'a recu sa destination finale qu'un quart d’heure avant l’atterrissage 
par le mot code « parking ». 

Des que l’avion coupe ses moteurs, je suis menotte a nouveau dans le dos et embarque au pas 
de course dans un helicoptere Puma de la gendannerie. 

Vingt minutes plus tard, il se pose dans... le preau de l'aile A de la prison de Saint-Gilles ou je 
fus directeur ! 

Toujours menotte dans le dos, on m’amene au pas de course a travers les couloirs de « ma » 
prison pour arriver au souterrain qui la relie a la prison de Forest. Descente dans le couloir 
humide et reapparition devant le greffe de Forest. 

Jean-Pol Petit me sourit et Madame Anne Leroy, la nouvelle chef du greffe m'attribue aussi 
un sourire plein de gentillesse et de comprehension ! 

Les flics me retirent les menottes et le docteur me demande signer a nouveau le meme papier. 
Le voyage a dure 23 heures 45’ ! 

Un petit quart d’heure de plus, et ils devaient me liberer ! 

A peine installe dans ma cellule, le Juge Hennart, qui a remplace le Juge Schliker, vient me 
voir pour me preparer des le lendemain aux interrogatoires sur 1'Affaire Mendez ! 

Dodo vient me visiter ! Elle a ete fantastique ! 

Son travail de public-relation avec la presse a permis a celle-ci de me voir sous un autre angle. 
Maitre Guy Francois n’a pas change. Toujours aussi vivace et possedant un esprit de synthese 
hors du commun. 

II a aussi garde sa coquetterie. 

En vue du proces de Gand, il me conseille le Batonnier Monsieur Verstringhe. Mes 
deplacements necessitent un minimum de huit gendarmes. Fes mesures de securite sont 
extremes. Par contre, je dois me plaindre par voix de presse des fouilles vraiment degradantes 
pratiquees par les gendarmes de l’escadron special d’intervention. Je ne peux plus supporter de 
me faire fouiller l’anus avant chaque deplacement! apres une semaine d’interrogatoire chez 
Monsieur le Juge Hennart, je passe 15 jours aupres des homines du Juge Colin, responsable de 
la Cellule du Brabant Wallon de Jumet. 

J'y retrouve deux gendannes qui furent toujours corrects : l’adjudant Faghlan et son adjoint 
Ruth. 

Deux jours avant ma rentree en Belgique, j’echappe aux barbares du groupe Delta : Le dossier 
des tueries leur est retire pour etre confie a Jumet. Enfin, le premier proces debute a la cour 
d’Appel de Gand ! Je n’ai pas eu l’occasion de me defendre en premiere instance... drole de 
justice ! 

Dans la salle, une multitude de journalistes et de gendannes ! 

Toute la famille de dodo est presente dans le pretoire. Ils m’envoient d’ailleurs un abondant 



courrier. Leur presence me rechauffe le coeur. 

J'explique a la Cour qu'il faut me punir pour ce que j'ai fait, et cela uniquement. Maitre 
Verstringhe demontre que Van Esbroek a change plusieurs fois de version et que son 
temoignage n’est pas fiable. J'ai appris que je suis condamne pour vol qualifie de videos et 
non pour recel ! 

Le 28 fevrier 1991, mes trois ans fermes pour vol qualifie se transforment en deux ans de 
prison dont un avec sursis pour recel. Le mari de Claudine avait ecope de 6 mois avec sursis. 
La Cour me dechoit aussi de mes droits civils et politiques pour une periode de dix ans ! 
Maitre Guy Francois produit une lettre de chacun des juges d’instruction en charge du meurtre 
de Mendez et du Brabant Wallon. Ces lettres attestent de ma non-inculpation dans ces 
dossiers. 

Apres une plaidoirie remarquable de trois heures ou il demontre point par point l’inanite de 
l’accusation, Maitre Guy Francois obtiendra la decision suivante : 

Recel de titres et escroqueries : Le tribunal declare que, meme si ma culpabilite devati etre 
prouvee, il devrait appliquer le principe de l’Unite d’intention avec les fais juges a Gand, et 
que done, il rejette les poursuites. 

Fabrication illegale de munitions : acquitte. 

Depot illegal de munitions : acquitte. 

Detention d'armes illegales (photos avec poignards et nunchaku) : 6 mois de prison avec 
sursis. 

Ainsi done, ma peine passe de 5 ans de prison fenne a 6 mois de prison avec sursis ! 

Le deballage de ce dossier, artificiellement gonfle, met la presse de mon cote. 

Devant ce resultat si pietre, le Parquet n'ose meme pas aller en appel. 

Le meme jour, soit le 5 avril 1991, je sors, je suis fibre, definitivement fibre. 

La presse s'agglutine devant la porte de la prison... Je resois mon dernier coup de poing de 
Maitre Guy Francis. 

Epilogue 

Dodo est epuisee physiquement mais surtout moralement. 

Comme chaque fois apres l’epreuve, son caractere change et s'assombrit! 

Nous pourrions enfin gouter a la paix, mais nos disputes reprennent. 

Alors que je commence ce livre avec elle, c'est en homme solitaire que je le termine ! 

Ma Dodo est redevenue Dominique. 

Les barrieres pour revoir mon fils demeurent toujours aussi dures et difficiles. En cinq mois, 
je ne le verrai que trois fois pendant deux petites heures. 

L’ambassade d’Afrique du Sud me refuse tout nouveau visa ! 

La commune de Schaerbeek, ou je m’inscris pour obtenir une aide sociale, me refuse le 
minimex (SMIG) alors qu'il s'agit d'un droit. Motif invoque : Ma ... personnalite !? 

Je n’ai plus d'argent, ni le moindre bien ! 

Un copain m’a dit que je devais etre bien aise d’avoir paye ma dette a la societe... 

Quand me reglera-t-elle la sienne ? 

Je suis a nouveau seul! 


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